J-09-183
VOIES D’EXECUTION – ARRET DE CONDAMNATION – EXECUTION – CASSATION DE L’ARRET – PREJUDICE –REPARATION PAR LE CREANCIER (OUI).
VOIES D’EXECUTION – ARRET DE CONDAMNATION – EXECUTION – CASSATION DE L’ARRET – OBLIGATION D’INFORMATION DU CLIENT PAR L’HUISSIER INSTUMENTAIRE – OBSERVATION (NON) – PREJUDICE – RESPONSABILITE DE L’HUISSIER (OUI).
VOIES D’EXECUTION – ARRET DE CONDAMNATION – EXECUTION – CASSATION DE L’ARRET – BANQUIER AYANT EU CONNAISSANCE DE LA CONTINUATION DES POURSUITES A CONCURRENCE DE LA SOMME DE UN MILLION – PAIEMENT DE LA CONDAMNATION PRONONCEE PAR L’ARRET DE LA COUR D’APPEL – PREJUDICE – RESPONSABILITE DU BANQUIER (OUI) – REPARATION.
RESPONSABILITE CIVILE – PREJUDICE – REPARATION PAR CHACUN EN TOTALITE – CONDAMNATION SOLIDAIRE (OUI).
L’exécution étant poursuivie aux risques du créancier, l’ex-employé est tenu de réparer intégralement le préjudice subi par son ex-employeur, dès lors qu’il s’est fait remettre la somme de 3.268.489 francs en vertu d’un arrêt de la Cour d’Appel qui a fait ultérieurement l’objet de cassation par la Cour Suprême.
La responsabilité de l’huissier instrumentaire doit être retenue et il est tenu de réparer le préjudice subi par la demanderesse, dès lors qu’il n’ignorait par la modification affectant le recouvrement de la totalité de la créance et a poursuivi ses opérations d’exécution.
La responsabilité de la banque doit être retenue et elle est tenue de réparer le préjudice subi par son client, dès lors qu’elle a procédé au paiement de la somme de 3.268.489 francs, alors que l’arrêt de Cassation dont elle avait connaissance n’avait ordonné la continuation des poursuites que pour la somme de un million de francs, l’ensemble du préjudice ayant été évalué, il y a lieu de condamner solidairement les défendeurs à en payer le montant, chacun étant condamné à le réparer en totalité.
Article 32 ALINEA 2 AUPSRVE
Section de tribunal d’Adzope, jugement civil n 25 du 02 mars 2005, affaire Société Tropical Bois c/ Adopo Brou Clément.
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier
Oui les Ministère Public en leur demandes fins et conclusion.
Après en avoir déclaré conformément à la loi.
Attendu que par exploit d’Huissier en date du 7 mai 2003 la Société TRPICAL BOIS a signé Monsieur ADOUPO BROU Clément, Maître BASSIMOUSSA TOURE et la Société Générale de Banques dite SGBCI à l’effet de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 3.268.429 francs indûment retirée de son compte et celle de 5 millions de francs à titre de dommages-intérêts :
Attendu qu’elle expose au soutien de son action que par arrêt social contradictoire n 370 du 27 mai 1999 la Cour d’Appel d’Abidjan l’a condamnée à verser à Mr ADOPO Clément la somme de 1.689.740 francs à titre d’indemnité supplémentaire et 850 000 francs à titre de dommages-intérêts.
Que cet arrêt a été signifié le 8 septembre 1999.
Que le (…) septembre 1999 Mr ADOPO BROU Clément a pratiqué sur la base de cet arrêt une saisie attribution de créance sur son compte ouvert dans les livres de la SGBCI.
Que cette saisie attribution a été dénoncée le 22 septembre 1999.
Que le 30 septembre 1999, le Président de la Cour Suprême a rendu une ordonnance de suspension des poursuites n 173/CS/JP/99 avec autorisation d’assigner Mr ADOPO BROU Clément en continuation des poursuites.
Que le 7 octobre 1999 cette ordonnance de suspension des poursuites a été signifiée à toutes les parties et notamment à Mr ADOPO BROU Clément et à la SGBCI.
Que contre toute attente alors même que la Cour Suprême n’avait pas encore vidé sa saisine la SGBCI a procédé au décaissement du montant de la condamnation à Maître BASSIMOUSSA TOURE pour le compte de son client Mr ADPO BROU Clément au motif qu’aucune contestation n’a été faite dans le mois suivant la saisie attribution de créance.
Que ce pendant, en droit lorsque le Président de la Cour Suprême rend une ordonnance de suspension les poursuites restent suspendues jusqu’à ce que la Cour Suprême vide sa saisine sur la continuation ou la discontinuation des poursuites.
Qu’en conséquence toute saisie est suspendue par l’effet de cette ordonnance et jusqu’à la signification de l’arrêt de continuation des poursuites.
Que le paiement fait par la SGBCI alors même que l’ordonnance de suspension des poursuites déployait ses effets n’est pas libératoire et régulier.
Qu’au surplus dans le fond de l’affaire, la Cour Suprême a cassé l’arrêt de la Cour d’Appel et après évocation débouté Mr ADOPO BOUR Clément de ses demandes.
Que son compte ouvert dans les livres de la SGBCI a été injustement débité.
Que la SGBCI soutien avoir payé parce qu’il y a eu contestation tardive.
Que cependant, en vertu de l’article 164 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution » en cas de contestation, le tiers saisi ne procède au paiement de la somme saisie que sur présentation à lui de la décision exécutoire repoussant cette contestation ».
Que si la contestation n’a pas été levée dans le délai légal, il n’appartient pas au tiers de la dire mais à la juridiction saisie de déclarer la demande en contestation irrecevable.
Que la SGBCI a payé le 18 février 2000 alors que la procédure en contestation introduite le 26 octobre 1999 était pendante.
Qu’en choisissant de payer alors que la procédure en contestation était en cours et que l’arrêt social ayant servi de titre exécutoire à la saisie de créance a été cassé et annulé, la SGBCI a commis une faute.
Qu’elle sollicite donc sa condamnation solidaire avec Mr ADOPO BROU Clément et Maître BASSIMOUSSA TOURE, Huissier instrumentaire qui a reçu non seulement copie de l’ordonnance de suspension en contestation.
Attendu qu’en réplique la SGBCI fait observer que le paiement effectué est intervenue sur présentation d’un certificat du greffe attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la saisie.
Qu’ayant agit conformément aux dispositions de l’article de l’acte uniforme, la contestation formée par la Société TROPICAL BOIS ne peut donc remettre en cause le paiement effectué.
Que le moyen selon lequel elle a commis une faute en effectuant un paiement sans tenir compte de l’ordonnance de suspension de poursuites n’est pas fondé.
Qu’en effet antérieurement au paiement, la Cour Suprême a rendu un arrêt le 21 octobre 1999 ordonnant la continuation des poursuites.
Que dans ces conditions la Cour Suprême s’étant déjà prononcée sur la continuation des poursuites, la suspension ordonne préalablement ne pouvait valoir.
Qu’enfin il ne peut lui être reproché d’avoir commis une faute en payant sur fondement d’un arrêt ayant fait l’objet de cassation.
Qu’en effet la cassation est intervenue après le paiement et la Cour d’Appel s’est prononcée dans ce sens dans une décision rendue sur appel interjeté contre une ordonnance de référé rendue le 20 novembre 2002.
Qu’elle conclut débouté de la Société TROPICAL BOIS.
Attendu que de son côté Maître BASSIMOUSSA TOURE objecte que les pièces fournies à la banque à savoir certificat de non contestation, ordonnance de continuation des poursuites permettaient d’obtenir paiement de la part de la banque, de sorte que l’action de la Société TROPICAL BOIS doit être déclarée mal fondée.
DES MOTIFS
EN LA FORME
Attendu que toutes les parties ont conclu.
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement.
AU FOND
1 SUR LA RESPONSABILITE
A) de Monsieur ADOPO BROU Clément
Attendu que selon l’article 32 alinéa 2 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiée de recouvrement et des voies d’exécution « l’exécution est… poursuivie aux risques du créancier, à charge pour celui-ci, si le titre est ultérieurement modifié, de réparer intégralement le préjudice causé par cette exécution sans qu’il ait lieu de relever de faute de sa part » :
Attendu qu’il apparaît à l’examen des pièces du dossier de la procédure que Mr ADOPO BROU Clément s’est fait remettre la somme de 3.268.489 francs CFA en vertu d’un arrêt de la Cour d’Appel qui a fait ultérieurement l’objet de cassation par la Cour Suprême.
Qu’il convient dès lors en vertu des dispositions de l’article 32 précité de dire qu’il est tenu de réparer intégralement le préjudice subi par la Société TROPICAL BOIS.
B) de l’huissier instrumentaire maître Bassimoussa Touré
Attendu que l’Huissier de justice chargé non seulement d’assigner, mais aussi de suivre le déroulement de la procédure, est tenu d’informer le recouvrement de sa créance.
Attendu cependant qu’il résulte des productions, que malgré l’intervention de l’article n 399/99 du 21 octobre 1999 qui ordonnait la continuation des poursuites à concurrence de la somme de un million de francs, l’Huissier instrumentaire qui n’ignorait pas cette modification affectant le recouvrement de la totalité de la créance a poursuivi ses opérations d’exécution.
Qu’en pareil circonstance, il aurait dû informer et procéder à un cantonnement de la saisie au quantum de la somme pour le recouvrement de laquelle la continuation des poursuites a été autorisée :
Qu’il convient dès lors de retenir sa responsabilité et de dire qu’il est tenu de réparer le préjudice subi par la demanderesse.-
C) De la Société Générale de Banques
Attendu qu’il apparaît à l’examen des pièces du dossier de la procédure notamment le relevé de compte produit que la SGBCI a procédé au paiement de la somme de 3.268.489 francs, montant de la condamnation en cause d’appel le 18 janvier 2000, alors même que l’arrêt n 399/99 du 21 octobre 1999 dont elle avait connaissance n’avait ordonné la continuation des poursuites et donc autorisé le paiement que pour la somme de un million de francs.
Qu’elle ne peut tirer argument de l’existence d’un certificat de non contestation pour justifier le paiement opéré en présence d’un arrêt qui indique clairement de par sa nature qu’une voie de recours a été introduite contre la décision qui fondait la saisie.
Qu’il y a lieu de retenir sa responsabilité et de dire qu’elle est tenue de réparer le préjudice subi par la demanderesse.
2) DE LA PREPARATION
Attendu qu’en se fondant sur les éléments souverains d’appréciation dont dispose le Tribunal estime devoir évaluer l’ensemble du préjudice subi par la demanderesse à la somme de six millions de francs.
Attendu que chacun des responsables d’un même dommage doit être condamné à la réparer en totalité sans qu’il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux et qui n’affecte pas l’étendue de leurs obligations envers la partie lésée.
Qu’il y a lieu de condamner solidairement les défendeurs à payer à la Société TROPICAL BOIS la somme de six millions de francs toutes cause de préjudice confondues.
Sur les dépens
Attendu que les défendeurs qui succombent doivent supporter les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en matière civile et en premier ressort.
Déclare la Société TROPICAL BOIS recevable en son action.
L’y dit partiellement fondée.
Condamne solidairement Monsieur ADOPO BROU Clément, Maître BASSIMOUSSA TOURE et la SGBCI à lui payer la somme de six millions de francs toutes causes de préjudice confondues.
Les condamne en outre aux dépens.
Et avons signé avec le Greffier.