J-07-192
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCE – TITRE EXECUTOIRE – ANNULATION DU TITRE EXECUTOIRE – ANNULATION DE LA SAISIE – MAINLEVEE DE LA SAISIE.
Lorsque le jugement sur lequel est fondé une saisie attribution de créance est ensuite réformé par un arrêt de la Cour d’appel, il en résulte que ladite saisie qui n’a plus de fondement doit être annulée et la mainlevée ordonnée.
(Cour d’Appel du Littoral, Arrêt n 211/REF du 24 septembre 2007, Affaire La société AES SONEL S.A. C/ ENEL CAMEROUN).
La Cour,
Vu la loi N°2006/15 du 29/12/06 portant organisation judiciaire de l’Etat.
Vu l’ordonnance N 183 rendue le 18 avril 2006 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo.
Vu la requête d’appel en date du 15 juin 2006.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Ouï l’appelante en ses conclusions.
Nul pour l’intimé ni comparante ni représentée.
Ouï madame la Présidente du siège en son rapport.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Considérant que bien que notifiée de la requête d’appel de la Société ENEL-Cam n’a ni conclu, ni personne pour la représenter.
Qu’il échet de statuer par arrêt de défaut contre elle et contradictoirement à l’égard de l’appelante.
Considérant que par requête en date du 15 juin 2006 reçue au greffe le 16 juin 2006 et enregistrée sous le N°988, la Société AES SONEL SA dont le siège social est à Douala BP 4077, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux et ayant pour conseil Maître DJABOU Joseph, avocat au barreau du Cameroun, BP 13267 Douala à l’étude duquel élit domicile pour les présentes et éventuellement pour les suites, a interjeté appel de l’ordonnance N°183 rendue le 18 avril 2006 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo, juge du contentieux de l’exécution.
Considérant qu’aux termes de l’article 172 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « la décision de la juridiction tranchant la contestation est susceptible d’appel dans les quinze jours de sa notification ».
Considérant qu’il ne ressort nulle part des pièces versées au dossier que ladite ordonnance a été notifiée à l’appelante.
Que son appel est donc régulier pour avoir été fait suivant les forme et délai prescrits par la loi; qu’il convient de le recevoir.
AU FOND
Considérant que AES SONEL fait grief au premier juge de l’avoir débouté de sa demande de mainlevée de la saisie attribution des créances pratiquée par le ministère de Maître BALENG MAAH Célestin, huissier de justice près la Cour d’Appel du Littoral, suivant exploit en date du 25 avril 2005, sur ses comptes ouverts dans les livres de la Société Générale des Banques au Cameroun (SGBC) SA, pour sûreté et avoir payement de la somme de 20.262.562 francs en exécution du JUGEMENT N°406, rendue le 09 mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance du Wouri, alors même que le Président de la Cour d’Appel de céans avait ordonné les défenses à exécution de ladite décision suivant arrêt N°47/DE rendu le 27 novembre 2005, en soutenant que ces défenses à exécution n’ont pas eu pour effet d’anéantir le titre mais de surseoir temporairement à son exécution et que la saisie exécution litigieuse ayant pour support ce titre exécutoire, fut-il par provision, pouvait être poursuivie jusqu’à son terme par application de l’article 32 de l’Acte Uniforme OHADA susvisé.
Que pour elle, le premier juge a déformé l’esprit de l’article 32 susvisé en même temps qu’il a esquinté la loi N°92/008 du 14 août fixant certaines dispositions relatives à l’exécution des décisions de justice.
Que l’article 32 de l’Acte Uniforme OHADA N°6 dispose que « à l’exception de l’adjudication des immeubles, l’exécution forcée peut être poursuivie jusqu’à son terme en vertu d’un titre exécutoire par provision. L’exécution est alors poursuivie au risque et péril du créancier, à charge pour celui-ci, si le titre est ultérieurement modifié, de réparer intégralement le préjudice causé par cette exécution sans qu’il y ait lieu de relever de faute de sa part ».
Que l’article de la loi 92/008 du 14 août 1992 quant à lui dispose que « lorsque l’exécution provisoire est de droit ou lorsqu’elle est fondée sur des matières énumérées à l’article 3 ci-dessus, la Cour d’Appel rejette la demande de défenses à exécution provisoire de la partie appelante si ladite demande a un caractère manifestement dilatoire ».
Que pour elle, la combinaison de ces deux textes révèle que la poursuite de l’exécution forcée en vertu d’un titre exécutoire par provision en droit camerounais n’est qu’une faculté réservée au créancier mais dont le Président de la Cour d’Appel, sais d’une requête en défenses à exécution, hors les cas ou ladite requête a un caractère manifestement dilatoire, en apprécie l’opportunité.
Que c’est ainsi que le Président de la Cour d’Appel de céans a jugé inopportun l’exécution provisoire du jugement d’instance et l’a suspendu jusqu’à l’arrêt de l’instance d’appel au fond.
Qu’il est de jurisprudence constante de la cour commune de justice et d’arbitrage d’Abidjan (CCJA) que l’exécution des décisions de justice au Cameroun n’est régie que par la loi nationale susvisée et, partant, échappe au champ d’application des Actes Uniformes de l’OHADA auxquels le premier juge s’est référé.
Que celui-ci, en même temps qu’il reconnaît que l’ordonnance du Président de la Cour d’Appel a provisoirement suspendu les effets de l’exécution provisoire entreprise, mais en même temps s’est abstenu de tirer les conséquences qui découlaient de cette suspension à savoir la mainlevée de la saisie attribution pratiquée en attendant la décision du juge d’appel.
Qu’au regard de cette contradiction flagrante, elle conclut à l’infirmation de la décision entreprise et que la Cour d’Appel de céans, statuant à nouveau, donne mainlevée de la saisie attribution des créances pratiquée et qu’elle condamne l’intimée aux dépens distraits au profit de Maître DJAMBOU Joseph, avocat aux offres de droit.
Considérant que revenant à la charge par ses conclusions produites à l’audience du 27 avril 2007, la Société AES soutient que le socle de la saisie attribution querellée s’est effondré par l’infirmation de la décision dont l’exécution forcée était entreprise à travers cette saisie par l’arrêt N 105/CC du 16 février 2007 rendu par la Cour d’Appel de céans.
Considérant que bien que régulièrement notifié de la requête d’appel et de la date d’audience, la Société ENEL- Cam n’a ni comparu ni personne pour la représenter.
Qu’il échet de statuer par défaut à son encontre.
Considérant qu’au terme de l’article 153 de l’Acte Uniforme OHADA susvisé, « tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir paiement, saisir entre les mains d’un tiers, les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent… ».
Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier que la saisie attribution de créances querellée était fondée sur l’exécution par provision du jugement n°406 rendu le 09 mars 2005 par le Tribunal de Grande Instance du Wouri.
Que dès lors que ledit jugement a été reformé par l’arrêt de la Cour d’Appel de céans, l’exécution forcée entreprise est dépouillée de tout support et ne peut être qu’annulée.
Qu’il convient donc d’infirmer l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, d’annuler la saisie attribution des créances pratiquée par le ministère de Maître BALENG MAAH Célestin, huissier de justice près la Cour d’Appel du Littoral, suivant exploit en date du 25 avril 2005, sur les comptes de la Société AES SONEL ouvert dans les livres de la Société générale des banques au Cameroun (SGBC) SA pour absence d’un titre exécutoire et d’en ordonner mainlevée.
Considérant que la partie qui succombe supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de l’appelante et par défaut contre l’intimé en matière civile et commerciale, chambre du contentieux de l’exécution, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
Reçoit l’appel.
AU FOND
Infirme l’ordonnance entreprise.
STATUANT A NOUVEAU
Annule la saisie attribution des créances pratiquée par le ministère de Maître BALENG MAAH Célestin, huissier de justice près la Cour d’Appel du Littoral, suivant exploit en date du 25 avril 2005, sur les comptes de la Société AES SONEL ouvert dans les livres de la Société générale des banques du Cameroun (SGBC) SA pour absence d’un titre exécutoire.
Ordonne mainlevée de ladite saisie.