J-09-51
SURETES PERSONNELLES – CAUTIONNEMENT – CAUTION PERSONNELLE ET SOLIDAIRE – EXECUTION D’UN MARCHE – RESILIATION – APPEL DE LA CAUTION – PAIEMENT – ACTION CONTRE LE DEBITEUR PRINCIPAL – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – EXCEPTIONS D’IRRECEVABILITE – REJET – OPPOSITION MAL FONDEE – APPEL.
CAUTION – PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER – DEMANDE EN PAIEMENT DE DOMMAGES-INTERETS – ARTICLE 21 AUS – RECEVABILITE (OUI) – PREUVE DU PREJUDICE (NON) – REJET DE LA DEMANDE – OBLIGATION DE LA CAUTION – DEBITEUR PRINCIPAL – AVIS PREALABLE – VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 19 AUS (NON) – CONFIRMATION DU JUGEMENT.
S’il ne peut être contesté de bonne foi que la créance réclamée par la caution ne satisfait pas aux conditions prescrites aux articles 1 et 2 AUPSRVE, il convient cependant de relever que les dommages-intérêts réclamés par la caution entre dans le champ contractuel des parties suite à la non exécution des engagements du débiteur principal ayant conduit à l’appel de la caution.
Le simple fait pour la caution de ne pas avertir ou mettre en cause le débiteur avant de payer ne suffit pour autant à la priver de son droit de recours contre celui-ci, à moins que le débiteur ne rapporte la preuve qu’au moment du paiement ou postérieurement au paiement, il avait le moyen de faire déclarer la dette éteinte, ou qu’il avait payé dans l’ignorance du paiement de la caution.
Article 1 AUPSRVE ET SUIVANT
Article 8 AUPSRVE
Article 15 AUPSRVE
Article 19 AUS
Article 21 AUS
Article 42 CIMA
(COUR D’APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n 102 du 18 mai 2007, SANOU Mesmin c/ SGBB).
LA COUR
Vu le jugement n 366/ 2006 du 1er mars 2006 du Tribunal de grande instance de Ouagadougou.
Vu l’acte d’appel en date du 07 mars 2006 de monsieur SANOU Mesmin.
Ouï les conclusions de deux parties.
Vu les autres pièces du dossier.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL
Attendu que par acte d’huissier de justice en date du 07 mars 2006 SANOU Mesmin a interjeté appel du jugement rendu le 1er mars 2006.
Attendu que ledit appel a été interjeté dans les formes et délais prévus par l’article 15 de l’Acte uniforme portant organisation des PSRVE et est recevable.
FAITS, PROCEDURES, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par requête aux fins d’injonction de payer en date du 09 août 2005, la Société générale de Banque du Burkina en abrégé SGBB représentée par son directeur général et ayant pour conseil maître Fortuné BICABA exposait au président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou qu’elle est créancière de SANOU Mesmin de la somme de quatre millions cent quatre vingt douze mille huit cent quatre vingt quinze (4.192.895) francs laquelle créance est consécutive à une caution personnelle et solidaire qu’elle a porté à celui-ci en faveur de l’Agence Faso Baara pour l’exécution du marché n T3-BCN-031506-01/95 qui lui a permis d’obtenir auprès de ladite agence le paiement d’une avance de démarrage des travaux; que cependant l’exécution des travaux n’a pas connu la diligence convenue, ce qui lui a valu la résiliation du marché et l’appel de la caution qu’elle est, pour le remboursement à l’agence Faso Baara de la somme de deux millions quatre cent soixante trois cent soixante dix (2.463.370) francs ainsi que les agios et découverts pris par le débiteur qui s’élèvent à sept cent vingt neuf mille cinq cent vingt cinq; qu’outre les sommes suscitées, elle entend voir SANOU Mesmin condamner à lui payer la somme de un million (1 000 000) de francs à titre de dommages-intérêts.
Suite à l’ordonnance d’injonction de payer n 256/05 rendue le 12 août 2005 par le président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, la SGBB a fait signifier à SANOU Mesmin l’injonction de lui payer la somme de quatre millions cent quatre vingt douze mille huit cent quatre vingt quinze (4.192.895) francs en principal le 19 septembre 2005; contre cette ordonnance, SANOU Mesmin a par acte d’huissier de justice en date du 26 septembre 2005 formé opposition; par jugement n 113/2006 du 1er mars 2006 le Tribunal a :
– déclaré SANOU Mesmin recevable en son opposition;
– rejeté les exceptions d’irrecevabilité soulevées par SANOU Mesmin;
– condamné SANOU Mesmin à payer à la SGBB la somme de trois millions cent quatre vingt dix sept mille huit cent quatre vingt quinze (3.197.895) francs en principal outre les intérêts de droit à compter du prononcé du jugement;
– débouté la SGBB du surplus de ses réclamations
– condamné SANOU Mesmin aux dépens.
Le 07 mars 2006, SANOU Mesmin interjetait appel dudit jugement.
Attendu que SANOU Mesmin par l’office de son conseil maître Jean Charles TOUGMA expose que par courrier daté du 1er avril 1998 adressé à la SGBB, le directeur général de l’Agence Faso Baara a fait état de la résiliation du marché à lui concédé, et a demandé paiement de la caution concédée par la SGBB, laquelle s’est acquittée de ladite caution sans qu’il ne soit avisé; qu’après une première ordonnance d’injonction de payer la somme de trois millions cent quatre vingt dix sept mille huit cent quatre vingt quinze (3.197.895) francs annulée le 15 juin 2005 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou pour violation de l’article 4 de l’Acte uniforme portant organisation de PSRVE, il recevait à nouveau le 19 septembre 2005, une autre ordonnance d’injonction de payer portant sur la somme de quatre millions cent quatre vingt douze mille huit cent quatre vingt quinze (4.192.895) francs dont un million (1 000 000) de francs à titre de dommages-intérêts.
Attendu qu’il soutient que ladite ordonnance doit être annulée aux motifs qu’il y a violation des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme portant organisation des PSRVE en ce que la créance réclamée est incertaine du fait qu’il a été inclus des dommages-intérêts qui ne peuvent être recouvrés par la procédure d’injonction de payer; qu’il fait valoir par ailleurs que la SGBB a aussi violé l’article 19 a12 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés qui fait obligation à la caution d’aviser le débiteur avant tout paiement sous peine de perdre son droit de recours contre lui; qu’il s’en suit que le jugement mérite annulation et la condamnation de l’intimé à lui payer la somme de sept cents mille (700 000) francs au titre des frais non compris dans les dépens.
Attendu qu’en réplique la SGBB par la plume de son conseil maître Fortuné BICABA sollicite la confirmation du jugement attaqué; qu’elle fait observer que c’est à tort que l’appelant, pour voir annuler le jugement, soutient qu’il y a violation des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme portant organisation des PSRVE alors même que les articles 5 et 8 de la même loi permettent au président du Tribunal d’apprécier et de fixer des dommages-intérêts mais aussi obligent le créancier à préciser le montant des intérêts réclamés dans les actes signifiés au débiteur; qu’au surplus le jugement querellé ne contient guerre condamnation à payer un quelconque dommages intérêts.
Attendu aussi qu’il relève que l’avis préalable à donner au débiteur principal avant paiement prévu à l’article 19 al 2 de l’Acte uniforme portant organisation de sûretés invoqué par l’appelant ne peut trouver application dans le cas d’espèce en ce que l’article 58 du décret n 96-59 du 07 mars 1996 portant réglementation générale des marchés publics prévoit que les « cautionnements définitifs sont inconditionnels, irrecevables, et payables sur simple demande du bénéficiaire »; qu’il sollicite la confirmation du jugement attaqué et la condamnation de l’appelant au paiement en sa faveur de la somme de un million cinq cents mille (1.500 000) francs au titre des honoraires et frais exposés.
SUR CE,
Attendu qu’il est fait grief au jugement attaqué d’avoir reçu la demande de paiement de dommages intérêts dans une procédure d’injonction de payer et ce, sur le fondement de l’article 21 de ‘Acte uniforme portant organisation des sûretés, alors même que l’injonction de payer est une procédure spéciale régie par les articles 1 et 2 de l’Acte uniforme portant organisation de PSRVE aux termes desquels seules les créances d’origine contractuelle qui sont certaines, liquides et exigibles peuvent y être recouvrées; qu’ainsi les dommages-intérêts n’ayant pas été prévus et déterminés dans la convention des parties ne peuvent être réclamés dans une procédure d’injonction de payer.
Attendu qu’il ressort de la lecture combinée des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme portant organisation des PSRVE que le recouvrement d’une créance certaine, liquide, exigible et ayant une cause contractuelle peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer.
Attendu qu’il est constant tel qu’il ressort des pièces du dossier notamment des correspondances n 00090 et 00091 du 22 janvier et 1er avril 1998 que la SGBB s’est portée caution personnelle et solidaire de SANOU Mesmin directeur de l’entreprise SETE qui a été attributaire d’un marché de l’Agence Faso Baara; que l’exécution des travaux n’a pas connu la diligence convenue, ce qui a valu la résiliation du marché et l’appel de la caution la SGBB pour le remboursement de l’avance reçue par SANOU Mesmin; qu’il ne peut être contesté de bonne foi que la créance réclamée par la SGBB ne satisfait pas aux conditions prescrites aux articles suscités; qu’il convient aussi de relever que les dommages-intérêts réclamés par l’intimé entre dans le champ contractuel des parties suite à la non exécution des engagements de l’appelant ayant conduit à l’appel de la caution qu’est l’intimé.
Attendu que de la lecture combinée des dispositions de l’article 8 de l’Acte uniforme portant organisation de PSRVE et de l’article 21 de l’Acte uniforme portant organisation de sûretés, il ressort que la caution qui a payé a, outre le recours personnel contre le débiteur principal pour ce qu’elle a payé en principal, en intérêts de cette somme et en frais engagés, la possibilité de réclamer des dommages-intérêts.
Attendu ainsi que c’est à bon droit que les premiers juges ont reçu la demande en paiement de dommages-intérêts de l’intimée tout en l’ayant débouté aux motifs qu’elle n’a pas rapporté la preuve du préjudice subi par elle.
Attendu qu’il est reproché par ailleurs au jugement attaqué d’avoir violé les dispositions de l’article 19 al 2 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés qui fait obligation à la caution d’aviser le débiteur avant tout paiement sous peine de perdre son droit de recours contre lui.
Attendu qu’en relevant que le simple fait pour la caution de ne pas avertir ou mettre en cause le débiteur avant de payer ne suffit pour autant à la priver de son droit de recours entre celui-ci, à moins que le débiteur ne rapporte la preuve qu’au moment du paiement ou postérieurement au paiement, il avait le moyen de faire déclarer la dette éteinte, ou qu’il avait payé dans l’ignorance du paiement de la caution, les premiers juges méritent d’être soutenus en cette motivation; que ne l’ayant pas fait, l’appelant se trouve mal fondé à invoquer la violation de l’article suscité.
Attendu que s’il est établi tel qu’il ressort des dispositions de l’article 21 de l’Acte uniforme portant organisation de sûretés que la caution a un recours personnel contre le débiteur principal en ce qui concerne le principal, intérêts et frais payés par elle, et qu’elle peut également réclamer des dommages-intérêts pour le préjudice par elle subi du fait des poursuites engagés contre elle, encore faut-il rapporter la preuve de ce préjudice; qu’en l’espèce ladite preuve n’a pas été rapportée par l’intimée, de même que celle des frais exposés.
Attendu qu’il convient également de rejeter la demande de frais exposés par l’appelant celui-ci ayant succombé.
Attendu que de ce qui précède il y a lieu de confirmer le jugement attaqué.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort.
En la forme
Déclare recevable l’appel de SANOU Mesmin.
Au fond
Confirme le jugement attaqué.
Déboute la SGBB du surplus de sa demande.
Condamne SANOU Mesmin aux dépens.