J-08-141
1) – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE – OPPOSITION – TRIBUNAL – COMPETENCE – RESPECT DES REGLES DE COMPETENCE (OUI) – RECEVABILITE (OUI).
2) – INJONCTION DE PAYER –ORDONNANCE –OPPOSITION – RESPECT DES DELAIS (OUI) – RECEVABILITE DE L’OPPOSITION (OUI).
3) – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE – OPPOSITION – ASSIGNATION – ASSIGNATION A TOUTES LES PARTIES (OUI) – –RESPECT DES DELAIS D’ASSIGNATION (OUI) – RECEVABILITE DE L’OPPOSITION (OUI).
L’opposition à une ordonnance d’injonction de payer pour être recevable doit être portée devant la juridiction compétente dont le président a rendu la décision d’injonction de payer. Est donc recevable l’opposition formée devant le tribunal de grande instance dont le président a rendu l’ordonnance.
L’opposition contre une ordonnance d’injonction de payer doit être formée dans le délai légal de 15 jours après la signification de l’ordonnance contestée. Lorsqu’il ressort de l’exploit d’assignation qui est l’acte par lequel le tribunal est saisi que ce délai a été respecté, doit être rejeté le moyen fondé sur l’irrecevabilité de l’opposition pour non respect des délais.
Lorsqu’il ressort de l’exploit d’assignation que contrairement aux allégations du défendeur l’assignation a été signifiée en même temps au défendeur à l’opposition et au tribunal et que cette assignation a respecté le délai de comparution prévu par la loi, le moyen fondé sur la violation de l’article 11 doit être rejeté.
Tribunal de Grande Instance de la Mifi, JUGEMENT N 94/CIV DU 20 NOVEMBRE 2007, AFFAIRE, TCHOUTEZO Jean Pierre représentant Ets TCHOUTEZO Contre AFFRILAND FIRST BANK S.A.
LE TRIBUNAL
Vu la Loi N 2006/015 du 29 Décembre 2006 portant organisation judiciaire.
Vu l’ordonnance N 23/INJ/2004-2005 rendue le 23 Juillet 2005 par monsieur le président du Tribunal de Grande Instance de la Mifi à Bafoussam.
Vu l’exploit d’assignation en date du 18 Août 2005 enregistré à Bafoussam le 14 Septembre 2005 aux droits de quatre milles francs de maître TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam, le sieur TCHOUTEZO Jean Pierre, représentant de l’Établissement TCHOUTEZO a fait donner assignation à Afriland First Bank et au greffier en chef du tribunal de Grande Instance de la Mifi à Bafoussam, d’avoir à se trouver et comparaître devant ledit tribunal statuant en matière civile et commerciale pour est-il dit dans l’exploit.
Recevoir le requérant en son opposition comme faite dans les formes et délais légaux.
Procéder à une tentative de conciliation des parties conformément à la loi.
Donner acte au requérant de ce qu’il conteste formellement la créance alléguée.
Dire qu’un simple relevé de compte contesté ne remplit pas le critère de certitude et liquidité de la créance tel qu’exigée par l’article 2 de l’Acte Uniforme OHADA N 6.
En conséquence, rétracter l’ordonnance N 23/INJ/2004-2005 rendue le 22 Juillet 2005 par Monsieur le président du Tribunal de Grande Instance de la Mifi à Bafoussam.
Condamner Afriland First Bank aux entiers dépens.
Attendu que TCHOUTEZO Jean Pierre, demandeur à l’opposition a conclu par la plume de son conseil maître TCHAPPI Emile, et que la société défenderesse a répliqué par les soins de maître MBODA SADJO;qu’il y a lieu de statuer contradictoirement.
Attendu qu’au soutien de son opposition le demandeur allègue.
Qu’il est titulaire du compte N 003007995801 18 ouvert dans les livres de Afriland First Bank, agence de Bafoussam.
Que dans ce compte il a eu des facilités bancaires à hauteur de six millions de francs CFA.
Que les reçus en sa possession attestent qu’il a réglé sa dette à hauteur de plus de trois millions de francs.
Qu’il conteste formellement le solde de 6.137 070 francs CFA qui lui sont réclamés.
Que dans tous les cas, la créance de Afriland First Bank est contestée parce que non liquide et ne remplit pas les conditions de l’article 2 de l’Acte Uniforme OHADA N 6 ce d’autant plus que l’intervention d’un expert est nécessaire pour arrêter le montant exact de débit du compte.
Que la seule pièce produite n’est qu’un relevé de compte contesté établi unilatéralement par la banque.
Que l’action est mal dirigée, en ce que l’ordonnance attaquée a été prise contre TCHOUTEZO Jean Pierre, alors qu’elle aurait due être dirigée contre les Ets TCHOUTEZO, personne morale différente de TCHOUTEZO Jean Pierre.
Que la créance ne remplit pas la triple condition exigée par la loi qui exige une créance certaine, liquide et exigible.
Que la créance est fortement contestée, les relevés de compte produits par Afriland First Bank ayant établis unilatéralement, les paiements effectués par les Ets TCHOUTEZO n’ayant pas été pris en compte.
Que la créance en cause ne peut être recouvrée au moyen de la procédure d’injonction de payer.
Attendu que pour faire échec à l’opposition, maître MBODA SADJO pour le compte de Afriland First Bank conclut à l’irrecevabilité.
Qu’il a soulevé la violation des articles 9, 10 et 11 de l’Acte Uniforme OHADA N 6.
Qu’il résulte de la combinaison des articles 9 et 10 sus visés que la juridiction compétente doit être saisie dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’ordonnance contestée.
Que dans le cas d’espèce, l’opposition a été servie à la défenderesse le 13 jours après la signification de l’ordonnance, mais la juridiction n’a été saisie qu’en date du 06 Septembre 2005 tel qu’en fait foi le reçu de consignation délivré par le greffier en chef.
Qu’il est incontestable que c’est le paiement de la consignation qui conditionne l’enrôlement de toute cause et partant, constitue la saisine de la juridiction compétente.
Que le paiement de la consignation en date du 06 septembre 2005 par sieur TCHOUTEZO Jean Pierre constitue une saisine tardive, soit plus de 30 jours après la signification de l’ordonnance contestée, en violation flagrante des articles 9 et 10 sus visés.
Que s’agissant de la violation de l’article 11 de l’Acte Uniforme OHADA N 6, ce texte dispose que l’opposant est tenu à peine de déchéance et dans le même acte que celui de l’opposition de signifier son recours à toutes les parties et au greffe de la juridiction ayant rendu la décision.
Que l’ordonnance contestée a été signifiée au demandeur le 05 Août 2005, et c’est en date du 05 Septembre que ce dernier a signifié son opposition au greffier en chef comme le veut la loi.
SUR LA VIOLATION DE L’ARTICLE 9 DE L’ACTE UNIFORME OHADA N 6
Attendu que cet article dispose que le recours ordinaire contre la décision d’injonction de payer est l’opposition, celle-ci est portée devant la juridiction compétente dont le président a rendu la décision d’injonction de payer.
Attendu que dans le cas d’espèce, sieur TCHOUTEZO a bien formé opposition, et l’a porté devant le Tribunal de Grande Instance de la Mifi dont le président a rendu l’ordonnance.
Attendu que cet article pour être appliqué n’a pas besoin d’une combinaison avec l’article 10 suivant qui traite des délais de l’opposition.
Que l’opposant l’a scrupuleusement respecté, d’où le moyen pris de sa violation n’est pas fondé.
SUR LA VIOLATION DE L’ARTICLE 10 DE L’ACTE UNIFORME OHADA N 6.
Attendu que la société défenderesse a soutenu que l’opposition doit être déclarée irrecevable comme tardive.
Que l’opposant lui a signifié son opposition en date du 18 Août 2005, soit le 13ème jour après signification de l’ordonnance, et le tribunal n’a été saisi que le 06 Septembre 2005 tel qu’il ressort du reçu de la consignation qui conditionne l’enrôlement de toute cause, et partant constitue la saisine de la juridiction.
Mais attendu que le tribunal est saisi par assignation, et non par le reçu de la consignation.
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier que l’opposant a reçu signification de l’ordonnance en date du 05 Août 2005 tel qu’en fait foi l’exploit d’assignation.
Que cet autre moyen n’étant pas fondé, il y a lieu de le rejeter.
SUR LA VIOLATION DE L’ARTICLE 11 DE L’ACTE UNIFORME OHADA SUS VISE
Attendu que cet article dispose que l’opposant est tenu, à peine de déchéance et dans le même acte que celui de l’opposition de signifier son recours à toutes les parties et au greffe de la juridiction ayant rendu la décision d’injonction de payer.
De servir assignation à comparaître devant la juridiction compétente à une date fixe qui ne saurait excéder le délai de trente jours à compter de l’opposition.
Attendu qu’il résulte bien de l’exploit d’assignation sus visé que l’opposant a formé son recours le 08 Août 2005, et l’a signifié à Afriland First Bank et au greffe du tribunal de céans et a servi assignation à comparaître devant le tribunal à l’audience du 06 Septembre 2005.
Que cet assignation ayant respecté le délai de trente jours pour comparaître devant la juridiction compétente, l’article 11 sus visé n’a nullement été violé.
Qu’il y a lieu de rejeter ce moyen.
Attendu que tous les moyens soulevés par la défense étant ainsi évacués, il y a lieu de recevoir l’opposition et de rétracter l’ordonnance entreprise.
SUR LES DEPENS
Attendu que les dépens sont supportés par la partie qui succombe;qu’il y a lieu de les mettre à la charge de la défenderesse.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière civile et commerciale, en premier ressort et à l’unanimité des membres du collège.
Déclare TCHOUTEZO Jean Pierre recevable en son opposition.
L’y dit fondée.
En conséquence, rétracte l’ordonnance n 23/INJ/2004-2005 rendu le 22 Juillet 2005 par le tribunal de céans.