J-09-209
DROIT COMMERCIAL GENERAL – FONDS DE COMMERCE – CESSION – ACTE DE CESSION – MENTIONS OBLIGATOIRES – OMISSION – NULLITE – QUALITE POUR AGIR – ACQUEREUR (OUI).
DROIT COMMERCIAL GENERAL – FONDS DE COMMERCE – CESSION – PRIX DE CESSION – PAYEMENT PAR L’ACQUEREUR – PAYEMENT VALANT QUITTANCE (OUI) – EXPULSION DE L’ACQUEREUR (NON)
L’acquéreur étant le seul a pouvoir invoquer la nullité de l’acte de cession pour défaut de mentions obligatoires, c’est à juste titre que le premier juge s’est prononcé dans ce sens, dès lors que l’acquéreur a expressément déclaré ne pas vouloir se prévaloir de cette nullité.
L’acquéreur ayant bel et bien payé de l’argent à la vendeuse devant le conseil de cette dernière, cela vaut, quittance.
Par conséquent, l’acquéreur ne peut en aucun cas en être expulsé comme occupant sans titre ni droit, il demeure acquéreur du fonds de commerce, dès lors que le prix a été intégralement payé.
Cour d’appel d’Abidjan, arrêt n 820 du 22 juillet 2005, affaire M. WAFO DZUMGNG RAOUL c/ Mme SYLLA AWA.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ensemble les faits, procédure, prétention des parties et motifs ci-après
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit d’Huissier en date du 19 Avril 2005 comportant ajournement au 06 Mai 2005, Monsieur WAFO DZUMGANG RAOUL, ayant pour conseil Maître OBIN GEORGES, Avocat à la Cour, a déclaré relever appel du jugement commercial contradictoire n 638/05 CIV3A rendu le 09 Mars 2005 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, lequel, en la cause, a statué dans les termes suivants :
– « Déclare les parties recevables en leurs demandes principale et reconventionnelle.
Déclare mal fondée la demande reconventionnelle de WAFO DZUMGANG RAOUL.
L’en déboute.
Déclare par contre Mademoiselle SYLLA AWA partiellement fondée en son action.
Prononce la résolution judiciaire des conventions de cession de fonds de commerce en date du 10 Octobre 2002.
Ordonne l’expulsion de WAFO DZUMGANG RAOUL desdits fonds qu’il occupe désormais sans titre ni droit.
Le condamne à payer à Mademoiselle SYLLA AWA la somme de 10 000 000 de francs à titre de dommages-intérêts pour l’inexécution de son obligation contractuelle.
Ordonne l’exécution provisoire de la décision en ses dispositions ayant prononcé l’expulsion des lieux du défendeur.
Déboute Mademoiselle SYLLA AWA du surplus de ses demandes.
Condamne WAFO DZUMGANG RAOUL aux dépens ».
Les deux parties ayant conclu, il échet de statuer contradictoirement.
Au soutien de son appel, WAFO D.RAOUL, articule, à travers son acte d’appel motivé et ses écritures en réplique en date du 29 Juin 2005, que contrairement aux allégations de l’intimé, son recours est recevable.
En effet, souligne t-il, même si par erreur, il a visé dans son acte d’appel l’article 228 du code de procédure civile, commerciale et administrative relatif à la procédure de référé, toujours est-il qu’il a relevé appel d’un jugement rendu par le Juge du fond dont il a précisé les numéro et date.
En outre, précise –t-il, le délai d’ajournement, s’agissant d’un jugement et non d’une décision de référé, a été respecté.
Au total, en la forme, WAFO D. RAOUL estime que son appel est tout à fait recevable comme ayant satisfait aux exigences de l’article 166 du code sus-visé applicable en l’espèce.
Au fond, WAFO D. RAOUL expose qu’il a acquis des mains de SYLLA AWA un fonds de commerce dénommé « Maquis Notre Dame » sis à Treichville-Arras, moyennant la somme de 25 000 000 de francs entièrement payée et faisant l’objet d’une convention signée le 16 Juillet 2002 entre les parties, en plus du conseil de la venderesse SYLLA AWA.
Il ajoute que le conseil sus-visé a fait établir une autre convention le 10 Octobre 2002 fixant le prix de concession à 2.000 000 de francs pour, est-il prétendu, faciliter l’enregistrement à la Direction Générale des Impôts.
L’appelant déclare qu’en outre, il a payé les arriérés d’impôts laissés par Dame SYLLA AWA.
WAFO D.RAOUL a fait valoir, au regard de ce qui précède, qu’il ne comprend pas pourquoi la résolution judiciaire de la cession des fonds ne profite qu’à SYLLA AWA seule.
Il soutient qu’ayant satisfait à ses obligations contractuelles essentielles, notamment le paiement du prix, il ne peut-être condamné à payer quoi que ce soit et à être expulsé des lieux.
Il sollicite en conséquence, l’infirmation du jugement entrepris.
SYLLA AWA, intimée, dans ses conclusions des 28 Avril 2005 et 05 Juillet 2005, soulève l’irrecevabilité de l’appel aux motifs que WAFO D. RAOUL a visé l’article 228 du code de procédure civile, commerciale et administrative alors que d’une part il s’agit de l’appel contre un jugement et non pas un référé et que d’autre part, le délai d’ajournement relatif au référé n’a pas été respecté.
Au fond, dame SYLLA AWA expose que c’est plutôt WAFO D. RAOUL qui lui a présenté deux conventions à des prix de cession déduits et que ce dernier ne s’est pas exécuté quant au paiement du prix de cession.
Elle estime que les conventions du 10 Octobre 2002 sont nulles pour n’avoir pas respecté les dispositions de l’article 118 de l’Acte Uniforme portant droit commercial général et qu’en outre la résolution judiciaire des ventes est justifiée pour paiement du prix par l’acquéreur tout comme est justifié son expulsion des lieux occupés sans titre ni droit.
Formant appel incident, dame SYLLA demande à la Cour de porter à 45 000 000 de francs le montant des dommages-intérêts à elle alloués par le premier juge, estimant que la somme de 10 000 000 de francs octroyé est insuffisante.
DES MOTIFS
EN LA FORME
Il est constant que WAFO a mentionné dans son acte d’appel l’article 228 du code de procédure civile, commerciale et administrative au lieu de l’article 166 dudit code relatif à l’appel contre les jugements.
Ce fait, constitutif d’une simple erreur, ne saurait avoir cependant d’effet sur la recevabilité de l’appel dès lors qu’en l’espèce, les conditions requises par l’article 116 précité ont été réunies par l’appelant WAFO, notamment en ce qui concerne le délai d’ajournement.
En conséquence, n’est pas fondé le moyen tiré de l’irrecevabilité de l’appel de WAFO D. RAOUL.
Il y a donc lieu de déclarer ce recours recevable.
AU FOND
S’il est vrai qu’aux termes de l’article 118 de l’Acte Uniforme relatif au droit commercial général, la cession de fonds de commerce doit, dans l’acte la constatant, contenir certaines mentions obligatoires, il n’en demeure pas vrai qu’en application des dispositions de l’article 119 dudit acte, seul l’acquéreur peut invoquer la nullité de l’acte pour défaut des dites mentions.
Or en l’espèce, WAFO D. RAOUL a expressément déclaré devant le Premier Juge ne pas vouloir se prévaloir de cette nullité.
C’est donc a juste titre que ledit Juge a tranché dans ce sens.
Cependant, s’il est vrai qu’aux termes de l’article 126 du même Acte Uniforme, la convention du cas d’espèce relativement au prix de cession est nulle pour dissimulation, il n’en demeure pas moins vrai qu’il appert des documents qu’effectivement WAFO D. RAOUL, contrairement à ce que soutiennent SYLLA AWA et le Premier Juge, a bel et bien payé de l’argent à celle-ci devant le conseil de cette dernière et que cela vaut quittance.
Il en résulte que le prix ayant intégralement payé, WAFO D. RAOUL demeure acquéreur des fonds de commerce litigieux et qu’il ne peut en aucun cas en être expulsé comme occupant sans titre ni droit.
En conséquence l’appel de WAFO D. RAOUL est fondé et il échet d’infirmer le jugement entrepris en déboutant SYLLA AWA tant dans sa demande d’expulsion des lieux occupés par WAFO que son appel incident tendant à faire condamner WAFO à lui payer des dommages-intérêts plus élevés que ceux octroyés par le Premier Juge.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort.
EN LA FORME
Reçoit WAFO DZUMGANG RAOUL en son appel du jugement n 638 rendu le 09 Mars 2005 par le Tribunal De Première Instance d’Abidjan.
AU FOND
L’y déclare dit bien fondé
Infirme ledit jugement.
Statuant à nouveau.
Déboute dans SYLLA AWA de toutes ses demandes non fondées.
Condamne l’intimée aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire) les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.