J-09-52
SURETES – CONVENTION – NANTISSEMENT DE MARCHE PUBLIC – REFERE – DEMANDE D’ANNULATION – ORDONNANCE D’INCOMPETENCE – APPEL.
JUGE DU FOND – ASSIGNATION EN INTERPRETATION – ASSIGNATION MAL FONDEE – DEMANDE INCIDENTE EN ANNULATION – EXCEPTION DE LITISPENDANCE – REJET – NANTISSEMENT – VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 63 AUS (OUI) – ANNULATION – APPEL.
EXCEPTION DE LITISPENDANCE – ORDONNANCE DE REFERE – PREJUDICE AU FOND (NON) – EXCEPTION MAL FONDEE – MARCHE ADMINISTRATIF – ARTICLE 63 AUS – NANTISSEMENT (NON) – CONVENTION DES PARTIES – ANNULATION (NON) – DEMANDE EN INTERPRETATION – LETTRES DE COMMANDE – DESSAISISSEMENT – SIGNIFICATION DE LA CONVENTION – ARTICLE 1156 CODE CIVIL – INTENTION DES PARTIES – CONTRAT DE GAGE (OUI) – INFIRMATION DU JUGEMENT – PAIEMENT DES FRAIS EXPOSES – ABSENCE DE DETAILS – REJET DE LA DEMANDE.
Aux termes de l’article 1er AUS, « les sûretés sont les moyens accordés au créancier par la loi de chaque partie ou la convention des parties pour garantir l’exécution des obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ci ».
Dans le cas d’espèce, la convention des parties a été faite pour garantir l’exécution des obligations. Dès lors, même si le marché administratif ne figure pas dans la liste des biens (corporels ou incorporels) susceptibles d’être nantis dressée par l’article 63 AUS, la convention des parties ne peut être annulée. Toutes les formalités afférentes au gage ayant été respectées, il convient de dire que la convention signée entre les parties est un contrat de gage.
Article 24 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 464 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 1156 CODE CIVIL BURKINABÈ ET SUIVANT
(COUR D’APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n 053 du 16 mars 2007, Financière du Burkina (FIB) c/ OUEDRAOGO Fatimata & CHU Yalgado OUEDRAOGO).
LA COUR
Vu le jugement n 130/06 du 22 mars 2006 du Tribunal de grande instance de Ouagadougou.
Vu l’acte d’appel en date du 24 mars 2006 de la Financière du Burkina (FIB) SA.
Vu les autres pièces du dossier.
Ouï les conclusions des deux parties.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL
Attendu que par acte d’huissier en date du 24 mars 2006, la Financière du Burkina (FIB) SA a interjeté appel du jugement du 22 mars 2006 par lequel le Tribunal de grande instance de Ouagadougou a :
– au fond déclaré mal fondée l’exception de litispendance soulevée par le FIB et l’a rejetée;
– déclaré mal fondée l’assignation de la FIB et l’a rejetée;
– déclaré bien fondée la demande incidente de dame OUEDRAOGO Fatimata et a annulé le nantissement de marché public du 15 février 2005 pour violation de l’article 63 de l’Acte uniforme OHADA.
Attendu que l’appel a été interjeté dans les formes et délais légaux prescrits par la loi; qu’il y a lieu de le déclarer recevable.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Attendu que la FIB par les conclusions de son conseil maître Frédéric LOMPO demande l’annulation ou l’infirmation du jugement querelle; qu’à l’appui de ses prétentions il soutient que Madame OUEDRAOGO Fatimata avait assigné la FIB devant la juridiction de référé qui avait rendu une ordonnance pour déclarer son incompétence le 27 juin 2005; qu’elle a relevé appel de cette ordonnance d’incompétence le 29 juin 2005 devant la juridiction du Premier président de la Cour d’appel de Ouagadougou; que la FIB soulève donc une exception de litispendance sur la demande d’annulation de la convention du 15 février 2005; que subsidiairement elle demande à la Cour de constater que la convention du 15 février 2005 constitue bel et bien un gage; que les parties ont procédé à la signification de la sûreté conformément à l’article 50 de l’Acte uniforme qui définit les modalités particulières du gage; que toutes les formalités prévues par les dispositions des articles 44 à 62 régissant le gage ont été respectées; qu’en outre le premier juge au lieu d’interpréter a dénaturé la convention des parties en méconnaissant l’article 24 du code de procédure civile.
Attendu que OUEDRAOGO Fatimata par les conclusions de son conseil maître Moussa SOGODOGO et en réplique soutient que la saisine du juge des référés ne fait pas obstacle la saisine du juge du fond; qu’il demande à la Cour de rejeter l’exception de litispendance en confirmant le jugement sur ce point; qu’en ce qui concerne la demande en interprétation de la FIB, c’est à bon droit qu’en l’absence d’indication des clauses ambiguës par le demandeur à l’interprétation, le premier juge a rejeté la demande d’interprétation; que par contre la demande d’annulation du nantissement est bien fondée; que dans l’article 63 de l’Acte uniforme sur le droit des sûretés le marché administratif n’est pas énuméré; qu’il ne peut donc être nanti; que si malgré tout le nantissement venait à être déclaré régulier il demande son annulation, la Financière du Burkina n’ayant pas exécuté les termes du contrat de financement, et déclarer le nantissement caduc pour inexistence de l’obligation de garantie d’exécution à laquelle le nantissement a consenti; qu’il y a lieu également de condamner la Financière du Burkina à lui payer la somme de six cent mille (600 000) francs au titre des frais non compris dans les dépens.
Attendu qu’en réplique le conseil de la FIB, maître Frédéric LOMPO réagit sur la prétendue caducité de la sûreté; que OUEDRAOGO Fatimata a signé le 08 février 2005 un billet à ordre portant sur la somme de vingt millions huit vingt six mille (20.826.000) francs à son profit; qu’au regard des dispositions de l’article 1132 du code civil, elle ne peut se dégager qu’en prouvant soit qu’elle a payé, soit que cette somme ne lui a pas été remise; que sa prétention est mal fondée; qu’en ce qui concerne la convention des parties l’article 1 de l’Acte uniforme OHADA a été violé et le jugement doit être infirmé; que d’autre part la convention des parties est parfaite au regard des dispositions de l’article 1108 du code civil; qu’il prie la Cour d’interpréter la convention signée entre les parties et dire qu’il s’agit d’un contrat de gage, toutes les formalités prévues aux articles 44 à 62 de l’Acte uniforme OHADA sur les sûretés ayant été respectées; qu’il demande aussi de condamner OUEDRAOGO Fatimata au paiement de la somme de sept cent mille (700 000) francs au titre de l’honoraire fixe, au titre des frais de procès.
En réplique également aux répliques de la FIB, OUEDRAOGO Fatimata par son conseil maître Moussa SOGODOGO revient pour soutenir que le nantissement consenti est caduc; que le contrat n’a pas lui-même été exécuté.
MOTIFS DE LA DECISION SUR LE FOND
Sur l’exception de litispendance
Attendu que la FIB demande l’infirmation de la décision de premier juge en ce qu’il a rejeté l’exception de litispendance qu’il a soulevé; que Madame OUEDRAOGO Fatimata doit se désister de son appel avant de former sa demande incidente que le Tribunal de grande instance saisi ne peut préjuger de la décision du premier président de la Cour d’appel.
Attendu cependant que l’instance de référé d’où découle l’ordonnance de référé ne préjudicie pas au fond; que la saisine du juge des référés ne fait pas obstacle à la saisine du juge au fond; qu’en effet selon l’article 464 du code de procédure civile « l’ordonnance de référé est une décision provisoire, rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures provisoires »; qu’il convient donc de rejeter l’exception de litispendance comme étant mal fondée.
Sur la demande incidente en annulation du nantissement
Attendu que Madame OUEDRAOGO Fatimata demande reconventionnellement l’annulation de la convention du 15 février 2005 ayant pour objet le nantissement du marché public dont elle a été adjudicataire au niveau de l’hôpital Yalgado OUEDRAOGO.
Attendu qu’aux termes de l’article 1er de l’Acte uniforme OHADA portant sur l’organisation des sûretés « les sûretés sont les moyens accordés au créancier par la loi de chaque partie ou la convention des parties pour garantir l’exécution des obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ci »; que la convention des parties en date du 15 février 2005 a été faite pour garantir l’exécution des obligations; que même si dans l’article 63 de l’Acte uniforme sur le droit des sûretés énumérant les titres susceptibles d’être nantis, le marché administratif ne figure pas, la convention des parties ne peut être annulée; qu’il n’y a donc pas lieu à annuler la convention du 15 février 2005.
Sur la demande en interprétation de la FIB
Attendu que la FIB demande à la Cour d’interpréter la convention du 15 février 2005 sur la base de l’article 24 du code de procédure civile.
Attendu que suivant contrat de prêt en date du 15 février 2005, Madame OUEDRAOGO Fatimata est redevable de la somme de vingt million huit cent vingt six mille (20.826.000) francs CFA à la FIB; qu’aux termes des dispositions de l’article 1156 du code civil, « on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes ».
Attendu qu’en se dessaisissant des originaux des lettres de commande ou profit de la FIB et en procédant à la signification de la convention au CHU-YO et non à une inscription de la sûreté au registre du commerce et du crédit mobilier, il est constant que les parties ont entendu constituer un gage au profit de la FIB; que de plus l’article 1157 du code civil ajoute que : « lorsqu’une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l’entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet que dans le sens avec lequel elle n’en pourrait produire aucun »; que toutes les formalités afférentes au gage ayant été respectées il convient de dire que la convention du 15 février 2005 signée entre les parties est un contrat de gage; que par conséquent le CHU Yalgado OUEDRAOGO est tenu de se libérer de toutes les sommes dues par Madame OUEDRAOGO Fatimata entre les mains de la FIB.
Attendu que la FIB demande de condamner Madame OUEDRAOGO Fatimata au paiement de la somme de sept cents mille (700 000) francs CFA au titre de l’honoraire fixe.
Mais attendu qu’en l’absence d’indications détaillées, la Cour ne peut apprécier le montant demandé; qu’il y a donc lieu de rejeter la demande.
Attendu que celui qui succombe au procès est condamné aux dépens; qu’il convient donc de condamner Madame OUEDRAOGO Fatimata aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort.
En la forme
Déclare recevable l’appel de la FIB
Au fond
Infirme le jugement attaqué.
Statuant à nouveau dit que la convention du 15 février 2005 conclue par les parties est un contrat de gage de créance. En conséquence dit que le CHU Yalgado OUEDRAOGO est tenu de se libérer de toutes les sommes à Mme OUEDRAOGO Fatimata entre les mains de la FIB.
Déboute la FIB des autres chefs de demande portant sur les frais exposés.
Condamne Madame OUEDRAOGO Fatimata aux dépens.