J-09-261
CCJA – COMPETENCE – DECISIONS SUSCEPTIBLES DU RECOURS EN CASSATION – MESURE PROVISOIRE AYANT POUR OBJET DE SUSPENDRE UNE EXECUTION FORCEE DEJA ENGAGEE (NON) – MESURE EMPECHANT QU’UNE TELLE MESURE PUISSE S’EXECUTER – MESURE ENTRANT DANS LA CATEGORIE DES DECISIONS SPECIFIEES PAR L’ARTICLE 14 ALINEA 3 ET 4 DU TRAITE (NON) – INCOMPETENCE DE LA CCJA.
La CCJA doit se déclarer incompétente dès lors que l’ordonnance, objet du recours en cassation, n’entre pas dans la catégorie des décisions spécifiées aux alinéas 3 et 4 de l’article 14 du Traité OHADA.
Il en est ainsi de l’ordonnance attaquée qui n’avait pas pour objet de suspendre une exécution forcée déjà engagé mais d’empêcher qu’une telle exécution puisse être entreprise.
C.C.J.A., 1ère Chambre, arrêt n 052 du 20 novembre 2008, affaire : Études et Réalisations d’Ouvrages Hydrauliques dite EROH SARL c/ Banque Internationale du Burkina dite BIB S.A. Juris Ohada n 1/2009, janvier-mars, p. 14.
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 22 août 2007 sous le n 074/2007/PC et formé par le Cabinet Maître Jean Charles TOUGMA, Avocats à la Cour, 11 BP 316 Ouagadougou 11, BURKINA FASO et Maître Alayidi Idrissa BA, Avocat à la Cour, 11 BP 316 Ouagadougou, BURKINA FASO, agissant au nom et pour le compte de la société Études et Réalisations d’Ouvrages Hydrauliques dite EROH SARL dans la cause l’opposant à la Banque internationale du Burkina dite BIB S.A ayant pour conseil Maître Barthélemy KERE, Avocat à la Cour, 508, Rue Gourme (28.239), secteur 28, Ouagadougou, 01 BP 2173 Ouagadougou 01.
en cassation de l’Ordonnance n 11/2007/G.C/C.CASS rendue le 05juillet 2007 par le Premier Président de la Cour de Cassation du BURKINA FASO et dont le dispositif est le suivant :
– « Statuant en chambre de conseil et en forme de référé.
En la forme.
Déclarons la requête recevable.
Au fond.
Ordonnons le sursis à l’exécution de l’arrêt n 105 rendu le 18 mai 2007 par la Cour d’appel de Ouagadougou dans la cause opposant la BIB à la Société EROH, sarl.
Lions les dépens au fond du pourvoi.
Renvoyons l’affaire devant la Chambre commerciale de la Cour de cassation pour la poursuite de la procédure de pourvoi conformément à la procédure d’urgence visée à l’article 619 du code de procédure civil; ».
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi trois moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la « requête afin de pourvoi en cassation » annexée au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur le Juge Maïnassara MAÏDAGI.
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que, par Arrêt n 105 du 18 mai 2007, la Chambre civile et commerciale de la Cour d’appel de Ouagadougou condamnait la Banque Internationale du Burkina dite BIB S.A à payer à la société Études et Réalisations d’Ouvrages Hydrauliques dite EROH SARL la somme de 3.181.195.342 F CFA; que le 1~ juin 2007, la BIB S.A. se pourvoyait en cassation contre l’Arrêtsus indiqué devant la Cour de cassation du BUKINA FASO; que par requête en date du 19juin 2007 elle sollicitait du Premier Président de la Cour de cassation, en application de l’article 607 du code de procédure civile du Burkina Faso tel que modifié par l’article 1er de la loi 30-2004 AN du 10 septembre 2004, le sursis à l’exécution de l’arrêt du 18 mai 2007 jusqu’au dénouement du pourvoi; que par Ordonnance rendue en forme de référé n 11/2007/G.C/C.CASS du 05juillet 2007, dont pourvoi, le Premier Président de la Cour de cassation faisait droit à la demande de la BIB S.A. en ordonnant le sursis à l’exécution de l’Arrêt n 105 du 18 mai 2007sus indiqué.
Sur la compétence de la Cour de céans
Vu l’article 14, alinéas 3 et 4 du Traité institutif de l’OHADA.
Attendu que la BIB S.A, défenderesse au pourvoi, soulève l’incompétence de la Cour de céans à connaître du présent pourvoi au motif que l’ordonnance attaquée et qui a eu pour effet de surseoir à l’exécution de l’Arrêt n 105 du 18 mai 2007 de la Cour d’appel de Ouagadougou a été rendue en application de l’article 607 du code burkinabé de procédure civile, lequel régit les effets du pourvoi et non sur la base des dispositions de l’Acte uniforme qui, elles, régissent les voies d’exécution.
Attendu que EROH soutient, pour sa part, que la cause litigieuse porte sur les voies d’exécution prévues par les articles 28 et suivants de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; qu’en effet, par exploit du 21 juin 2007, la concluante a fait signifier à la Société BIB l’Arrêt n 105 en date du 18 mai 2007 de la Cour d’appel de Ouagadougou et lui a également fait commandement avant saisie-vente d’avoir à lui payer dans un délai de 08 jours la somme totale de 3.488.390.303 F CFA; que ce commandement de payer marque le début de l’exécution forcée de l’arrêt de condamnation de la société BIB; qu’auparavant, la Société EROH avait, par procès-verbal en date des 20 et 21 juin 2007, fait pratiquer une saisie conservatoire dénoncée à cette dernière par exploit en date du 21juin 2008; qu’ainsi, l’ordonnance querellée rendue le 05 juillet 2007 a eu pour effet de suspendre l’exécution forcée entamée, notamment par la signification-commandement avant saisie-vente faite à la Société BIB le 21 juin 2007; que la censure d’une telle décision suspendant une mesure d’exécution forcée et rendue en premier et dernier ressort, relève de la compétence de la CCJA, en application de l’article 14 alinéas 3 et 4 du Traité OHADA.
Attendu qu’aux termes de l’article 14, alinéas 3 et 4 du Traité susvisé qui détermine la compétence de la Cour de céans en matière contentieuse, « saisie par la voie du recours en cassation, la Cour se prononce sur les décisions rendues par les juridictions d’appel des Etats parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des Règlements prévus au présent Traité à l’exception des décisions appliquant des sanctions pénales.
Elle se prononce dans les mêmes conditions sur les décisions non susceptibles d’appel rendues par toute juridiction des Etats parties dans les mêmes contentieux »
Attendu, en l’espèce, qu’à la suite d’un pourvoi qu’elle avait formé contre l’Arrêt n 105 rendu le 18 mai 2007 par la Chambre Civile et Commerciale de la Cour d’appel de Ouagadougou, la BIB avait introduit le 19juin 2007 devant Monsieur le Premier Président de la Cour de Cassation du BURKINA FASO une requête afin d’être autorisé à assigner en référé aux fins de sursis à l’exécution de l’Arrêt suscité; que par Ordonnance n 10/2007 du 19 juin 2007, la BIB avait été autorisée à assigner EROH pour le lundi 25juin 2007 à 10 heures pour voir statuer sur les mérites de sa requête; que le même jour 19 juin 2007, BIB délaissait l’exploit d’assignation à EROH d’avoir à comparaître le lundi 25 juin 2007 à 10 heures en vue de s’entendre dire bien fondée et en conséquence ordonner le sursis à l’exécution de l’Arrêt n 105 du 18mai2007.
Attendu que c’est après avoir régulièrement saisi Monsieur le Premier Président de la Cour de cassation par exploit d’assignation en référé en date d,u 19 juin 2007 aux fins de sursis à exécution de l’Arrêt n 105 rendu le 18 mai 2007 par la Chambre Civile et Commerciale de la Cour d’appel de Ouagadougou que BIB a reçu, d’une part, le 21juin 2007 la dénonciation du procès-verbal de saisie conservatoire de créances et, d’autre part, toujours le 21 juin 2007 la signification commandement tendant à saisie-vente en vertu de l’Arrêt n 105 du 18 mai 2007.
Attendu que l’Ordonnance n 11/2007/G.C/C.CASS du 05 juillet 2007 rendue par le Premier Président de la Cour de Cassation du BURKINA FASO et contre laquelle la société EROH SARL s’est pourvue en cassation est une mesure provisoire prise sur « requête aux fins de sursis à l’exécution de l’Arrêt n 105 rendu le 18 mai 2007 par la Cour d’appel d& Ouagadougou » en application, non pas d’un Acte uniforme ou d’un Règlement prévu au Traité de I’OHADA, mais plutôt des dispositions de l’article 607 du Code burkinabé de procédure civile; que ladite procédure aux fins de sursis à exécution introduite le 19 juin 2007, donc avant la dénonciation du procès-verbal de saisie-conservatoire de créances du 21juin 2007 et avant la signification du commandement tendant à saisie-vente également du 21juin 2007 et qui a abouti à l’ordonnance attaquée n’avait pas pour objet de suspendre une exécution forcée déjà engagée mais d’empêcher qu’une telle exécution puisse être entreprise; qu’il suit que ladite ordonnance n’entre pas dans la catégorie des décisions spécifiées aux alinéas 3 et 4 susénoncés de l’article 14 du Traité susvisé et ne peut donc faire l’objet de recours en cassation devant la Cour de céans; qu’il s’ensuit que ladite Cour doit se déclarer incompétente pour statuer sur le recours introduit par la société EROH SARL.
Attendu que la société EROH SARL ayant succombé, doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Se déclare incompétente.
Condamne la société EROH SARL aux dépens.
PRESIDENT : M. Jacques M’BOSSO