J-09-91
VOIES D’EXECUTION – SAISIE IMMOBILIERE – COMMANDEMENT AUX FINS DE SAISIE – SOMMATION DE PAYER – DEPOT DU CAHIER DES CHARGES – SOMMATION DE PRENDRE COMMUNICATION – DIRES ET OBSERVATION – RECEVABILITE (OUI).
SURETES – SURETES PERSONNELLES – CONVENTION DE COMPTE COURANT – AVENANTS – CAUTIONNEMENT HYPOTHECAIRE – EXCEPTION DE NULLITE – HYPOTHEQUE CONVENTIONNELLE – FORME NOTARIEE – CAUTION – MANDAT – ACTE SOUS SEING PRIVE – PROCURATION – FORMALITE REQUISE – ARTICLE 128 ALINEA 2 AUS – IDENTITE DE FORME – NULLITE DU CAUTIONNEMENT HYPOTHECAIRE (OUI).
Il est de principe que le mandat est un contrat consensuel dont la validité n’est soumise à l’accomplissement d’aucune formalité particulière. Cependant, cette règle générale vient à s’infléchir dans certains cas par l’effet de la volonté du législateur. Ainsi, il résulte de l’article 128 alinéa 2 AUS que la procuration donnée à un tiers pour constituer une hypothèque en la forme notariée doit être établie en la même forme authentique.
Par conséquence, le mandat reçu par acte sous-seing privé pour constituer hypothèque en la forme authentique ne saurait produire aucun effet, en l’occurrence la valable constitution de cette hypothèque dès lors que la méconnaissance de l’exigence d’authenticité posée par l’article susvisé en son aliéna 2, élude la finalité protectrice poursuivie par le législateur à travers l’exigence d’une solennité habilitante.
Article 270 AUPSRVE
Article 272 AUPSRVE
Article 128 AUS
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBO-DIOULASSO (BURKINA FASO), Jugement n 273 du 27 septembre 2006, BICIA-B c/ Ayants droit de feu KOTE Youssouf.
LE TRIBUNAL
I FAITS, PROCEDURE, MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit daté du 09 mai 2006, la Banque Internationale pour le Commerce, l’Industrie et l’Artisanat du Burkina (BICIA-B), société anonyme au capital de 5 000 000 000 de francs CFA, ayant son siège à Ouagadougou et pour laquelle domicile est élu en la SCPA KARAMBIRI-NIAMBA, avocats associés, sise à Bobo-Dioulasso et à l’étude de maître Moumouni KOPIHO, avocat à la Cour Ouagadougou, faisait signifier à KOTE Aboubacar, KOTE Daouda, KOTE Abdoulaye, KOTE Fatimata, KOTE Djénéba, KOTE Tari Maïmou, KOTE Yacouba, KOTE Issiaka, KOTE Souaibou, KOTE Batta Tarry, KOTE Alassane, KOTE Aramatou, tous ayants droit de feu KOTE Youssouf ayant pour conseil maître Yacoba OUATTARA, avocat à la Cour, Ouagadougou, un commandement tendant à saisie immobilière avec sommation de payer ou de délaisser, ledit exploit était suivi d’un acte de dépôt du cahier des charges n 77/2006 du 24 juillet 2006 dont sommation d’en prendre communication a été faite le 26 juillet 2006.
La cause était ainsi programmée pour être appelée pour la première fois à l’audience ordinaire du 30 août 2006 du Tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso.
Par acte daté du 08 août 2006, maître Yacoba OUATTARA présentait des dires et observations à l’effet de s’entendre, en la forme déclarer recevable son action, au fond et au principal, annuler l’exploit du 09 mai 2006 et les actes subséquents et par suite, ordonner mainlevée de la saisie immobilière pratiquée à la diligence de la BICIA-B, à titre subsidiaire, ordonner la distraction de l’immeuble saisi et s’il y a bien, ordonner une expertise immobilière en vue d’une réévaluation de la mise prix, ordonner le sursis à statuer, condamner la BICIA-B au paiement de la somme de vingt sept millions neuf cent quatre vingt dix mille trois cent quatre vingt quinze (27.990.395) francs CFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et enfin condamner la BICIA-B aux entiers dépens.
Au soutien des prétentions ainsi émises, maître Yacoba OUATTARA exposait en substance qu’une convention de compte courant complétée par deux (02) avenants successifs, avait été passée entre la BICIA-B et KOTE Aboubakar avec cautionnement hypothécaire de feu KOTE Youssouf. Il précisait que l’immeuble formant la parcelle A du lot n 148 d’une superficie de 1330 m2, objet de titre foncier n 1474 de la ville de Bobo Dioulasso et appartenant à KOTE Youssouf, avait été affecté à la garantie de l’exécution par celui-ci des obligations qui viendraient, à lui incomber en tant que caution en méconnaissance des formes exigées. Il relevait à ce titre que outre le fait que la convention de compte courant de même que ses avenants, constatant le contrat de cautionnement hypothécaire, ne comportaient aucune signature de la caution, le débiteur principal, représentant cette dernière, ne tenait pas son mandat d’un acte authentique et que des mentions prescrites pour figurer sur le cahier des charges n’y figuraient cependant pas.
maître Yacoba OUATTARA ajoutait que si le Tribunal venait à passer outre les moyens de nullité ainsi développés, il sollicitait que soit ordonnée la distraction de l’immeuble ou encore un sursis à statuer.
En réplique et pour le compte de la BICIA-B, maître NIAMBA concluait à la régularité de la procédure et au renvoi de la cause à l’audience d’adjudication. Il faisait valoir que les poursuites engagées dans le cadre de la présente procédure étaient fondées sur des grosses de conventions qui n’avaient pas été annulées et que le débiteur principal, KOTE Aboubakar n’a jamais contesté devoir à la BICIA-B. Ce conseil ajoutait qu’aucun préjudice n’avait été allégué de nature à justifier le prononcé d’une nullité raison de la méconnaissance des prescriptions de l’article 267 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. Il ajoutait par ailleurs que les demandes relatives au sursis de même qu’à la modification de la mise à prix n’étaient pas fondées. maître NIAMBA concluait enfin à la condamnation de la partie adverse à payer à sa cliente, la somme de vingt sept millions deux cent soixante dix mille six cent quarante six (27.270.646) francs CFA représentant les frais exposés et non compris dans les dépens.
DISCUSSION
SUR LA RECEVABILITE
Attendu qu’il résulte des articles 270 et 272 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution que les dires et observation doivent être présentés jusqu’au cinquième jour avant l’audience éventuelle; Qu’ils soient jugés après échange de conclusions motivées des parties dans le respect du principe du contradictoire.
Que par conclusions datées du 08 août 2006, maître Yacoba OUATTARA a présenté des dires pour l’audience éventuelle qui devait se tenir le 30 août 2006; Que la partie adverse ayant régulièrement répliqué aux prétentions et moyens développés dans lesdites conclusions, il convient de déclarer des dires dont s’agit recevables.
SUR LE FOND
Attendu qu’il résulte de l’article 128 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés d’une part, que l’hypothèque conventionnelle est consentie, selon la loi nationale du lieu de situation de l’immeuble par acte authentique ou par sous seing privé; d’autre part, que la procuration donnée à un tiers pour constituer une hypothèque en la forme notariée doit être établie en la même forme authentique.
Attendu que la convention de compte courant passée devant notaire les 22 et 27 janvier 1998 de même que ses deux (02) avenants conclus en la même forme, mais dont la validité n’est pas ici discutée, stipulent que la caution en la personne de KOTE Youssouf a été représentée pour l’ensemble des opérations par KOTE Aboubakar, son fils et débiteur principal en vertu d’un acte sous seing privé.
Attendu qu’il est de principe que le mandat est un contrat consensuel dont la validité n’est soumise à l’accomplissement d’aucune formalité particulière; Que cette règle générale vient cependant à s’infléchir par l’effet de la volonté du législateur pour notamment prendre en compte la particularité de certaines matières.
Qu’a ce titre, la solennité requise par les dispositions de l’article 128 de l’Acte uniforme précité relativement à la procuration, vise la protection du consentement du débiteur au contrat d’hypothèque dès lors qu’il est de l’office du notaire, non seulement de le renseigner sur l’étendue et le caractère dangereux de son engagement mais également de vérifier la sincérité du consentement ainsi donné.
Qu’ainsi, le mandat reçu par KOTE Aboubakar par acte sous-seing privé pour constituer hypothèque en la forme authentique ne saurait produire aucun effet, en l’occurrence la valable constitution de cette hypothèque dès lors que la méconnaissance de l’exigence d’authenticité posée par l’article susvisé en son aliéna 2, élude la finalité protectrice poursuivie par le législateur à travers l’exigence d’une solennité habilitante.
Attendu par ailleurs que la nullité du contrat de cautionnement hypothécaire laisse en l’état la question du sort de la convention de compte courant et de ses avenants dont il est distinct.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, sur les dires et observations, en matière civile et en premier ressort.
Déclare recevable et fondés les dires présentés par maître OUATTARA Yacoba le 08 août 2006.
Annule le contrat de cautionnement hypothécaire intervenu entre la BICIA-B et KOTE Youssouf, constaté dans la convention de compte courant du 22 janvier 1998, ensemble ses avenants et par voie de conséquence, la procédure de saisie immobilière entreprise.
Condamne la BICIA-B aux dépens.