J-09-27
Voies d’exécution – Saisie immobilière – Demande en distraction de l’immeuble saisi – Forme de la requête – Acte d’avocat – Inobservation – Irrecevabilité.
Voies d’exécution – Saisie immobilière – Sommation faite aux débiteurs saisis de prendre communication du cahier des charges dans le délai prescrit – Régularité de la procédure (OUI).
Toute contestation ou demande incidente relative à une poursuite de saisie immobilière formulée postérieurement à la signification du commandement devant être formée par simple acte d’avocat, aux termes de l’article 298 de l’Acte uniforme portant voies d’exécution, la demande en distraction de l’immeuble saisi par les débiteurs doit être déclarée irrecevable, dès lors que leurs observations ont été faits sous forme orale, au mépris desdites dispositions.
Les formalités légales prescrites par l’article 269 de l’Acte uniforme portant voies d’exécution ont été accomplies et il y a lieu de déclarer régulier le commandement à fin de saisie immobilière, ainsi que tous actes subséquents et notamment la procédure de saisie immobilière, dès lors que le créancier poursuivant a régulièrement sommé les débiteurs saisis de prendre communication du cahier des charges dans le délai prescrit.
Par conséquent, il échet d’ordonner la continuation des poursuites.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) 1ère Chambre, Arrêt n 004 du 28 février 2008. Affaire : Compagnie Bancaire de l’Atlantique Côte d’Ivoire dite COBACI c/ 1) Époux A. 2) Époux M. Le Juris-Ohada n 2 Avril-Mai-Juin 2008, p. 6. Le recueil de jurisprudence de la CCJA, n 11, janvier-juin 2008, p. 82. Actualités juridiques, n 60-61, p. 422.
Sur le pourvoi enregistré le 13 avril 2005 au greffe de la Cour de céans sous le n 015/2005/PC et formé par Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour, demeurant à l’immeuble SIPIM, 5ème étage, 24 Bd Clozel, 01 BP 1306 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la Compagnie Bancaire de l’Atlantique Côte d’Ivoire dite COBACI SA, au capital de 3.002.008.950 FCFA, dont le siège social est à Abidjan-Plateau, immeuble Atlantique, dans une cause l’opposant, d’une part, à Monsieur A. et Madame K. épouse A., demeurant à Cocody les 2 Plateaux, quartier SICOGI n 160, 01 BP 283, Cedex 01 Abidjan, et d’autre part, à Monsieur M. et Madame K. épouse M., demeurant à Abidjan Cocody les 2 Plateaux, non loin de la Polyclinique des 2 Plateaux, appartement n 329, 06 BP 755 Abidjan 06.
en cassation du Jugement n 2436/civ/4 rendu le 26 juillet 2004 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau, et dont le dispositif est le suivant :
– « Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort.
Constate le non-respect du délai prévu par l’article 269 de l’Acte uniforme portant voies d’exécution.
Dit que la COBACI était déchue.
En conséquence.
Annule le commandement aux fins de saisie réelle du 11/03/04.
Ordonne la mainlevée de la saisie pratiquée sur l’immeuble, objet du titre foncier n 52.937 de la circonscription foncière de Bingerville.
Dit que la demande en distraction des époux M. est sans objet.
Condamne la COBACI aux dépens ».
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête de pourvoi en cassation annexée au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur le Juge Biquezil NAMBAK
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu les dispositions du Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu que la signification du recours en cassation faite aux époux A. et M. par le Greffier en chef de la Cour de céans par lettre n 247/2005/G5 en date du 28 avril 2005 n’a pas été suivie du dépôt au greffe dans le délai de trois mois prévu à l’article 30 du Règlement de Procédure de ladite Cour, de mémoire en réponse; que le principe du contradictoire ayant été respecté, il y a lieu d’examiner ledit recours.
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure, que dans un litige l’opposant à Monsieur A., la COBACI avait obtenu, par ordonnance d’injonction de payer n 1029/96 du 30 avril 1996, sa condamnation à lui payer la somme principale de 15.973.035 FCFA, outre les intérêts de droit et frais de procédure; que muni de cette décision, devenue définitive, la COBACI avait fait pratiquer une saisie immobilière portant sur des constructions édifiées sur le lot n 2867, objet du titre foncier n 52.937 de la circonscription foncière de Bingerville, dont est concessionnaire provisoire Monsieur A; qu’advenue l’audience éventuelle, les époux M. se prétendant propriétaires, avaient fait des observations orales sollicitant du Tribunal la distraction du bien immobilier précité; que par Jugement n 2436/civ/4 du 26 juillet 2004 dont pourvoi, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau avait déclaré la COBACI déchue, annulé en conséquence le commandement aux fins de saisie réelle du 11/03/04 et ordonné la mainlevée de la saisie pratiquée sur l’immeuble.
Sur le moyen unique
Vu l’article 269 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Attendu qu’il est reproché au jugement attaqué, la violation de l’article 269 de l’Acte uniforme susvisé, en ce qu’il a déclaré la COBACI déchue et annulé la procédure de saisie immobilière diligentée par ses soins, au motif qu’ » après l’acte de dépôt du cahier des charges daté du 23 mars2004, la COBACI n’a adressé aux époux A., aucune sommation dans le délai comme exigé par l’article 269 de l’Acte uniforme portant voies d’exécution », alors que, selon le moyen, la COBACI avait délivré aux époux A., une sommation de prendre communication du cahier des charges par exploit d’huissier en date 23 mars2004, soit le même jour du dépôt du cahier des charges; que pour avoir sommé régulièrement les époux A. de prendre communication du cahier des charges dans le délai de huit jours prévu à l’article 269 susvisé, il ne peut être reproché à la COBACI de l’avoir violé; que par conséquent, le premier juge a fait une mauvaise application ou appréciation de ce texte et exposé son jugement à la cassation.
Attendu que contrairement à ce que retient le jugement attaqué, il appert bel et bien des pièces versées au dossier, que la COBACI a produit une sommation de prendre communication du cahier des charges aux époux A., le mardi 23 mars2004 à 17 h 10 mn, le même jour de l’acte de dépôt du cahier de charges à 16 h 10 mn; qu’il s’ensuit que le premier juge a manifestement erré dans l’appréciation des faits et dans l’application des dispositions de l’article 269 de l’Acte uniforme susvisé; qu’il échet en conséquence, de casser le jugement attaqué et d’évoquer.
Sur l’évocation
Attendu que le 23 mars2004, Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour, Conseil de la COBACI, a, par acte de greffe, déposé le cahier de charges dressé le 22 mars2004 pour parvenir à la vente de l’immeuble, objet du titre foncier n 52.937 de la circonscription foncière de Bingerville et saisi à la requête de la COBACI; que celle-ci explique avoir saisi cet immeuble pour obtenir extinction de sa créance estimée à la somme de 15.973.035 francs dont il constitue la sûreté; qu’elle demande que la procédure de saisie immobilière par elle engagée soit validée, puisque toutes les formalités prescrites par la loi ont été observées.
Attendu que les époux A. à qui sommation a été faite de prendre connaissance du cahier de charges produit par la COBACI n’ont pas déposé de dires et observations comme l’exige la loi.
Attendu que les époux M. sollicitent la distraction de l’immeuble saisi, motif pris de ce qu’ils en sont les propriétaires.
Sur la demande des époux M
Attendu qu’aux termes de l’article 298 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « toute contestation ou demande incidente relative à une poursuite de saisie immobilière formulée postérieurement à la signification du commandement est formée par simple acte d’avocat contenant les moyens et conclusions. Elle est formée, contre toute partie n’ayant pas constitué d’avocat, par requête avec assignation ».
Attendu, en l’espèce, que les époux M., représentés par leur Conseil, n’ont produit aux débats aucun acte d’avocat contenant des moyens et conclusions; qu’ils se sont contentés de faire des observations orales à l’audience éventuelle du 03 mai 2004, à l’effet de solliciter du premier juge, la distraction à leur profit du lot n 2867 du titre foncier n 52.937 de la circonscription foncière de Bingerville.
Attendu que les époux M. ayant fait leurs observations sous forme orale, au mépris des dispositions sus énoncées de l’article 298 de l’Acte uniforme sus indiqué, il y a lieu de les déclarer irrecevables.
Sur la régularité de la procédure de saisie immobilière
Attendu qu’il ressort des pièces versées aux débats, que la COBACI a régulièrement sommé les époux A. de prendre communication du cahier de charges dans le délai de huit jours prescrit par les dispositions de l’article 269 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; que les formalités légales prescrites ayant été accomplies, il y a lieu de déclarer réguliers le commandement à fin de saisie immobilière du 11 mars2004, ainsi que tous les actes subséquents et notamment la procédure de saisie immobilière initiée par la COBACI; qu’il échet d’ordonner la continuation des poursuites et, pour y procéder, de renvoyer la cause et les parties devant le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau.
Attendu que les époux A. ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Casse le Jugement n 2436/civ/4 rendu le 26 juillet 2004 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau.
Déclare irrecevables les observations orales des époux M.
Déclare régulière la procédure de saisie immobilière initiée par la COBACI.
Ordonne la continuation des poursuites et, pour y procéder, renvoie la cause et les parties devant le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau.
Condamne les époux A. aux dépens.
Président : Jacques M’BOSSO.
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