J-07-229
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – RECEVABILITE (OUI) – CREANCE – PRET BANCAIRE – SOLDE – DEBITEUR EN LIQUIDATION – POURSUITES INDIVIDUELLES – ARTICLE 75 AUPCAP – EFFETS SUSPENSIFS – OPPOSITION BIEN FONDEE – ANNULATION DE L’ORDONNANCE.
Aux termes de l’article 75 AUPCAP, la décision d’ouverture (de la procédure de liquidation) suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies d’exécution tendant à en obtenir le paiement.
En l’espèce, le débiteur ayant fait l’objet d’une procédure de liquidation en vertu du jugement n 20/03 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou le 29 janvier 2003, il en résulte que les poursuites individuelles sont suspendues au regard de la disposition susvisée et le créancier ne peut faire valoir sa créance qu’en se joignant à la masse des créanciers de sa débitrice; il y a donc lieu de déclarer le débiteur bien fondé en son opposition et, par conséquent, annuler l’ordonnance d’injonction de payer n 645/2003 du 14 octobre 2003.
Article 1 AUPSRVE ET SUIVANTS
Article 10 AUPSRVE
Article 75 AUPCAP
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n 374/2005 du 06 juillet 2005, Société Internationale Faso Export - SA (IFEX-SA) c/ Bank Of Africa (BOA)) Solution critiquable. Voir infra observations Joseph ISSA SAYEGH.
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier.
Vu les conclusions des parties.
Ouï les parties en leurs observations orales à l’audience du 11 avril 2005.
Vu les articles 1 et suivants de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Vu l’article 75 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation d’injonction de des procédures collectives d’apurement du passif payer.
Le 03 novembre 2003, la Bank Of Africa (BOA) agissant poursuites et diligence de son directeur général a par acte d’huissier de justice signifié à la Société Internationale Faso Export - SA (IFEX-SA) l’ordonnance d’injonction de payer n 645/2003 rendue le 14 octobre 2003 par le président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, laquelle ordonnance a condamné IFEX-SA à payer à la BOA la somme principale de vingt et un million sept cent dix huit mille sept (21.718.007) francs sous réserves des intérêts de droit et frais de procédure; contre cette ordonnance IFEX-SA a par acte d’huissier de justice en date du 10 novembre 2003 formé opposition.
La BOA expose au soutien de sa demande que sa créance représente le solde d’un prêt consenti à IFEX-SA par laquelle Messieurs Paul et Laurent BACH, actionnaires de IFEX-SA, se sont portés cautions solidaires et indivisibles. Elle soutient en outre que sa créance est certaine, liquide et exigible.
En réplique, IFEX-SA représentée par maître Yacouba OUATTARA expose qu’elle fait l’objet de procédure de liquidation conformément au jugement n 20/03 du 29 janvier 2003 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou, ce qui la rend juridiquement inexistante. Elle explique en outre qu’au lieu de notifier l’ordonnance d’injonction de payer à IFEX-SA, la BOA l’a plutôt notifiée à l’un des Syndic liquidateurs qui n’a pourtant pas été visé par l’ordonnance en question. Elle ajoute qu’en matière de liquidation judiciaire, toutes les poursuites individuelles ou collectives sont suspendues à l’encontre du débiteur en liquidation, conformément à l’article 75, alinéa 1 et 2 de l’Acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
DISCUSSION
Attendu que l’ordonnance d’injonction de payer a été rendue le 14 octobre 2003 et signifiée à IFEX-SA le 3 novembre 2000; Que contre cette ordonnance IFEX-SA a par acte d’huissier de justice en date du 17 novembre 2003, formé opposition; Qu’ainsi, le délai d’opposition imposé par l’article 10 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution a été respecté; Qu’il y a donc lieu de déclarer la Société IFEX-SA recevable en son opposition en la forme.
Attendu qu’il ressort des termes de l’article 75 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif que la décision d’ouverture (de la procédure de liquidation) suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies d’exécution tendant à en obtenir le paiement.
Qu’en l’espèce, la Société IFEX-SA fait l’objet d’une procédure de liquidation en vertu du jugement n 20/03 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou le 29 janvier 2003.
Qu’ainsi, les poursuites individuelles sont suspendues au regard de la disposition susvisée et la BOA ne peut faire valoir sa créance qu’en se joignant à la masse des créanciers de sa débitrice; Qu’il y a donc lieu de déclarer la Société IFEX-SA bien fondée en son opposition et par conséquent, annuler l’ordonnance d’injonction de payer n 645/2003 du 14 octobre 2003.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort.
Déclare la société IFEX-SA recevable en son opposition.
La déclare bien fondée.
Annule l’ordonnance d’injonction de payer n 645/2003 du 14 octobre 2003 sur le fondement de l’article 75 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
Condamne la BOA-SA aux dépens.
Observations de Joseph ISSA SAYEGH, Professeur
Le tribunal de grande instance de Ouagadougou tire une conclusion erronée de la suspension des poursuites individuelles qu’entraîne le prononcé d’un jugement de règlement judiciaire ou de liquidation des biens. Un tel effet suspensif ne remet pas en cause les effets des décisions prononcées avant le jugement déclaratif; il implique seulement que tous les actes de procédure à venir suite à ce jugement soient dirigés contre le débiteur assisté du syndic (règlement judiciaire) ou contre le syndic représentant le débiteur (liquidation des biens). En l’espèce, s’agissant d’une liquidation des biens, la procédure d’opposition aurait dû être poursuivie contre le syndic sans remise en cause de l’ordonnance d’injonction de payer sauf à examiner les motifs de l’opposition sur le fond sous la conduite du syndic.