J-09-269
VOIES D’EXECUTION – SAISIE IMMOBILIERE – CAHIER DES CHARGES – SOMMATION AU DEBITEUR D’EN PRENDRE COMMUNICATION – SIGNIFICATION A PARQUET – VIOLATION DE L’ARTICLE 269 (OUI) – NULLITE DE LA SOMMATION.
VOIES D’EXECUTION – SAISIE IMMOBILIERE – CAHIER DES CHARGES – MENTION – FRAIS DE POURSUITE – INDICATION (NON) – NULLITE DU CAHIER DES CHARGES.
La sommation de prendre communication du cahier des charges doit être déclaré nulle, dès lors que sa signification n’a pas été faite en la personne du débiteur mais plutôt à parquet, en la personne du substitut du Procureur de la République au mépris des prescriptions de l’article 269 alinéa 2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des Voies d’exécution.
En déclarant nul le cahier des charges pour défaut de rappel des frais de poursuites, le jugement attaqué fait une saine application de l’article 267-8 de l’Acte uniforme susvisé, dès lors qu’une application dudit article, le défaut de cette mention expose ledit cahier des charges à l’annulation.
C.C.J.A.1ère CHAMBRE, ARRET N 060 du 30 décembre 2008, affaire : Banque Internationale de l’Afrique de l’Ouest dite BIAO-CI c/ 1. Monsieur S; 2. Madame C. Juris Ohada, n 1/2009, janvier-mars, p. 39.
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le n 028/2004/PC du 1er mars 2004 et formé par Maître Agnès OUANGUI, Avocat à la Cour, demeurant à l’immeuble SIPIM, 5è étage, 24 Boulevard Clozel, 01 B.P. 1306 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de la B1AO-Ci, société anonyme dont le siège social est sis au 8-10, Avenue Joseph ANOMA, Abidjan-Plateau, 01 B.P. 1274 Abidjan 01, représentée par Mr V, Administrateur Directeur général dans la cause qui l’oppose à Monsieur S demeurant à Abidjan, 11 B.P. 1490 Abidjan 11 et Madame C, épouse divorcée de Monsieur S demeurant Route de Douvaine, 74890 Bons en Chablais (FRANCE).
En cassation du Jugement n 576/Civ./4 rendu le 19 novembre 2001 par le Tribunal de première instance d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
– « Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort.
Le Tribunal constate que les dires et observations du défendeur n’ont pas été présentés dans les débats légaux’; en conséquence les en déclare déchus; Ecarte les divers et observations présentés oralement.
Constate que Dame C est domiciliée en France.
Constate que la sommation à elle servie d’avoir à prendre communication du cahier des charges a été délaissée à parquet le 11 octobre 2001 en violation des pièces concernant les délais de distance.
Constate en conséquence que cette sommation est nulle et de nul effet.
Constate également que le cahier des charges est nul pour défaut de rappel des frais de poursuite.
Dit en conséquence que la procédure est irrégulière.
L’annule et ordonne la main levée du commandement afin de saisie réelle en date du 3 octobre 2001.
Condamne la BIAO Cl aux dépens »
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur Jacques M’BOSSO, Président.
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’arbitrage de l’OHADA.
Attendu que les ex-époux S et C n’ont pu être joints par le Greffier en chef de la Cour de céans, lequel leur avait adressé respectivement les lettres n 245/2004/G5 en date du 17 mai 2004 et n 169/2004/G5 en date du 19 avril 2004 à l’effet de leur signifier, en application des articles 29 et 30 du Règlement susvisé, le recours en cassation formé par la BIAO-Cl contre le Jugement n 576/Civ/4 rendu le 19 novembre 2001 par le Tribunal de première instance d’Abidjan dans une cause qui les opposait à celle-ci; que par ailleurs, la SCPA NAMBEYADOGBEMIN & Associés, constituée en première instance pour les susnommés, a, par lettre n S.012/NOAIMB en date du 26 octobre 2004, informé le Greffier en chef de la Cour de céans de ce qu’elle n’est plus constituée aux soins des intérêts de Monsieur S; que toutes les diligences prescrites par le Règlement précité ayant été accomplies, il y a lieu d’examiner le présent recours.
Attendu qu’il résulte de l’examen des pièces du dossier de la procédure que Monsieur S et son ex-épouse C avaient obtenu de la BIAO-Ci un prêt qu’ils avaient remboursé en partie et restaient devoir la somme principale de soixante seize millions quatorze mille cinq cent quatre vingt sept (76.014.587) francs CFA; qu’ayant été attraits devant le Tribunal de première instance d’Abidjan par la BIAO-CI, Monsieur S et Madame C avaient été condamnés solidairement par Jugement n 542/92 du 30 décembre 1992 à payer ladite somme à la B1AO-Cl; qu’en exécution dudit jugement qui était devenu définitif et qui avait été signifié le 14 mai 1993, la BIAO-CI avait entrepris à l’encontre de ses débiteurs une procédure de saisie immobilière portant sur l’immeuble, objet du titre foncier n 10559 de la circonscription foncière de Bingerville; qu’ainsi, par le ministère de Maître Nicolas DAGO, huissier de justice à Abidjan, la BIAO-Cl avait servi le 03 octobre 2001 un commandement afin de saisie réelle à Monsieur S en personne et à parquet en la personne du Substitut du procureur de la République du Tribunal de première instance d’Abidjan, pour ce qui concerne C; qu’après avoir rédigé et déposé le cahier des charges au greffe dudit Tribunal le 10 octobre 2001, la BIAO-Ci avait sommé ses débiteurs par exploit du 11 octobre 2001 pour en prendre communication et y annexer leurs dires et observations; qu’enfin, à l’audience éventuelle du 19 novembre 2001, le Tribunal de première instance d’Abidjan avait rendu dans la cause opposant la B1AO-Ci à ses débiteurs susnommés le Jugement n 576/Civ./4 dont pourvoi.
Sur le premier moyen
Vu l’article 269 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Attendu qu’il est fait grief au jugement attaqué d’avoir considéré que la BIAO-CI devait tenir compte des délais de distance dans l’exploit du 11 octobre 2001 par lequel elle a fait sommation à ses débiteurs S et C de prendre communication du cahier des charges alors que, selon le moyen, à l’analyse de l’article 270, il n’apparaît nulle part que le créancier poursuivant doit, en procédant à la signification de ladite sommation, respecter des délais de distance si un débiteur est à l’étranger; que l’article 270 met [seulement] à la charge du créancier poursuivant l’obligation d’informer le débiteur saisi sur les dates de l’audience éventuelle et de l’adjudication qui doivent être fixées en tenant compte des délais prévus par ledit article; (..) que le premier juge, en reprochant à la BIAO-Ci de ne pas tenir compte des délais de distance dans son exploit de sommation du fait qu’un des débiteurs réside à l’étranger alors que cette obligation n’est pas prévue par les dispositions de l’article 270, a violé le principe selon lequel « il n’y a pas de nullité sans texte »
Attendu que contrairement à ce que soutient la demanderesse au pourvoi, c’est plutôt l’article 269 au lieu du 270 de l’Acte uniforme susvisé qui traite de la sommation à prendre communication du cahier des charges; qu’aux termes dudit article 269 de l’Acte uniforme susvisé, « dans les huit jours au plus tard après le dépôt du cahier des charges, le créancier saisissant fait sommation au saisi et aux créanciers inscrits de prendre communication au greffe du cahier des charges et d’y faire insérer leurs dires.
A peine de nullité, cette sommation est signifiée au saisi, à personne ou à domicile, et aux créanciers inscrits à domicile élu »
Attendu, en l’espèce que la signification de la sommation de prendre communication du cahier des charges n’a pas été faite à la personne de Madame C mais plutôt à parquet en la personne du Substitut du Procureur de la République près le Tribunal de première instance d’Abidjan. au mépris des prescriptions de l’article 269 alinéa 2 sus énoncé; qu’ainsi, en constatant que la sommation servie à la Madame C a été délaissée à parquet le 11 octobre 2001 en violation des textes en~ vigueur notamment l’article 269 et en déclarant nulle ladite sommation, le premier juge ne viole en rien l’article 270 visé dans le moyen et le jugement attaqué n’encourt pas le reproche qui lui est fait; qu’il échet en conséquence de rejeter ce premier moyen comme étant mal fondé.
Sur le second moyen
Vu l’article 267-8 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Attendu qu’il est également fait grief au jugement attaqué d’avoir déclaré nul le cahier des charges pour défaut de rappel des frais de procédure alors que, selon le moyen, les frais de poursuite étant l’ensemble des frais dont est redevable le débiteur à l’occasion de la procédure de saisie immobilière, il est tout à fait logique que le montant de ces frais [ne puisse] être déterminé et connu au début de ladite procédure, le cahier des charges étant un acte préliminaire à la vente de l’immeuble, objet de la procédure de saisie immobilière c’est-à-dire à partir du dernier acte précédant l’adjudication de l’immeuble; que par conséquent le premier juge a fait une mauvaise appréciation de l’article 267-8 sus-indiqué et exposé sa décision à l’annulation.
Attendu qu’aux termes de l’article 267-8 de l’Acte uniforme susvisé, « le cahier des charges contient, à peine de nullité.
8) les conditions de la vente et notamment les droits et obligations des vendeurs et adjudicataires, le rappel des frais de poursuite et toute condition particulière »
Attendu, en l’espèce, que le cahier des charges établi par la BIAO-Cl ne fait pas état des frais de poursuite; qu’en application des dispositions sus-énoncées de l’article 267-8 de l’Acte uniforme susvisé le défaut de cette mention expose ledit cahier des charges à l’annulation qu’ainsi, en déclarant nul le cahier des charges pour défaut de rappel des frais de poursuites, le jugement attaqué fait une saine application de l’article 267-8 susvisé; qu’il suit que ce second moyen de cassation n’est pas davantage fondé et doit être rejeté.
Attendu que la BIAO-Cl ayant succombé, il échet de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Rejette le pourvoi formé par la BIAO-Cl
La condamne aux dépens.
PRESIDENT : M. Jacques M’BOSSO