J-08-112
SURETES – CAUTIONNEMENT – FORMATION – CONTRAT SIGNE DES PARTIES (NON) – MENTION MANUSCRITE (NON) – NULLITE.
Un acte portant obligation de rembourser une somme déterminée en lieu et place du débiteur initial mais qui n’est pas signé des parties et ne porte pas la mention écrite de la main de celui qui s’engage de la somme maximale en toutes lettres et en chiffres ne constitue pas un acte de cautionnement au sens des articles 3 et 4 de l’AUS et doit être annulé.
Article 3 AUS
Article 4 AUS
(Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, JUGEMENT N 404/CIV DU 28 MARS 2005, AFFAIRE PITAMBERT LADHARAM ASNANI (demandeur). Maître KAMDEM MATCHOUANDEM Contre Mme EPANE MBOUMDJA JULIENNE (défenderesse)). Observations Yvette KALIEU.
LE TRIBUNAL
Attendu qu’à la requête des époux PITAMBERG LADHARAM ASNANI et par exploit du 28 Avril 2004 de Maître EBOBE Raphaël, huissier de justice à Yaoundé, acte enregistré à Yaoundé, le 26 Mai 2004 volume 8, Folio 106, Case et Bordereau 2816/2 à quatre milles francs, madame EPANE MBOUMDJA Julienne est assignée devant le Tribunal de Grande Instance de céans, pour s’entendre annuler « l’acte d’engagement pour exécution d’un contrat de prêt sur gage » daté du 26 Novembre 2003, avec toutes les conséquences de droit.
Attendu que régulièrement assignée, la défenderesse ne comparaît ni ne conclut;qu’il échet de statuer par défaut à son égard;Attendu qu’au soutien de leur action, les demandeurs exposent que suivant contrat intitulé « acte d’engagement pour exécution d’un contrat de prêt sur gage » daté du 26 Novembre 2003, Monsieur PITAMBERT LADHARAM ASNANI s’est constitué caution solidaire de son épouse et a pris sur lui l’obligation de « rembourser en lieu et place de son épouse cette somme telle qu’il a été convenu dans le contrat initial ».
Que cet acte est nul car, aux termes de l’article 4 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés, « le cautionnement ne se présume pas, quelle que soit la nature de l’obligation garantie. A peine de nullité, il doit être convenu de façon expresse entre la caution et le créancier. Le cautionnement doit être constaté dans un acte comportant la signature des deux parties et la mention, écrite de la main de la caution, de la somme maximale garantie en toute lettre et en chiffre ».
Qu’il ressort de cette disposition que l’acte sus visé a été établi en violation flagrante des dispositions légales et est par conséquent nul.
Attendu que les développements des demandeurs sont pertinents comme fondés sur les dispositions de l’article 4 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés, prescrites à peine de nullité.
Attendu que le document contesté intitulé « acte d’engagement pour exécution d’un contrat de prêt sur gage » est un acte unilatéral, dépourvu de tout caractère contractuel.
Mais Attendu qu’aux termes de l’article 3 de l’Acte Uniforme OHADA relatif aux sûretés, le cautionnement est un contrat entre la caution qui s’engage et le créancier qui accepte.
Que bien plus, les mentions manuscrites prescrites par l’article 4 de l’acte uniforme sont absentes sur le document.
Que s’agissant des formalités prescrites à peine de nullité, il échet d’annuler le document contesté.
Attendu que la partie qui perd le procès doit supporter les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par défaut à l’égard de la défenderesse, en matière civile et commerciale et en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Reçoit PITAMBERT LADHARAM ASNANI en sa demande;l’y dit fondé.
Annule « l’acte d’engagement pour exécution d’un contrat de prêt sur gage daté du 26 novembre 2003.
Condamne la défenderesse aux dépens.
Observations : Pr KALIEU ELONGO Yvette Rachel, Agrégée des facultés de droit, Université de Dschang ( Cameroun)
Cette décision fait une application rigoureuse des dispositions légales relatives à la formation du contrat de cautionnement.
Bien que le cautionnement soit un contrat unilatéral, car seule la caution s’engage en faveur du créancier, l’AUS exige que le contrat soit signé des deux parties. En l’espèce, il semble que l’acte qui n’était pas d’ailleurs intitulé contrat de cautionnement mais qui en fait comportait un engagement de caution n’était pas signé des deux parties conformément à la loi. Par ailleurs, l’acte ne comportait pas la mention, écrite de la main de la caution, du montant maximum garanti.
Ceci a conduit les juges a annulé l’engagement ainsi pris. La solution peut paraître rigoureuse, mais il s’agit de l’application de la loi même si l’on peut regretter que les juges n’aient pas été suffisamment explicites dans leur motivation.
(Lire de manière générale sur la question : KALIEU ELONGO Yvette Rachel, Les sûretés personnelles dans l’espace OHADA, PUA, collection Vade Mecum 2006).