J-09-235
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – COMMANDEMENT – AUDIENCE EVENTUELLE – DIRES ET OBSERVATIONS – DIRES TENDANT A L’ANNULATION DES POURSUITES – DELAI – 8 JOURS AVANT LA DATE D’ADJUDICATION – RESPECT DU DELAI (OUI) – DECHEANCE (NON).
Dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière, dès lors qu’une demande en contestation introduite après l’audience éventuelle tend à l’annulation des poursuites engagées et qu’elle a été introduite dans le délai de 8 jours avant la date prévue pour l’adjudication, elle doit être déclarée recevable.
Article 298 AUPSRVE
Article 299 AUPSRVE
(Tribunal de Grande Instance de Nkongsamba, Jugement N 31/CIV du 17 Avril 2008, Affaire Monsieur NFANKOU Jean planteur demeurant à Nkongsamba contre le Crédit Lyonnais Cameroun (CLC).
Le Tribunal
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Vu les lois et règlement en vigueur.
Attendu qu’en vertu de la grosse en forme exécutoire de la convention d’ouverture de compte courant, avec affectation hypothécaire N 38/7 du 21 Mai 1985 du répertoire de Maître Oscar SOCKA BONGUE, Notaire à Nkongsamba, le Crédit Lyonnais du Cameroun en abrégé (C.L.C.) Société Anonyme au capital de 6 milliard de francs, dont le siège est a Avenue VOGT BP 700 Yaoundé, ayant pour conseil Maître KOLLOKO Fidèle, Avocat au Barreau du Cameroun, est créancière envers NFANKOU Jean, commerçant à Nkongsamba, de la somme de 12.856.057 francs, ainsi que le confirme surabondamment le relevé de compte versé au présent dossier.
Que cette créance est garantie par une hypothèque de premier rang consentie sur l’immeuble objet du titre foncier N 2357 du Département du Moungo par NFANKOU au profit de la C.L.C par la grosse sus-visé.
Que suivant commandement en date du 17 Décembre 2007 la C.L.C a entrepris le recouvrement de ladite créance par voie de saisie immobilière.
Que pour ce faire, ce commandement a dûment été inscrit à la conservation foncière du Département du Moungo, pour valoir publication et saisie.
Que le cahier des charges y relatif a également été déposé au greffe du Tribunal de Grande Instance de céans, avec sommation faite au débiteur d’en prendre communication et d’y insérer éventuellement des dires et observations.
Qu’aucun dire, ni observation n’ayant été déposé dans le délai légal, et alors que la vente de l’immeuble hypothéqué était programmée au 13 Mars 2008, sieur NFANKOU Jean, sous la plume de son conseil Luc TCHOUAWOU SIEWE, Avocat au Barreau du Cameroun, a saisi le Président du Tribunal de Grande Instance de céans d’une requête aux fins de contestation, en vertu des articles 298 et 299 de l’Acte Uniforme OHADA N 6, sollicitant notamment l’annulation des poursuites ainsi engagées aux motifs :
1) Que l’Hypothèque grevée sur son immeuble objet de saisie a été passée devant un seul Notaire et en l’absence de deux témoins, ceci en violation des dispositions de l’article 2127 du Code Civil.
2) Que cette hypothèque n’a non plus été renouvelée avant l’expiration du délai de dix ans prévu par l’article 2154 du même code.
Attendu que réagissant à cet argumentaire, le C.L.C a conclu à la déchéance de sieur NFANKOU Jean, au motif que sa requête en contestation étant intervenue après l’audience éventuelle, ne pouvait être introduite que dans le délai de 8 jours au plus tard avant la date d’adjudication, ceci à peine de déchéance, ainsi que le prévoit l’article 299 alinéa 2 de l’Acte Uniforme n 6 qui traite des pareilles requêtes.
Que contrairement à cela, la requête introduite par NFANKOU le 5 Mars 2008 alors que l’adjudication était prévue pour le 13 Mars 2008 n’a pas observé ce délai de 8 jours, et qu’il y a lieu de constater sa déchéance pour non respect des délais prévus à l’article 299 de l’Acte Uniforme sus visé.
Attendu que le Tribunal est donc appelé à se prononcer de prime abord sur la recevabilité de la requête en contestation introduite par NFANKOU Jean, avant d’en examiner les mérites au fond.
I SUR LA FORME
Attendu que l’article 299 alinéa 2 de l’Acte Uniforme N 6 dispose que : « les demandes fondées sur un fait ou sur acte survenu ou révélé postérieurement à l’audience éventuelle et celles tendant à faire prononcer la distraction de tout ou partie des biens saisis, la nullité de tout ou partie de la procédure suivie à l’audience éventuelle, ou la radiation de la saisie, peuvent encore être présentées après l’audience éventuelle, mais seulement à peine de déchéance jusqu’au huitième jour avant l’adjudication ».
Attendu que la demande en contestation introduite par NFANKOU Jean visait l’annulation des poursuites engagées par la C.L.C.
Qu’elle a effectivement été déposée au 5 Mars 2008, alors que la vente était prévue au 13 Mars 2008, donc exactement au huitième jour avant l’adjudication, tel que le prescrit le texte de loi sus visé.
Qu’il échet de dire NFANKOU Jean recevable en sa demande pour l’avoir introduite dans les formes et délais légaux.
II AU FOND
Attendu que sieur NFANKOU sollicite l’annulation des poursuites engagées contre pour deus raisons :
1) Que l’hypothèque qui fonde lesdites poursuites a été passée par devant un seul Notaire, et en l’absence de deux témoins au mépris des dispositions de l’article 2127 du Code Civil.
2) Que cette hypothèque n’a en outre pas été renouvelée avant l’expiration du délai de dix ans prévu par l’article 2124 du même Code.
Mais Attendu sur le premier moyen que l’article 2127 du Code Civil ne prescrit pas la présence des deux témoins sous peine de nullité.
Attendu qu’il n’y a pas de nullité sans texte.
Qu’au surplus, le fait que cette convention d’hypothèque ait été passée en l’absence de deux témoins, n’a causé et ne cause aucun préjudice à NFANKOU qui bien au contraire en a profité en encaissant les crédits que le C.L.C lui a consentis en contrepartie.
Qu’en outre, cet état de chose ne l’empêche en rien d’assurer correctement la défense de ses droits en l’espèce.
Que NFANKOU Jean ne saurait d’ailleurs se prévaloir de sa propre turpitude, lui qui a participé à cette convention, et en a joui des fruits, sans en déplorer le moindre vice.
Qu’il échet au regard de cette analyse, de rejeter le moyen de nullité excipé comme non fondé.
Attendu sur le second moyen, que les débats ont établi contrairement aux prétentions de NFANKOU, que cette hypothèque a bel et bien été renouvelée conformément aux dispositions de l’article 2154 du Code Civil.
Que quand bien même elle ne l’aurait pas été cela n’aurait eu aucun effet négatif sur les poursuites, étant entendu qu’aucun texte n’interdit à un créancier chirographaire de recouvrer sa créance par la voie de la saisie immobilière.
Qu’il échet de rejeter ce deuxième moyen comme non fondé.
Attendu qu’il y a lieu dans ces conditions d’ordonner la continuation des poursuites, celles-ci n’étant entachées d’aucune irrégularité susceptible d’entraîner leur annulation, de fixer une nouvelle date de vente, et d’ordonner de nouvelles mesures de publicité.
Attendu que celui qui succombe au procès en supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière civile et commerciale, et en premier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Reçoit NFANKOU Jean en sa demande en contestation.
L’y dit cependant non fondé et l’en déboute.
Ordonne la continuation des poursuites.
Fixe au 05 Juin 2008 la nouvelle date de l’adjudication.
Ordonne les nouvelles mesures de publicité par le créancier poursuivant.