J-07-202
1) VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE VENTE – BIEN APPARTENANT A UN TIERS – DEMANDE DE DISTRACTION – PREUVE DE LA PROPRIETE OUI MAILEVEE DE LA SAISIE.
2) VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE VENTE – BIEN APPARTENANT A UN TIERS – DEMANDE DE DISTRACTION – SIGNIFICATION AU SAISI (OUI) – IRRECEVABILITE (NON).
1°) Lorsqu’il est prouvé que le bien saisi dans le cadre d’une saisie vente appartient à un tiers autre que le débiteur, la demande en distraction doit être déclarée recevable et la mainlevée de la saisie ordonnée.
2) La demande en distraction d’un bien saisi dans le cadre d’une procédure de saisie vente doit être, conformément à l’article 141 AUPSRVE, signifiée au saisi. Dès lors qu’il est prouvé que cette signification a été faite, l’action en distraction ne peut être déclarée irrecevable.
(Tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti, ordonnance n°219 du 28 avril 2005, affaire Mme FENKAM GAMGNIE F. ép. TCHEMTCHOUA C/ MINDIC (ACEP CAMEROUN) et Me Ename Nkwame).
NOUS, PRESIDENT, JUGE DU CONTENTIEUX DE L’EXECUTION.
Vu l’exploit introductif d’instance.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Et après en avoir délibéré conformément à la loi.
Attendu qu’en vertu de l’ordonnance Présidentielle n°177 du 26 janvier 2005 non encore enregistré mais qui le sera en temps utile de Maître BALENG MAAH huissier de justice à Douala, dame FENKAM GAMGNIE Félicité épouse TCHEMTCHOUA ayant pour conseil Maître MPAY avocat au barreau du Cameroun BP 1532 Douala a fait donner assignation à.
MINDIC agissant pour le projet de financement de très petites entreprises en abrégé (ACEP) ayant pour conseil Maître YOSSA avocat au barreau du Cameroun BP 2152 Yaoundé.
Maître ENAME NKWANE, huissier instrumentaire d’avoir à se trouver et comparaître par devant le Tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti Statuant en matière de contentieux de l’exécution pour est-il dans cet exploit.
Constater que le véhicule de marque Toyota Carina E immatriculé Lt 7505 N qui a fait l’objet d’une saisie vente le 05 janvier 2005 par ACEP appartient en propre à Dame FENKAM GAMGNIE car étant un bien réservé tel qu’il est défini à l’article 224 du code civil.
Constater que FENKAM GAMGNIE, avocat au barreau du Cameroun exerce une profession séparée de celle de son mari.
Constater qu’avec le produit de son activité professionnelle, elle a acquis le véhicule en cause.
Qu’il échet donc d’ordonner la distraction du véhicule dont saisie conformément à l’article 141 de l’Acte Uniforme précité.
En conséquence ordonner la mainlevée de la saisie vente pratiquée le 05 janvier 2005 sur le véhicule Toyota Carina E Lt 7505 N réservé à la requérante.
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir sur minute et avant enregistrement nonobstant toute voie de recours.
Condamner ACEP aux dépens distraits au profit de Maître MPAY, avocat aux offres de droit.
Attendu qu’au soutien de son action, la demanderesse par l’entremise de son conseil expose.
Qu’en date du 05 janvier 2005 en exécution de la grosse d’une ordonnance d’injonction de payer n°573 du 02 septembre 2004 rendue contre son époux TCHEMTCHOUA Joseph, le ministère du développement industriel et commercial (MINDIC), agissant par le projet de financement de très petites entreprises (ACEP) camerounais a fait pratiquer une saisie vente sur un véhicule de marque Toyota Carina E immatriculé lt 7505 N lui appartenant.
Que s’il est vrai que le débiteur de ACEP Cameroun est sieur TCHEMTCHOUA son époux avec qui elle est commune en biens du fait de leur mariage célébré sans contrat préalable, il demeure que le véhicule qui a été saisi par ACEP lui appartient en propre car étant un bien réservé tel qu’il est défini à l’article 224 du Code civil.
Que dame PENKAM épouse TCHEMTCHOUA est avocat au barreau du Cameroun et exerce cette profession séparément de celle de son époux qui est un fonctionnaire (administrateur de travail) dont le salaire est par ailleurs suspendu depuis août 1999.
Qu’avec le produit de son activité professionnelle, elle a acquis le véhicule en cause en 2001, lequel est d’ailleurs immatriculé en son nom.
Qu’en sus de ce que la jouissance et l’administration de ce véhicule lui sont réservées; l’article 227 alinéa 2 du code civil dispose que les créanciers du mari ne peuvent exercer leurs poursuites sur les biens réservés de la femme que lorsqu’ils établissent que l’obligation du mari a été contracté dans l’intérêt du ménage.
Que dans le cas d’espèce, la requérante a voulu savoir à quoi était destiné l’emprunt que son mari avait auprès de ACEP.
Que les agents de cette entreprise qu’accompagnait l’huissier instrumentaire lui ont rétorqué que c’était pour acheter un congélateur servant à la conservation de la viande de porc dans une braiserie que son époux projetait de créer.
Qu’à ce jour cette braiserie n’a pas été achetée par son époux.
Qu’il en ressort que cette obligation n’a pas été contractée dans l’intérêt du ménage.
Que dès lors la saisie vente effectuée le 05 janvier sur le véhicule Toyota Carina E Lt 7505 N réservé à la requérante doit être levée.
Attendu que dans sa demande additionnelle dame FENKAM par le biais de son conseil sollicite l’allocation de la somme de 1 000°000 FCFA à titre de dommages intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis et fait par ailleurs observer verbalement que son action est recevable non seulement parce que précise-t-elle le tiers saisi n’a pas les mêmes obligations que le débiteur saisi mais bien plus la demande en distraction a été signifiée au débiteur saisi par la voie de l’assignation en intervention forcée.
Attendu que pour étayer ses prétentions, la demanderesse fait verser aux débats nombre de pièces dont le procès verbal de saisie, la carte grise du véhicule et le certificat de conformité.
Attendu que par exploit en date du 07 mars 2005 non encore enregistré de Maître BALENG MAAH. Dame PENKAM ayant pour conseil Maître MPAY, avocat au barreau du Cameroun a fait donner assignation en intervention forcée à sieur TCHEMTCHOUA Joseph d’avoir à se trouver et comparaître par devant monsieur le Président de Tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti statuant en matière de contentieux de l’exécution pour est-il dit dans cet exploit.
Constater que le véhicule de marque Toyota Carina immatriculé Lt 7505 N qui fait l’objet d’une saisie vente le 05 janvier 2005 par ACEP appartient en propre à Dame FENKAM GAMGNIE car étant un bien réservé.
Constater que dame FENKAM GAMGNIE avocat au barreau du Cameroun exerce une profession séparée de celle de son mari.
Qu’en vertu de l’article 224 in fine, elle a sur les biens qui sont ainsi réservés, les droits de jouissance et d’administration moins aussi le droit de disposition que la femme séparée de biens par contrat possède sur les biens personnels.
Qu’il échet d’ordonner la distraction du véhicule dont saisie.
En conséquence ordonner la mainlevée de la saisie vente pratiquée le 05 janvier 2005 sur le véhicule Toyota Carina E Lt 7505 N réservé à la requérante.
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir sur minute et avant enregistrement nonobstant toute voie de recours.
Condamner ACEP aux dépens distraits au profit de Maître MPAY, avocat aux offres de droit.
Attendu que le défendeur sous la plume de son conseil Maître YOSSA soulève au principal une fin de non recevoir tirée de la violation de l’article 141 de l’Acte Uniforme OHADA N°6 en ce que le saisi n’a pas été appelé à l’instance et subsidiairement conclut au débouté de l’action de la demanderesse motif pris de ce que le mari a contracter la dette dans l’intérêt du ménage.
SUR LA FIN DE NON RECEVOIR TIREE DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 141 DE L’ACTE UNIFORME N°6
Attendu qu’aux termes de l’article 141 de l’Acte Uniforme OHADA n°6 « le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi peut demander à la juridiction compétente d’en ordonner la distraction; à peine d’irrecevabilité la demande doit préciser les éléments sur lesquels se fondent le droit de propriété au saisi et éventuellement au gardien ».
Attendu qu’il appert de l’exploit de signification avec assignation en intervention forcée que sieur TCHEMTCHOUA Joseph est informé du déroulement de la procédure pendante.
Qu’au regard de ce qui précède, il échet de rejeter cette fin de non recevoir comme non fondée.
SUR LA DISTRACTION DU VEHICULE SAISI
Attendu qu’aux termes de l’article 141 de l’Acte Uniforme OHADA n°6 le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi peut demander à la juridiction compétente d’en ordonner la distraction.
Attendu qu’il résulte des pièces produites notamment de la carte grise que le véhicule querellé appartient à dame PENKAM GAMGNIE Félicité épouse TCHEMTCHOUA, avocat au barreau du Cameroun.
Attendu par ailleurs qu’il appert du contrat d’ouverture de crédit que le prêt contracté soit la somme de 300°000 francs CFA pour l’acquisition d’un congélateur ne l’a pas été dans l’intérêt du ménage, tant il est vrai que non seulement la demanderesse disposait déjà d’un congélateur à son domicile mais bien plus, sieur TCHEMTCHOUA a utilisé cette somme d’argent à des fins personnelles.
Qu’il y a en conséquence lieu d’ordonner la distraction du véhicule de marque Toyota Carina E immatriculé Lt 7505 N et donner mainlevée de la saisie vente pratiquée le 05 janvier 2005 sur le véhicule concerné.
SUR LES DOMMAGES INTERETS
(…).
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de contentieux de l’exécution conformément à l’article 49 de l’Acte Uniforme OHADA N°6 et en premier ressort.
Rejetons comme non fondée la fin de non recevoir invoquée.
Recevons la demanderesse en son action.
Rejetons comme non fondée la demande en dommages-intérêts.
Constatons que le véhicule litigieux est un bien réservé au sens de l’article 224 du Code Civil.
Constatons que sieur TCHEMTCHOUA Joseph n’a pas contracté le prêt consenti dans l’intérêt du ménage.
En conséquence, ordonnons la distraction du véhicule de marque Toyota Carina E Lt 7505 N appartenant à dame FENKAM GAMGNIE épouse TCHEMTCHOUA.
Donnons mainlevée à la saisie vente querellée.
Disons notre ordonnance exécutoire sur minute, par provision et avant enregistrement.