J-09-87
SURETES – SURETES REELLES – CONVENTION DE COMPTE COURANT – CAUTIONNEMENT HYPOTHECAIRE – SAISIE IMMOBILIERE – PROCEDURE DE VENTE IMMOBILIERE – DEMANDES INCIDENTES – DEBITRICE SAISIE – DECISION DE SUSPENSION DES POURSUITES – NULLITE DE LA PROCEDURE DE SAISIE (OUI) – FRAIS EXPOSES – DEMANDE PARTIELLEMENT FONDEE.
Une procédure de vente immobilière initiée et poursuivie après une décision de suspension des poursuites individuelles, doit être déclarée nulle pour violation des dispositions de l’article 9 AUPCAP. Aux termes de cet article, la décision du président de la juridiction compétente saisie suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances désignées par le débiteur et nées antérieurement à ladite décision.
Cette suspension s’applique aussi bien aux demandes en paiement qu’à l’exercice de voie d’exécution, qui intéresse les créanciers munis de sûretés réelles spéciales ou possédant un titre exécutoire.
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBO-DIOULASSO (BURKINA FASO), Jugement n 138 du 26 avril 2006, BCB c/ CISPLUS SARL.
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier.
Vu les conclusions écrites des parties.
Ouï les parties en leurs explications orales.
Vu l’article 09 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives du passif.
En vertu d’une convention de compte courant avec cautionnement hypothécaire entre la Banque Commerciale du Burkina (BCB) et la société Compétences Internet Informatique et de Service Plus (CISPLUS) SARL représentée par son gérant THIOMBIANO Achille Honoré sa caution hypothécaire et madame THIOMBIANO née BA Fanta Ciré intervenante à la convention, établie le 21 octobre 2004 par maître Perpétue COULIDIATI, notaire, et portant paiement de la somme de huit millions neuf cent trente cinq mille huit cent quatre vingt six (8.935.886) francs, la société CISPLUS recevait par acte d’huissier en date du 15 novembre 2005 un commandement tendant à la saisie immobilière; après visa dudit commandement par le receveur de la publicité foncière en date du 21 décembre 2005, un cahier de charges était rédigé et déposé au greffe du Tribunal de céans.
Le 31 janvier 2006, une sommation de prendre communication du cahier des charges était notifiée à la société CISPLUS qui, en réplique, formulait des dires et observations en date du 22 février 2006. A l’audience éventuelle du 15 mars 2006, la BCB désistait de l’instance.
Mais auparavant, soit le 7 février 2006, une autre sommation de prendre connaissance du cahier des charges était notifiée à la société CISPLUS. A l’audience éventuelle du 15 mars 2006 le Tribunal déclarait la procédure régulière et la vente était prévue pour le 19 avril 2006. Par demandes incidentes en date du 04 avril 2006 la société CISPLUS et le Projet d’Appui aux Petites et Moyennes Entreprises (PAPME) demandaient au Tribunal de prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière initiée par la BCB et sa condamnation à leur payer la somme de quatre cent mille (400 000) francs au titre des frais non compris dans les dépens. A défaut, la société CISPLUS demande la distraction de l’immeuble objet de la saisie ou encore la remise de l’audience à une date ultérieure pour nouvelle mise à prix et le PAPME l’annulation de la sommation de prendre communication du cahier des charges du 7 février 2006 ainsi que les actes subséquents.
Au soutient de sa demande, le PAPME invoque le défaut de sommation faite à lui de prendre communication du cahier des charges en tant que créancier inscrit. La société CISPLUS soutient que le commandement est entaché de nullité pour ce qu’il n’a pas été signifié aux tiers détenteurs de l’immeuble et comporte les honoraires d’avocat; Que l’instance est éteinte par le désistement de la BCB outre le fait que la société CISPLUS bénéficie d’une décision de suspension des poursuites individuelles.
La BCB fait valoir en réplique que l’addition des honoraires et frais d’huissier au principal est régulière parce qu’elle résulte d’une convention entre les parties; Qu’ensuite la société CISPLUS est débitrice saisie d’où elle est mal fondée à demander la distraction de l’immeuble; Que la décision de suspension des poursuites individuelles ne lui est pas opposable pour ce qu’elle n’en pas reçu notification.
Relativement aux prétentions du PAPME, la BCB soulève l’irrecevabilité de la constitution d’un même cabinet d’avocats auprès de la société CISPLUS et du PAPME pour conflit d’intérêt entre les deux parties. Pour elle, l’état des droits réels relatifs à l’immeuble saisie n’a pas fait paraître le PAPME comme créancier inscrit.
Attendu qu’aux termes de l’article 9 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives, la décision du président de la juridiction compétente saisie suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances désignées par le débiteur et nées antérieurement à ladite décision; Que cette suspension s’applique aussi bien aux demandes en paiement qu’à l’exercice de voie d’exécution, qui intéresse les créanciers munis de sûretés réelles spéciales ou possédant un titre exécutoire; Qu’en l’espèce la société CISPLUS bénéficie d’une suspension des poursuites individuelles fondée sur le jugement n 014 du 25 janvier 2006 et rendu par le Tribunal de céans; Que cette décision a été soulevée à l’audience éventuelle du 1er mars 2006; Que la procédure de vente immobilière initiée par la BCB a été poursuivie après cette décision; Qu’il sied en conséquence et sans qu’il n’y ait lieu d’examiner d’autres moyens, de la déclarer nulle pour violation de la décision de suspension des poursuites individuelles.
Attendu par ailleurs que la société CISPLUS et le PAPME demandent la condamnation de la BCB à leur payer la somme de quatre cent mille (400 000) francs aux titre des frais exposés non compris dans les dépens; Que cette réclamation trouve son fondement dans l’article 6 de la loi n 028 2004/AN du 8 septembre 2004; Que cependant, son quantum apparaît excessif à cette étape de la procédure, où aucune décision n’est intervenue au fond; Que le Tribunal estime équitable de leur accorder la somme forfaitaire de trois cent mille francs (300 000) représentant les frais d’ouverture de dossier et une partie des honoraires fixes.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort.
Annule la procédure de saisie immobilière pratiquée par la BCB.
Reçoit la demande de frais non compris dans les dépens du PAPME et de la société CISPLUS et la déclare partiellement fondée.
En conséquence condamne la BCB à leur payer la somme totale de trois cent mille (300 000) francs; les déboutes du surplus de leur demande.
Condamne la BCB aux dépens.