J-09-131
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – COMMANDEMENT – MENTIONS – TITRE EXECUTOIRE – ORIGINAL OU COPIE DU TITRE (NON) – PHOTOCOPIE DU TITRE – PHOTOCOPIE NON VALABLE – NULLITE DU COMMANDEMENT.
Le commandement aux fins de saisie immobilière doit à peine de nullité contenir certaines indications dont la reproduction ou la copie du titre exécutoire. Dès lors, doit être annulé un commandement aux fins de saisie immobilière établi non sur la base du titre ou d’une copie du titre, mais sur la base d’une simple photocopie de ce titre, et ce, conformément à l’article 254 AUPSRVE.
Cour d’Appel du Littoral, arrêt N 109/C du 01 Août 2008, affaire La Compagnie Africaine pour le Commerce Internationale au Cameroun (CACIC SA) contre Sté Afriland First Bank SA.
LA COUR
Vu le jugement N 197 rendu le 07 décembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance du Wouri.
Vu l’appel interjeté le 13 décembre 2006 par la Compagnie Africaine pour le Commerce Internationale au Cameroun (CACIC) SA et EL HADJ GARBA AOUDOU.
Ouï le Président en la lecture de son rapport.
Ouï le Ministère Public en ses réquisitions.
Ouï les parties en leurs dires et explications.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Considérant que l’appel interjeté le 13 Décembre 2006 par la CACIC SA et EL HADJ GARBA AOUDOU contre le jugement sus référencé a été suivant arrêt N 193/C/ADD du 27 Août 2007 de la Cour d’Appel de céans.
Qu’il y a lieu d’en faire le constat (…).
Considérant que toutes les parties ont conclu.
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement.
AU FOND
Considérant qu’il ressort de l’article 254 (1) de l’Acte Uniforme OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution « qu’à peine de nullité, toute poursuite en vente forcée d’immeubles doit être précédée d’un commandement aux fins de saisie. A peine de nullité, ce commandement doit être signifié au débiteur et le cas échéant au tiers détenteur de l’immeuble et contenir :
1) la reproduction ou la copie du titre exécutoire et le montant de la dette… »
Considérant qu’il ressort de ce qui précède que le créancier poursuivant doit remettre à l’huissier instrumentaire le titre exécutoire ou la copie dudit titre :
Que l’Huissier instrumentaire doit donc soit joindre à son commandement la copie du titre exécutoire, soit reproduire le titre exécutoire qu’il est censé détenir.
Qu’il en résulte que l’article 254 (1) sus repris exclut l’exploitation et l’utilisation de la simple photocopie du titre exécutoire pour établir le commandement aux fins de saisie immobilière.
Considérant en l’espèce que tant dans leurs dires et observations du 18 octobre 2006 que dans leurs écrits en cause d’appel, les conseils de la CACIC SA et GARBA AOUDOU reprochent à l’huissier instrumentaire de s’être servi pour établir son commandement du 23 Mai 2006 non pas des titres exécutoires ou des copies desdits titres exécutoires comme le prescrit l’article 254 (1) sus cité mais plutôt les photocopies.
Que dans ses écrits datant du 16 mai 2007 page 6 in fine, Me PENKA, conseil de Afriland First Bank a affirmé que l’huissier instrumentaire a reproduit les titres exécutoires en photocopie.
Qu’il y a là un aveu judiciaire qui démontre que ce sont des photocopies des titres exécutoires qui ont été remises à l’huissier instrumentaire lequel s’en est servi pour établir le commandement du 23 mai 2006.
Considérant qu’au-delà des photocopies des titres exécutoires contenus dans le commandement du 23 mai 2006, Afriland First Bank a exposé que la saisie immobilière querellée est justifiée au regard du protocole d’accord N 115/PVC 99-2000 du 18 Janvier 2000 sus évoqué.
Que ce document versé au dossier l’est également en photocopie tout comme le pouvoir donné à l’Huissier instrumentaire par Afriland First Bank.
Qu’il y a là nombre de pièces capitales qui sont toutes en photocopies et qui ont servi à l’établissement du commandement du 23 mai 2006 et y ont été jointes.
Considérant qu’il ressort tant du pouvoir donné à l’huissier instrumentaire par acte du 18 avril 2006 par Afriland First Bank que du commandement aux fins de saisie immobilière du 23 mai 2006 que la constitution de Mes PENKA, la SCP KOUENGOUA et NGANTIO MBATTANG tous avocats au Barreau du Cameroun y est indiquée.
Qu’il y a là autant de fondés de pouvoir spécial
Qu’ainsi l’aveu judiciaire sus indiqué fait par Me PENKA au regard de l’article 1356 du Code civil fait pleine foi contre Afriland First Bank.
Que cet aveu de ce que c’est à l’aide des photocopies des titres exécutoires à lui remises par le poursuivant et la photocopie du pouvoir aux fins de saisie immobilière remise à l’huissier instrumentaire que le commandement du 23 mai 2006 a été établi n’a nullement fait l’objet d’une demande de révocation de la part d’Afriland First Bank.
Qu’il y a par ailleurs lieu de souligner que Afriland First Bank n’a pas produit au dossier ni offert de produire les titres exécutoires excipés ou leurs copies, la production des photocopies tant à l’huissier instrumentaire qu’au dossier de procédure lui paraissant suffisante et légale.
Qu’il y a là une option qui consacre le mépris des dispositions de l’article 254 (1) sus citées et des articles 1334 et 1335 du code civil qui ne reconnaissent pas une valeur probante à la photocopie.
Qu’au demeurant, la production desdits titres exécutoires ou leur copie a fortiori et après établissement du commandement aux fins de saisie immobilière du 23 mai 2006 ne saurait suppléer aux carences dudit commandement ou extirper ses lacunes sus exposées qui le rendent d’office invalide et nul.
Que les photocopies d’actes même authentiques n’ont aucune valeur juridique en matière de saisie immobilière et ne peuvent suppléer au défaut de production des originaux ou des copies des originaux qui seuls sont de nature à renseigner de manière fiable sur l’enregistrement régulier du titre et autre.
Qu’il convient dès lors d’annuler le commandement aux fins de saisie immobilière sus cité du 23 mai 2006 et d’infirmer le jugement entrepris dans ce sens, le premier juge ayant fait une mauvaise application de la loi en passant outre le moyen tiré de la violation de l’article 254 (1) sus visé.
Considérant que la partie qui succombe au procès en supporte les dépens
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Constate que l’appel a été reçu
AU FOND
Infirme le jugement entrepris.
Statuant à nouveau.
Annule le commandement aux fins de saisie immobilière délivré le 23 mai 2006 par Me ALOBOUEDE Édouard, huissier de justice à Douala, à la CACIC et à GARBA AOUDOU, à la requête de la Société Afriland First Bank SA (…).