J-09-210
VOIES D’EXECUTION – SAISIE-VENTE – ACTION EN NULLITE – DEMANDE DEVANT INTERVENIR AVANT LA VENTE – INOBSERVATION – IRRECEVABILITE.
La possibilité offerte au débiteur de demander la nullité de la saisie étant circonscrite dans un délai allant de ladite saisie jusqu’à la vente des biens saisis, doit être déclarée irrecevable toute demande tendant à obtenir la nullité d’une saisie après la vente des objets saisis, car hors délai.
Article 144 AUPSRVE alinéa 1
Tribunal de première instance de Bouaflé, arrêt n 1041 du 06 décembre 2005, affaire COOPERATIVE OPAMC c/ FONDS DE GARANTIE DES COOPERATIVES CAFE CACAO DIT FGCC.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ensemble l’exposé des faits, procédures, prétentions des parties et motifs ci-après.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit d’Huissier daté du 19 JANVIER 2005 portant avenir d’audience, la Coopérative OPAMC représentée par M. ANGORA KABLAN MAMERT, Président du Conseil d’Administration, ayant pour Conseil, Maître GEORGES PATRICK VIEIRA, Avocat, a assigné le Fonds de Garantie des Coopératives Café Cacao dit FGCCC à comparaître par devant la Cour d’Appel de ce siège pour voir statuer sur l’appel qu’elle a relevé, par exploit d’Huissier en date du 07 JANVIER 2005 avec ajournement au 18 JANVIER 2005 de l’ordonnance n 58/04 rendue le 03 DECEMBRE 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan dont le dispositif est le suivant :
– statuant publiquement, contradictoirement, par voie de référé et en premier ressort;
– en la forme, déclarons irrecevable l’action initiée par la Coopérative OPAMC;
– mettons les dépens d’instance à sa charge.
Il ressort des énonciations de cette décision que par ordonnance d’injonction de payer n 98/2003 daté du 05 MAI 2003, la Coopérative OPAMC et son Président du Conseil d’Administration ont été condamnés à payer au FGCCC la somme principale de 37.499.691 francs.
Cette ordonnance lui ayant été signifiée le 07 MAI 2003, l’OPAMC a formé opposition le 22 MAI 2003, avec l’ajournement fixé au 19 JUIN 2003.
La procédure n’ayant pas été enrôlée pour qu’il soit statué à ladite date, le FGCCC s’est fait délivrer le 19 JUIN 2003 un certificat de non enrôlement et a obtenu l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance d’injonction de payer.
En exécution de l’ordonnance revêtue de la formule exécutoire, le FGCCC a, le 17 MARS 2004, servi un commandement de payer à la Coopérative OPAMC.
Par exploit du 25 MAI 2004, le FGCCC a fait pratiquer la saisie-vente des biens de sa débitrice, et la vente a été réalisée le 07 JUIN 2004, après l’accomplissement de toutes les formalités requises.
C’est ainsi que le 7 DECEMBRE 2004, la Coopérative OPAMC a assigné la FGCCC aux fins d’enrôlement de l’opposition pour voir statuer sur ce recours.
Parallèlement à cette procédure, la coopérative OPAMC a saisi le Juge des référés pour entendre déclarer nulle la saisie-vente pratiquée sur ses biens meubles.
Au soutien de cette action, elle a expliqué qu’ayant formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer N 98/2003 du 5 mai 2003, le Greffier en Chef ne pouvait, de ce fait, y apposer la formule exécutoire même si elle n’a pas enrôlé l’affaire, dans la mesure où le défaut d’enrôlement n’équivaut pas à un désistement de l’opposition.
Elle a donc conclu à une violation des dispositions de l’article 16 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, qui a rendu illégales les conditions de la saisie vente.
Le FGCCC, qui n’a pas comparu, n’a pas développé de moyens de défense.
Pour déclarer irrecevable l’action de la Coopérative OPAMC, le Juge des référé a indiqué que si l’article 144 de l’Acte Uniforme précité énonce que la nullité de la saisie peut être déclarée après la vente, il n’autorise pas le débiteur à saisir le Tribunal d’une demande de nullité lorsque la vente a eu lieu, cette demande ne pouvant être introduite que jusqu’à la vente des biens saisis.
Cette idée, à sons sens, est confortée par l’article 146 dudit Acte Uniforme qui dispose que la demande en nullité ne suspend pas les opérations de saisie.
A l’appui de son appel relevé contre cette décision, la Coopérative OPAMC fait valoir qu’en raison de l’opposition qu’elle a formée, aucune formule exécutoire ne pouvant être délivrée au demandeur.
Elle souligne que le défendeur ne peut prétendre qu’elle s’est désisté de l’opposition dans la mesure où l’article 52 du code de procédure civile qui fixe les cas légaux de désistement suppose au préalable l’introduction d’une instance et une demande expresse de désistement, celui-ci ne pouvant résulter d’un défaut d’enrôlement.
Elle soutient que la seule voie de droit ouverte au FGCCC était de faire procéder à l’enrôlement de l’affaire, en application des dispositions de l’article 46 du code de procédure civile.
La Coopérative OPAMC déclare alors que le FGCCC s’est fait délivrer une formule exécutoire de façon frauduleuse, violant ainsi les dispositions de l’article 16 de l’Acte Uniforme précité.
Elle relève par ailleurs, la violation de l’article 33 de l’Acte Uniforme sur les voies d’exécution en ce que l’ordonnance d’injonction de payer n 98/2003 du 05 MAI 2003 frappée d’opposition ne constitue pas un titre exécutoire au sens de cet article et ne peut par conséquent servir de base à la saisie-vente pratiquée, surtout qu’en tout état de cause l’affaire finalement enrôlée était pendante devant le Tribunal.
C’est en raison de toutes ces violations qu’elle sollicite l’infirmation de l’ordonnance querellée pour qu’il soit déclaré la nullité du commandement de payer du 17 MARS 2004 et de tous les actes subséquents.
Par des conclusions additionnelles, l’appelante allègue que la décision attaquée manque de bas légale pour violation des dispositions de l’article 144 de l’Acte Uniforme sus indiqué en ce sens que, selon elle, le Premier Juge a ajouté à la loi en soutenant que la dernière disposition de cet article n’autorise pas le débiteur à saisir le Tribunal d’une demande de nullité après le vente.
En effet, explique-t-elle, le législateur a clairement prévu la possibilité de déclarer la saisie nulle après la vente, laissant ensuite le choix au débiteur de demander la restitution du produit de la vente ou d’exercer des actions en responsabilité dans les termes du droit commun.
En réplique le FGCCC, par le canal de ses conseils, soulève l’irrecevabilité de la demande en nullité pour avoir été faite tardivement, l’article 144 de l’Acte Uniforme sur les voies d’exécution n’admettant cette demande qu’avant la vente des biens.
Or la vente, en l’espèce, précise-t-il, a lieu le 7 JUIN 2004 et la demande a été introduite des mois plus tard.
Le FGCC considère, quant à lui, que le défaut de l’enrôlement de l’opposition équivaut à une absence d’opposition et qu’il n’avait aucune obligation de solliciter le renvoi de l’affaire après avoir payé une consignation conformément à l’article 46 du code de procédure civile.
Il articule que le recours à cet article est exclu par l’application de l’Acte Uniforme qui régit la cause.
L’intimé poursuit en soutenant que la formule exécutoire a conféré à l’ordonnance d’injonction de payer devenue définitive un caractère exécutoire et que l’assignation aux fins d’enrôlement plus d’un an après la date d’opposition ne peut nullement être un obstacle à sa validité.
Selon le FGCCC, l’ordonnance d’injonction de payer N 98/2003 du 7 MAI 2003, non frappée d’opposition constitue un titre exécutoire, conformément à l’article 33 de l’Acte Uniforme précité, étant donné qu’elle est revêtue de la formule exécutoire.
Il conclut qu’il n’ y a pas eu de violation des articles 16 et 33 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution et sollicite la confirmation de l’ordonnance attaquée.
DES MOTIFS
Toutes les parties régulièrement représentées ont conclu.
Il y a lieu de statuer contradictoirement.
EN LA FORME
L’appel de la coopérative OPAMC ayant été interjeté dans les forme et délai légaux, il échet de le déclarer recevable.
AU FOND
Aux termes de l’article 144 alinéa 1 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « la nullité de la saisie pour vice de forme ou de fond autre que l’insaisissabilité des biens compris dans la saisie, peut être demandée par le débiteur jusqu’à la vente des biens saisis.
Il ressort clairement de ces dispositions que la possibilité offerte au débiteur de demander la nullité de la saisie est circonscrite dans un délai allant de ladite saisie jusqu’à la vente des biens saisis.
Dès lors toute demande tendant à obtenir la nullité d’une saisie après la vente des objets saisis est hors délai et ne peut être admise.
Or en l’espèce, il est constant, comme résultant des déclarations des parties et du procès verbal de vente produit au dossier, que les objets saisis au préjudice de la Coopérative OPAMC ont été vendus le 07 JUIN 2004.
C’est donc à bon droit que le Premier Juge a déclaré l’action irrecevable.
Il convient par conséquent de confirmer l’ordonnance querellée.
L’appelante succombant en la cause, doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort.
EN LA FORME
Déclare recevable l’appel de la Coopérative OPAMC relevé de l’ordonnance de référé n 58/04 rendue le 30 DECEMBRE 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abengourou.
AU FOND
L’y dit mal fondée et l’en déboute.
Confirme la dite ordonnance en toutes ses dispositions.
Condamne l’appelante aux dépens.
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan (5ème chambre civile B), a été signé par le Président et le Greffier.