J-08-137
1) – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE – EXPLOIT DE SIGNIFICATION – MENTIONS – MONTANT DES FRAIS DE GREFFE (OUI) – NULLITE DE L’EXPLOIT (NON).
2) – SOCIETES COMMERCIALES – SARL – SARL UNIPERSONNELLE (NON) – –DETTES SOCIALES – RESPONSABILITE DU GERANT (NON).
3) – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE – OPPOSITION – REQUETE – NON RESPECT DES CONDITIONS – EXCEPTION – RECEVABILITE PAR LE JUGE D’OPPOSITION (NON).
1). L’exploit de signification d’une ordonnance d’injonction de payer ne peut pas être déclarée nulle lorsque, contrairement aux allégations du demandeur, cet exploit précise le montant des frais de greffe et que, par ailleurs, la signification de l’exploit a pour but de porter la décision à la connaissance de l’autre partie afin de faire courir les délais d’opposition.
2). Lorsqu’une société est constituée sous forme de SARL, à moins qu’il s’agisse du SARL unipersonnelle, le gérant de cette société ne peut répondre des dettes sociales.
3). L’exception d’irrecevabilité de la requête ayant fondé une ordonnance d’injonction de payer, irrecevabilité fondée sur l’absence d’indication du siège et de forme sociale, de la profession et du domicile des défendeurs ne peut plus être soulevée devant le juge saisi de l’opposition à ordonnance d’injonction de payer lorsque la requête a déjà été reçue par le premier juge.
(Tribunal de Grande Instance de la Mifi, jugement n 36/CIV du 17 Juin 2008, affaire AMOUR DU NDE SARL, WOUAPI Evariste contre CAMI TOYOTA).
LE TRIBUNAL
Vu l’acte introductif d’instance.
Vu les articles 9 et suivants de l’Acte Uniforme OHADA n 06 portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution.
Vu la loi N 2006/015 du 29 Décembre 2006 portant organisation judiciaire.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Attendu que par exploit en date du 12 Décembre 2006 enregistré à Bafoussam le 11 janvier 2007 aux droits de quatre mille francs de Maître TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam, la société AMOUR DU NDE SARL, dont le siège social est à Douala, et le sieur WOUAPI Evariste, homme d’affaires demeurant à Nkongsamba ayant pour conseil Maître Fidèle TEPPI KOLOKO, avocat au barreau du Cameroun ont donné assignation à la société Cameroon Motors Industries, ci -après désignée CAMI TOYOTA, d’avoir à se trouver et comparaître par devant le Tribunal de céans statuant en matière civile et commerciale pour est -il dit dans l’exploit :
Bien vouloir annuler l’exploit de signification de l’ordonnance attaquée comme ayant méconnu l’article 8 de l’Acte Uniforme OHADA n 06.
Bien vouloir rétracter et annuler l’ordonnance n 04/INJ/06 – 07 du 03 Novembre 2006 dont opposition.
Statuant sur la recevabilité de la requête aux fins d’injonction de payer.
Vu l’article 4 de l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution OHADA.
Bien vouloir déclarer irrecevable, icelle contenant des manquements sanctionnés d’irrecevabilité par le texte susvisé.
Condamner la Cameroon Motors Industries aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître TEPPI KOLOKKO Fidèle, avocat aux offres et affirmations de droit.
Attendu que la CAMI TOYOTA avait pour conseil la SCP NOUGWA et KOUONGUEING, et que toutes les parties ont conclu.
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement.
Attendu que les demandeurs allèguent au soutien de leur opposition.
Que par ordonnance n 04/INJ/06 – 07 rendue le 03 Novembre 2006, le Président du Tribunal de céans les a enjoint d’avoir à payer à la CAMI TOYOTA la somme FCFA= 13.125.989= en principa,l augmentée des frais accessoires d’un montant de FCFA= 2.150 000=, soit au total FCFA= 15.275.989=, outre les intérêts de droit et les dépens de la procédure.
Que ladite ordonnance leur a été signifiée le 06 Décembre 2006, et qu’ils formulent opposition sur la base de plusieurs moyens :
La nullité de l’exploit de signification de l’ordonnance.
La nullité de l’ordonnance elle – même et.
L’irrecevabilité de la requête aux fins d’injonction de payer.
Qu’en violation de l’article 8 de l’acte uniforme susvisé, l’exploit de signification ne précise pas le montant des frais de greffe, ce qui constitue une omission substantielle sanctionnée par la nullité.
Que s’agissant de la nullité et la rétractation de l’ordonnance querellée, cette décision fait injonction à la fois à AMOUR DU NDE et à WOUAPI Evariste, alors que ce dernier n’est que gérant de la société AMOUR DU NDE, et sa personne ne saurait se confondre à celle de la société dont il n’est que le gérant statutaire.
Que sur ce point, l’ordonnance encourt annulation et rétractation.
Que par ailleurs, il ressort aussi bien de la correspondance du 29 Août 2006 à eux adressée que de la requête et de l’ordonnance d’injonction de payer que la créance est de FCFA= 13.129 989=.
Que de cette somme il faut soustraire celle de FCFA=4.990 000= versée respectivement le 14 Septembre 2006, 08 Novembre 2006 et 06 Décembre 2006 telles qu’en font foi les pièces, ce qui ramène la créance à FCFA= 8.135.989= en principal au jour de l’assignation.
Que sur ce point, l’ordonnance encourt rétractation et annulation.
Qu’en ce qui concerne les frais accessoires et les dépens, le juge des requêtes les a fixé à FCFA=2.150 000= alors que les seuls frais engagés sont ceux de la levée de l’expédition et de la signification de l’ordonnance, lesquels ne dépassent pas 40 000 F.
Que la notion de « frais accessoires » n’existe pas en droit, les seuls frais nécessités pour une procédure civile étant connus sous le nom de dépens que seul le juge du fond peut être amené à prononcer.
Qu’en conséquence, l’ordonnance encourt rétractation et annulation.
Que s’agissant de l’irrecevabilité de la requête pour violation de l’article 4 de l’Acte Uniforme susvisé, ce texte dispose que « la requête… contient, à peine d’irrecevabilité : les noms, prénoms, profession et domiciles des parties ou, pour les personnes morales, leur forme, dénomination et siège social ».
Qu’à la lecture de la requête, ni la forme, ni le siège social de la société AMOUR DU NDE ne sont indiqués, de même que la profession et le domicile de WOUAPI Evariste.
Qu’en délivrant une ordonnance d’injonction de payer dans ces conditions, le juge des requêtes a exposé nécessairement son ordonnance à l’annulation et à la rétractation.
Attendu que pour s’opposer à l’action, la société CAMI TOYOTA a conclu de déclarer l’opposition recevable comme faite dans les forme et délai légaux, mais de la déclarer non fondée.
Que la nullité de l’exploit de signification n’entraîne pas la caducité de l’ordonnance d’injonction de payer.
Que la conséquence, c’est que le délai d’opposition n’a pu courir.
Que par ailleurs, WOUAPI Evariste ne saurait décliner sa responsabilité, en ce qu’il a été régulièrement interpellé dans des procès verbaux de signification des 04 et 27 Septembre 2006, et sa réponse formulée à cette occasion ne fait pas de différence entre sa personne et celle de AMOUR DU NDE.
Qu’en ce qui concerne le principal de la créance, il n’est pas contesté qu’après l’obtention de l’ordonnance et sa signification, les débiteurs ont payé la somme de FCFA= 4.990 000= qui devra nécessairement être déduite du principal de la créance réclamée.
Que par ailleurs, la résistance des demandeurs à honorer leur engagement continue à les pénaliser, qu’elle sollicite l’exécution provisoire de la décision à intervenir, s’agissant d’une créance contractuelle exigible.
SUR LA RECEVABILITE DE L’OPPOSITION
Attendu que l’article 10 de l’Acte Uniforme OHADA n 06 dispose que l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer.
Attendu qu’en l’espèce, l’ordonnance a été signifiée le 06 Décembre 2006 et l’opposition formée six jours plus tard, le 12 Décembre 2006.
Qu’il y a lieu de la déclarer recevable.
Sur la nullité tirée de la violation de l’article 8.
Attendu que les demandeurs soutiennent que l’exploit de signification doit être déclaré nul, car il ne précise pas le montant des frais de greffe, ce qui constitue une omission substantielle.
Mais attendu que le montant des frais est bien fixé dans l’ordonnance.
Attendu par ailleurs que la signification a pour but de porter la décision à la connaissance de l’autre partie, pour faire courir les délais d’opposition.
Que la nullité de l’exploit n’entraîne pas la caducité de l’ordonnance, mais empêche le délai d’opposition de courir.
Que ce moyen n’étant pas fondé, il y a lieu de le rejeter.
1) Sur sa nullité et la rétractation de l’ordonnance
Attendu que les demandeurs sollicitent la rétractation de l’ordonnance, au motif qu’elle a fait injonction à la fois à AMOUR DU NDE et à WOUAPI Evariste, alors que ce dernier n’est que gérant statutaire.
Attendu qu’il ressort du contrat produit aux débats que la vente était passée entre CAMI TOYOTA et AMOUR DU NDE.
Qu’il ressort des statuts de cette dernière qu’il s’agit d’une Société à Responsabilité Limitée, et WOUAPI Evariste est l’un des actionnaires.
Attendu qu’un actionnaire ne peut répondre des dettes de la société que s’il s’agit d’une société unipersonnelle.
Qu’il y a lieu de mettre WOUAPI Evariste hors de cause.
2) Sur les frais et accessoires et les dépens
(…).
3) Sur l’irrecevabilité de la requête
Attendu que les demandeurs ont soulevé l’irrecevabilité de la requête pour violation de l’article 4 de l’Acte Uniforme OHADA, au motif que la requête aux fins d’injonction de payer ne contient ni la forme, ni le siège social de la société AMOUR DU NDE, de même que la profession et le domicile de WOUAPI Evariste n’y sont pas indiqués.
Mais attendu que la requête a déjà été reçue par le Président du Tribunal qui a rendu l’ordonnance, qu’il y a lieu de rejeter ce moyen.
4) Sur le montant de la créance
(…).
5). Sur l’exécution provisoire
Attendu que CAMI TOYOTA a sollicité l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Attendu qu’en l’espèce, il s’agit d’une créance contractuelle exigible, le débiteur ayant même sollicité des moratoires qu’il n’a pas respectés.
Que les conditions requises par la loi n 92/008 du 14 Août 1992 fixant les conditions d’exécution des décisions de justice sont bien remplies.
Qu’il y a lieu de faire droit à la demande.
Attendu que les dépens sont à la charge de la partie qui succombe, qu’il y a lieu de les mettre à la charge de AMOUR DU NDE SARL.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière civile et commerciale, en premier ressort, en collégialité et à l’unanimité.
EN LA FORME
Déclare l’opposition recevable comme faite dans les forme et délai légaux.
AU FOND
La déclare partiellement fondée.
Met WOUAPI Evariste hors de cause.
Condamne AMOUR DU NDE SARL à payer à la Cameroon Motors Industries (CAMI TOYOTA) la somme FCFA= 9.285.989= (neuf millions deux cent quatre vingt cinq mille neuf cent quatre vingt neuf francs) ventilée comme suit :
Principal de la créance 7.135.989 F.
Intérêts de droit 713. 600 F.
Frais 1.436.400 F.
Ordonne l’exécution provisoire de la présente à concurrence de FCFA= 7.849.589= (sept million huit cent quarante neuf mille cinq cent quatre vingt neuf francs) nonobstant appel.