J-09-207
PROCEDURES COLLECTIVES D’APUREMENT DU PASSIF – SAISIE-VENTE – RECLAMATION DE DOMMAGES-INTERETS – EXCLUSION DES DOMMAGES-INTERETS DU CHAMP DE SUSPENSION OU D’INTERDICTION DES POURSUITES INDIVIDUELLES (NON) – NULLITE DES SAISIES VENTES (OUI) – MAINLEVEE.
Sont nulles les saisies-ventes pratiquées non pas uniquement sur la base de créances purement salariales, mais en quasi-totalité sur des condamnations au paiement de dommages-intérêts qui ne sont pas exclus du champ de suspension ou d’interdiction des poursuites individuelles prévues par l’article 9 de l’AUPCAP.
Par conséquent, la mainlevée doit être ordonnée
Tribunal de première instance de Bouaké, section de Dimbokro, jugement n 138 du 18 mai 2005, affaire SOCIETE UTEXI c/ KAMENAN KOUAME ET 14 AUTRES.
LE TRIBUNAL
Ouï les parties en leurs demandes, moyens, fins et conclusions.
Vu les pièces du dossier.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Attendu que par exploit daté du 12 mai 2005 du Ministère de Maître KOUTOUAN ABOKE BENJAMIN Huissier de justice à Abidjan, la société union industrielle textile de côte d’ivoire dite UTEXI représenté par le cabinet Manglejidan-tidou sanogo et associés, a assigné Kamenan Kouame et 14 autres ex-employés, en référé d’heure à heure, aux fins de faire constater la nullités des saisies ventes pratiquées sur les biens meubles et les comptes bancaires de ladite société et ordonner par la même occasion main-levée sous astreintes comminatoires de 1 000 000 (un million) de francs de retard à compter du prononcé de la décision.
Attendu qu’au soutien de son action, la société UTEXI fait Valoir que suivant jugement social N 04 en date du 22 février 2005 rendu par le tribunal de ce siège, elle a été condamnée à payer à KAMENA KOUAME et 14 Autres ex-employés, la somme globale de 28.541.702 (vingt huit millions cinq cent quarante un mille sept cent ) francs.
Que muni de cette décision, ceux-ci ont par le ministère de maître cisse yao jules, huissier de justice à Abidjan, fait pratiquer une saisie-vente sur les biens meubles et mobiliers de la société UTEXI aussi bien à ses bureaux d’Abidjan qu’à ceux de Dimbokro, les mardi 19 et 26 avril 2005.
Que par ordonnance N 319/2003 du 30 septembre 2003 rendue au pied d’une requête à lui présentée le 25 du mois susdit le président du tribunal de première instance d’Abidjan-plateau a ouvert le règlement préventif de la société UTEXI, qu’il a en conséquence ordonné « la suspension des poursuites individuelles à quelque titre et pour quelque raison que ce soit, en rapport avec toutes créances constituant le passif de la société UTEXI
Que dès lors, ces saisies-ventes sont manifestement illégales parce qu’elles violent les dispositions de l’article 9 de l’acte uniforme du traité ohada relatif aux procédures collectif d’apurement du passif qui prévoit que l’ouverture de règlement préventif »…suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des créances désigné par le débiteur et nées antérieurement à ladite décision, la suspension concerne aussi bien les voies d’exécutions que les mesures conservatoires;… ».
Que par ailleurs, depuis la décision de règlement préventif, des démarches et négociations fortement appuyées par le gouvernement de la république de cote d’ivoire ont été entreprise par le groupe UTEX-TEXICODI auprès de partenaires étrangers, en vue de la mise en place d’un plan de redressement afin de préserver l’outil industriel et garantir sa présence sur le marché du textile ivoirien et sous régional.
Que la société UTEXI est seule unité de production de la région pourvoyeuse de revenus stables pour les 5 000 familles liées à cette société.
Que ces saisies –ventes causent par la même un préjudice certain à la société UTEXI en difficulté, en ruinant les sérieux efforts consentis par elle, l’Etat et les partenaires extérieures pour qu’elle revienne à meilleure fortune; qu’il y a aussi lieu de craindre qu’elle ne troublent davantage les activités de la société UTEXI en occasionnant la mise au chômage précipité de bon nombre de salarié de cette entreprise
Qu’il y a donc urgence à mettre fin à une telle situation irrégulière et hautement préjudiciable.
Attendu qu’en réplique KAMENAN KOUAME et 14 autres présentés par la société civile professionnelle d’Avocats SORO et BAKO font remarquer que la reprise des activités de la société UTEXI est hypothétique de sorte qu’ayant été licenciés abusivement ils sont fondés à réclamer le paiement de leurs droits par leur ex-employeur même en règlement préventif surtout que cette procédure n’est pas encore suivie de concordant préventif.
Que cette situation laisse craindre le recouvrement de leur créance, qui est d’ailleurs une créance sociale qui n’est guère concernée par la suspension ou l’interdiction des poursuites individuelles prévues à l’article 9 de l’acte uniforme du traité OHADA précité.
Qu’en conséquence la société UTEXI doit être déboutés de son action.
II DES MOTIFS
1) EN LA FORME
Attendu que les parties ont comparu; qu’il y a lieu de statuer par décision contradictoire.
Que l’action a été introduite dans les formes et délai prescrites par la loi; qu’il convient de la déclarer recevable.
2) AU FOND
Attendu qu’il est constant comme résultant des pièces du dossier que la société UTEXI fait l’objet d’un règlement préventif.
Que cette procédure d’épurement du passif suspend ou interdit toute poursuites individuelles… à l’exception des créances de salaires.
Attendu qu’en la cause, les saisies-ventes pratiquées ont été faites sur la base d’une décision sociale portant certes sur des créances des salaires mais en quasi-totalité sur des condamnations au paiement de dommages-intérêts en réparation de préjudices subis; découlant d’agissements fautifs.
Attendu qu’en l’espèce, lesdites réclamations de dommages-intérêts impriment manifestement une nature complexe au bloc de créance poursuivie, de sorte que celui-ci ne saurait être exclu du champ de suspension ou d’interdiction des poursuites individuelles prévue à l’article 9 de l’acte uniforme du traite OHADA relatif aux procédures collectives d’apurement du passif.
Que dès lors que les saisies-ventes et attribution n’ont pas été en la cause pratiquées uniquement sur la base de créances purement salariales, Il y a lieu de dire qu’elles ont été faites au mépris du texte précité.
Qu’en conséquence, il convient d’ordonner la main-levée desdites saisies sous astreintes comminatoires fixées raisonnablement à 250 000 FCFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision.
Attendu qu’au demeurant, il s’infère de l’analyse des productions de la cause que cette mainlevée se justifie, tant la société UTEXI qui ne contexte guère la créance, revendiqués, entend organiser sa solvabilité par la reprise certaine et imminente de ces activités grâce à l’implication directe des pouvoirs publiques et des opérateurs économique privés de la filière coton; ce que les saisies-ventes litigieuses tendent à n’en point douter compromettre définitivement.
Attendu que les défendeurs succombent qu’il convient de les condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement en chambre du conseil, en matière de référé d’heure à heure à en premier ressort.
Au principal, renvoyons les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront.
Pour l’heure, vu l’urgence, et par provision.
Déclarons recevable l’action de la société UTEXI.
Déclarons nulle les saisies-ventes et attribution de créances pratiquées sur le patrimoine de la société UTEXI par le ministère de Maître CISSE YAO JULES Huissier de justice à Abidjan.
Ordonnons en conséquence mainlevée dites saisie sous astreintes comminatoires de 250 000 francs CFA par jour de retard à compter du prononcé de la présente décision.
Condamnons les défendeurs aux dépens.
Ainsi fait jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT et le GREFFIER.