J-08-66
Société commerciale – décès d’un associé – succession – nomination d’un curateur (oui).
Dans le cas d’une succession vacante dans laquelle se trouve une société devenue sans administrateur, le juge peut nommer un curateur à la succession avec mission d’administrer la société.
Article 203 AUSCGIE ET SUIVANTS
Tribunal de première instance de Mbouda, jugement du 21 juillet 1999, jugement N 19/Civ. Juridis Périodique n 59 / 2004, p. 49. note Djoustop.
LE TRIBUNAL
Attendu que par exploit de Maître Tchokountche, Huissier à Mbouda, enregistré, volume 7, folio 44, case 1063, au droit de 4 000 francs, en date du 12 février 1999, la Commune Rurale de Babadjou, représentée par le maire de ladite commune, a fait donner assignation à Madame Theam, épouse Theam Barthélemy, Kaleguem Augustin, chef du personnel de la SINCOA, à l’effet d’attraire les défenseurs devant le Tribunal de Première Instance de Mbouda, statuant en matière civile et commerciale, dans l’intérêt de voir déclarer la demanderesse recevable en sa demande;l’y dire fondée;s’entendre nommer un curateur ayant pouvoir d’accomplir les actes d’administration à la SINCOA, jusqu’à l’obtention d’un jugement d’hérédité définitif de la succession de feu Theam Barthélemy;s’entendre déclarer que le jugement à intervenir sera exécutoire, nonobstant toutes voies de recours.
Attendu qu’au soutien de son action, la demanderesse a développé qu’elle est créancière de la Société Industrielle et Commerciale Africaine, en abrégé, la SINCOA, d’importantes sommes d’argent, représentant diverses taxes communales actuelles, et précédentes.
Que depuis le décès de Theam Barthélemy, Directeur et principal actionnaire de la SINCOA, survenu courant 1990, elle est victime de la situation anarchique qui règne dans la succession du défunt, qui compte entre autres, des plantations et des pâturages sis à Babadjou.
Que des personnes qui ont prétendu prendre en charge la gestion de ladite succession, n’ont pas pris en considération les créances des tiers.
Que jusqu’ici, personne ne se réclame de la succession de feu Theam, et cette situation fait régner la vacance, aussi bien de la succession que de la direction de la SINCOA.
Que pareille situation gêne le développement socioéconomique de la Communauté Rurale de Babadjou, et pour lui permettre de recouvrer ses créances, elle sollicite que soit désigné pour l’administration de la SINCOA, un curateur.
Qu’elle en propose Maître Mongkuo Lawrence, Avocat au Barreau du Cameroun;ayant charge d’administrer la SINCOA, jusqu’à obtention d’un jugement d’hérédité définitif de la succession de feu THEAM Barthélemy.
Attendu que les défendeurs ne comparaissent pas;qu’il y a lieu de statuer par jugement de défaut à leur égard.
Attendu que cette situation de la SINCOA, sans administration, a trop duré;que pour mettre fin à cet état de chose, il convient d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision, nonobstant toutes voies de recours.
Attendu que les dépens sont laissés à la charge de la demanderesse.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de la demanderesse. Par défaut à l’égard des défendeurs, en matière civile et en premier ressort.
Reçoit la Commune Rurale de Babadjou en sa demande.
L’y dit fondée.
Désigne Maître Mongkuo N. Lawrence, Avocat au Barreau du Cameroun, curateur de la Société Industrielle et Commerciale Africaine (SINCOA).
Dit que le curateur ainsi désigné a la charge d’administrer ladite SINCOA, jusqu’à l’obtention d’un jugement d’hérédité définitif de la succession de feu THEAM Barthélemy, qui déterminera les nouveaux responsables à la tête de la SINCOA.
Dit que le curateur devra, avant toute prise de fonction, faire constater l’état de la SINCOA par inventaire.
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, nonobstant toutes voies de recours.
Met les dépens à la charge de la demanderesse liquide quant à présent, à la somme de vingt deux mille francs.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique les même jour, mois et an que dessus.
En foi de quoi, la minute du présent jugement a été signée par le Président qui l’a rendu, et le Greffier audiencier.
NOTE
La tutelle judiciaire, qui est d’origine prétorienne, est une institution qui intervient quand il y a crise. Elle est, comme son nom l’indique, désignée par un juge (chaque fois que besoin est), qui met en place des « mandataires ». Ils sont connus sous diverses dénominations. On a, selon le cas, le curateur, l’administrateur provisoire, le liquidateur judiciaire, l’expert de gestion et, dans une moindre mesure, le séquestre, le contrôleur de gestion, enfin, l’enquêteur conciliateur.
Compte tenu des missions qui leur sont confiées, et qui diffèrent d’une institution à l’autre;compte tenu également de leur importance, seules quelques-unes rentrent dans le cadre du jugement commenté.
Il s’agit, tout d’abord, du curateur, parce qu’il organise et liquide les successions vacantes. Sa situation est très proche de celle du jugement du TPI de Mbouda, daté du 21 juillet 1999, que nous commentons.
Le législateur a organisé cette institution dans les articles 812 à 814 du Code Civil.
Il s’agit ensuite, de l’administrateur provisoire : institution qui se substitue momentanément aux organes de direction d’une société commerciale. Il est plus indiqué de parler, au sujet de ces sociétés commerciales, d’administrateur judiciaire, car il est nommé par le juge. Il a un pouvoir provisoire limité à la résolution de la difficulté actuelle. La société anonyme SINCOA, défenderesse dans l’affaire commentée, avait bel et bien une difficulté actuelle : le décès de son directeur et principal actionnaire.
Il s’agit, enfin, du liquidateur qui résulte de la fin de l’exécution du contrat de société, autrement dit, de la disparition de la personne morale. Le liquidateur a pour tâche de réaliser l’ensemble des opérations de liquidation de la société. Cette institution est prévue et organisée par les articles 203 et suivants de l’Acte Uniforme OHADA relatif au Droit des Sociétés Commerciales et au Groupement d’Intérêt Economique (A.U.S.C.). Elle peut être organisée soit à l’amiable, soit par décision de justice.
Une telle institution pouvait être mise en place pour le règlement de la créance de la Commune rurale de Babadjou.
Le curateur, l’administrateur et le liquidateur, ont été retenus parmi les tuteurs judiciaires, parce qu’ils épousent les situations invoquées par le jugement du TPI de Mbouda du 21 juillet 1999, dont les faits sont les suivants :
Depuis plus de huit ans, la Commune rurale de Babadjou souffre du non-paiement par la Société Industrielle et Commerciale Africaine (SINCOA), des taxes communales.
L’inaction de la SINCOA résulte du décès en 1990, de Monsieur Theam Barthélemy, directeur et principal actionnaire de ladite société. Aux dires de la commune créancière, depuis ce décès, rien n’a été fait pour organiser la succession du défunt, et encore moins pour assurer la direction de la société, notamment pour prendre en considération, les créances des tiers et donc, les siennes. Pas même la veuve Theam n’a daigné accepter la succession, même sous bénéfice d’inventaire. Cette situation de vide installée tant autour de la succession de feu Theam qu’à la tête de la S.A. SINCOA, lui cause un préjudice important;seule la nomination d’un « curateur » ayant le pouvoir d’accomplir les actes d’administration à la Société Industrielle et Commerciale Africaine pourra lui permettre de recouvrer ses créances et trouver une solution définitive à cette carence.
C’est donc forte de tout ceci, que la Commune rurale de Babadjou décide d’attraire en justice, la veuve Theam, ainsi que le chef du personnel de la SINCOA, Monsieur Kaleguem Augustin.
L’action de la créancière, qui est basée sur l’article 812 du Code Civil (et donc, sur la nécessité de nommer un curateur à la succession Theam), est portée devant le Tribunal de Première Instance de Mbouda.
Les défendeurs, régulièrement assignés, n’ont ni répliqué, ni conclu, et ne se sont point présentés aux différentes audiences. Le tribunal, après plusieurs audiences, a fait droit à la demande de la commune rurale de Babadjou, en désignant un curateur à la SINCOA, à charge pour ce dernier, « d’administrer ladite société, jusqu’à l’obtention d’un jugement d’hérédité définitif de la succession de feu Theam Barthélemy, qui déterminera les nouveaux responsables à la tête de la SINCOA ».
Il faut ajouter, pour une meilleure compréhension de l’affaire, que les défendeurs, absents en instance, ont interjeté appel contre le jugement intervenu. L’arrêt rendu par la Cour d’Appel de l’Ouest à Bafoussam, le 28 février 2001, est sans intérêt. Il l’est, car après avoir formé appel contre le jugement du TPI de Mbouda, les appelants ont désisté et les magistrats de la C.A. de Bafoussam n’ont plus eu qu’à constater ce désistement.
L’argumentation développée par les appelants pouvait laisser présager un sérieux débat juridique quant au fond de l’affaire : ils relevaient, entre autres, que la succession n’était pas vacante et que des personnes existaient, qui assuraient la continuation de la société;informations qui, si elles étaient fondées, écarteraient, d’une part, la nomination du curateur, et permettraient, d’autre part, d’autres approches quant au règlement des dettes sociales. On ne peut comprendre leur désistement que par la survenance d’un arrangement à l’amiable intervenu entre les parties.
L’économie du jugement du 21 juillet 1999 du T.P.I. de Mbouda (Affaire SINCOA). laisse comprendre que, ce qui opposait les protagonistes était moins la succession de feu Theam Barthélemy, que le sort de la créance de la Commune rurale de Babadjou.
Or, s’agissant du payement d’une dette commerciale (dette contractée par une S.A. à l’occasion de son activité commerciale), l’article 812 du Code Civil était moins indiqué. Car, les dispositions de ce texte portent sur la curatelle d’une succession vacante, ce qui ne semble pas être le cas dans notre espèce. (I).
Le règlement des dettes d’une société commerciale, en cas de paralysie de ses organes de gestion ou de crises, est organisé autour de deux institutions qui sont, d’une part, l’administrateur provisoire, et d’autre part, le liquidateur (II).
I. Le curateur :
institution mieux adaptée aux successions qu’au règlement de dettes commerciales.
« Le mort saisit le vif », dit-on assez souvent, pour se référer à la saisine. Ce qui s’explique tout d’abord, par le fait qu’elle est la continuité spirituelle d’une société;elle est, ensuite, le lien de la vie et de la mort. Elle est, enfin et surtout, non seulement l’apaisement que l’acquisition des biens du mort donne souvent à la douleur des héritiers, mais aussi une consolation plus mystérieuse et plus profonde.
Autrement dit, de la continuation de la personne du défunt par l’héritier;l’hérédité est immédiatement transmise, sans formalité quelconque, aux « heredes sui ». Les autres héritiers peuvent refuser ou accepter (par une aditio hereditatis), la succession. Mais, tout n’est possible que s’il s’agit d’une succession avec successeur. C’est-à-dire que la succession ne doit pas être abandonnée;tel est le cas, quand personne ne la réclame, car il n’y a pas d’héritiers connus, ou que les héritiers connus y ont renoncé ou s’en désintéressent. On parle alors, de succession vacante.
Cette situation est prévue et organisée par le législateur camerounais, dans les articles 812 à 814 du Code Civil. Ces textes prévoient, d’une part, les conditions de nomination du curateur (A). et d’autre part, ses missions (B).
A. Conditions de nomination du curateur
Pour qu’un curateur soit nommé à une succession, il faut, d’une part, que cette succession soit vacante (a), et d’autre part, qu’une décision de justice intervienne (b).
a) La succession doit être vacante
La vacance d’une succession est le contraire même de la succession, dans la mesure où il n’y a pas de successeur. Tel est le cas, quand la succession est abandonnée (l), ou quand personne ne la réclame (2). Si tout intéressé peut déclarer la vacance d’une succession, elle intéresse beaucoup plus les créanciers successoraux qui cherchent à se faire payer.
1). Succession abandonnée
L’abandon de la succession se caractérise, d’abord, par le fait qu’il n’y a pas d’héritiers connus à cette succession. Ce qui suppose que le de cujus soit mort sans qu’on lui connaisse un quelconque héritier (les magistrats du TPI de Mbouda ne nous disent pas si feu Theam est mort sans postérité).
Dans ces conditions, elle peut alors être recueillie par l’Etat. Il la recueille soit à titre d’administrateur provisoire, en attendant qu’un éventuel héritier puisse se manifester, soit à titre de sa vocation successorale.
La vocation successorale de l’Etat peut apparaître dans plusieurs hypothèses : ou bien, en l’absence d’héritier au degré successible, sans qu’il y ait de légataire universel institué. Ou bien, en cas d’exhérédation collective de tous les héritiers, lorsqu’il n’y a pas de réservataire (on dit dans ces deux cas, qu’il y a déshérence). Ou bien enfin, au cas où le défunt aurait institué l’Etat légataire universel.
Pour les créanciers de la succession, quand elle est recueillie par l’Etat, il n’y a pas de problème, ils peuvent toujours se faire payer par lui.
2). La succession n’est pas réclamée
Une succession n’est pas réclamée, lorsque après l’expiration des délais d’option (trois mois et quarante jours), personne ne s’est présenté pour l’appréhender. Il faut donc, qu’il ne se trouve aucun successible contre lequel les créanciers pourraient agir. S’il n’existe aucun héritier connu, il n’y a pas de difficultés.
Si, par contre, les héritiers sont connus, mais inactifs, la difficulté est de choisir entre deux partis, qui représentent chacun un inconvénient;il est inopportun de dépouiller les héritiers de leur gestion, mais il est aussi inopportun de léser les créanciers.
Mais après ces délais, les créanciers devraient contraindre l’héritier à prendre parti (soit accepter, même sous bénéfice d’inventaire art. 798 C.civ, soit renoncer). Il est, dans tous les cas, admis que la vacance puisse être prononcée du seul fait de la carence des héritiers du premier rang. Il est vraisemblable que les héritiers de rang subséquent renoncent aussi.
Quand toutes ces conditions sont réunies (la succession est abandonnée ou n’est pas réclamée), le législateur autorise que soit nommé un curateur à celle-ci.
b) L’intervention d’une décision de justice
La curatelle d’une succession vacante est prononcée par le Tribunal de Première Instance, dans l’arrondissement duquel elle est ouverte. C’est donc cette juridiction qui nomme le curateur;mais elle le fait sur la demande des personnes intéressées ou sur la réquisition du Procureur de la République. Avant cette nomination, il vérifie que les conditions prévues à l’article 811 du Code Civil sont réunies. La curatelle n’intervenant pas seulement dans les successions, on a pu voir, dans une espèce, les membres d’une famille (enfants et épouses), demander au juge la mise sous curatelle de leur père, devenu incapable (victime d’une démence sénile);insister, dans leur assignation, que par jugement Avant Dire Droit, soit nommé un administrateur provisoire des biens de leur père.
Que ce soit dans cette espèce ou dans bien d’autres, l’intervention d’une décision de justice est toujours nécessaire. C’est d’ailleurs ce qu’a sollicité et obtenu la Commune rurale de Babadjou, du T.P.I. de Mbouda. La décision qui désigne le curateur organise de même, ses missions.
B. Les missions du curateur
Dès sa désignation, le curateur a des missions connues sous forme de pouvoirs. Elles sont, sauf autorisation judiciaire, limitées aux actes d’administration et à concurrence du passif héréditaire;aux actes de disposition portant sur le mobilier, ainsi qu’à la reddition des comptes. C’est l’essentiel de l’article 813 du Code Civil.
a) L’administration de la succession
Le curateur des successions vacantes a sur elles, les mêmes pouvoirs que ceux de l’héritier bénéficiaire. Autrement dit, les dispositions du bénéfice d’inventaire lui sont appliquées.
Dans cet objectif, pour gérer la succession (2), il doit d’abord en faire inventaire (1).
1). La rédaction d’un inventaire
A la différence de l’héritier bénéficiaire, le curateur n’a plus de déclaration à faire au greffe du tribunal, compte tenu de sa nomination par cette juridiction.
Par contre, il doit rédiger un inventaire, « fidèle et exact » (art. 794), ne comportant pas des omissions volontaires. Cet inventaire est destiné à faire connaître avec certitude, la consistance de l’actif. Il est une garantie efficace qui donne à l’acte, son caractère solennel.
Le curateur dispose également du délai de trois mois pour faire cet inventaire, à compter de sa désignation;mais certainement pas de celui de quarante jours pour délibérer, puisqu’il n’est qu’un administrateur désigné par voie judiciaire.
Quoi qu’il en soit, il est préférable que l’inventaire soit rédigé à une date aussi proche que possible du décès du de cujus;cela, afin qu’il soit vraiment fidèle. C’est le souci de cette fidélité qui explique l’urgence qu’il y a à désigner toujours très vite, un curateur à une succession vacante.
L’établissement de cet inventaire a pour conséquence, d’une part, de séparer les deux patrimoines (celui du curateur et celui de la succession). Cette séparation des patrimoines peut ressembler à celle que demandent les créanciers successoraux. La séparation des patrimoines résultant de la désignation d’un curateur est réelle, le curateur est un étranger à la succession, ce qui n’apparaît pas à la séparation des patrimoines proprement dite. Les juges du T.P.I. de Mbouda ont bien requis le curateur nommé de faire un inventaire, mais faire un inventaire de la S.A. SINCOA et non celui de la succession de feu Theam.
L’établissement de l’inventaire a pour conséquence, d’autre part, d’éviter la confusion entre les droits et les obligations de la succession, et ceux du curateur (art. 802 2, C.civ.), mais tel ne sera pas le cas dans notre espèce.
Une fois l’inventaire de la succession dressé, le curateur peut l’administrer.
2). La gestion de la succession
Une fois le patrimoine successoral identifié par l’inventaire, le curateur, en sa qualité de « gérant », va l’administrer, c’est-à-dire, exercer et poursuivre les droits y relatifs, répondre aux demandes formées contre elle.
Il s’agit, en quelque sorte, de la gestion de l’actif de la succession. A cet effet, tout comme l’héritier bénéficiaire, le Code Civil apporte quelques limites à sa liberté d’action. Il prévoit, par exemple, « qu’il ne peut vendre les meubles de la succession que par le ministère d’un officier public, aux enchères, et après les affiches et publications accoutumées » (art. 805 C.civ.). La jurisprudence soumet à autorisation judiciaire, la vente des meubles incorporels, tels que les rentes, les créances, les effigies et valeurs mobilières;ce qui est critiqué par la doctrine.
Quant au passif successoral, en principe, le curateur doit le liquider. Mais il ne s’agit pas d’une liquidation générale. Le législateur se borne à dire que « l’héritier bénéficiaire (tout comme le curateur). est chargé d’administrer les biens de la succession » (art. 803 C.civ.). La raison d’être du bénéfice d’inventaire est la protection du curateur bénéficiaire contre un passif successoral excessif, et non le règlement à tout prix des créanciers. Aussi, aucun texte n’impose la liquidation, bien qu’en pratique, elle soit nécessaire.
C’est ce qui explique qu’une règle particulière est énoncée au profit des créanciers hypothécaires : le prix de l’immeuble hypothéqué doit leur être délégué. Les créanciers chirographaires sont soumis à la règle habituelle au droit civil du paiement : le curateur doit les payer dans l’ordre où ils se présentent (art. 808 C.civ.).
Pour les légataires, s’ils sont payés à mesure qu’ils se présentent, par application de la règle « Némo liberalis, nisi liberatus », un légataire ne peut être payé au détriment d’un créancier. Dès lors, même si un créancier se présente après l’épuisement de l’actif et que les légataires aient été payés, il peut exercer (même en cas de négligence personnelle). un recours contre les légataires, pendant un délai de trois ans (art. 809 C.civ.).
Le curateur n’administre pas seulement la succession;il rend des comptes.
b) La reddition des comptes
Parce qu’il est un mandataire, le curateur doit rendre les comptes de son administration aux créanciers et aux légataires (art. 803 al.1du C.civ.). Toutefois, le curateur est comptable du prix des meubles ou immeubles vendus, ce qui assure la conservation des droits des uns et des autres.
Au crédit du compte, figurent l’actif de la succession et les valeurs qui l’ont accrue, telles que les fruits perçus et les biens subrogés à ceux qui ont été aliénés ou ont disparu. Au passif, figurent les charges et les dettes de la succession.
Si le curateur doit rendre des comptes aux créanciers, il n’est pas obligé de gérer dans leur intérêt : il n’est pas tenu de faire fructifier les biens, il ne doit pas rendre compte aux créanciers, des fruits qu’il n’a pas reçus.
Comme on peut le remarquer, le curateur est un tuteur judiciaire, dont les conditions de nomination et ses attributions le destinent plus aux problèmes de succession qu’à autre chose.
Les dettes commerciales comme celles de la société SINCOA, peuvent être réglées par le biais d’autres tuteurs judiciaires.
II. L’administrateur provisoire et le liquidateur judiciaire : deux institutions qui permettent le règlement des dettes commerciales (difficultueuses). en cas de crise.
Les créanciers des sociétés commerciales sont très souvent en difficulté, quand un désordre s’installe à la tête des sociétés débitrices. Ce désordre peut avoir plusieurs origines. Il peut provenir tout d’abord, d’une mésentente entre associés, paralysant le bon fonctionnement des institutions de gestion. Il peut provenir ensuite, d’une absence totale de dirigeants sociaux : tel est le cas de la S.A. SINCOA, dont le directeur et principal actionnaire était décédé.
Dans ces différentes conditions, les créanciers sociaux ne peuvent plus se faire payer : il n’y a plus d’interlocuteurs pour faire face à leurs créances dans la société.
Fort heureusement pour eux, toutes les crises ne mènent pas à la dissolution de la société. L’intervention d’une tierce personne (qui entraîne une baisse de tension), désignée par le juge, permet un retour à la sérénité, ce qui est à nouveau une garantie quant au payement des créances sociales.
La désignation d’un administrateur provisoire, qui se substituera momentanément aux organes de direction, est la mesure la plus radicale (A). Mais quand la dissolution devient nécessaire, un liquidateur auquel on attribue un certain nombre de pouvoirs, doit être nommé (B). L’un ou l’autre de ces tuteurs aurait pu permettre aisément à la Commune rurale de Babadjou, de rentrer dans ses créances sans insister sur la nomination d’un curateur qui, au demeurant, peut toujours refuser de payer les dettes de la société qui sont étrangères à la succession pour laquelle il a été nommé.
A. L’administrateur provisoire
Sa désignation est une mesure grave et exceptionnelle. Elle l’est d’autant plus qu’elle n’est ni prévue ni organisée par la loi. Il s’agit d’une pure construction prétorienne;autre possibilité pour le juge de s’immiscer dans la gestion de la société, lorsque la survie de celle-ci est en cause.
Bien qu’il s’agisse d’une construction prétorienne, la désignation par le juge, d’un administrateur provisoire qui se substituera aux organes de gestion, le temps que se dénoue la crise, intervient dans des conditions particulières, et suite à une certaine procédure (a). De même, il a des missions bien précises au sein de la société (b).
a. Procédure et conditions de nomination
La procédure de nomination de l’administrateur provisoire doit être précisée avant les conditions de sa nomination.
1). La procédure de nomination
En raison de l’urgence de la situation, la demande est le plus souvent présentée par voie de référé devant le tribunal compétent, c’est-à-dire, le Président du TPI. Les personnes qui peuvent faire cette demande sont nombreuses.
Les associés minoritaires sont les demandeurs naturels. Ils le sont, parce que leurs droits sont les plus exposés, les majoritaires contrôlant assez souvent la gestion de la société.
Les dirigeants, notamment quand ils viennent d’être révoqués, peuvent également présenter une demande;ou encore, les administrateurs d’une S.A, s’ils estiment que les informations dont ils disposent sont insuffisantes.
En cas d’inertie des associés, le commissaire aux comptes peut prendre l’initiative d’une telle nomination. Le peuvent également, dans cette même condition, le comité d’entreprise et les créanciers.
En sa qualité de créancier, la Commune rurale de Babadjou devrait normalement demander au juge du TPI de Mbouda, de procéder à une telle nomination, car toutes les conditions étaient réunies pour cela.
2). Les conditions de nomination
La nomination d’un administrateur provisoire relève en pratique, de l’assistance à personne en danger. C’est ce qui explique que, se fondant sur l’intérêt social, le juge n’accède à la demande de sa nomination qu’à la double condition que la preuve soit apportée d’une paralysie des organes sociaux, et d’un péril imminent.
La paralysie des organes sociaux
La paralysie des organes sociaux peut également s’entendre de la défaillance de ces organes. Ex : une S.A. dont tous administrateurs, y compris le président, ont démissionné ou ont été révoqués. Les actionnaires, à leur tour, sont divisés en deux blocs rivaux et n’arrivent pas à se mettre d’accord pour désigner des remplaçants. Pour cette société, le pire est à craindre : elle est comme un avion en plein vol, sans aucun pilote;son crash est inévitable. Pour la société dans cette situation, la désignation d’un administrateur provisoire s’impose à l’évidence.
La paralysie peut également avoir pour cause, la mésintelligence des organes qui sont pourtant en place. Tel est le cas, quand les administrateurs qui composent le Conseil de la S.A, entravent le fonctionnement normal de la société, au point d’en compromettre la survie.
La paralysie est également présente pour les S.A, comme dans le cas de la SINCOA, quand il n’y a plus personne à la tête de la société pour répondre de quoi que ce soit;c’est à croire avec ce décès, que l’on se trouvait dans le cas de société commerciale unipersonnelle dont parle l’article cinq de l’Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales.
Un tel vide peut également correspondre à une paralysie commandant la nomination d’un administrateur provisoire.
Bien qu’il soit admis que l’administrateur provisoire n’est pas un arbitre chargé de trancher le moindre conflit opposant minoritaires et majoritaires, on a vu de plus en plu, les minoritaires solliciter et obtenir sa désignation, alors même que les organes sociaux en place ne sont en rien paralysés. Tel est souvent le cas, quand (à dire des juges). l’intérêt social est gravement menacé;n’est-ce pas là, déjà, le péril imminent ?.
Le péril imminent
La première condition à elle seule ne suffit pas à convaincre le juge du TPI, de nommer un administrateur provisoire;il faut qu’elle expose la société à un péril certain et imminent, et donc, que le juge intervienne au nom de l’intérêt social. Il faut admettre que ceci est un principe, car dans bien d’autres situations de gravité moindre, les juges accèdent à la demande. Il s’agit notamment, des cas dans lesquels le préjudice, sans être actuel, risque de se réaliser, si aucune mesure d’urgence n’est prise. L’administrateur provisoire est alors désigné à titre préventif, pour conjurer un péril futur.
Dans tous les cas, les juges restent prudents et ne s’immiscent dans la gestion d’une société, que si une crise grave la met en péril. L’absence de dirigeants dans la S.A. SINCOA et le silence des autres associés face aux créanciers, constituent justement une situation de crise qui demande l’intervention des juges.
Quelles que soient les dissensions entre les associés, du moment que les organes en place fonctionnent régulièrement, le juge refuse en général, la nomination d’un administrateur provisoire. Mais quand il le fait, il doit préciser ses missions.
b) Les missions de l’administrateur provisoire
L’administrateur judiciaire nommé par le juge a un pouvoir provisoire limité à la résolution de la difficulté actuelle. C’est un dirigeant (même s’il est provisoire). qui va être mis en place;la décision judiciaire qui procède à sa nomination doit, à l’exemple de celle des dirigeants sociaux, être publiée selon les modes habituels.
L’étendue de sa mission est en principe définie par la décision du juge. Il est tout d’abord chargé de poser des actes préparatoires : il doit prendre d’urgence, les mesures qui s’imposent pour conjurer les dangers menaçant la société. Il doit, ensuite, s’occuper de la gestion quotidienne de la société.
Peut-il avoir des pouvoirs qui lui permettent d’engager l’avenir de la société ? Les juges n’accorderaient certainement de tels pouvoirs que si l’intérêt social l’exige. Par exemple, si un tel engagement permet de résorber le passif social, nous pensons que oui;car cela lui permettrait également de faire face aux échéances sociales.
Parce qu’il se substitue aux dirigeants sociaux le temps de sa mission, il est nécessairement investi de tous les pouvoirs confiés par la loi à ces organes de direction. Dès lors, les décisions qui sont de la compétence des assemblées devraient lui échapper. A titre d’exemple, la dissolution de la société ne devrait pas rentrer dans ses missions, puisqu’elle échoit au liquidateur judiciaire.
B. Le liquidateur judiciaire
De tous les tuteurs judiciaires, le liquidateur est celui qui ne vient que dans un but ultime : procéder à la liquidation de la société. Alors que les autres, et notamment ceux que nous avons rencontrés plus haut, ont pour tâche de régler les différends sociaux, pour permettre un meilleur retour à la normale. C’est certainement ce qui explique que l’on le retrouve assez souvent en matière patrimoniale. Mais il est l’institution la mieux connue, lors des opérations de liquidation de la société commerciale. Liquidation, qui jusqu’à l’avènement de l’Acte uniforme OHADA sur les sociétés commerciales, n’était organisée ni par le Code de Commerce, ni par des lois postérieures. Seules les solutions dégagées par la jurisprudence s’y appliquaient. Même si les faits de notre espèce relèvent, entre autres, le décès du principal actionnaire de la S.A. SINCOA, le paiement de la créance commerciale, objet même du jugement, nous commande de ne retenir que le second aspect des fonctions du liquidateur : celui de son intervention dans les sociétés;c’est donc normalement qu’il faut dire un mot sur sa nomination (a), avant de préciser ses pouvoirs (b).
a. La nomination du liquidateur
Un liquidateur auquel on attribue un certain nombre de pouvoirs, doit être nommé pour réaliser toutes les opérations de liquidation. Cette nomination peut intervenir soit par décision de justice, soit de manière statuaire.
Sur le plan statuaire, les dispositions de l’article 206 de l’Acte uniforme prévoient que : « lorsque la liquidation est décidée par les associés, un ou plusieurs liquidateurs sont nommés :
1) Dans les sociétés en nom collectif, à l’unanimité des associés.
2) Dans les sociétés en commandite simple, à l’unanimité des commandités et à la majorité en capital des commanditaires.
3) Dans les sociétés à responsabilité limitée, à la majorité en capital des associés.
4) Dans les sociétés anonymes, aux conditions de quorum et de majorité prévues pour les assemblées générales extraordinaires. »
Depuis le décret du 8 aoûtt 1935, le liquidateur ne peut être choisi parmi les personnes déchues du droit d’administrer les sociétés. Avec l’Acte uniforme, il peut être choisi parmi les associés ou les tiers;il peut même être une personne morale. Si les associés n’ont pas pu nommer un liquidateur, il est désigné par décision de justice.
Sur le plan judiciaire, la désignation peut intervenir à la demande de toute personne intéressée, et notamment :
1) de la majorité des associés, dans les sociétés en nom collectif.
2) d’associés représentant au moins le dixième du capital, dans les autres formes de sociétés dotées de la personnalité juridique.
3) des créanciers sociaux, comme dans le cas de la SA SINCOA.
4) du représentant de la masse des obligataires.
Elle doit intervenir dans les conditions prévues aux articles 226 et 227 de l’Acte uniforme. Ces textes précisent, entre autres, que la décision de justice qui a ordonné la liquidation de la société, doit désigner un ou plusieurs liquidateurs. Que la durée du mandat de ces liquidateurs ne peut excéder trois ans. Cette période peut être renouvelée à la demande du liquidateur (toujours par décision judiciaire). Mais le liquidateur doit motiver sa demande, en indiquant les raisons pour lesquelles la liquidation n’a pu être clôturée, les mesures qu’il envisage de prendre, ainsi que les délais que nécessite l’achèvement de la liquidation.
Les dispositions de l’Acte uniforme précisent également qu’en cas de nomination de plusieurs liquidateurs, ceux-ci peuvent exercer leurs fonctions séparément, mais établir et présenter un rapport commun.
Une fois le liquidateur nommé, son acte de nomination, quelle que soit sa forme, doit être publié pour que les tiers en soient avertis. Cette publication doit intervenir dans un délai d’un mois, à compter de la date de la nomination, et être faite dans un journal d’annonces légales du lieu du siège de la société concernée. La publication est d’une très grande importance, car la nomination et la révocation ne sont opposables aux tiers qu’à compter de sa date.
b. Les pouvoirs du liquidateur
Pour réaliser les opérations de liquidation, le liquidateur est investi de larges pouvoirs. Il représente, en effet, la société, qu’il engage pour tous les actes de la liquidation. Il a les pouvoirs les plus étendus pour, tout d’abord, réaliser l’actif social (même à l’amiable), en vue de désintéresser les créanciers sociaux. Il est ensuite, habilité à répartir, entre les associés, le solde disponible et éventuellement, le « boni de liquidation ». Il peut également (grâce à ses pouvoirs). continuer les affaires en cours ou en engager de nouvelles pour les besoins de la liquidation, mais il devrait y être autorisé par décision de justice.
Dans le cadre du jugement qui nous intéresse, seuls les premiers pouvoirs évoqués méritent d’être relevés. Il s’agit de la réalisation de l’actif social (1). et du désintéressement des créanciers sociaux (2).
1). La réalisation de l’actif social
Le liquidateur doit réaliser l’actif social, c’est-à-dire le transformer en argent liquide. Il doit, notamment, recouvrer les créances de la société. Il peut aussi vendre les biens sociaux, si cette vente est nécessaire, pour mettre fin aux dettes de la société. L’article 230 de l’Acte uniforme prévoit, à cet effet, que le liquidateur est investi d’importants pouvoirs pour réaliser l’actif social;les restrictions à ces pouvoirs résultant des statuts ou de l’acte de nomination, ne sont pas opposables aux tiers. Autrement dit, s’il accomplit néanmoins un de ces actes qui lui sont interdits, ceux-ci engageront la société à l’égard des tiers.
L’Acte uniforme ne lui accorde pas un « blanc seing ». Certaines restrictions sont posées à sa liberté d’action. La première de ces limites concerne la cession de biens sociaux par le liquidateur. Elle est interdite au profit de certaines personnes, dont le liquidateur lui-même, ses employés et ses proches parents (ascendants, descendants, conjoints). Cette limitation s’explique par le fait que le liquidateur aurait pu, par lui-même ou par personne interposée, faire passer ses intérêts avant ceux de la société, et se vendre à lui-même, l’actif social pour un prix inférieur au prix réel (art. 214 de l’Acte uniforme).
Pour les mêmes raisons, la cession des biens sociaux, faite à l’un des dirigeants de la société, doit être autorisée à l’unanimité des associés. Dans l’impossibilité de réunir cette unanimité, la vente doit être autorisée par la juridiction compétente, le liquidateur et le commissaire aux comptes dûment entendus (art. 213 de l’Acte uniforme). Cette attitude a été dictée par la crainte du législateur africain, que les dirigeants sociaux aient précipité la dissolution de la société, afin de bénéficier de la vente de l’actif à un prix peu élevé.
La seconde restriction aux pouvoirs du liquidateur concerne le cas où ce dernier continue les affaires en cours, ou engage de nouvelles affaires pour les besoins de la liquidation. Dans cette hypothèse, dit l’Acte uniforme, le liquidateur doit obtenir l’autorisation des associés ou d’une décision de justice (suivant que sa nomination résulte d’une décision des associés ou d’une décision judiciaire).
Dans tous les cas, que ce soit pour exécuter des engagements en cours ou pour passer des contrats nouveaux, les papiers d’affaires de la société doivent comporter obligatoirement la mention « société en liquidation », afin que les tiers cocontractants traitent en toute connaissance de cause.
Quand l’actif social est ainsi réalisé, il l’est avant tout pour désintéresser les créanciers sociaux.
2). Le désintéressement des créanciers sociaux.
Le liquidateur doit désintéresser les créanciers sociaux, avec l’argent qu’il a pu obtenir en réalisant l’actif social. Ces créanciers ont été prévenus de la liquidation, par la publicité qui a été effectuée au moment de la dissolution de la société. Normalement, ils doivent se présenter, et ils sont payés au fur et à mesure qu’ils se présentent. Dans la pratique, avant de commencer les payements, le liquidateur dresse un état liquidatif, afin de faire apparaître le passif privilégié, le passif chirographaire et les éventuels prêts participatifs. Toutefois, d’une part, le liquidateur ne peut payer les créanciers à terme qu’en leur offrant (en plus du principal de la créance), les intérêts à courir jusqu’au jour de l’arrivée du terme. D’autre part, s’il sait qu’il ne pourra désintéresser tous les créanciers sociaux avec l’actif réalisé, il doit éviter de payer certains d’entre eux au détriment des autres. Dans ce cas, il a l’obligation de déposer le bilan de la société et de mettre en route la procédure collective du redressement judiciaire ou de la liquidation des biens.
Comme on le voit, autant les missions de l’administrateur provisoire que les pouvoirs du liquidateur judiciaire, leur permettent de résoudre, entre autres, directement les problèmes tels que ceux qui opposaient la Commune rurale de Babadjou à la S.A. SINCOA. La nomination d’un curateur n’était pas forcément la meilleure des solutions, car, nous l’avons dit, il n’a pas pour mission principale de procéder au payement de dettes commerciales, même si, comme en l’espèce, la société commerciale est un élément du patrimoine du défunt.
Bien que la S.A. SINCOA soit un élément du patrimoine de son défunt directeur, il ne demeure pas moins que l’on commettrait une confusion en assimilant la société à la personne même du défunt.
En effet, la responsabilité des associés dans les sociétés anonymes (vis-à-vis des dettes sociales). se porte à la hauteur de leurs participations au capital social, que la société soit pluripersonnelle ou unipersonnelle.
Dès lors, le décès de l’associé unique de la S.A. SINCOA ne saurait déroger à ce principe et permettre aux créanciers sociaux, d’exiger la liquidation de sa succession personnelle, afin d’entrer en possession de leurs créances.
Le fait que l’associé unique soit, dans le même temps, administrateur de la société, ne change rien à la question :
Quand une dette sociale résulte de l’activité du dirigeant de la société, et que cette dette a été contractée dans l’intérêt de la société (tel était le cas pour les créances de la Commune rurale de Babadjou), elle engage la société en tant que personne morale à part entière. En cas de difficulté de paiement d’une telle dette (à l’exemple du décès de l’administrateur et seul associé), la mise en place de tuteurs judiciaires administrateur provisoire et liquidateur judiciaire, peut permettre son recouvrement.
Phostin Roger DJOUTSOP.
Chargé de cours FSJP, Université de Dschang.