J-09-230
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – COMMANDEMENT – SIGNIFICATION AU DEBITEUR (OUI) – ABSENCE DE PREJUDICE – NULLITE (NON).
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – CAHIER DES CHARGES – ETAT DES DROITS INSCRITS SUR L’IMMEUBLE (NON) – NULLITE (NON) – ABSENCE DE PREJUDICE.
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – CAHIER DES CHARGES – SOMMATION DE PRENDRE COMMUNICATION – INDICATION DE LA DATE DE L’AUDIENCE EVENTUELLE – DELAI – NON RESPECT – NULLITE DE LA PROCEDURE.
1 La signification du commandement aux fins de saisie immobilière faite à la caution propriétaire de l’immeuble hypothéqué objet de la saisie doit être considérée comme faite au débiteur principal. Par conséquent, il ne saurait y avoir nullité de la procédure d’autant que le débiteur ne relève aucun préjudice subi.
2 Il ne saurait y avoir lieu à nullité du cahier des charges et partant de la procédure de saisie immobilière au motif pris de ce que l’état des droits inscrits sur l’immeuble au jour du commandement n’a pas été annexé au cahier des charges dès lors que le débiteur ne prouve pas que l’absence de cette formalité lui a causé un préjudice.
3 La sommation de prendre connaissance du cahier des charges doit indiquer la date de l’audience éventuelle au cours de laquelle il sera statué sur les dires et observations et cette date ne saurait être inférieure à trente jours après la date de la dernière sommation. Le non respect de délai entraîne la nullité de la procédure et partant la discontinuation des poursuites.
Article 254 AUPSRVE
Article 267 AUPSRVE
Article 269 AUPSRVE
Article 270 AUPSRVE
Article 297 AUPSRVE
(Tribunal de Grande Instance de la Mifi, jugement N 14/CIV du 18 Mars 2008, affaire BICEC contre TAKAM Bonaventure, Dame TAKAM née DJONZO Élise).
Le Tribunal
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Ouï les parties en leurs conclusions.
Et après en avoir délibéré conformément à la loi.
Attendu qu’à la requête de la Banque Internationale du Cameroun pour l’Épargne et le Crédit ci-après désigné BICEC ayant pour conseil Maître SIMO Emmanuel, Avocat au Barreau du Cameroun, au cabinet duquel domicile est élu et en vertu :
1 De la grosse dûment en forme exécutoire de la convention d’ouverture de crédit avec affectation hypothécaire N 657 du répertoire de Maître GUEGANG, Notaire à Bafoussam en date du 25 Juillet 2005, passée entre la BICEC et TABO Express Voyages représentée par TAKAM Bonaventure.
2 Du certificat d’inscription hypothécaire N 042/Y.10/MINDAF/8/P520 délivré le 18 Août 2005 par le conservateur de la propriété foncière de l’Ouest à Bafoussam.
3 Du pouvoir spécial aux fins de saisie immobilière en date du 10 Juillet 2006, par lequel maître MAJOUKOUO TENKEU Julienne, Huissier de Justice à Bafoussam, a fait commandement à TAKAM Bonaventure et Dame TAKAM née DJONZO Élise, d’avoir dans le délai de vingt jours, à payer à la requérante la somme de 79 134 725 francs en principal, 7 913 472 francs de droit de recette, 1 523 343 francs de TVA sur droit de recette, leur déclarant que faute par eux de s’exécuter dans le délai susvisé, le commandement pourra être inscrit à la conservation foncière et vaudra saisie à partir de sa publication.
Leur déclarant enfin que le cas échéant, ils seront contraints au paiement de leur dette par tous voies et moyens de droit, notamment la saisie et l’expropriation de leur immeuble urbain sis à Bafoussam au lieu dit Djeleng IV bis formant le lot N 45 d’une superficie de 375 m² objet du titre foncier N 8630 du Département de la Mifi par devant le Tribunal de Grande Instance de la Mifi.
Attendu que ne s’étant pas exécuté, la créancière a déposé le 29 Janvier 2007 au Greffe du Tribunal céans le cahier des charges et a fixé au 03 Avril 2007 la date de la vente par devant cette juridiction.
Attendu qu’en réaction, la SCP NGANHOU et NZEGAN, avocats associés au barreau du Cameroun, agissant pour le compte des parties saisies déposait en date du 15 Février 2007, des dires et observations au greffe de céans par lesquels, elle soulevait la nullité de la procédure et partant, la discontinuation des poursuites sur le fondement de plusieurs moyens à savoir :
La violation des articles 254, 267 et 270 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en abrégé AU N 6 pour la suite des présentes.
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 254 DE L’AU N 6
Attendu que sur ce moyen, les parties saisies ont évoqué la violation de l’article 254 (2) de l’AU N 6 qui exige à peine de nullité que le commandement aux fins de saisie doit être signifié au débiteur.
Qu’en l’espèce celui-ci a été signifié à sieur TAKAM Bonaventure et à son épouse, alors que la convention d’ouverture de crédit avec affectation hypothécaire N 1657/ REP du 25 Juillet 2005 a été passé entre la BICEC d’une part et « TABO EXPRESS » d’autre part.
Attendu qu’en réaction la saisissante relève qu’il y a identité de personne entre « TABO EXPRESS VOYAGE » et TAKAM Bonaventure, caution personnelle et solidaire de la première et conclut au rejet de cette prétention.
Attendu que s’il est constant que le débiteur désigné dans la convention de crédit sus citée est « TABO EXPRESS VOYAGE », il n’en pas moins vrai que le saisi TAKAM Bonaventure y est désigné comme caution personnelle et solidaire, mais alors et surtout comme propriétaire de l’immeuble objet de la poursuite de réalisation de l’hypothèque, tenu de répondre de l’insolvabilité du débiteur.
Qu’il ressort d’ailleurs des dispositions de l’article 297 de l’AU N 6 que les formalités prévues à l’article 254 du même acte ne sont sanctionnées par la nullité que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’a invoquée.
Qu’il y a lieu de rejeter cette prétention comme manquant de pertinence.
SUR LE DEUXIEME MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 267 DE L’AU N 6
Attendu que les parties saisies sollicitent l’annulation du cahier des charges et partant la nullité de la procédure au motif pris de ce que la saisissante n’a pas annexé l’état des droits inscrits sur l’immeuble au jour du commandement en violation de l’article 267 ci-dessus.
Attendu que s’il est vrai que cette formalité n’a pas été accomplie par la poursuivante, l’article 297 de l’AU N 6 dispose que la violation de cette formalité n’entraîne nullité que si cette irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque.
Qu’en l’espèce, il y a lieu de constater que les saisies se sont contentées d’invoquer cette irrégularité sans dire en quoi celle-ci leur a causé un quelconque grief.
SUR LE TROISIEME MOYEN PRIS DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 270 DE L’AU N 6
Attendu que les saisis, sous la plume de leur conseil sus – désigné, soutiennent que la dernière sommation à eux servie date du 31 Janvier 2007 et que la date de l’audience éventuelle a été arrêtée au 20 février 2007 pour la vente de l’immeuble.
Qu’ils estiment que le délai indiqué dans cette sommation a été fait en violation flagrante des dispositions de l’article 270 en son alinéa 1er de l’AU N 6 qui énonce à peine de nullité que cette audience éventuelle ne peut avoir lieu moins de trente jours après la dernière sommation.
Attendu que pour faire échec à cette prétention des saisis, la BICEC argue de ce que s’il est vrai que la sommation dont s’agit est celle de prendre connaissance du cahier des charges qui a été servie aux saisis, ceux-ci n’indiquent nullement la nature ou le régime de cette sommation puisque l’article 270 lui-même n’identifie pas clairement la sommation en cause.
Attendu qu’il résulte de l’analyse combinée des articles 269 et 270 de l’AU N 6 que la sommation dont s’agit est celle de prendre connaissance du cahier des charges.
Qu’il est expressément dit à l’article 269 que dans les huit jours au plus tard, après le dépôt du cahier des charges, le créancier saisissant fait sommation au saisi et aux créanciers de prendre communication au Greffe du cahier des charges et d’y faire insérer leurs dires.
Que l’article 270 quant à lui commence par l’adjectif démonstratif féminin singulier « cette » sommation, indique à peine de nullité pour désigner la sommation de prendre connaissance du cahier des charges dont fait allusion plus haut le 269.
Qu’il n’y a aucun doute que la dernière sommation dont s’agit est bel et bien la sommation de prendre connaissance du cahier des charges qui doit indiquer, à peine de nullité, les jours et heures d’une audience éventuelle au cours de laquelle il sera statué sur les dires et observations qui auraient été formulés, cette audience ne pouvant avoir lieu moins de trente jours (après la dernière sommation), martèle l’article 270 (1) de l’AU N 6.
Qu’en l’espèce, la dernière sommation a été servie le 31 Janvier 2007 et a fixé la date de l’audience éventuelle au 20 Février 2007 soit dix neuf jours après celle-ci.
Attendu que l’observation du délai minimum de trente jours après la dernière sommation et l’audience éventuelle est prescrite à peine de nullité de la procédure.
Qu’il s’ensuit de ce qui précède que le moyen sus-évoqué est pertinent et qu’il y a lieu d’ordonner en conséquence la discontinuation des poursuites.
Attendu que la partie qui succombe au procès en supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière civile et commerciale, en premier ressort, en collégialité et à l’unanimité des membres, déclare les défendeurs recevables en leurs dires et observations, l’y dit fondé.
Ordonne en conséquence la discontinuation des poursuites de la demanderesse.