J-08-138
INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE – SIGNIFICATION A PERSONNE (NON) – ACTE D’EXECUTION (OUI) – OPPOSITION – DELAI – NON RESPECT – FORCLUSION – IRRECEVABILITE.
Pour être recevable, l’opposition à une ordonnance d’injonction de payer doit être faite dans le délai légal qui est de 15 jours suivant la signification de la décision portant injonction de payer. Toutefois, lorsque la signification de l’ordonnance n’a pas été faite personnellement, ce délai court à compter du premier acte signifié à personne ou de la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou partie les biens de débiteur.
Ainsi, lorsqu’il apparaît, comme dans cette espèce qu’il n’y a pas eu signification à personne mais qu’une saisie attribution de créance a été opérée et qu’elle constituait ainsi la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre les biens du débiteur, l’opposition devait être formée dans les 15 jours suivants cette mesure. Faute d’avoir respecté ce délai, l’opposition formée doit être déclarée irrecevable pour cause de forclusion.
(Tribunal de Grande Instance de la Mifi, jugement n 18/CIV du 15 Avril 2008, Succession PENUIE Etienne contre TENE Pascal).
LE TRIBUNAL
Vu l’exploit introductif d’instance.
Vu les lois et règlements en vigueur.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Et après en avoir délibéré conformément à la loi.
Attendu que suivant exploit du 03 Juillet 2006 de Maître TCHAMOKOUIN, huissier de justice à Bafoussam, enregistré à Bafoussam le 04 Août 2006, volume 02, folio 211, casier Bd 4519/Bd n 264/1 aux droits de quatre mille francs suivant quittance n 0014779 du 04 Août 2006 et à la requête de la dame veuve PENUIE Marquise, représentante de la succession PENUIE Etienne domiciliée à Bafoussam et ayant pour conseil Maîtres KAMGA et KADJE, avocats à Bafoussam, a fait opposition aux fins d’injonction de payer avec assignation au sieur TENE Pascal, entrepreneur domicilié à Bafoussam pour est, il dit dans cet exploit :
- recevoir l’opposition de la dame veuve PENUIE Marquise parce que faite dans les forme et délai légaux.
– constater que la succession de PENUIE représentée par dame veuve PENUIE Marquise n’est redevable d’aucune somme d’argent envers sieur TENE Pascal.
– constater que la prétendue créance de sieur TENE Pascal est sérieusement contestable.
– constater en outre que la créance dont s’agit ne remplit pas les conditions de certitude, de liquidité et d’exigibilité.
– rétracter purement et simplement l’ordonnance n 04/INJ/2004 – 2005.
– condamner sieur TENE Pascal aux entiers dépens.
Attendu que toutes les parties comparaissent et concluent.
Qu’il échet de statuer contradictoirement à leur égard.
Attendu que la demanderesse expose qu’en date du 22 Juin 2006, sieur TENE Pascal a fait servir itératif commandement en exécution de l’ordonnance n 04/INJ/2004 – 2005 rendue le 02 Décembre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de la Mifi sommant l’opposante à lui payer la somme de 6.755 000 Francs;que ladite ordonnance ne lui a jamais été servie en tant que représentante de la susdite succession.
Que c’est à bon droit qu’elle s’y oppose conformément à l’article 10 de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution.
Que PENUIE Etienne est décédé le 09 Octobre 2002 ceci bien avant l’obtention de l’ordonnance critiquée qui ne peut pas de ce fait recevoir signification.
Que plus est, elle n’a jamais reçu signification de la présente ordonnance sauf l’itératif commandement du 22 Juin 2006 à elle régulièrement servi.
Que sieur TENE Pascal entend être le créancier de la succession PENUIE Etienne dont elle est la représente sans pouvoir en rapporter la preuve.
Que ladite créance est sérieusement contestable motif pris de ce qu’elle ne remplit pas les conditions légales y afférentes prévues par l’article 1er de l’Acte Uniforme sus évoqué.
Attendu que pour faire échec à l’action de la demanderesse, sieur TENE Pascal sous la plume de son conseil Maître TASSA André, fait valoir que feu PENUIE Etienne lui est redevable d’une somme de 6.755 000 Francs comme le certifie le bon de reconnaissance de dette daté du 05 Novembre 2001 enregistré le 15 Novembre 2004, volume 02, Folio 69 case Bd 2535/01 aux droits de 10.120 francs suivant quittance n 0063435 25268 du 03 Novembre 2004.
Que jusqu’à ce jour, la succession PENUIE Etienne n’a pas cru devoir s’exécuter vis – à – vis de lui malgré de nombreuses démarches par lui entreprises.
Que même la sommation de payer à lui servie en date du 28 Janvier 2002 du ministère de Maître NGUETSOP Paul Prosper, huissier de justice à Bafoussam n’a pu l’ébranler;que la susdite créance remplit les conditions légales requises.
Qu’au soutien de son action, il a produit une reconnaissance de dette légalisée et enregistrée du 05 Novembre 2001, une ordonnance d’injonction de payer datée du 15 Décembre 2004 du ministère de Maître TCHOUA Yves et un procès verbal de saisie attribution de créance du 24 Janvier 2005 de Maître TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam.
Attendu qu’en réplique, la demanderesse soutient que la requête aux fins d’injonction de payer initiée par le défendeur est un acte constitutif de faux motif pris de ce qu’elle est signée et présentée par lui le 17 Novembre 2004, c’est-à-dire deux ans après le décès de PENUIE Etienne.
Que ce dernier était parfaitement au courant dudit décès puisque ayant pris part aux obsèques subséquentes.
Que c’est deux ans après le décès de PENUIE Etienne qu’il a introduit une procédure en injonction de payer en faisant croire qu’il est encore en vie.
Que la reconnaissance de dette sus évoquée présente des incohérences de part la signature qui y est apposée et les écrits y figurant.
Qu’en initiant cette procédure, le défendeur a manifestement violé les dispositions de l’article 1er de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution qui dispose que » la procédure d’injonction de payer ne peut être ouverte que pour les créances certaines, liquides et exigibles », ce qui n’est pas le cas de celle-ci parce que entachée de fraude.
Que la signification constitue aussi un cas de fraude parce que sieur TENE Pascal connaissait le domicile du de cujus;qu’animé d’une mauvaise foi, il l’a signifié à la mairie.
Attendu qu’en réplique, le défendeur fait valoir que n’ayant trouvé personne au domicile de la demanderesse et en application de la loi, la signification de l’ordonnance d’injonction de payer n 04/inj/2004 – 2005 rendue le 08 Décembre 2004 par le Président du Tribunal de Grande Instance de Bafoussam et la dénonciation de la saisie attribution de créance ont été faites auprès du délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Bafoussam, lequel a procédé à leur affichage au babillard de ladite Mairie.
Qu’à défaut de la signification à personne, le point de départ de la signification des délais était indubitablement « la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou partie les biens du débiteur ».
Que la première mesure exercée à ces fins, est la saisie attribution de créances dont procès verbal dressé le 24 Janvier 2005.
Que du 24 Janvier 2005 au 03 Juillet 2006, le délai de 15 jours imparti par la loi est largement dépassé;que le décès du débiteur ne saurait éteindre sa dette;qu’il est question d’une action dirigée contre la succession PENUIE Etienne qui devra régler son passif;que la susdite reconnaissance de dette a été légalisée par devant les autorités de police judiciaire compétentes;que ledit acte a été légalisé le 05 Novembre 2001 puis enregistré le 15 Novembre 2004;que la susdite dette est connue dans son montant et échue depuis le 11 Juillet 2002.
Attendu que revenant à la charge, la demanderesse soutient que le dernier acte d’exécution contre sa personne est l’itératif commandement à elle servi en date du 22 Juin 2006, soit moins de 15 jours après l’opposition avec assignation intervenue le 03 Juillet 2006.
Attendu qu’en date du 22 Juin 2006, sieur TENE Pascal a fait servir un itératif commandement à dame PENUIE Marquise, en exécution de l’ordonnance n 04/inj 2004-2005 rendue le 08 Décembre 2004 par le Président du Tribunal de Grande Instance de la Mifi sommant l’opposante à payer la somme de 6.755 000 francs.
Mais attendu qu’aux termes de l’article 10 de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’exécution « l’opposition doit être formée dans les 15 Jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer. Le délai est augmenté éventuellement des délais de distance.
Toutefois si le débiteur n’a pas reçu personnellement la signification de la décision portant injonction de payer, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai de 15 jours suivant le premier acte signifié à personne ou à défaut suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur.
Que dans le cas d’espèce n’ayant trouvé personne à domicile, ni parent, ni serviteur et n’ayant pu remettre la copie au chef de quartier ou à voisin consentant à la recevoir, la signification de la susdite ordonnance d’injonction de payer et la dénonciation de la saisie – attribution de créance y afférente ont été faites à mairie le 15 décembre 2004.
Qu’à défaut de signification à personne, le point de départ pour la computation des délais est la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur.
Que ladite saisie-attribution de créance dont procès verbal dressé le 24 Janvier 2005 constitue la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou partie les biens de la succession PENUIE Etienne.
Que du 24 Janvier 2005 au 03 Juillet 2006 date de l’opposition, le délai de 15 jours imparti par la loi est largement dépassé.
Qu’il échet en conséquence de déclarer l’action de la dame PENUIE Marquise irrecevable pour forclusion.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière civile et commerciale, en premier ressort, en collégialité et à l’unanimité des membres.
Déclare irrecevable l’opposition à injonction de payer faite par la succession PENUIE Etienne, pour cause de forclusion.
(…).