J-07-218
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – RECEVABILITE (OUI) – EXCEPTIONS D’IRRECEVABILITE – CONVENTION DE COMPTE COURANT – ATTESTATION DE SOLDE – CARACTERES UNILATERAL ET GLOBAL – REQUETE AUX FINS D’INJONCTION DE PAYER – DECOMPTE – NON MENTION DES INTERETS – VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 4-2 AUPSRVE – IRRECEVABILITE DE LA REQUETE – ANNULATION DE L’ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER.
En faisant uniquement état, en sus du principal des intérêts de la créance sans en indiquer le montant, le décompte fait dans la requête aux fins d’injonction de payer, le requérant d’une ordonnance d’une injonction de payer viole l’article 4-2 de l’AUPSRVE. Ainsi, l’ordonnance d’injonction de payer ayant été rendue sur la base d’une requête qui était irrecevable mérite d’être annulé.
Article 1 AUPSRVE
Article 4 AUPSRVE
Article 5 AUDCG
Article 15 AUDCG
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n 216 du 27 avril 2005, Banque Internationale pour le Commerce, l’Industrie et l’Agriculture du Burkina (BICIA-B) c/ Société de Commercialisation des produits pétroliers (SOPPEC)).
LE TRIBUNAL,
Faits procédures et prétentions des parties
La Banque Internationale pour le Commerce, l’Industrie et l’Agriculture du Burkina (BICIA-B) laquelle a fait élection de domicile à l’Étude de maître SANFO Ramata/SERE, avocat à la Cour, à la suite d’une requête obtenait le 3 août 2004 de la présidente du Tribunal de grande instance de Ouagadougou une ordonnance d’injonction de payer, lui permettant d’enjoindre la Société de commercialisation des produits pétroliers (SOPPEC) d’avoir à lui payer la somme de 42.937.264 Francs outre les frais d’exécution, émoluments et honoraires; Elle exposait à l’appui de sa requête que cette créance procédait d’une convention de compte courant qu’elle a conclu avec la SOPPEC; Qu’après avoir bénéficié de ce crédit, la SOPPEC n’a plus respecté ses engagements quant au remboursement en dépit des démarches entreprises et qui sont restées vaines.
Contre cette ordonnance à elle signifiée le 25 octobre 2004, la SOPPEC a formé opposition le 9 novembre 2004 par exploit d’huissier et a par le même acte donné assignation à la BICIA-B d’avoir à comparaître devant le Tribunal de grande instance de céans à l’effet de s’entendre déclarer… a d’exécution (AUPSRCVE) et subsidiairement s’entendre lui permettre de se défendre sur la base des détails et preuve qu’il appartiendra à la BICIA-B de fournir.
La SOPPEC expose à l’appui de sa demande que d’une part la créance alléguée ne remplit pas les conditions de l’article 1er de l’AUPSRCVE en ce qu’elle s’appuie sur une attestation de solde tirée par la BICIA-B et sur des conventions hypothécaires qui ne peuvent certifier les sommes réclamées et ainsi faire la preuve d’une créance certaine liquide et exigible; Qu’un principe bien connu veut que les livres du commerçant ne fasse preuve que contre lui uniquement et que pour les opposer aux tiers, il faut davantage de moyens et d’actes.
Que d’autre part, la BICIA-B a fait fi des prescriptions de l’article 4-2 de l’Acte uniforme précité en fondant la procédure d’injonction de payer sur une attestation de solde globalisant la créance en son principal et intérêt de retard.
Qu’enfin le montant réclamé est inexact, ce qui justifie d’ailleurs que la BICIA-B n’a établi aucun détail de la créance; Qu’elle ne peut ignorer les paiements ne serait-ce que les dividendes non perçus par la caution depuis l’année 2000 en paiement de la créance; que de ce fait, il y a lieu de contraindre la BICIA-B à faire l’état de la créance afin qu’elle puisse utilement se défendre.
En réplique la BICIA-B soutient que le moyen pris sur les caractères unilatéraux de l’attestation de solde et global de la créance ne saurait prospérer en ce que d’une part, étant toutes des sociétés commerciales, rien ne s’oppose à ce que conformément à l’article 15 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général, elle invoque contre la SOPPEC ses livres de commerce pour établir sa créance; que par ailleurs, l’article 5 du même Acte uniforme consacre le principe de la liberté de preuve en matière commerciale; que si le tribunal estimait que sa créance n’est pas conforme à l’article 1 de l’AUPSRCVE, il y a lieu de noter que ladite créance a une cause contractuelle et que ce caractère contractuel est aussi l’un des cas d’ouverture de la procédure d’injonction de payer.
Que d’autre part, elle a précisé dans sa requête le montant de sa créance qui s’élève à 42.932°264 Francs en principal ainsi que les frais de greffe qui sont de 5.000 Francs; que pour des raisons d’ordre pratique, elle n’a pas évalué pour l’instant les intérêts échus; que de ce fait les 42.932°264 ne représente nullement la créance en son principal et intérêt.
Poursuivant, elle expose que si la SOPPEC estime avoir effectué des paiements, susceptibles de réduire le montant de la créance, qu’elle en fasse la preuve; que du reste, OUEDRAOGO Mady gérant de la SARL SOPPEC qui prétend avoir effectué des paiements a signé le 09 avril 2004 à l’Étude de son conseil, un engagement dans lequel il a reconnu en tant que gérant de la SOPPEC et solidairement devoir le montant sus indiqués.
DISCUSSION
En la forme…
Au fond
Attendu que la SOPPEC demande l’annulation de l’ordonnance d’injonction de payer en se fondant d’une part sur le fait que la créance ne remplit pas les conditions de l’article 1 de l’AUPSRCVE en ce qu’elle se fonde sur une attestation de solde unilatéralement tirée et comme telle ne saurait lui être opposée et d’autre part, en se fondant sur le fait que l’attestation de solde en globalisant la créance en son principal et intérêt viole l’article 4-2 de l’AUPSRCVE.
Attendu que le moyen tiré du caractère unilatéral de l’attestation de solde ne peut prospérer en ce sens que si initialement le solde du compte courant a été tiré unilatéralement par la BICIA-B, il reste entendu que cette attestation a été par la suite communiquée à la SOPPEC qui par engagement en date du 9 avril a reconnu le montant réclamé en principal et s’est engagé à régler la créance dans un délai maximum de 2 mois à compter du 9 avril 2004; Que de ce fait, il y a lieu de noter que le solde a été arrêté contradictoirement et qu’à la date de l’introduction de la requête aux fins d’injonction de payer la créance principale était belle et bien exigible, certaine et liquide.
Attendu qu’en ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l’article 4-2 de l’Acte uniforme précité, c’est à tort que la SOPPEC estime que l’attestation de solde à globalisé la créance en son principal et intérêts; Qu’à la lecture de la requête d’injonction de payer, il est fort aisé de se convaincre que l’attestation dont s’agit n’a pris uniquement en compte que le montant de la créance en son principal.
Que cependant, le décompte fait dans la requête, fait état en sus du principal des intérêts de la créance sans en indiquer le montant; Que la BICIA-B explique cette omission par le fait que pour des raisons d’ordre pratique, elle n’a pas évalué pour l’instant les intérêts échus.
Attendu que cette façon de procéder au décompte viole l’article 4-2 de l’AUPSRCVE; qu’ainsi, l’ordonnance d’injonction de payer ayant été rendue sur la base d’une requête qui était irrecevable mérite d’être annulée sans qu’il ne soit besoin de statuer sur le moyen tiré de l’inexactitude du montant réclamé.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort.
Reçoit en la forme l’opposition formée par la SOPPEC et OUEDRAOGO K. Mady en date du 9 novembre 2004.
Au fond la déclare bien fondée.
En conséquence, annule l’ordonnance d’injonction de payer n 334/2004 du 3 avril 2004 pour violation de l’article 4 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances.
Condamne la BICIA-B aux dépens.