J-08-132
VOIES D’EXECUTION – SAISIES – SAISIE GAGERIE – CONDITIONS – INDICATION DU MONTANT DES SOMMES GARANTIES (NON) – RETRACTATION DE L’ORDONNANCE (OUI).
L’ordonnance autorisant une saisie gagerie peut être rétractée si elle ne remplit pas toutes les conditions légales notamment si elle n’indique pas le montant des sommes garanties.
(COUR D’APPEL DE L’OUEST, ARRET N 121/CIV DU 22 AOUT 2007, affaire EL HADJ FIFEN SOULE C/ MPONDO Daniel).
LA COUR
Vu le jugement n 02/CIV rendu le 19 Janvier 1999 par le Tribunal de Première Instance de Foumbot.
Vu l’appel interjeté le 14 Mai 1999 par FIFEN SOULE.
Vu l’appel incident interjeté le 05 Novembre 1999 par MPONDO Daniel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu la loi n 015/2006 du 29 Décembre 2006 portant organisation judiciaire.
Vu l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution.
Oui le Président en son rapport.
Oui les parties en leurs conclusions.
Oui le ministère public en ses réquisitions écrites.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Considérant que par requête du 14 Mai 1999, reçue et enregistrée à la présidence de la Cour d’Appel de céans le 26 Mai 1999 sous le numéro 723, HADJ FIFEN SOULE a interjeté appel contre le jugement n 02/CIV, rendu le 19 Janvier par le Tribunal de Première Instance de Foumbot, statuant en matière civile et commerciale, signifié par exploit du 12 Mars 1999 de Maître KEGNE TAGNE Luc Olivier, Huissier de Justice à Foumbot.
Considérant que dans conclusions du 05 Novembre 1999, le sieur MPONDO Daniel a entendu relever appel incident contre la décision sus évoquée.
Considérant que toutes les parties ont conclu par l’intermédiaire de leurs conseils, Maître SEIDOU NGAPOUT et DZEUKOU pour l’appelant principal, Maître DJIEMON pour l’appelant incident;qu’il convient de statuer par arrêt contradictoire sur le mérite de leurs appels tant dans la forme qu’au fond.
EN LA FORME
Considérant que le jugement querellé a été signifié par exploit du 12 Mars 1999 au sieur FIFEN SOULE lequel a par requête du 14 Mai 1999 interjeté appel contre cette décision.
Qu’il y a lieu de déclarer cet appel recevable comme intervenu dans les forme et délai de la loi.
Considérant que FIFEN SOULE, appelant principal, soulève au préalable l’irrecevabilité de l’appel incident de monsieur MPONDO Daniel au motif que cet appel intervenu le 05 Novembre 1999 serait hors délai, en tout cas en violation de l’article 193 alinéa 4 du code de procédure civile et commerciale et par ces mêmes écritures relève l’irrecevabilité de l’appel incident pour insuffisance de consignation.
Considérant également que par lettre du 10 Avril 2001, le sieur FIFEN Soulé a sollicité le rabattement du délibéré pour attendre l’issue de la procédure pénale engagée contre MPONDO Daniel en application du principe « le criminel tient le civil en l’état ».
Qu’il convient d’examiner les exceptions d’irrecevabilité de l’appel incident tirées de la violation de l’article 193 al. 4 du code de procédure civile et commerciale et de l’insuffisance de la consignation et ensuite la demande du sursis à statuer sollicité par FIFEN Soulé.
SUR L’IRRECEVABILITE DE L’APPEL INCIDENT
(…).
SUR L’INSUFFISANCE DE CONSIGNATION
(…).
SUR LE SURSIS A STATUER
(…).
AU FOND
Considérant que le sus nommé au soutien de sa requête d’appel reproche au premier juge d’avoir déclaré la saisie qu’il a fait pratiquer suivant exploit du 05 Août 1998 sur les biens mobiliers du sieur MPONDO Daniel non valable et de l’avoir débouté de sa demande en paiement de la somme de 1 075 000 F représentant les loyers échus et impayés alors que la dette est certaine, le contrat de bail pouvant être écrit ou verbal et d’avoir ordonné la restitution sous astreinte de 4000 F par jour de retard des effets mobiliers saisis et prononcé sa condamnation à payer au susnommé la somme de 400 000 francs CFA à titre de dommages intérêts.
Mais considérant que la saisie conservatoire pratiquée le 30 Juillet 1998 par FIFEN Soulé est absolument irrégulière comme effectuée en violation des dispositions des articles 59 et 64 de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution.
Qu’en effet, l’article 59 dudit acte dispose : « la décision autorisant la saisie conservatoire doit, à peine de nullité, préciser le montant des sommes pour la garantie desquelles la mesure conservatoire est autorisée et préciser la nature des biens sur lesquels elle porte ».
Considérant que l’ordonnance N 25/97 – 98 du 30 Juillet 1998 du Président du Tribunal de Première Instance de Foumbot autorisant la saisie litigieuse est prise en violation du texte susvisé en ce qu’elle n’indique nulle part le montant des sommes qu’elle garantit;que cette omission constitue une nullité d’ordre public de l’ordonnance susvisée;qu’il convient dès lors, sans qu’il soit besoin de s’appesantir sur les autres irrégularités tirées de la violation des dispositions de l’article 64 alinéas 7, 8, 9 et 10 de l’acte uniforme précité, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré non valable la saisie gagerie, substituant ce motif à ceux retenus par le premier juge.
SUR L’APPEL INCIDENT DE MPONDO Daniel
Considérant que le susnommé soutient au moyen de son appel incident que la saisie gagerie pratiquée sur ses biens mobiliers par le sieur FIFEN Soulé est et demeure injustifiée comme fondée sur un défaut de créance prouvée, et qu’en plus, elle a été opérée en vertu d’une autorisation nulle, tirée de la violation de l’article 59 de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution et de l’article 54 du même acte, la saisie ayant été faite avec enlèvement alors que l’ordonnance n 25/OSR/97 – 98 susvisé ne l’avait pas indiqué;qu’il conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a annulé la saisie gagerie mais sollicite par voie de conséquence la réévaluation de l’astreinte à 10 000 F CFA par jour et le relèvement des dommages et intérêts à 5 000 000 F CFA pour la réparation du préjudice moral qu’il a subi du fait de l’enlèvement de ses biens.
Considérant que les arguments développés par sieur MPONDO Daniel sont pertinents et fondés;qu’ils justifient la restitution de ses effets irrégulièrement saisis.
Mais considérant que bien que fondés sur leur principe les montants sollicités tant pour l’astreinte que les dommages intérêts semblent exagérés en leur quantum;que la Cour dispose des éléments suffisants d’appréciation pour fixer l’astreinte à 5 000 F CFA par jour de retard et la réparation des préjudices subi à 1.500 000 F CFA de dommages intérêts.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en formation collégiale et à l’unanimité des voix, contradictoirement, en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Reçoit EL HADJ FIFEN SOULE en son appel principal et MPONDO Daniel en son appel incident.
AU FOND
Rejette la demande de sursis à statuer formulée par EL HADJ FIFEN SOULE.
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré non valable la saisie pratiquée par EL HADJ FIFEN SOULE sur les biens de MPONDO Daniel et ordonné la restitution desdits biens à celui – ci sous astreinte.
Infirme par contre ledit jugement sur les intérêts civils de MPONDO Daniel et sur le montant de l’astreinte.
Statuant à nouveau sur ces seuls points.
Alloue à MPONDO Daniel à titre de dommages intérêts la somme de 1.500 000 (un million cinq cent mille) francs.
Condamne EL HADJ FIFEN SOULE à lui payer cette somme.
Le condamne également à 5 000 francs d’astreinte par jour de retard pour compter de la notification du présent arrêt et aux entiers dépens.
(…).