J-08-270
DROIT COMEMRCIAL GENERAL – bail COMMERCIAL – REMBOURSEMENT DES FRAIS DE TRAVAUX AU PRENEUR – NECESSITE D’UNE AUTORISATION DU BAILLEUR (NON) – NATURE DES TRAVAUX – CONDITION SUFFISANTE POUR OBTENIR LE REMBOURSEMENT.
Doit être censuré l’arrêt d’une Cour d’Appel qui a subordonné le remboursement des frais de travaux à l’autorisation du bailleur, car seuls les travaux sont soumis à cette autorisation et non leur remboursement.
Cour Suprême, Chambre judiciaire, Formation civile. Arrêt n 447 du 08 juillet 2004. Affaire : M. KOUAME ADUO Luc (Conseil : Me Philippe KOUDOU-GBATE c/ EL BARIE Mohamed. Actualités Juridiques n 49/2005, p. 223.
LA COUR
Vu l’exploit aux fins de pourvoi en cassation du 31 octobre 2003.
Vu les pièces du dossier.
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation ou erreur dans l’application ou l’interprétation de la loi :
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué (Abidjan, 28 février 2003), que courant 1992, KOUAME ADUO Luc signait un contrat de location avec BAKAYOKO Abdoulaye, le propriétaire d’un local que le locataire exploita sous forme de bar-restaurant;qu’à l’entrée du locataire dans les lieux loués, il fit d’abord des travaux de 300 000 francs et plus tard, d’autres travaux;que EL BARIE Mohamed, devenu propriétaire, refusait de percevoir les loyers, au motif que le locataire aurait changé la destination des lieux loués, et engageait une procédure de référé-expulsion, sans succès, contre le locataire, aussi bien en première instance qu’en appel;que KOUAME DUO Luc assignait, à son tour, le bailleur devant le Tribunal d’Abidjan, pour avoir paiement de la somme de 15.244 490 francs représentant le montant du remboursement des frais d’aménagement, et ce, avant de quitter les lieux, conformément au souhait du propriétaire;que le tribunal faisait entièrement droit à la demande, par jugement n 613/Civ du 10 décembre 2001, alors que la Cour d’Appel d’Abidjan, par l’arrêt n 230 du 28 février 2003, présentement attaqué, infirmait le jugement et, statuant à nouveau, déboutait KOUAME ADUO Luc de sa demande.
Attendu que le demandeur au pourvoi reproche à la Cour d’Appel, d’avoir violé l’article 99 du Traité OHADA relatif au droit commercial, en ce qu’elle laisse sous-entendre que le paiement des travaux était soumis à l’autorisation du bailleur, mais également, que cette autorisation devrait être formalisée par écrit, alors que, selon le pourvoi, ce texte n’a pas prévu la forme que doit revêtir cette autorisation, mais également, au regard de l’alinéa 2 de l’article 99, le défaut d’accord ne prive pas le demandeur de toute action en remboursement.
Attendu, en effet, que le juge d’appel a subordonné le remboursement des frais des travaux à l’autorisation du bailleur, alors que ce sont les travaux qui doivent être autorisés;qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a violé le texte visé au moyen;qu’il y a lieu de casser et annuler l’arrêt attaqué, et d’évoquer.
Sur l’évocation
Attendu que le preneur réclame le paiement de la somme de 15.244 490 francs, au titre des impenses pour les travaux.
Attendu que les travaux n’ont pas été réalisés avec l’autorisation du bailleur;que cependant, les frais des travaux de construction et d’aménagement pourront être remboursés;qu’en effet, l’article 99 alinéa 2 du Traité OHADA portant droit commercial dispose que : « à défaut d’accord entre les parties, le preneur pourra saisir la juridiction compétente, dès l’expiration du bail à durée déterminée non renouvelé ».
Attendu, aux dires de KOUAME ADUO Luc, que les travaux ont été réalisés sans aucune réserve de la part du bailleur;que c’est donc vainement que EL BARIE Mohamed se réfugie derrière le fait qu’il n’a pas autorisé les travaux;que le nouveau bailleur étant tenu dans les mêmes termes du contrat de location, que l’ancien bailleur envers le locataire, EL BARIE Mohamed ne peut pas valablement refuser de payer, alors surtout que celui-ci, n’ayant pas produit de mémoire en réplique, ne conteste pas que les travaux ont été réalisés avec ou sans son autorisation préalable;que lesdits travaux ont été évalués par les conclusions de l’expertise immobilière, à 15.244,490 francs;qu’il y a lieu d’homologuer le rapport d’expertise et de condamner EL BARIE Mohamed à payer à KOUAME ADUO Luc, la somme de 15.244 490 francs représentant le montant des frais des travaux et aménagements faits.
PAR CES MOTIFS
Casse et annule l’arrêt attaqué.
Évoquant.
Condamne EL BARIE Mohamed à payer la somme de 15.244 490 francs à KOUAME ADUO Luc.
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Président : M. WOUNE BLEKA.
Conseillers : M. AGNINI YOUSSOUF (rapporteur).
M. VEBOUA.
Greffier : Me N’GUESSAN Germain.