J-08-89
RECOUVREMENT DE CREANCE – CARACTERE DE LA CREANCE – CONSTESTATION DE L’EXISTENCE DE LA CREANCE – CREANCE CERTAINE (NON) – APPLICATION DE LA PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER (NON).
C’est à tort que le créancier poursuivant a obtenu une ordonnance d’injonction de payer, dès lors que la créance dont le recouvrement est poursuivi n’est pas certaine au sens de l’article 1er de l’Acte Uniforme portant procédure simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Cour d’Appel D’Abidjan Côte D’Ivoire, 3e Chambre Civile et Commerciale, Arrêt N 234 du 20 septembre 2006, Affaire Monsieur SOUFI OULD EL BANE c/ La société de café et de cacao de Bouaflé dite SOCABO SARL.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Vu les conclusions des parties.
Ensemble l’exposé des faits;les moyens, prétentions des parties et motifs ci-après.
Après avoir délibéré conformément à la loi.
FAITS ET PROCEDURE
Considérant que par acte du 08 mars 2006 SOUFI OULD EL BANE a formé opposition devant le Tribunal de Première Instance de Bouaflé à l’ordonnance d’injonction de payer n 136 rendue le 05 juillet 2005 par la juridiction présidentielle dudit Tribunal le condamnant à payer la somme de 5 323 680 F à la Société de Café et de Cacao de Bouaflé dite SCCABO.
Considérant qu’au soutien de son action, le susnommé expose que pour cette même créance, le Tribunal de Première Instance de Bouaflé a par jugement civil contradictoire n 53 du 28 avril 2005 a déclaré qu’il ne reste devoir que la somme de 723 680 F à la SCCABO.
Que contre tout bon sens, après ce jugement devenu définitif, la SCCABO se servant des mêmes pièces obtient une ordonnance d’injonction de payer portant sur la même somme.
Que c’est quelque mois après le prononcé de ce jugement que cette Société a curieusement obtenu l’ordonnance querellée.
Considérant que SOUFI OULD EL BANE explique que les relations d’affaires entre lui et la SCCABO remontent à la campagne agricole 1998-1999.
Qu’au cours de cette période, il a reçu de cette société les sommes de 5 890 920 F et 945 000 F.
Que sur ces sommes, il remboursé 3 500 000 le 05 janvier 1999, 1 012 240 F le 22 février 2000, 500 000 F le 23 décembre 2000, en enfin a versé pour le compte de la SCCABO la somme de 1 100 000 F à Maître EKRA, Huissier de justice à Bouaflé.
Qu’il reste donc devoir la somme de 723 680 F à la SCCABO.
Qu’il conclut à la rétractation pure et simple de l’ordonnance d’injonction de payer à l’entreprise et la condamnation de la SCCABO aux dépens.
Considérant qu’en réplique la SCCABO fait valoir que dans les leurs relations d’affaires, elle a remis à SOUFI OULD EL BANE le 27 février 1999 et le 23 décembre 2000, respectivement les sommes et le 23 décembre 2000, respectivement les sommes de produits agricoles pour les campagnes agricoles 1999-2000 et 2000-2001.
Qu’en remboursement desdites sommes, le débiteur susnommé a effectué des paiements partiels d’un montant total de 1 512 240 F et reste donc devoir la sommes de 5 890 320 F et 945 000 F pour l’achat de produits agricoles pour les campagnes agricoles 1999-2000 et 2000-2001.
Que pour cette créance, elle a obtenu l’ordonnance d’injonction de payer ayant fait l’objet d’opposition.
Qu’elle sollicite du Tribunal de restituer à ladite ordonnance son plein et entier effet.
Considérant que par jugement commercial contradictoire n 82 du 18 mai 2006, le Tribunal a débouté SOUFI OULD EL BANE de son opposition.
Considérant que par acte du 16 juin 2006 de dernier a relevé appel de ce jugement devant la Cour d’Appel de Daloa.
Considérant que par arrêt avant-dire-droit n 189 du 19 juillet 2006, la Cour d’Appel de ce siège a déclaré cet appel recevable.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES.
Considérant que l’appelant fait grief aux premiers juges d’avoir ainsi statué.
Qu’il articule que le jugement civil contradictoire n 53 du 28 avril 2005 a déjà tranché cette même affaire pour la même créance de la SCCABO.
Qu’il a été jugé après mise en état que sa dette envers l’intimé est de 723 680 F.
Que cette décision ayant acquis autorité de la chose jugée, la même affaire ne saurait de nouveau être portée devant la même juridiction.
Qu’il sollicite l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Considérant que l’intimé, par conclusions en réplique de son conseil, Maître SONLE Émile, Avocat à la Cour, sollicite la confirmation du jugement à tort querellé.
Qu’elle allègue que contrairement aux prétentions de SOUFI OULD EL BANE, il n’a ni été condamné à tort, ni autorité de la chose jugée relativement à la présente cause.
Qu’elle indique que la présente cause est différente de celle ayant donné lieu au jugement dont parle l’appelant, et reprend ses explications de première instance concernant la créance.
Qu’elle conclut que l’appelant est mal fondé à se prévaloir des moyens de défense tiré de l’autorité de la chose jugée et solliciter l’infirmation du jugement querellé.
Considérant que par écritures en réplique, l’appelant, par l’entremise de son conseil, Maître Simon P. BOGUI, Avocat à la Cour, rétorque que la date du 27 février 1999 ne peut être celle de la remise de somme d’argent au titre de la campagne 1999-2000 puisque celle-ci a débuté en octobre 1999.
Qu’il explique que toutes les campagnes agricoles débutent au plus tôt en octobre de l’année en cours de sorte qu’il est impossible qu’il ait reçu de l’argent en février 1999 pour la campagne 1999-2000 qui n’avait pas encore commencé.
Que par ailleurs, dans le jugement civil n 53 du 28 avril 2005 le même premier juge rappelant les prétentions de SALHAB TARECK, gérant de la SCCABO, mentionne que ce dernier a soutenu avoir arrêté les comptes avec lui (appelant) le 27 février 1999.
Que ce n’est donc pas le 27 février 1999 qu’il lui a été remis la somme de 5 890 920 F réclamée.
Que cette créance est douteuse.
Que mieux, le même premier juge pour dire que sa (appelant) dette envers l’intimée est de 723 680 F motive ainsi sa décision; » que ne rapportant ni la preuve qu’une nouvelle dette est née après la sommation de payer servie au demandeur, ni que le paiement de la somme de 3 500 000 F a été fait pour une cause autre que le remboursement de la dette du demandeur, il échet de dire que sa créance à l’endroit dudit demandeur est de 723 680 F ».
Considérant que l’appelant ajoute que suivant l’article 13 de l’acte uniforme OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement de créances, il appartient au bénéficiaire de la décision d’injonction de payer de faire la preuve de sa créance.
Qu’il conclut qu’en l’espèce, nulle part la SCCABO ne rapporte pas la preuve de deux créances distinctes.
Qu’il s’évince de tout ce qui précède que la créance en cause n’est manifestement pas certaine de sorte que la décision d’injonction de payer est injustifiée.
Qu’il échet dès lors à la Cour d déclarer bien fondé le présent appel et de rétracter l’ordonnance d’injonction de payer entreprise.
SUR CE.
EN LA FORME
Considérant que par arrêt avant-dire-droit n 189 du 19 juillet 2006, la Cour d’Appel de céans a déjà déclaré cet appel recevable.
Qu’il convient de s’en rapporter.
AU FOND
Considérant qu’aux termes de l’article 1er du traité OHADA portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, le recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer.
Considérant, en l’espèce, que l’appelant conteste l’existence de la créance litigieuse.
Qu’ainsi, la créance dont le recouvrement est poursuivi n’est pas certaine au sens de l’article 1er du traité OHADA précité.
Que par conséquent, c’est à tort que la SCCABO a obtenu une ordonnance d’injonction de payer.
Considérant que le premier juge a statué dans le sens contraire.
Qu’il convient d’infirmer sa décision sur ce point.
Considérant que l’intimé succombe, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Considérant que l’intimée succombe, il y a lieu de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contrairement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort.
EN LA FORME
S’en rapporte à l’arrêt avant-dire-droit n 189 du 19 juillet 2006 de la Cour d’Appel de c siégé ayant déclaré recevable cet appel.
AU FOND
Infirme le jugement entrepris.
STATUANT A NOUVEAU.
Dit que c’est à tort que la SCCABO a obtenu une ordonnance d’injonction de payer, la créance poursuivie n’étant pas certaine.
Condamne la SCCABO aux dépens.
Prononcé publiquement par le Président de la Chambre les jour, mois et an que dessus.
Lequel Président a signé la minute avec le Greffier.