J-09-191
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – CONDITION DE VALIDITE – REUNION (OUI) – VALIDITE.
Les conditions de l’article 54 AUPSRVE sont réunies et il y a lieu de déclarer valables les saisies, dès lors que d’une part la créance litigieuse est fondée en son principe non seulement par le protocole d’accord liant les parties, mais aussi par la reconnaissance de la dette et la promesse de payer du débiteur, et d’autre part que le fait pour le débiteur de multiplier les procédures constitue une manœuvre dilatoire qui met en péril le recouvrement de la créance.
Article 54 AUPSRVE
Cour d’appel d’Abidjan, arrêt n 943 du 11 novembre 2005, affaire SOUMHORO MARIAM c/ SYLLA BANGALY.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties en leurs conclusions.
Ensemble l’exposé de la procédure, des faits, prétentions et moyens des parties et des motifs ci-après.
EXPOSE DE LA PROCEDURE DES FAITS, DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Considérant que par exploit en date du 10 Août 2005, Madame SOUMAHORO MARIAM a relevé appel de l’ordonnance de référé n 1183 du 26 Juillet 2005 rendue par la juridiction présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau qui en la cause a statué comme suit :
– déclarons Monsieur SYLLA BANGALY recevable en sa demande;
– l’y disons bien fondée;
– ordonnons la mainlevée desdites saisies;
– ordonnons l’exécution provisoire de la décision sur minute avant enregistrement.
Qu’au soutien de son appel, Madame SOUMAHORO MARIAM expose qu’aux termes d’un protocole d’accord conclu avec Monsieur SYLLA BANGALY, celui-ci a reconnu lui devoir la somme de 11.750 000 Francs.
Que SYLLA BANGALY a effectué un premier versement partiel d’une valeur de 2.000 000 F qui a ramené le montant de sa dette à 9.750 000 F.
Qu’il devait, conformément au protocole d’accord, faire des versements mensuels d’une valeur de 250 000 F chacun jusqu’à épuisement total, de sa dette
Que cependant, après avoir procédé à une série de neuf versements dont le dernier est intervenu le 9 Avril 2003, l’intimé n’a plus respecté ses engagements alors que le protocole d’accord comporte une clause résolutoire qui prévoit que « le non respect par les parties de leurs engagements ou obligations respectives rendra immédiatement caduc le protocole d’accord ».
Qu’en application de la clause résolutoire, elle dénonça ledit protocole le 19 Mai 2003 et somme l’intimé de lui payer sans délai le reliquat de sa dette d’une valeur de 7.500 000 F devenu immédiatement exigible du fait de la cessation de ses paiements mensuels.
Que malgré la sommation, l’intimé n’ayant toujours pas réglé la dette, elle a obtenu une ordonnance d’injonction de payer le 05 Juin 2005 sous le n 3311 le condamnant à lui payer le montant réclamé.
Que l’intimé a fait opposition à cette ordonnance mais a été débouté par le Tribunal qui par jugement rendu le 09 Février 2005 a confirmé les termes de ladite ordonnance.
Que par exploit en date du 17 Février 2005, il a relevé appel de ce jugement.
Qu’estimant que toutes ces procédures initiées par SYLLA BANGALY ont un caractère dilatoire et sont de nature à menacer le recouvrement de sa créance pourtant fondée en son principe, certaine et exigible, elle a sollicité et obtenu, par ordonnance N 2158 du 31 Mai 2005, l’autorisation de pratiquer saisie conservatoire de tout bien meuble et créance appartenant à l’intimé.
Que munie de cette ordonnance, elle a fait pratiquer le 21 Juin 2005 une saisie conservatoire de biens meubles et le 04 Juillet 2005 une saisie conservatoire de créance entre les mains de la BICICI.
Que l’intimé a saisi la juridiction des référés contre ces mesures, laquelle a rendu l’ordonnance querellée.
Que contrairement à la motivation du premier juge, les saisies litigieuses n’ont pas été pratiquées sur le fondement du jugement frappé d’appel mais plutôt sur la base de l’ordonnance d’autorisation n 2158 du 31 Mai 2005.
Qu’à considérer même que les saisies aient été pratiquées sur la base de jugement rendu sur opposition à ordonnance d’injonction à payer, la circonstance que cette décision ait été frappée d’appel n’empêche pas légalement de pratiquer des saisies conservatoires puisque celles-ci ont été faites sur le fondement de l’art. 54 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution qui n’exige que deux conditions auxquelles elle s’est conformée à savoir l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe et un péril dans le recouvrement de cette créance.
Que sa créance est fondée en son principe parce qu’elle résulte d’un protocole d’accord signé par les deux parties.
Qu’il y a en outre péril dans le recouvrement de cette créance dans la mesure où l’intimé qui a reconnu lui devoir la somme de 11.750 000 F n’a payé que 4.250 000 F, et pour le reliquat de 7.500 000 F, ne s’excuse pas et multiplie au contraire les procédures à des fins dilatoires.
Qu’elle sollicite pour ces raisons, l’infirmation de l’ordonnance attaquée et demande qu’en statuant à nouveau, l’intimé, à cause de sa mauvaise foi résultant du fait qu’il reconnaît sa dette et dit prêt à procéder à des paiements alors qu’il ne fait que multiplier les procédures, soit débouté de sa demande de mainlevée.
Considérant que SYLLA BANGALY intimé a répliqué en déposant à l’audience du 25 Août 2005 son mémoire portant la date du 22 Août 2005.
Considérant qu’en réplique, l’appelante, par le canal de son conseil Maître Agnès Ouangui, a sollicité que le mémoire de l’intimé daté du 22 Août 2005 soit écarté des débats pour cause de forclusion en application de l’art. 228 al. 3 du code de procédure civile qui prévoit qu’à peine de forclusion, les pièces et conclusions doivent être déposées au Greffe dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’acte d’appel.
Que l’appel ayant été signifié à l’intimé le 10 Août 2005, il avait jusqu’au 19 Août 2005, date d’expiration du délai de forclusion, pour déposer son mémoire.
Qu’il en résulte que le délai de huit jours prévu pour déposer les pièces et conclusions expirait le 19 Août 2005
Qu’ayant déposé son mémoire le 25 Août 2005, ses écritures doivent être écartées des débats pour cause de forclusion conformément à une jurisprudence constante de la Cour d’Appel.
DES MOTIFS
Considérant que l’intimé a été régulièrement cité et a au surplus produit un mémoire.
Qu’il y a lieu, ayant eu connaissance de la procédure, de statuer contradictoirement en application des dispositions de l’art. 144 du Code de Procédure Civile.
Qu’il y a lieu de le déclarer recevable.
EN LA FORME
Sur la recevabilité
Considérant l’appel de Madame SOUMAHORO MARIAM a été relevé dans les formes et délais prévus par les art. 164 à 170 du Code de Procédure Civile.
Qu’il y a lieu de le déclarer recevable.
Sur l’exception de forclusion
Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 228 alinéa 3 du Code de Procédure Civile, commerciale et administrative, les parties doivent, à peine de forclusion, faire parvenir eu Greffe de la Cour les conclusions et pièces dont elles entendent se servir en cause d’appel dans un délai de huit jours au plus à compter de la signification de l’appel.
Considérant qu’en l’espèce l’appel relevé de l’ordonnance litigieuse a été signifié à l’intimé le 10 Août 2005.
Que par conséquent, le mémoire remis par l’intimé à l’audience du 25 Août 2005 a été produit hors délai.
Qu’il convient de le déclarer forclos et de l’écarter des débats en application de l’art. 228 al. 3 ci-dessus cité.
AU FOND
Sur l’annulation de l’ordonnance
Considérant qu’il ressort de l’exposé des prétentions et des faits de l’ordonnance attaquée que la demande de mainlevée de saisie conservatoire formulée par SYLLA BANGALY portait sur une saisie conservatoire de créance du 04 Juillet 2005 alors que dans l’exposé des motifs, le juge se prononce sur les deux saisies conservatoires des 21 Juin 2005 et 04 Juillet 2005.
Qu’il y a manifestement une contrariété entre l’exposé des prétentions et des faits et l’exposé des motifs.
Que cette contrariété entache de nullité l’ordonnance déférée.
Qu’il sied de l’annuler et d’évoquer, la cause étant en état, les parties préalablement entendues en leurs observations.
Sur les saisies conservatoires
Considérant que l’art. 54 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution prévoit deux conditions de validité des saisies conservatoires à savoir l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe et un péril dans le recouvrement de cette créance.
Considérant qu’en l’espèce la créance litigieuse est fondée en son principe non seulement par le protocole d’accord liant les parties, mais aussi par la reconnaissance de la dette et la promesse de payer du débiteur mentionnée dans l’ordonnance entreprise.
Que dès lors, le fait pour le débiteur de multiplier les procédures, d’abord en faisant opposition à l’ordonnance d’injonction de payer, puis en relevant appel du jugement rendu sur opposition à l’ordonnance d’injonction de payer, constitue une manœuvre dilatoire qui met en péril le recouvrement de la créance.
Qu’il s’ensuit que les conditions de l’art. 54 précité étant réunies, il y a lieu de déclarer valables les saisies conservatoires pratiquées en déboutant par voie de conséquence l’intimé de sa demande de mainlevée.
Sur les dépens
Considérant qu’au terme de la procédure, l’intimé succombe.
Qu’il y a lieu, en application de l’art. 149 du Code de Procédure Civile, de mettre les dépens à sa charge.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort.
EN LA FORME
Déclare Madame SOUMAHORO MARIAM recevable en son appel.
AU FONDDéclare nulle l’ordonnance entreprise.Évoquant.
Déboute Monsieur SYLLA BANGALY de sa demande de mainlevée des saisies conservatoires pratiquées le 21 Juin 2005 sur ses biens meubles et le 04 Juillet 2005 sur son compte sis à la BICICI.
Met les dépens à sa charge.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire), les jours, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.