J-08-229
sAISIE ATTRIBUTION – DEMANDE DE MAINLEVEE – Compétence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA : oui.
Demande de mainlevée de la saisie-attribution ordonnée en application de l’article 1134 du code civil : sans objet.
Le litige qui oppose les parties portant sur la mainlevée d’une saisie-attribution des créances, et ladite procédure d’exécution forcée étant régie par les articles 154 à 172 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, il s’ensuit que ledit litige relève de la compétence de la Cour de céans.
En ordonnant, en application de l’article 1134 du Code Civil, la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse, alors que suite au paiement effectué le 25 juin 2003 à l’OPVN par la CCA, conformément à l’article 164 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, contenant les seules dispositions susceptibles d’être appliquées à ladite saisie, lequel avait éteint l’obligation de la CCA, tiers saisi, à l’égard de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, débiteur saisi, et de celui-ci à l’égard de l’OPVN, créancier saisissant, ainsi qu’il résulte de l’article 165 de l’Acte uniforme sus indiqué, la demande de mainlevée formée par la SONIBANK après ledit paiement qui a mis fin à la saisie-attribution des créances litigieuse, était devenue sans objet et donc irrecevable, l’arrêt attaqué n’est pas légalement justifié;d’où il suit qu’il doit être cassé.
Article 154 AUPSRVE ET SUIVANTS
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), Arrêt n 09/2007 du 15 mars 2007, Audience publique du 15 mars 2007, Pourvoi n 035/2004/PC du 16 mars 2004, Affaire : OFFICE DES PRODUITS VIVRIERS DU NIGER dit OPVN (Conseils : La SCPA YANKORI-DJERMAKOYE-YANKORI, Avocats Associés à la Cour). contre SOCIETE NIGERIENNE DE BANQUES dite SONIBANK (Conseils : Maître MANOU KIMBA et la SCPA MANDELA, Avocats à la Cour), en présence de : La CELLULE DES CRISES ALIMENTAIRES dite CCA. Etat du Niger (Conseils : Maîtres CISSE Ibrahim et Issouf BAADHIO, Avocats à la Cour), EL HADJ NASSIROU AMBOUKA (Conseil : Maître NIANDOU KARIMOU, Avocat à la Cour). Recueil de Jurisprudence n 9. Janvier/Juin 2007, p. 71. Le Juris Ohada n 4/2007, p. 14.
LA COUR Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant, en son audience publique du 15 mars 2007, où étaient présents :
– MM. Antoine Joachim OLIVEIRA, Président, rapporteur;
– Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge;
– Boubacar DICKO, Juge;
– Et, Maître ASSIEHUE Acka, Greffier.
Sur le pourvoi enregistré le 16 mars 2004 au greffe de la Cour de céans, sous le numéro 035/2004/PC et formé par la SCPA YANKORI-DJERMAKOYE-YANKORI, Avocats à la Cour, au nom et pour le compte de l’OFFICE DES PRODUITS VIVRIERS DU NIGER dit OPVN, Établissement public à caractère industriel et commercial, BP 474 Niamey (Niger), agissant par l’organe de son Directeur général, Monsieur ISSAKA Hassan Djégoulé, dans la cause qui l’oppose à la SOCIETE NIGERIENNE DE BANQUES dite SONIBANK, société anonyme, BP 891 Niamey, représentée par son Directeur général, ayant pour Conseils Maître MANOU KIMBA et la SCPA MANDELA, Avocats à la Cour, et en présence de la CELLULE DES CRISES ALIMENTAIRES dite CCA – Etat du Niger, représentée par son coordonnateur Monsieur BAKARI SAIDOU, ayant pour Conseils Maîtres CISSE IBRAHIM et Issouf BAADHIO, Avocats à la Cour, et de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, Commerçant, BP 11349 Niamey, ayant pour Avocat, Maître NIANDOU KARIMOU, Avocat à la Cour.
en cassation de l’Arrêt n 110 rendu le 05 novembre 2003 par la Cour d’Appel de Niamey (Niger), et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort :
Reçoit les appels de la SONIBANK et de EL H. NASSIROU AMBOUKA réguliers en la forme.
Annule l’ordonnance n 156 du 2/07/2003 pour violation de la loi.
Évoque et statue à nouveau :
Reçoit la SONIBANK en sa demande.
Ordonne mainlevée de la saisie pratiquée sur la somme de 140.260.200 FCFA entre les mains de la CELLULE DES CRISES ALIMENTAIRES.
Reçoit EL H. NASSIROU AMBOUKA en sa demande de délai de grâce.
AU FOND :
La rejette.
Rejette enfin toute autre demande.
Condamne l’OPVN et EL H. NASSIROU AMBOUKA aux dépens ».
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur Antoine Joachim OLIVEIRA, Président :
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure, que la Société Nigérienne de Banques dite SONIBANK a accordé le 3 janvier 2003, un crédit à court terme d’un montant de 100 000 000 de francs CFA à EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, à qui la Cellule des Crises Alimentaires dite CCA, sise à la Primature, avait octroyé, le 30 décembre 2002, le marché n 10/FSA/2002/BNS de livraison de mil à l’Office des Produits Vivriers du Niger dit OPVN;que EL HADJ NASSIROU AMBOUKA s’est engagé, le 30 décembre 2002, envers la SONIBANK pour que le règlement de l’intégralité dudit marché, par la CCA, Autorité contractante, soit irrévocablement domicilié à son compte n 251 0005061/21 ouvert à la SONIBANK;que le 12 mai 2003, l’OPVN, muni d’un titre exécutoire constitué d’un procès-verbal de conciliation signé le 10 février 2003 par EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, qui y avait reconnu devoir à l’OPVN, la somme de 113 000 000 de francs CFA, assorti de la formule exécutoire apposée le 09 mai 2003 par le Président du Tribunal Régional de Niamey (Niger), a pratiqué entre les mains de la CCA, une saisie-attribution des avoirs de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, dénoncée à ce dernier le 19 mai 2003;que le 25 juin 2003, la CCA, à laquelle l’OPVN avait présenté un certificat de non-contestation, à lui délivré le 19 juin 2003 par Monsieur le Greffier en chef du Tribunal Régional de Niamey et attestant qu’aucune contestation de ladite saisie n’avait été formée dans le mois suivant la dénonciation de celle-ci au débiteur, a procédé au paiement à l’OPVN, d’une somme d’un montant de 98 048.522 FCFA à la Banque Commerciale du Niger, dans le compte de ses avocats, la SCPA YANKORI-DJERMAKOYE-YANKORI, par ordre de paiement émis par la BANK OF AFRICA, sur ordre de la FSA/CMC/ETATS DONATEURS et par débit de son compte;que le 19 juin 2003, la CCA a adressé à la SONIBANK, la lettre n 0510/CAB/PM/CCA, demeurée sans réponse, par laquelle elle informait la banque de ce qu’elle était dans l’impossibilité de virer au compte de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, la somme de 152.880 019 FCFA, représentant le montant intégral du marché de livraison de produits vivriers qu’elle avait octroyé à ce dernier, en raison de ce qu’une partie de cette somme, soit 140.260.200 FCFA, fait l’objet de saisie conservatoire, à moins que la banque lui transmette une décision contradictoire;que le 26 juin 2003, la SONIBANK a assigné en référé, EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, débiteur saisi, l’OPVN, créancier saisissant, et la CCA, tiers saisi, devant le Président du Tribunal Régional de Niamey, afin que celui-ci ordonne la mainlevée de ladite saisie-attribution;que par Ordonnance de référé n 156 du 02 juillet 2003, le Juge des référés sus désigné a déclaré irrecevable la requête de la SONIBANK;que par Arrêt n 110 du 05 novembre 2003, objet du présent pourvoi, rendu sur appels de la SONIBANK et de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, formé contre l’Ordonnance précitée, la Cour d’Appel de Niamey a annulé ladite décision et ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par l’OPVN à l’encontre de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, entre les mains de la CCA.
Sur l’exception d’incompétence de la Cour de céans soulevée par la SONIBANK
Attendu que la SONIBANK, se fondant sur l’alinéa 1er de l’article 14 du Traité institutif de l’OHADA, qui dispose que « La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage assure dans les Etats Parties, l’interprétation et l’application commune du présent Traité, des Règlements pris pour son application et des Actes uniformes », et sur l’alinéa 2 du même article, selon lequel « Saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats Parties, dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité, à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales », soutient que le contrôle de l’application des dispositions nationales, en l’occurrence, celles du Code nigérien des Marchés Publics, relevant des juridictions nationales, la Cour de céans est incompétente pour connaître du présent litige.
Mais, attendu que le litige qui oppose les parties porte sur la mainlevée d’une saisie-attribution des créances;que ladite procédure d’exécution forcée étant régie par les articles 154 à 172 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, il s’ensuit que ledit litige relève de la compétence de la Cour de céans;qu’il y a donc lieu de rejeter l’exception d’incompétence soulevée par la SONIBANK.
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’Arrêt attaqué, d’avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse, alors que ladite demande formée le 26 juin 2003 par la SONIBANK, soit plus d’un mois après la dénonciation faite le 19 mai 2003 au débiteur saisi, n’a pas été introduite conformément aux articles 169 et 170, alinéa 1 de l’Acte uniforme précité, qui disposent respectivement que « les contestations sont portées devant la juridiction du domicile ou du lieu où demeure le débiteur. Si celui-ci n’a pas de domicile connu, elles sont portées devant la juridiction du domicile ou du lieu où demeure le tiers saisi », et qu’ » à peine d’irrecevabilité, les contestations sont portées devant la juridiction compétente, par voie d’assignation, dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur », et qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel de Niamey aurait violé les dispositions précitées.
Vu l’article 165 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, selon lequel « Dans la limite des sommes versées, ce paiement éteint l’obligation du débiteur et celle du tiers saisi ».
Attendu que la mainlevée est une mesure qui ne peut être ordonnée après le paiement du créancier saisissant par le tiers saisi, lequel met fin à la procédure de saisie-attribution des créances.
Attendu qu’en ordonnant, en application de l’article 1134 du Code Civil, la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse, alors que suite au paiement effectué le 25 juin 2003 à l’OPVN par la CCA, conformément à l’article 164 de l’Acte uniforme susvisé contenant les seules dispositions susceptibles d’être appliquées à ladite saisie, lequel avait éteint l’obligation de la CCA, tiers saisi, à l’égard de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, débiteur saisi, et de celui-ci à l’égard de l’OPVN, créancier saisissant, ainsi qu’il résulte de l’article 165 précité, la demande de mainlevée formée par la SONIBANK après ledit paiement qui a mis fin à la saisie-attribution des créances litigieuse, était devenue sans objet et donc irrecevable, il suit que l’arrêt attaqué n’est pas légalement justifié;qu’il y a lieu de le casser et d’évoquer sans qu’il soit besoin de statuer sur le deuxième moyen.
Sur l’évocation
Attendu que la SONIBANK et EL HADJ NASSIROU AMBOUKA ont interjeté appel de l’Ordonnance de référé n 156 rendue le 02 juillet 2003 par le Président du Tribunal Régional de Niamey, et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement et contradictoirement en matière de référé et en premier ressort.
Déclare irrecevable la requête de la SONIBANK et la demande de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA.
Dit qu’il n’y a pas lieu à dépens ».
Attendu que par requête en date du 26 juin 2003, la SONIBANK a sollicité la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée sur la créance de 140.260.200 FCFA auprès de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA, et que cette somme lui soit versée dans son intégralité.
Attendu que pour les mêmes motifs que ci-dessus développés ayant déterminé la Cour de céans à casser l’Arrêt attaqué, il y a lieu de ne pas faire droit à la demande précitée et de confirmer par suite, l’Ordonnance de référé n 156 rendue le 02 juillet 2003 par le Président du Tribunal Régional de Niamey, en ce qu’elle a déclaré irrecevable ladite requête formée par la SONIBANK.
Attendu que l’OFFICE DES PRODUITS VIVRIERS DU NIGER dit OPVN ayant succombé, doit être condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Rejette l’exception d’incompétence soulevée par la Société Nigérienne de Banques dite SONIBANK.
Casse l’Arrêt de référé n 110 rendu le 05 novembre 2003 par la Cour d’Appel de Niamey (Niger), en ce qu’il a ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par l’OFFICE DES PRODUITS VIVRIERS DU NIGER dit OPVN, le 12 mai 2002 au préjudice de EL HADJ NASSIROU AMBOUKA entre les mains de la CELLULE DES CRISES ALIMENTAIRES – Etat du Niger.
Confirme l’Ordonnance de référé n 156 rendue le 02 juillet 2003 par le Tribunal Régional de Niamey, en ce qu’elle a déclaré irrecevable la requête de la SOCIETE NIGERIENNE DE BANQUES dite SONIBANK, à fin de mainlevée de ladite saisie.
Condamne l’OFFICE DES PRODUITS VIVRIERS DU NIGER dit OPVN aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
– le Président;
– le Greffier.