J-09-168
SAISIES CONSERVATOIRES – DEBITEUR – CONDITIONS – MAINLEVEE – INCOMPETENCE – NULLITE.
Il ressort de la combinaison des articles 62 et 63 AUPSRVE que la demande de mainlevée des saisies conservatoires est selon le cas portée devant la juridiction ayant autorisé la saisie, ou devant la juridiction du domicile ou du lieu où demeure le débiteur s’il n’y a pas eu une autorisation pour procéder à la saisie; et quant aux contestations relatives à l’exécution de la saisie, elles sont portées devant la juridiction compétente du lieu où sont situés les biens saisis. Si ces conditions ne sont pas réunies, la juridiction saisie doit se déclarer incompétente. Et si la saisie conservatoire a été pratiquée, celle-ci doit être déclarée nulle et faire l’objet d’une main levée immédiate.
Tribunal de Grande Instance Hors classe de Niamey (Niger), Ordonnance de référé n 174 du 27/09/2005., Affaire : Nassirou Elhadji Abouka c/ Elhadji Laouali Tsohoua.
Dire que la saisie conservatoire du 20 Juin 2005 pratiquée sur le camion et le tracteur localisé à Konni est nulle.
Ordonne par conséquent la mainlevée immédiate de la dite saisie sous astreinte de 1 000 000 francs CFA par jour de retard.
Ordonne l’exécution provisoire de l’ordonnance sur minute et avant enregistrement.
Condamner aux dépens.
A l’appui de sa requête, NASSIROU ELHADJI ABOUKA expose que par exploit en date du 20 Juin 2005, ELHADJI LAOUALI TSOHOUA, en vertu d’une autorisation du Président du tribunal de Grande Instance Hors classe de Niamey, pratiquait une saisie conservatoire sur le véhicule Mercedes G 0278 RN 8, le camion tracteur 8 B 0161 RN 8 et la remorque F 3006 RN 8 lui appartenant.
Il indique que le camion tracteur et la remorque sont actuellement immobilisés à Birni N’Koni à la demande de Maître ABDOU CHAIBOU, l’huissier instrumentaire.
Qu’un procès verbal de constat a été dressé à cet effet par Maître ILLA SODO, Huissier de Justice dans la dite localité.
Il soutient que les pouvoirs de l’huissier sont confinés dans la limite territoriale de compétence de sa juridiction d’attache; qu’en pratiquant une saisie conservatoire à Konni, Maître ABDOU CHAIBOU a méconnu les règles de compétence; que lesdites règles étant d’ordre public, il y’a lieu de constater que la saisie pratiquée sur le camion et le tracteur est manifestement abusive et irrégulière.
A l’audience, NASSIROU ELH ABOUKA soutient qu’il y’a eu violation des articles 64, 103 et 167 AUPSRVE ainsi que la loi 96-2002 du 20/01/2005 portant statut des huissiers. Il fait valoir que lors de la saisie, le camion était à Konni; qu’après la saisie, LAOUALI DAN TSOHOUA a demandé un changement de gardien, et ABDOU CHAIBOU a été commis pour exécuter l’ordonnance; que ce dernier étant huissier près le Tribunal de Niamey, ne peut instrumenter à Koni, NASSIROU ELH ABOUKA demande au Tribunal d’annuler le s saisies et de rétracter l’ordonnance n 237 du 24 Juin 2005.
ELHADJI LAOUALI DAN TSOHOUA rappelle que courant 2003, NASSIROU ELH ABOUKA l’avait approché sur la livraison de 200 tonnes de mil pour une valeur de 18.000 000 francs, que NASSIROU ABOUKA lui avait versé 10.550 000 francs; pour le restant, il avait autorisé à pratiquer une saisie conservatoire sur les biens de son débiteur.
Qu’ayant appris que NASSIROU ABOUKA allait faire partir le camion au Nigeria ABDOU CHAIBOU commis pour exécuter l’ordonnance, a donné mandat à un huissier de Konni pour saisir le camion; il a été ensuite demandé un changement de gardien.
In limine litis, LAOUALI DAN TSOHOUA soulève l’incompétence du Président du Tribunal de Niamey, juge des référés pour violation des articles 62 et 63 AU-PSR-VE; il soutient que l’article 62 détermine le champ d’application des compétences des saisies conservatoires, or les contestations que soulève NASSIROU ABOUKA ne rentrent pas dans les cas prévus par l’article 62 AU-PSR-VE.
Que l’article 63 in fine dispose qu’en cas de contestation, la juridiction compétente est celle du lieu des objets saisis; qu’en l’espèce ce lieu est Konni.
Subsidiairement, LAOUALI DAN TSOHOUA fait valoir que NASSIROU ALH ABOUKA n’a pas été autorisé à l’assigner mais plutôt la SONITEL comme il ressort de l’ordonnance; et qu’en conséquence, son action doit être déclarée irrecevable.
Au fond, LAOUALI DAN TSOHOUA soutient que la saisie a été pratiquée à Niamey sur la base des cartes grises; que lorsqu’il a sollicité le changement de gardien, NASSIROU ABOUKA a été régulièrement convoqué; que dès lors; les saisies doivent être valables.
NASSIROU ELH ABOUKA soutient en réplique qu’il s’agit d’une erreur sur l’ordonnance l’autorisant à assigner, qui a indiqué SONITEL au lieu de LAOUALI DAN TSOHOUA; qu’en tout état de cause, il n’y a pas nullité sans texte, et qu’en outre, pour contester des saisies, il n’a pas besoin d’autorisation; que dès lors l’erreur sur l’ordonnance ne peut affecter son assignation et la rendre nulle; s’agissant de la juridiction compétente pour connaître des contestations, il soutient qu’elle est celle ayant rendu l’ordonnance sur requête ayant autorisé la saisie ou le changement de gardien.
DISCUSSION
Sur l’exception d’incompétence
Attendu que ELH LAOUALI TSOHOUA invoque les articles 62 et 63 alinéa 2 AUPSRVE pour soutenir l’incompétence de la juridiction de céans.
Attendu que l’article 62 AUPSRVE dispose que « Même lorsqu’une autorisation préalable n’est pas requise, la juridiction compétente peut à tout moment, sur la demande du débiteur, le créancier entendu ou appelé donner mainlevée de la mesure conservatoire si le saisissant ne rapporte pas la preuve que les conditions prescrites par les articles 54, 55, 59, 60 et 61 ci-dessus sont réunies »; et l’article 63 énonce que : « la demande de mainlevée est portée devant la juridiction compétente qui a autorisé la mesure. Si celle-ci a été prise sans autorisation préalable, la demande est portée devant la juridiction du domicile ou du lieu où demeure le débiteur :
Les autres contestations, notamment celles relatives à l’exécution de la mesure sont portées devant la juridiction compétente du lieu où sont situées les biens saisis ».
Attendu qu’il résulte de la combinaison des articles 62 et 63 AUPSRVE que la demande de mainlevée des saisies conservatoires est selon le cas portée devant la juridiction ayant autorisé la saisie, ou devant la juridiction du domicile ou du lieu où demeure le débiteur s’il n’y a pas eu une autorisation pour procéder à la saisie; et quant aux contestations relatives à l’exécution de la saisie, elles sont portées devant la juridiction compétente du lieu où sont situés les biens saisis :
Attendu qu’en l’espèce, les contestations de NASSIROU ELH ABOUKA portent sur l’exécution de la mesure de la saisie conservatoire sur le camion tracteur n 8 B 0161 RN, Remorque F 3006 RN 8 :
Attendu qu’il résulte des débats à l’audience et des pièces versées au dossier, notamment les procès-verbaux de constat de Maître ILLA SODO, Huissier de Justice à Konni, que le camion saisi se trouve à Konni.
Qu’en application de l’article 63 alinéa 2, c’est le Tribunal de Konni, lieu de situation du camion saisi, qui est compétent pour connaître des contestations relatives à l’exécution de cette saisies : qu’en conséquence, il y a lieu de se déclarer incompétent.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en premier ressorts.
Se déclare incompétent.
Avis d’appels (15 jours)
Ainsi fait, jugé et prononcé, les jours, mois et an que dessus; et ont signé le Président et le Greffier.