J-07-232
DROIT CIVIL – CONTRATS – LIQUIDATION – OFFRES DE REPRISE – CONTRAT DE CESSION GLOBALE – NON RESPECT DES OBLIGATIONS – ACTION EN RESOLUTION JUDICIAIRE DU CONTRAT.
EXCEPTIONS DE NULLITE – SIGNIFICATION DE L’ASSIGNATION – PERSONNE MORALE – ARTICLE 86 CPC BURKINABE – PERSONNE HABILITEE – SIGNIFICATION A PERSONNE – VALABLE (OUI) – SYNDICS-LIQUIDATEURS – QUALITE POUR AGIR – LIQUIDATION DES BIENS – ARTICLE 53 ET 160 AUPCAP – REPRESENTATION DU DEBITEUR – DEFAUT DE QUALITE (NON) – NULLITE DE L’ASSIGNATION (NON) – DELAI DE COMPARUTION – ETRANGER – REPRESENTATION – DOMICILE – AUGMENTATION (NON) – NON RESPECT DU DELAI (NON).
INEXECUTION DU CONTRAT – FORCE MAJEURE – ARTICLE 1184 CODE CIVIL BURKINABE – DELAI SUPPLEMENTAIRE (NON) – RESOLUTION DU CONTRAT DE CESSION (OUI) – DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS – PREJUDICES – DEFAUT DE PREUVES – REJET – EXECUTION PROVISOIRE (OUI).
Aux termes de l’article 1184 du code civil, « la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts ».
Article 1184 CODE CIVIL BURKINABE
Article 86 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 88 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 94 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 95 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 96 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 97 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 141 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 441 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 78 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 402 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 362 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n 101/2005 du 02 mars 2005, Michel S. SANOU Syndics liquidateurs de la SOREMIB c/ La société OSCAR Industries LTD International (Headquarier Company)).
LE TRIBUNAL,
FAITS PRETENTIONS PROCEDURE
Le 23 novembre 2004, Michel S. SANOU, né vers 1941 à Bobo-Dioulasso, de nationalité BURKINABE, domicilié à Ouagadougou secteur 8, Expert-comptable d’Etat et maître Benoît J. SAWADOGO, né le 21 mars 1945 à Tenkodogo, de nationalité BURKINABE, domicilié à Ouagadougou secteur 29, avocat à la Cour, tous deux syndics liquidateurs de la Société de Recherches et d’exploitation Minière du Burkina (SOREMIB), société d’économie mixte dont le siège est à Ouagadougou, société en liquidation, ont assigné la société OSCAR INDUSTRIES LTD, INTERNATIONAL HEADQUARIER COMPANY par devant le Tribunal de grande instance de Ouagadougou siégeant en matière civile et commerciale à l’audience du 08 décembre 2004 pour voir prononcer la résolution judiciaire du contrat de cession globale de la mine d’or de Poura et de son périmètre minier de 500 km2; les demandeurs exposent que dans le cadre de la liquidation de la SOREMIB, ils ont lancé un avis d’appel d’offres international pour recueillir des offres de reprises de la mine d’or de Poura; qu’en réponse, ils ont reçu une soumission de la société OSCAR INDUSTRIES LTD; que cette soumission après dépouillement a été transmise au ministère des Mines, des Carrières et de l’Energie du Burkina Faso qui a marqué son accord pour la cession globale de la mine à Oscar Industrie; qu’après des discussions et échanges, un contrat de cession globale de la mine d’or de Poura et de son périmètre minier de 500 km2 a finalement été signé entre eux et la société OSCAR Industries LTD; que malheureusement à ce jour, la société OSCAR Industries LTD ne respecte pas les engagements par elle souscrits, notamment dans l’article 3 du contrat; qu’ils demandent en conséquence la résolution pure et simple du contrat de cession conformément à l’article 1184 du code civil avec des dommages intérêts de trois cent millions (300°000°000) de francs CFA en réparation des préjudices subis dus à la prolongation du temps pour les opérations de liquidation avec prise en charge de divers frais et à la perte de chance pour la reprise des activités de la mine; en outre, ils sollicitent l’exécution provisoire de la décision nonobstant toute voie de recours.
Appelé à la première audience du 8 décembre 2004, le dossier a été mis en délibéré pour être vidé le 29 décembre 2004; avant cette date, OSCAR Industries par le biais de son conseil adressait une demande de rabat du délibéré dans laquelle demande elle exposait n’avoir pas été mise à mesure de se défendre; le délibéré était alors rabattu puis le dossier renvoyé à l’audience en chambre du conseil le 30/12/2004; à cette nouvelle date, OSCAR Industries invoquait l’exception selon laquelle la cause devait être instruite en audience publique conformément aux dispositions des l’article 362 du code de procédure civile.
Il était fait droit à l’exception, puis la cause était renvoyée à l’audience publique du 19/01/2005; elle sera par la suite renvoyée deux fois pour communications de pièces.
Pour se défendre alors, la société OSCAR Industries soulève trois exceptions°: l’une tenant à la signification de l’assignation, l’autre à la qualité pour agir des requérants, et enfin la troisième tenant au délai de comparution.
S’agissant d’abord de la signification, elle prétend qu’elle n’a été faite ni à personne, ni à domicile°: la signification à personne pour une personne morale se fait à son représentant légal ou à un fondé de pouvoir de cette dernière; cela n’est pas le cas en l’espèce; quant à la signification à domicile, elle suppose le respect des prescriptions de l’article 88 CPC; ces prescriptions ont pourtant été violées; Oscar Industries conclut sur la signification qu’elle devait être faite à parquet et obéir aux dispositions des articles 94 à 97 du CPC, s’estimant domicilié à Londres. La violation des règles de signification lui cause préjudice en ce que le dossier a été mis en délibéré sans qu’elle n’ait pu se défendre et qu’il y a eu une mauvaise publicité d’elle.
S’agissant de la qualité pour agir, OSCAR Industries tire ensuite argument des termes de l’article 1 du contrat de cession de la mine d’or de Poura selon lesquelles « les syndics-liquidateurs cèdent, au nom de l’Etat BURKINABE, propriétaire de la mine d’or de Poura à la société OSCAR Industries LTD » pour denier la qualité pour agir aux syndics-liquidateurs es qualité, en résolution du contrat; elle invoque à l’appui de cette prétention l’article 141 du CPC.
S’agissant enfin du délai de comparution, OSCAR Industries se prévalant d’une domiciliation à Londres, s’appuie sur les articles 441 et 78 du CPC pour réclamer le bénéfice d’un délai de deux mois et 15 jours pour sa comparution; l’assignation n’a pas respecté ce délai et mérite annulation.
Quant au fond, OSCAR Industries, tout en ne déniant pas le non respect de ses obligations résultant du contrat de cession, fait valoir que cette défaillance est due à une force majeure constituée par la crise ivoirienne°: l’Etat BURKINABE ayant traîné depuis l’adjudication de la mine d’or pour la signature du contrat de cession, l’intervention de la crise ivoirienne a rendu le partenaire financier, la DEXIA Banque de Luxembourg, réticente à investir, considérant désormais l’Afrique de l’Ouest comme zone à grand risque.
Somme toute, OSCAR Industries relève qu’à ce jour elle a obtenu l’accord de principe d’autres partenaires financiers et que sur la mine d’or de Pourra, un certain nombre d’engagements ont été exécutés ou sont en voie; qu’au regard de l’article 1184 al. 3 du code civil, la juridiction de céans n’est pas tenue de prononcer la résolution mais peut lui accorder des délais pour l’exécution des obligations; que cela est d’autant plus judicieux que OSCAR Industries a déjà déboursé plusieurs millions de francs CFA pour acquérir la mine et y mener des études de faisabilité.
DISCUSSION
En la forme
Sur la signification de l’assignation
Attendu que la signification faite à une personne morale est à personne selon l’article 86 du code de procédure civile lorsque l’acte est délivré au représentant légal de la personne morale, à un fondé de pouvoir de ce représentant ou à toute autre personne habilitée à cet effet.
Attendu que l’exploit d’assignation du 23/11/2004 a été servi à un nommé KAFANDO Lassané qui se prévalait de la qualité de représentant de la société OSCAR Industries; que cette société lui dénie pourtant cette qualité en produisant la procuration du représentant légal Jean Bernard BERCOT en vertu de laquelle procuration est habilité à le représenter N’Drin Dobet Jean Baptiste.
Attendu cependant qu’à la date où l’assignation a été délivrée, N’Drin Dobet Jean Baptiste qui était le fondé de pouvoir du représentant légal Jean Bernard BERCOT était absent de la représentation de la société OSCAR Industries; que c’est à cette représentation que se mènent les activités de ladite société pour le Burkina Faso; que KAFANDO Lassané s’y trouvant, a été la personne investie du pouvoir intérimaire par N’Drin Dobet Jean Baptiste; qu’en vertu de cet intérim, KAFANDO Lassané était bien personne habilitée à recevoir l’assignation; qu’il en découle que la signification a été faite valablement à personne.
Sur le défaut de qualité des syndics liquidateurs
Attendu que prenant prétexte des termes de l’article 1er du contrat de cession de la mine d’or de Poura, Oscar Industries conclut à la nullité de l’assignation pour irrégularité de fond, les syndics ayant introduit l’action en résolution du contrat es qualité.
Attendu cependant qu’en considération de l’article 53 de l’Acte uniforme OHADA portant sur les procédures collectives d’apurement du passif, dès l’ouverture de la procédure de liquidation des biens, la personne morale du débiteur est dissoute de plein droit et celle-ci est désormais représentée dans les actes d’administration et de disposition de ses biens par le syndic; que ses droits et actions appartiennent au syndic durant toute la procédure de liquidation; qu’à fortiori, l’article 160 du même Acte uniforme reconnaît au syndic la cession globale de l’actif comprenant des unités d’exploitation.
Attendu que la liquidation des biens de la SOREMIB (unité d’exploitation de l’Etat) comprenant la mine d’or de Poura est toujours en cours; que la cession dont la résolution est demandée porte sur l’unité d’exploitation; que cette cession avait été faite par les syndics, qu’au regard des articles 53 et 160 suscités, lesdits syndics ont es qualité pour agir; que la nullité de l’assignation tirée du défaut de qualité ne peut donc prospérer.
Sur le délai de comparution
Attendu que OSCAR Industries estime être domiciliée à Londres, qu’au regard de cette domiciliation, elle doit obtenir le bénéfice des articles 441 et 78 du code de procédure civile concernant la comparution.
Attendu cependant que OSCAR Industries s’est valablement installé au Burkina Faso en ouvrant une représentation; que cette représentation a plein pouvoir pour agir et répondre des actes de la société; qu’elle vaut domicile; que ce domicile relève du même ressort territorial que la juridiction saisie; que conformément à l’article 78 précité, il n’y a pas lieu à augmenter le délai de comparution en raison des distances.
Que OSCAR Industries est en conséquence mal fondée à invoquer un non respect du délai de comparution.
Au fond
Sur la résolution du contrat
Attendu qu’aux termes de l’article 1184 du code civil, « la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts ».
Attendu que les syndics-liquidateurs, auteurs de la cession de la mine d’or de Poura demandent la résolution de ladite cession au motif que OSCAR Industries n’a pas honoré ses engagements; qu’elle n’a notamment pas à ce jour maintenu les installations nécessaires au fonctionnement de la mine et n’a pas mis en place la nouvelle société avec participation de l’Etat, mais au contraire, a engendré une détérioration des lieux en violation des termes de l’article « de leur contrat, que OSCAR Industries ne méconnaît pas les reproches à elle faits; qu’elle justifie ses manquements par la défaillance de sa banque initiale et par la lenteur de l’Etat BURKINABE; qu’en considération de l’article 1184 alinéa 3 du code civil, il convient de lui accorder un délai supplémentaire.
Attendu qu’il est constant que OSCAR Industries n’a pas respecté les engagements par elle souscrits, que la sanction de cette inexécution est soit la résolution du contrat, soit l’exécution forcée lorsqu’elle est encore possible; qu’un délai peut être accordé selon les circonstances au débiteur pour s’exécuter.
Attendu que les manquements à son obligation par OSCAR Industries sont causes de résolution du contrat de cession; que les syndics liquidateurs sollicitent cette résolution, qu’en considération de ce que les faits invoqués par OSCAR Industries ne sont pas opposables aux syndics liquidateurs et eu égard à la situation particulière de la procédure collective qui nécessite que les syndics traitent avec des preneurs sérieux pour la réalisation de l’actif de la société en liquidation, il convient refuser l’octroi d’un délai supplémentaire et prononcer la résolution du contrat de cession.
Attendu que la résolution du contrat est demandée avec dommages et intérêts; que ces dommages et intérêts visent à réparer les préjudices résultant de l’inexécution des engagements; que les syndics liquidateurs estiment ces préjudices à trois cent millions de francs CFA; qu’ils prétendent à cette réclamation au motif que la liquidation qui devait se clore au lendemain de la cession de la mine a dû continuer à faire face aux frais d’entretien, de surveillance de la mine et des salaires du personnel, qu’il existe en outre une perte de chance de reprise des activités de la mine à un moment où le cours de l’or est à la hausse.
Attendu que cette demande de dommages et intérêts n’est pas justifiée; que les syndics liquidateurs ne quantifient ni le préjudice financier, ni celui économique; qu’ils ne produisent aucune pièce à même d’asseoir la réalité des frais d’entretien, de surveillance de la mine et de paiement des salaires; qu’il échet par conséquent rejeter cette demande en dommages et intérêts.
Sur l’exécution provisoire
Attendu que les demandeurs souhaitent voir assortir la décision de l’exécution provisoire; qu’aux termes de l’article 402 du code de procédure civile, la condamnation peut être assortie en tout ou partie de l’exécution provisoire.
Attendu que la mine d’or de Poura est délaissée depuis le contrat de cession; qu’elle est en perte de valeur; que le cours mondial de l’or est actuellement à la hausse; qu’au regard de ces éléments, aggravés par le fait que la liquidation de la SOREMIB doit clore au plus tôt, il y a nécessité et urgence à ce que la mine soit reprise; qu’il y a donc lieu assortir la résolution du contrat de cession de l’exécution provisoire nonobstant toute voie de recours.
Sur les dépens
Attendu en tout état de cause, que la partie qui succombe à un procès doit en assurer les frais; que OSCAR Industries est la partie qui succombe à cette instance; qu’il échet la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort,.
En la forme°: rejette les exceptions soulevées par OSCAR Industries LTD International Headquarier Company comme étant mal fondées.
Au fond°: fait droit à la demande des syndics liquidateurs de la SOREMIB. Prononce par conséquent la résolution judiciaire du contrat de cession globale de la mine d’or de Poura conclu le 31 décembre 2003 entre les syndics liquidateurs de la SOREMIB et la société OSCAR Industries LTD International Headquarier Company sur le fondement de l’article 1184 du code civil.
Rejette la demande de dommages et intérêts comme étant injustifiée.
Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision nonobstant toute voie de recours.
Condamne la société OSCAR Industries LTD International Headquarier Company aux dépens.