J-09-179
VOIES D’EXECUTION – SAISIE-VENTE – BIEN SAISI N’ETANT PAS LA PROPRETE DU DEBITEUR – ACTION EN NULLITE – QUALITE POUR AGIR DU DEBITEUR (OUI).
VOIES D’EXECUTION – SAISIE-VENTE – COMMANDEMENT DE PAYER – DELAI DE PAIEMENT INFERIEUR A HUIT (08) JOURS – REGULARISATION (NON) – NULLITE – MAINLEVEE DE LA SAISIE.
C’est à tort que l’appelante met en cause la régularité de l’action en nullité de la saisie dès lors que l’article 140 de l’AUPSRVE lui reconnaît qualité pour agir.
Le commandement de payer ayant été déclaré nul pour avoir indiqué un délai de paiement inférieur à huit (08) jours, la régularité de la saisie vente oblige qu’un autre commandement de payer, régulier cette fois, soit servi au débiteur.
Le créancier n’ayant pas en l’espèce justifié d’avoir procédé à une telle régularisation, c’est à bon droit que le premier juge a ordonné la mainlevée de la saisie pratiquée.
Cour d’appel d’Abidjan, arrêt civil contradictoire n 146 du 08 février 2005, Affaire Société CLAM Ivoire C/ Bathily Moussa.
LA COUR
Ouï le Ministère Publique.
Vu les pièces du dossier.
Ensemble les faits, procédure, prétention des parties et motifs ci-après.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit daté du 29 décembre 2004 comportant ajournement au 11 janvier 2005 la Société CLAM IVOIRE, agissant aux poursuites et diligences de son gérant Mr RENVEER S/ CHANHAN, et ayant pour conseil Maître COULIBALY SOUNGALO, Avocat à la Cour, a relevé appel de l’ordonnance de référé n 256 rendue le 22 décembre 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance de Yopougon suit, en la cause, statué ainsi qu’il suit :
– « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé d’heure à heure, en premier ressort.
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront; Mais dès à présent; Vu l’urgence.
Déclarons Mr BATHILY MOUSSA recevable en son action.
L’y disons partiellement fondé.
Ordonnons la mainlevée de la suivie vente pratiquée le 29 octobre 2004.
Ordonnons la restitution des objets enlevé; Sous astreinte comminatoire de 1 000 000 F par jour de retard à compter de la signification de la décision.
Condamnons la Société CLAM IVOIRE aux dépens ».
Il ressort des énonciations de l’ordonnance querellée que par exploit du 8 septembre 2004 Mr BATHILY MOUSSA a fait assigner par devant la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance de Yopougon la Société CLAM IVOIRE à l’effet d’ordonner la nullité du Commandement de payer; et constater que les biens saisis ne sont pas la propriété et, en conséquence, ordonner la mainlevée de la saisie vente pratiquée.
Au soutien de son action, Mr BATHILY MOUSSA a exposé que la Société CLAM IVOIRE a fait pratiquer saisie vente à son préjudice sur des biens mobiliers ne lui appartenant pas et garnissant un magasin sis à Yopougon Kouté.
Il estimait que cette saisie vente était irrégulière dans la mesure où l’acte de saisie vente viole les dispositions de l’article 87 et ne contient pas de commandement d’avoir à payer la dette dans un délai de 8 jours.
Par ailleurs, a-t-il déclaré, les biens saisies ne sont pas sa propriété mais celle de Mr LAH ALLOU.
En réplique la Société CLAM IVOIRE a soutenu avoir fait pratiquer saisie vente au préjudice de Mr BATHILY MOUSSA qui est commerçant de riz et que c’est vainement que ce dernier fait croire que les biens saisis appartiennent à un certain LAH ALLOU.
Par ailleurs a-t-elle relevé, la saisine de la Juridiction de Yopougon n’est pas régulière d’autant que l’exploit d’assignation invité à se présenter devant le Tribunal d’Abidjan.
Elle a donc sollicité l’irrecevabilité de l’action du fait de cette irrégularité de l’exploit d’assignation.
S’agissant de la nullité du commandement sollicité par le demandeur, la Société CLAM IVOIRE a rétorqué que cette nullité ne peut être prononcée que si la partie qui s’en prévaut fait la preuve du préjudice qu’elle lui cause.
Pour statuer ainsi qu’il l’a fait le premier Juge a estimé que la saisie vente a été pratiquée en vertu d’un commandement irrégulier au regard des dispositions de l’article 92 de l’acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécutions.
Par ailleurs il a relevé que la propriété des biens saisis, au regard des productions, n’est pas établie de façon irréfutable à l’égard du débiteur poursuivi.
C’est contre cette décision que la Société CLAM IVOIRE relève appel en soulevant d’une part, l’irrecevabilité d’action de Mr BATHILY MOUSSA pour violation des dispositions de l’article 246-2 du code de procédure civile en ce que l’acte d’assignation ne contient ni la nationalité ni le domicile réel du demandeur; D’autre part en ce que, alors que le demandeur est de nationalité étrangère, il n’a pas fourni de caution à l’effet de garantir le paiement des sommes auxquelles il pourrait être condamné.
Enfin, l’appelante soutient que l’ordonnance querellée a été rendue au mépris des dispositions de l’article 140 de l’Acte Uniforme relatif sur voies d’exécution, le débiteur n’ayant ni qualité, ni pouvoir ni intérêt pour demander en Justice un lieu et place du tiers propriétaire des biens saisis entre ses mains, la distraction et la restitution desdits biens.
Par ailleurs, estimant que le premier Juge a statué ultra petit a en ce qu’il a ordonné la restitution des objets saisis sous astreinte alors que le demandeur n’avait sollicité que l’annulation du procès-verbal de saisis vente et la mainlevée de la saisie, l’appelante sollicite l’annulation de l’ordonnance entreprise.
Sur le fond, l’appelante qui soutient que la saisie vente pratiquée est régulière et que les droits de propriété du sieur LAH ALLOU sur les objets saisis ne sont pas établis, conclut à l’infirmation de l’ordonnance querellée.
L’intimé qui comparaît ne dépose ni pièce ni conclusion au dossier de la procédure.
Il convient de statuer contradictoirement.
DES MOTIFS
EN LA FORME
L’appel de la société CLAM IVOIRE a été relevé conformément aux prescriptions légales.
Il doit être, en conséquence, déclaré régulier et recevable.
AU FOND
La société CLAM IVOIRE soulève l’irrecevabilité de l’action de Mr BATILY MOUSSA pour violation des dispositions de l’article 246-2 du code de procédure civile en ce que l’acte d’assignation ne contient ni la nationalité ni le domicile réel du demandeur.
Cependant les mentions de l’article 246 n’étant pas prescrites sous peine de nullité, leur omission ne peut entraîner qu’une nullité relative mettant à la charge de la partie qui l’invoque, la preuve d’un préjudice.
En l’espèce, la Société CLAM IVOIRE qui a comparu aussi bien devant le Premier Juge qu’en appel et a régulièrement fait valoir des moyens de défense, ne justifie d’aucun préjudice.
Il convient dès lors de rejeter cette exception non fondée.
L’appelante soulève, en outre l’exception de caution de l’article 4 du code de procédure civile, le demandeur étant, selon elle, de nationalité étrangère.
Cette exception cependant doit être forcément soulevée dès la Première Instance pour mette au Premier Juge non seulement d’apprécier la qualité d’étranger du demandeur mais en plus, de solliciter de ce dernier, soit le paiement d’une caution, soit de justification de l’existence des biens immobilières sur le territoire de Côte d’Ivoire.
Or, la lecture des énonciations de l’ordonnance querellée ne permet pas de dire que cette exception a été soulevée devant le Premier Juge.
Elle ne saurait être donc valablement soulevée pour la première fois en cause d’appel.
L’appelante prétend que l’ordonnance querellée a été rendue au mépris de l’article 140 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et aux voies d’exécutions en ce que le débiteur n’a ni qualité, ni pouvoir ni intérêt pour demander en Justice, en lieu et place du tiers propriétaire des biens saisis entre ces mains, la distraction et la restitution desdits biens.
Or, contrairement à l’opinion de l’appelante, aux termes desdites dispositions de l’article 140 » le débiteur peut demander la nullité de la saisie portant sur un bien dont il n’est pas propriétaire ».
En l’espèce, Mr BAHILLY MOUSSA, débiteur saisi, a sollicité d’une part la nullité du commandement de payer et portant la mainlevée de la saisie pratiquée; d’autre part la nullité de la saisie en ce que les marchandises saisies sont la propriété de LAH ALLOU.
C’est donc à tort que l’appelante met en cause la régularité de cette action.
Ce moyen doit donc être rejeté comme non fondé :
L’appelante soulève par ailleurs l’annulation de l’ordonnance entreprise en ce que le Premier Juge a statué ultra petite, en ordonnant la restitution sous astreinte alors que le demandeur n’avait sollicité que l’annulation du procès-verbal de saisie vente et la mainlevée de la saisie.
Il ressort cependant de l’examen des énonciations de l’ordonnance querellée que le demandeur a sollicité du commandement de payer et la mainlevée de la saisie pratiquée ainsi que la restitution des objets saisis sous astreinte de 2.000 000 F par jour de retard.
Ainsi en prononçant des astreintes, le Premier Juge n’a nullement statué au-delà de ce qui a été demandé.
Ainsi ce moyen doit être écarté comme non pertinent.
SUR LA MAINLEVEE DE LA SAISIE
Pour ordonner la mainlevée de la saisie pratiquée, le Premier Juge a relevé que celle-ci a été pratiquée en vertu du commandement de payer du 12 août 2004 déclaré nul par l’ordonnance n 190 du 13 septembre 2004.
En effet, aux termes de l’article 92 de l’Acte Uniforme relatif aux recouvrements simplifiés et aux voies d’exécution.
« La saisie est précédée d’un commandement de payer signifié au moins huit jours avant la saisie au débiteur, qui contient à peine de nullité.
1) Mention su titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux d’intérêt.
2) Commandement d’avoir à payer la dette dans un délai de huit (8) jours, faute de quoi, il pourra y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles ».
Ainsi, si comme en l’espèce, le commandement de payer a été déclaré nul pour avoir indiqué un délai de paiement inférieur à huit (8) jours, la régularité de la saisie vente oblige qu’un autre commandement de payer, régulier cette fois, soit servi au débiteur.
Le créancier n’ayant pas en l’espèce justifié d’avoir procédé à une telle régularisation, c’est à bon droit que le Premier Juge a ordonné la mainlevée de la saisie pratiquée.
Il convient dès lors de confirmer l’ordonnance entreprise.
L’appelante qui succombe doit être, par ailleurs, condamnée aux dépens en application de l’article 149 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort.
EN LA FORME
Déclare recevable l’appel régulièrement relevé par la société CLAM IVOIRE de l’ordonnance de référé n 256 rendue le 22 décembre 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance de Yopougon.
AU FOND
L’y dit mal fondée et l’en déboute.
Confirme l’ordonnance entreprise.
Condamne l’appelante aux dépens
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan, (5ème chambre civil A), a été signé par le Président et le Greffier.