J-09-163
DROIT COMMERCIAL GENERAL – VENTE DE MARCHANDISES – LIVRAISON LIBRE DE TOUTE PRETENTION D’UN TIERS (NON) – VENDEUR AYANT USE DE DOL – NULLITE.
Un véhicule vendu n’est pas libre de toute prétention de la part d’un tiers dès lors qu’il avait été préalablement vendu à un tiers et que le vendeur à usé de dol en faisant croire que la vente initiale avait été annulée.
Une vente intervenue dans ces conditions est nulle.
COUR D’APPEL D’AABIDJAN, CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE ,2eme CHAMBRE, ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE DU 06 MAI 2005, AFFAIRE BILE BILE c/COOPERATIVE AGRICOLE KAVOKIVA.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après.
Considérant que suivant exploit d’Huissier en date du 26 novembre 2004, Monsieur BILE BILE ayant pour conseil Maître TRAORE MOUSSA, Avocat à la Cour, a relevé appel du jugement civil contradictoire n 2229 rendu le 21 juillet 2004 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui a statué ainsi qu’il suit :
– « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort.
Déclare la Coopérative KAVOKIVA recevable en son action.
L’y dit partiellement fondé.
Condamne Monsieur BILE BILE à lui payer la somme de 10 000 000 de francs CFA toutes causes de préjudice confondues.
Le condamne aux entiers dépens ».
Considérant qu’il résulte des énonciations du jugement querellé que par exploit d’Huissier en date du 09 juillet 2003, la Coopérative Agricole KAVOKIVA, agissant aux poursuites et diligences de Monsieur N’GUESSAN Fulgence son Président du Conseil d’Administration a assigné Monsieur BIE BILE devant le Tribunal de Première Instance d’Abidjan aux fins de s’entendre condamner au paiement de la somme de 20.765 000 francs, toutes causes de préjudice confondues.
Que pour statuer comme il l’a fait, le Premier Juge a estimé que le véhicule, objet de la vente, ayant une origine frauduleuse, notamment le vol, ladite vente doit être déclarée nul.
Que cette nullité entraîne la résolution du contrat et ouvre droit à des dommages et intérêts pour la Coopérative KAVOKIVA.
Considérant qu’il est fait grief à cette décision.
Qu’au soutien de son appel, Monsieur BELE BILE fait valoir :
Qu’il a vendu, courant année 2000 à la Coopérative KAVOKIVA représentée par messieurs BAMBA MAMADOU et N’GUESSAN Fulgence un véhicule automobile immatriculé 9092 CU 02 appartenant à dame N’GUETTA MAGNE à la somme de 7.000 000 de francs CFA payer seulement 2003.
Qu’au départ, ledit véhicule était stationné à la Brigade de Gendarmerie de Daloa en raison d’un litige né de l’émission d’un chèque sans provision par un premier acquéreur.
Que ce premier contrat ayant été annulé d’accord parties, le véhicule a été livré deux semaines plus tard à la Coopérative KAVOKIVA qui a procédé à la mutation en son nom.
Que dès lors, le véhicule vendu n’a pas une origine frauduleuse et appartient bien à dame N’GUETTA MAGNE.
Que l’exécution de leurs obligation par les parties au contrat et la mutation opérée au profit de l’acquéreur achèvent de consommer la vente dont la régularité est établie.
Que par ailleurs, le jugement querellé en court la nullité d’autant qu’en soulevant d’office la nullité de la vente, a statué ultra petita, surtout qu’un tel moyen de nullité n’est pas d’ordre public.
Qu’en outre, la présente procédure introduite par la Coopérative KAVOKIVA qui a attendu trois 03 année avant de payer le prix de véhicule litigieux, est malicieuse, vexatoire et lui cause un préjudice estimé à la somme de 5 000 000 de francs CFA.
Considérant qu’en réponse la Coopérative KAVOKIVA par canal de son conseil Maître Philippe KOUDOU – GBATE expose :
Que le véhicule litigieux a été vendu alors qu’il n’était libre de toute prétention d’un tiers puisque contre toute attente courant mois de janvier 2001, alors qu’exploité à des fins commerciales, ce véhicule a été appréhendé en pleine circulation à Daloa par la Brigade criminelle de la Préfecture de Police de cette ville au motif qu’il s’agirait d’un véhicule volé.
Que depuis, elle est privée de la jouissance de ce véhicule.
Que cette situation ouvre droit à réparation.
Considérant que répliquant à son tour, monsieur BILE BILE explique que le véhicule ne s’est retrouvé à la Police que bien après sa vente et la mutation de la carte grise.
Que les faits de vol justifiant cette capture ne lui sont pas imputables et n’entament en rien la validité de la vente survenue antérieurement.
DES MOTIFS
SUR LE CARACTERE DE LA DECISION
Considérant que les parties ont conclu; qu’il convient de statuer contradictoirement.
EN LAFORME
Considérant que l’appel a été interjeté dans les formes et délai légaux.
Qu’il sied de le déclarer recevable.
AU FOND
SUR LES MERITES DE L’APPEL
DE LA NULLITE DU JUGEMENT QUERELLE
Considérant que l’appelant relève qu’en déclarant d’office nulle la vente, le Tribunal a statué ultra petita, faisant ainsi encourir une nullité à son jugement.
Considérant cependant que le Premier Juge n’a pas statué ultra petita.
Qu’en effet, la demande initiale de la Coopérative KAVOKIVA tendait au paiement de la somme de la somme de 20.765 000 F CFA repartie comme suit :
5 000 000 de francs pour coût d’achat du véhicule.
15 000 000 de francs correspondant au coût de location des véhicules litigieux.
165 00 francs de frais de gardiennage.
Qu’il y avait manifestement une demande en annulation de la vente justifiant la restitution du prix d’achat.
Que l’argument tiré de la nullité du jugement querellé est donc inopérant.
SUR LA VALIDITE DE LA VENTE
Considérant qu’il résulte des pièces produites et notamment du procès-verbal de constat de présence physique en du 09 avril 2004 que le véhicule litigieux a été vendu aux intimés alors qu’il l’avait préalablement été à un tiers en l’occurrence le nommé AISSAM HUSSEIN GANDOUR.
Que ce dernier qu’aux termes de l’article 230 de l’acte uniforme OHADA portant droit commercial général, le vendeur doit livrer les marchandises libres de droit ou prétentions d’un tiers, a moins que l’acheteur n’accepte de prendre les marchandises dans ces conditions.
Qu’en l’espèce, le véhicule n’était pas libre de toute prétention d’un tiers.
Que le vendeur qui a fait croire que la vente initiale avait été annulée a usé de dol.
Qu’une vente intervenue dans de telles conditions est nulle.
Qu’il y a lieu de remettre les parties en l’état.
Considérant par ailleurs que l’indisponibilité du véhicule depuis sa capture a incontestablement causé un préjudice à l’acquéreur la Coopérative KAVOKIVA qu’il convient de réparer.
SUR LE CARACTERE VEXATOIRE DE LA PROCEDURE
Considérant que la procédure introduite par la Coopérative KAVIKIVA n’est ni malicieuse ni vexatoire mais tend à réparer un préjudice né des manœuvres dolosives du vendeur qui a surpris son consentement.
SUR LES DEPENS
Considérant que l’appelant succombe.
Qu’il convient de le condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
Déclare Monsieur BILE BILE recevable en son appel.
L’y dit mal fondé.
Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions.
Condamne l’appelant aux dépens.