J-09-150
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCE – TRANSACTIONS ENTRE LES PARTIES VALANT REMISE DE DETTE – EXTINCTION DE LA DETTE – ABSENCE DE TITRE EXECUTOIRE (ARTICLE 153) – ANNULATION DE LA SAISIE ATTRIBUTION – MAINLEVEE DE LA SAISIE.
La transaction intervenue et exécutée entre les parties relativement à une partie de la dette vaut remise de dette et emportant extinction de cette dette. Dès lors, le créancier ne disposant plus d’un titre exécutoire au sens de l’article 153 AUPSRVE, la saisie-attribution de créances pratiquée au détriment du débiteur est dénuée de tout fondement et doit par conséquent être annulée et sa mainlevée ordonnée.
Article 49 AUPSRVE
Article 153 AUPSRVE
Article 160 AUPSRVE
Article 172 AUPSRVE
Article 336 AUPSRVE
Cour d’Appel du Littoral, Arrêt N 62/REF DU 24 MARS 2008, Affaire LA SOCIETE GENERALE DE BANQUE AU CAMEROUN (SGBC) SA Contre ETAT DU CAMEROUN EX-ONCPB EN LIQUIDATION.
LA COUR
Vu la loi N 2006 /15 portant organisation judiciaire de l’Etat.
Vu l’ordonnance N 76 rendue le 14 Décembre 2004 par le juge du contentieux de l’exécution du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo.
Vu la requête d’appel en date 21 Décembre 2004.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Ouï les parties en leurs conclusions respectives.
Ouï le ministère Public en ses réquisitions.
Ouï madame la Présidente du siège en son rapport.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Considérant que toutes les parties ont été régulièrement représentées par leurs conseils qui ont conclu.
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard.
Considérant que suivant requête en date du 20 Décembre 2004 reçue au greffe le lendemain et enregistré sous le numéro 304, la Société Générale des Banques au Cameroun (SGBC) SA, dont le siège social est à Douala, 78 Rue Joss, BP 4042 Douala, agissant poursuites et diligence de ses représentants légaux et ayant pour conseil Maître Henri Job Avocat au Barreau du Cameroun a relevé appel de l’ordonnance N 76 rendue le 14 Décembre 2004 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo, statuant en matière du contentieux de l’exécution dans l’affaire l’opposant à l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex – ONCPB.
Considérant qu’aux termes de l’article 172 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution, « la décision de la juridiction tranchant la contestation est susceptible d’appel dans un délai de quinze jours de sa notification.. ».
Considérant que cet appel intervenu avant la notification de l’ordonnance querellée est régulier pour avoir été fait dans les forme et délai prescrits par la loi.
Qu’il convient de le recevoir.
AU FOND
Considérant que l’appelante fait grief au premier juge d’avoir avalisé la saisie attribution des créances pratiquée le 15 Juillet 2004 au nom de l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’Ex- ONCPB, sur ses avoirs à la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC) alors même que Maître YEN EYOUN Lydienne, Avocat au Barreau du Cameroun, initiatrice de ladite mesure d’exécution forcée, ne justifiait pas d’un mandat à elle remis par le Ministère des Finances et du Budget et les liquidateurs de l’organisme susvisé d’une part, et que d’autre part, cette saisie attribution des créances ne reposait sur aucun fondement légal, la créance dont l’exécution était poursuivie étant éteinte par la transaction intervenue entre les parties et entièrement exécutée, et elle était même caduque en raison de la fausse indication dans l’acte de dénonciation de la juridiction compétente pour connaître les contestations y relatives.
Qu’elle sollicite donc que la Cour d’Appel de céans infirme l’ordonnance entreprise et que statuant à nouveau, qu’elle déclare non fondée en tout point ladite saisie attribution des créances, qu’elle constate subsidiairement sa caducité en raison de l’invalidité de l’exploit de dénonciation et qu’elle en ordonne main- levée.
Considérant qu’elle développe en substance que le 10 Juin 1994, la liquidation de l’Ex – ONCPB levait contre elle une ordonnance d’injonction de payer N 307/93-94 rendue par le Président du Tribunal de Grande Instance du Wouri pour obtenir paiement de la somme totale de 3.987.972.800 francs soit 3.637.972.800 francs en principal et 350 000 000 francs à titre d’intérêt, ordonnance sur laquelle la Cour d’Appel du Littoral a suivant arrêt N 93/C rendu le 10 Mars 1999, ordonné l’apposition de la formule exécutoire.
Que les demandes de sursis à l’exécution de cette ordonnance introduites aussi bien par la société Gortzounian que par elle-même à la Cour Suprême furent rejetées suivant ordonnance N 563 rendue par le Président de ladite cour et une saisie attribution des créances fut pratiquée sur ses avoirs à la BEAC le 22 Août 2000.
Qu’alors que la Cour d’Appel avait évalué les intérêts et frais à la somme de 350 000 000 francs en sus du principal qui était 3.637.972.800 francs, le procès verbal de cette saisie mentionnait en outre les sommes de :
– 47.461.872 FCFA pour dépens à Me EYOUM (appel);
– 47.461.872 FCFA pour dépens de Me MININE (appel)
– 122.493.397 FCFA droit de recette
– 22.906.619 FCFA TVA/DR
– 15.225 FCFA coût du commandement du 4 Mai 2000
– 295.982.619.24 FCFA provision pour les intérêts à échoir
– 600 000 000 FCFA frais de procédure;
– 191.710 FCFA coût du présent exploit soit un total de 5.124.497.461, 24 francs;
Que face à ces montants exorbitants, elle saisit le Président de la Cour d’Appel de céans en arbitrage sur les questions de dépens et le problème fut réglé par un paiement unique au profit de tous les Avocats et partagé entre eux.
Que pour les autres montants, elle saisit le Ministres d’Etat chargé de l’Économie et des Finances suivant correspondance en date du 09 Février 2001 pour lui faire part de sa disponibilité à payer les sommes réellement dues et en réponse, cette haute autorité lui indiqua par correspondance en date du 16 Février 2001 « d’exécuter la décision de Justice de référence à l’exception des sommes suivantes que l’Etat accepte d’abandonner :
– 295.982.619, 24 FCFA provision pour intérêt à échoir;
– 160 000 000. FCFA montant de l’astreinte de retard au 15 Février 2001;
– 9% sur le principal et les intérêts.. ».
– 191.710 FCFA coût du présent exploit ».
Que suivant correspondance en date des 20 et 28 Février 2001, elle remercia d’abord le Ministre de l’Économie et des Finances pour cet abandon partiel de la créance et lui fit ensuite une offre de payement de la somme 3.987.972 800 francs de laquelle il fallait retirer l’avance précédemment versée qui était de 400 000 000 Francs CFA soit un solde de 3.587.972.800 FCFA, proposition finalement acceptée par l’Etat du Cameroun, ce qui l’amena à procéder à un règlement par chèque de la somme 3.615.972.800 FCFA soit 3.215.972.800 FCFA représentant le montant réellement dû et 400 000 000 FCFA d’intérêts, à la suite duquel le Ministre d’Etat chargé de l’Économie et des Finances lui adressa une correspondance en date du 3 Avril 2001 accusant réception de ce règlement « pour solde de tout compte » et l’informant de la main levée de la saisie attribution pratiquée sur ses avoirs à la BEAC.
Qu’elle a été surprise de recevoir en date du 15 Juillet 2004, une dénonciation d’une saisie attribution des créances pratiquée à son préjudice en vertu des mêmes titres exécutoires alors qu’une transaction était intervenue entre elles, l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB, transaction du reste homologuée par arrêt à la Cour d’Appel du Littoral en date du 8 Août 2001.
Que s’agissant de la régularité de cette saisie attribution, la SGBC SA fait observer que celle-ci est identique à tout point de vue à celle pratiquée à son préjudice le 28 Août 2000 par l’Etat du Cameroun et le liquidation de l’ex- ONCPB et qui a donné lieu à une transaction suivant correspondance N 1284/CF/MINEFI/SJ /DAJ/CC du 3 Avril 2001 du Ministre d’Etat chargé de l’Économie et des Finances qui confirmait avoir transigé pour « solde de tout compte ».
Que la saisie attribution des créances du 15 Juillet 2004 repose donc sur un titre exécutoire déjà exécuté suivi d’une transaction elle-même exécutée.
Que c’est à tort que le premier juge l’a déclarée bonne et valable.
Qu’elle termine que cette saisie, à la supposer valable est devenue caduque pour absence de dénonciation dans un délai de 08 jours conformément à l’article 160 (2) de l’acte uniforme OHADA portant sur le recouvrement simplifié des créances et des voies d’exécution, la fausse indication de la juridiction compétente pour connaître des contestations dans l’acte de dénonciation rendant ledit acte nul, une telle nullité anéantie l’acte de dénonciation, tout se passant alors comme si elle n’avait pas été faite.
Que dans le cas d’espèce, l’acte de dénonciation de la saisie querellée indique que la juridiction compétente pour connaître la contestation relative à ladite saisie est « le Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo statuant en urgence sur les contentieux de l’exécution ».
Que or, cette juridiction ne statue pas en urgence, mais c’est plutôt le Président du Tribunal de Première Instance qui est juge de l’urgence et du contentieux de l’exécution en vertu de l’article 49 de l’acte uniforme OHADA N 6.
Considérant que venant aux débats, l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB, agissant sous la plume de leur conseil Maître YEN EYONG Lydienne concluent à la confirmation de l’ordonnance entreprise et à la condamnation de l’appelante aux dépens distraits au profit de leur conseil susnommé.
Considérant s’agissant du bien fondé de la saisie attribution querellée, l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB font valoir d’une part que l’arrêt de la Cour d’Appel de céans dont la SGBC tente de se prévaloir comme ayant homologué la transaction intervenue entre eux a fait l’objet d’un pourvoi et que d’autre part, les titres exécutoires n’ont pas été exécutés dans leur totalité.
Que la saisie attribution du 15 juillet 2004 reposait sur :
– La grosse de l’ordonnance d’injonction de payer N 303/93-94 du 16 Juin 1994 (Tribunal de Grande Instance Wouri);
– La grosse de l’arrêt N 93/C du 10 Mars 1999 (CA Littoral)
– La grosse de l’ordonnance N 563 du 20 Juin 2000 (PCS);
– La grosse de l’ordonnance N 1135 du 21 Septembre 2000 (PTGI Douala) déboutant la SGBC de son action et ordonnant le payement provisionnel des causes de la saisie du 22 Août 2000;
– La grosse de l’ordonnance N 299 du 31 Janvier 2001 (PTPI Douala) ordonnant le reversement par la SGBC et la BEAC des causes de la saisie attribution telles que résultant de l’ordonnance N 1135 du 21 Septembre 2000 sous astreinte de 10 000 000 francs par jour de retard à compter du prononcé;
L’expédition de l’arrêt N 435/DE rendu le 12 Septembre 2001 par Monsieur le Président de la Cour d’Appel du Littoral à Douala constatant le désistement de la SGBC.
Que toutes ces décisions ont consacré les causes de la saisie attribution du 22 Août 2000 à la somme de 5.124.497.461.24 francs CFA somme partiellement réglé par la SGBC SA à concurrence de 3.615.972.800 FCFA.
Que la présente saisie qui porte sur le reliquat de cette somme est parfaitement fondée et il était normal que le recouvrement soit fondé sur les mêmes titres exécutoires que celles initiales.
Qu’ils poursuivent que l’appelante donne à la lettre N 1284/MINEFI/SG/DAJ/CC du 3 avril 2001par laquelle le Ministre des Finances a levé la saisie un contenu qui va au-delà de sa portée et de celle consacrée par la loi.
Que pour eux, une lettre qui déclare recevoir payement pour « solde de tout compte » n’est pas de nature à éteindre les poursuites en matière de créance.
Que la notion « solde de tout compte » qui n’a d’intérêt qu’en matière sociale est d’ailleurs remise en cause en jurisprudence lorsqu’un employeur tente de s’en prévaloir pour faire obstacle au payement des droits de ses ex- employés.
Qu’en droit civil ou commercial, il faut un accord exprès et irrévocable de volonté pour éteindre une créance ou la preuve du payement total de celle-ci.
Qu’il a ainsi été jugé qu’il n’ y a aucune extinction d’une créance lorsqu’un créancier reçoit de son débiteur un effet de commerce (lettre de change, chèque) accepté pour un montant inférieur à celui de ladite créance et portant la mention « solde de tout compte » faute d’une concession du débiteur, lequel s’était déjà engagé irrévocablement par l’acceptation de l’effet de commerce a payer la somme portée sur cet effet (voir comme. 22 Novembre 1988, Bull CIV. I, N 320)
Que la lettre sus visée n’avait pas éteint leur créance en l’absence d’un acte bilatéral stipulant expressément que les contestations existantes entre les parties sont terminées, la transaction étant un véritable contrat synallagmatique par lequel les parties s’obligent réciproquement les unes envers les autres.
Que les prétentions de l’appelante sur ce point n’ont donc aucun crédit.
Qu’il convient de l’en débouter.
Qu’en ce qui concerne la caducité de la saisie attribution des créances du 15 juillet 2004 pour indication erronée de la juridiction compétente dans l’acte de dénonciation, les intimées soutiennent que la seule juridiction compétente pour connaître des contestations relatives à ladite saisie est le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo statuant en matière de contentieux de l’exécution et que c’est bien cette juridiction qu’il ont indiqué dans leur acte.
Que même s’ils étaient trompés sur cette désignation, ce moyen serait inopérant dès lors que l’appelante aurait couvert ladite erreur en saisissant le juge compétent conformément à la loi; (CF CCJA Arrêt N 026/2005 du 07 Août 2005;affaireBOUCHEBEL MALECK C/ LA Station Mobile de Yamoussoukro).
Considérant qu’à la suite des réquisitions du Ministère Public tendant à l’infirmation de l’ordonnance entreprise, à la nullité de la saisie attribution des créances querellées en raison de la transaction intervenue entre les parties, la main levée de ladite saisie ainsi que la renversement des sommes encaissées à la SGBC, l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB agissant sous la plume de leur conseil susnommé critiquent véhémentement cette intervention qu’ils jugent inopportune au regard des dispositions impératives de l’article 336 de l’acte uniforme OHADA N 6, la jurisprudence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’Abidjan (CF Arrêt N 016/2004 du 29 Avril 2004,affaire. Scierie d’Agnibilikrou WAhab Nouhad Dite SDA, Wahd Nouhad Rachid contre Hassan Sahly RJCCJA N 3 janvier – Juin 2004, Page 116) et d’une Doctrine constante, (CF Professeur Issa, SAEGH et Jacqueline LOHOUES – OBLE dans le « OHADA – Harmonisation du Droit des Affaires, page 139 »), partielle et exorbitante allant même à l’encontre de sa première position devant le premier juge.
Qu’ils réitèrent leur argumentaire sur le bien fondé de la saisie attribution querellée et font observer que la demande du Ministère Publique de reverser les sommes saisies arrêtées à la SGBC est sans fondement dès lors que la banque tierce saisie leur a réservé cet argent.
Mais, considérant que les critiques relatives à l’intervention du Ministère Public dans la présente cause sont stériles et inopérantes dès lors que, bien que l’acte uniforme sus visé est implicitement abrogé les dispositions de la loi interne sur la communication des procédures y afférentes au parquet, la méprise de cette interdiction n’entrave en rien la validité de la procédure, le juge n’étant aucunement lié par les réquisitions faites par le Ministère Public.
Considérant en ce qui concerne le second grief que pour déclarer bonne et valable la saisie attribution des créances pratiquée par l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB sur les avoirs de la SGBC dans les livres de la BEAC, le premier juge s’est appuyé sur :
1 L’absence d’un protocole d’accord transactionnel entre l’Etat et cette Banque.
2 La correspondance en date du 21 Octobre 2004 que le Ministre de l’Économie et des Finances a adressé à la SGBC stipulant que « vous avez indiqué dans votre lettre du 05 Février 2004 qu’en plus du règlement du principal fixé dans le cadre de cette transaction, soit la somme de 3.615.972.800 FCFA, vous avez réglé les autres frais accessoires après vérification, il s’est avéré que votre banque n’a pas couvert l’ensemble de ces frais… » propos qui démontreraient que la mention « solde de tout compte » contenue dans sa correspondance en date du 3 Avril 2001 ne concernait que le principal de la créance soit la somme 3.615.972.800 FCFA et non sur les accessoires qui demeuraient quérables et exigibles.
Mais considérant qu’il s’agit d’une analyse superficielle des faits de la cause qui fait abstraction de la commune volonté des parties laquelle se révèle à travers les différentes correspondances échangées entre elles.
Qu’en effet, muni des titres exécutoires, constatant une créance liquide et exigible, l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB ont fait pratiqué une saisie attribution des créances sur les avoirs de leur débitrice, la SGBC SA logée dans les livres de la BEAC, suivant l’exploit en date du 22 Août 2000 pour un montant de 5.124.497.461, 24 FCFA.
Qu ‘ayant estimé que cette créance était exorbitante en raison du gonflement démesuré de certains frais, la SGBC a, par une première correspondance en date du Juillet 2000, saisit le Président de la Cour d’Appel de céans en arbitrage sur la répartition des dépens entre les Avocats et autres droits des recettes des Huissiers.
Que forte de l’éclairage apporté par ce haut magistrat, la SGBC s’est approchée de l’Etat du Cameroun à travers le Ministre d’Etat chargé de l’Économie et des Finances pour obtenir un règlement à l’amiable par le paiement partiel des sommes objets de la saisie attribution des créances.
Que c’est ainsi que par lettre N 1080/CF/MINEFI/SJ/DAJ du 16 Février 2001, le Ministre d’Etat chargé de l’Économie et des Finances lui demandait d’exécuter la décision de Justice en se libérant entre les mains du Trésor Public, les sommes objets de la saisie attribution des créances à l’exclusion de celles que l’Etat acceptait abandonner soit :
– 295 000 000 FCFA provision pour les intérêts à échoir;
– 160 000 000 FCFA montant de l’astreinte de retard au 15 Février 2001;
– 9% sur le principal et les intérêts.
Que poursuivant ces négociations, la SGBC a suivant correspondance en date du 20 Février 2001, fait une contre proposition en sollicitant :
1 Le paiement du principal de la créance évalué à la somme de 3.987.000 000 FCFA, auquel l’on devrait soustraire la vente de 400 000 000 FCFA déjà payée à la liquidation de l’ex- ONCPB;
2 Le paiement de la somme de 47.000 000 au titre des dépens à partager entre les 4 Avocats;
3 Celle de 145 000 000 FCFA de frais de recette à partager entre les deux Huissiers instrumentaires;
4 L’abandon par l’Etat de la somme de 600 000 000 FCFA et les intérêts de 7% y appliqués et elle a suggéré enfin que le montant des honoraires qu’elle devait verser aux Avocats soit arrêté de commun accord sur les bases généralement admises dans les professions;
Qu’elle rétractait partiellement ces propositions dans sa correspondance en date du 28 Février 2001 en précisant qu’elle était entièrement disposée à payer la somme 3.987.972.800 FCFA contenu dans l’arrêt N 93/C du 10 Mars 1999 de la Cour d’Appel de céans et repartie comme suit :
– 3.637.972.800 FCFA en principal;
– 350 000 000 FCFA à titre d’intérêt et frais.
Qu’elle ajoutait qu’elle n’allait payer les dépens aux Avocats (et non à l’Etat) que sur présentation des pièces justificatives et n’ayant procédé à aucun recouvrement, l’Huissier instrumentaire ne pouvait pas prétendre à un quelconque droit de recette.
Que les 600 000 000 FCFA de frais de procédure supposaient que l’Etat avait payé des sommes à la Justice et pour lesquels le remboursement lui était dû, or, l’Etat du Cameroun ne paye aucun frais de Justice et ne saurait réclamer le paiement de cette somme.
Qu’elle a donc maintenu sa proposition de payer la somme totale de 3.987.972.800 FCFA soustraite de l’avance déjà payé de 400 000 000 FCFA soit 3.587.972.800 FCFA.
Considérant qu’à l’issue de cette discussion, elle a finalement payé la somme de 3.615.972.800 FCFA par chèque en date du 2 Avril 2001 et le Ministre d’Etat chargé de l’Économie et des Finances dans sa correspondance en date du 3 Avril 2001 a accusé réception et de la lettre et du chèque sus visé « solde de tout compte » et il a donné « main levée entière et définitive » à la BEAC Douala de la saisie attribution des créances pratiquée sur ses avoirs en date du 22 Août 2000.
Considérant qu’aux termes de l’article 1156 du code civil « on doit, dans les conventions, rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s’arrêter au sens littéraire des termes ».
Que les démarches entreprises par les parties en cause dans cette affaire tendaient à un règlement à l’amiable de leur différend.
Que c’est ainsi que l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB sensibles aux doléances de leur débitrice, lui ont consenti une remise partielle de sa dette en acceptant de ne recevoir que le principal de leur créance.
Que la correspondance du 3 Avril 2001 de Monsieur le Ministre d’Etat en charge de l’Économie et des Finances consacre l’aboutissement heureux d’un processus de négociation engagé par les parties pour le règlement à l’amiable de leur litige sous la houlette d’un médiateur en la personne de Maître MBIAN Emmanuel, Avocat au Barreau du Cameroun.
Que c’est à tort que le premier juge a nié toute valeur transactionnelle à ce document alors même que d’une part, à l’analyse des correspondances qui l’ont précédé, il était question que l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB abandonnent une partie des causes de la saisie attribution du 22 Août 2000 composé essentiellement des accessoires de la créance principale.
Qu’après avoir consenti à une première remise de 295 000 000 FCFA représentant la provision pour les intérêts à échoir.
160 000 000 FCFA montant de l’astreinte de retard au 15 Février 2001
9% sur le principal et les intérêts, les créanciers ont cédé à la demande de leur débitrice de ne payer que la somme objet de sa condamnation par l’arrêt n 93/C du 10 Mars 1999 de la Cour d’Appel de céans et répartie comme suit : 3.637.972.800 FCFA en principal, 350 000 000 à titre d’intérêts et frais, diminué de l’avance des 400 000 000 FCFA déjà payé à la liquidation.
Que d’autre part, suivant correspondance en date du 4 Avril 2001 ayant pour objet : « suite règlement amiable définitif, affaire liquidation ONCPB » et adressé à la SGBC par Maître MBIAM Emmanuel, Avocat au Barreau du Cameroun, ce conseil écrit : « l’affaire en objet vient de connaître un dénouement heureux.
« En vous transmettant ci-jointe l’accusé de réception de votre chèque par le MINEFI en règlement pour solde de tout compte ainsi que la main levée de la saisie attribution des créances pratiquée le 22 Août 2000 sur vos avoirs de la BEAC Douala,.. ».
Qu’il est donc constant que la commune intention des parties permanentes à cette négociation était d’aboutir à une remise partielle de la dette par les créanciers afin d’éteindre cette obligation de leur débiteur par paiement à l’amiable.
Que la remise de la dette est l’acte par lequel le créancier libère volontairement le débiteur de tout ou partie de sa dette sans avoir obtenu ce qui lui est dû.
Qu’il s’agit d’une décharge conventionnelle qui a pour effet de mettre fin à un lien de droit et requiert par conséquent l’acceptation du débiteur : (CF Article 1285 et 1287 du code civil).
Qu’elle emporte l’extinction de la dette avec ses accessoires et libère le débiteur envers le créancier.
Considérant que la correspondance du 3 Avril 2001 de Monsieur le Ministre d’Etat en charge de l’Économie et des Finances répond à tous ces critères et la main levée totale et entière de la saisie attribution des créances donnée à la Banque tierce saisie achevé de convaincre sur la volonté de l’Etat du Cameroun et la liquidation ONCPB de mettre définitivement un terme à leurs poursuites.
Que bien plus, cette ferme volonté ressort expressément de la correspondance n 02884/MINFIB/SG/DAJ du 21 Octobre 2004 de Monsieur le Ministre des Finances et du Budget qu’il conclut par une invite de la SGBC à un arrangement définitif.
Considérant qu’aux termes de l’article 153 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, peut, pour en obtenir paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent ».
Que la mise sous main de la Justice des deniers de son débiteur à travers une saisie attribution des créances ne peut donc se faire qu’en vertu d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.
Que or, dans le cas d’espèce, la créance matérialisée par les titres exécutoires détenus par l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex-ONCPB a été atteinte par la remise partielle de la dette telle que ci-dessus développée et par paiement du reliquat par la débitrice en date du 02 avril 2001.
Que les titres qui la consacraient ayant perdu de leur efficacité contraignante, ils ne peuvent plus servir de socle à une nouvelle saisie attribution des créances.
Qu’il s’en suit donc que la saisie attribution pratiquée le 15 juillet 2004 par l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB sur les avoirs de la SGBC dans les livres de la BEAC est dénuée de tout fondement juridique et doit par conséquent être annulée.
Que la correspondance inédite du ministre des finances et du budget adressée à la SGBC en date du 21 octobre 2004 sus visée sur laquelle le premier juge s’est fondé pour ressuscité la créance, ne saurait venir au secours des intimés.
Que pour justifier la reprise des poursuites par l’exécution forcée, le Ministre mentionne en effet que « vous avez indiqué dans notre lettre du 05 Février 2004 qu’en plus du règlement du principal fixé dans le cadre de cette transaction soit la somme de 3.615.972.800 FCFA, vous avez réglé les autres frais accessoires; après vérification que votre Banque n’a pas couvert l’ensemble de ces frais.. ».
Que or, le non paiement de tous les frais par la SGBC ( à le supposer exacte) ne saurait engager l’Etat et la liquidation de l’ex- ONCPB dans la logique d’une nouvelle saisie attribution des créances dans la mesure où ces créanciers ont, la correspondance N 1080/CF/MINEFI/SG/DAJ du 16 Février 2001 accepté d’abandonner les sommes de/
295 000 000 FCFA provision pour les intérêts à échoir
160 000 000 FCFA montant de l’astreinte de retard au 15 Février 2001
9% sur le principal et les intérêts qui constituaient l’accessoire de leur créance.
Que « les autres accessoires et frais » évoqué malignement dans cette correspondance ne constitue que les dépens, les honoraires des Avocats et autre droit de recette et frais dus aux Huissiers instrumentaires et dont le recouvrement forcé n’incombe pas à l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB, ceux-ci n’ayant reçu aucun mandat de ceux-là pour la faire.
Considérant qu’il ressort de cette analyse qu’en validant la saisie attribution querellée, le premier juge a fait une lecture puérile des faits de la cause ainsi qu’une malheureuse application de la loi.
Qu’il convient d’infirmer son ordonnance sur ce point et, statuant à nouveau, d’annuler purement et simplement la saisie attribution des créances pratiquée à l’Etat du Cameroun et la liquidation de l’ex- ONCPB sur les avoirs de la SGBC logée dans es livres de la BEAC Douala suivant exploit du Ministère de Maître BALENG MAAH, Huissier de Justice à Douala en date du 15 Juillet 2004 pour violation des articles 1285, 1287 du code civil, 153 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et d’en donner par conséquent main levée.
Considérant que cette nullité de la saisie querellée, rend l’examen du troisième grief soulevé inopportun.
Considérant que les parties doivent être condamnées aux dépens, dont ¼ pour la SGBC et ¾ pour l’Etat Cameroun et la liquidation ONCPB
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière du contentieux de l’exécution, en appel, en dernier ressort et en formation collégiale.
EN LA FORME
Reçoit l’appel
AU FOND
Infirme partiellement l’ordonnance entreprise sur le bien fondé de la saisie attribution des créances querellées.
Statuant à nouveau sur ce point.
Annule la saisie attribution des créances pratiquée le 15 Juillet 2004 suivant l’exploit du Ministère de Maître BALENG MAAH Célestin Huissier de Justice à Douala à la requête de l’Etat du Cameroun et l’ex- ONCPB sur les avoirs de la SGBC logée dans les livres de la BEAC Douala pour violation des articles 1285, 1287 du code civil et 153 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution.
Ordonne en conséquence main levée de ladite saisie (…).