J-09-296
SOCIETES COMMERCIALES – ADMINISTRATEUR PROVISOIRE – CONDITIONS DE NOMINATION.
La nomination d’un administrateur provisoire n’est admise qu’en cas la mésintelligence paralysant le fonctionnement des organes sociaux – il n’y a pas lieu d’y procéder dès lors que les organes de la société fonctionnent, se réunissent régulièrement et délibèrent conformément aux statuts de ladite société.
Cour suprême de Côte d’Ivoire, Chambre judiciaire, arrêt n 123/07 du 9 mars 2007, La société YARA WEST AFRICA, la Société YARA France (Me Théodore HOEGAH st Michel ETTE) c/ la Société de financement et de participation de Côte d’Ivoire dite SFPI (Me Jules Avlessi). Actualités juridiques, n 57, p. 150.
La Cour
Vu les mémoires produits
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de la loi, en sa première branche et tiré de l’article 226 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Abidjan, 24 octobre 2006) que courant août 2006, la Société de financement et participation de Côte d’Ivoire dite S.F.P-CI l’un des actionnaires de la Société YARA WEST AFRICA a porté plainte avec constitution de partie civile contre les dirigeants sociaux de celle-ci pour détournement de fonds; qu’estimant que les relations entre les associés s’étaient détériorées à la suite de cette plainte, la SFP-CI a saisi le juge des référés pour solliciter un audit des comptes et la nomination d’un administrateur provisoire; que le Juge des référés a fait droit à la demande; que la Cour d’Appel d’Abidjan a confirmé cette décision.
Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt d’avoir retenu la compétence du Juge des référés pour ordonner la nomination d’un administrateur provisoire, alors que selon le moyen, l’existence d’une plainte devant le doyen des Juges d’instruction, et partant d’une procédure au principal aurait dû amener le Juge des référés à se déclarer incompétent, de sorte qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a violé l’article 226 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative qui dispose que la décision du Juge des référés ne peut en aucun cas porter préjudice au principal.
Mais Attendu que le Juge des référés ayant été saisi pour ordonner une administration provisoire, mesure purement conservatoire, l’existence d’une procédure au principal ne fait pas obstacle à sa compétence; qu’ainsi, en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel n’a nullement violé l’article 226 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative visé au moyen, lequel n’est pas fondé en cette branche.
Sur la deuxième branche du premier moyen tiré de la violation de l’article 4 du Code de Procédure Pénale
Attendu qu’il est encore fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir accueilli la demande de la Société de Financement et Participation alors que selon le moyen, l’action publique ayant été mise en mouvement, il devait être sursis au jugement sur l’action exercée devant la juridiction civile, tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique et d’avoir ainsi violé lesdits positions de l’article 4 du Code de Procédure Pénale.
Mais Attendu qu’une assignation en référé n’est pas une action exercée devant la juridiction du fond; que dès. lors, le sursis à statuer ne s’imposait pas; qu’ainsi, en statuant sur les mesures qui lui étaient demandées, la Cour d’Appel n’a pas méconnu l’article 4 du Code de Procédure Pénale; qu’il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé en cette autre branche.
Mais sur le deuxième moyen pris du défaut de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance de l’obscurité ou de la contrariété de motifs
Vu l’article 206-6) du Code de Procédure Civile, commerciale et Administrative
Attendu que pour ordonner la désignation d’un administrateur provisoire, l’arrêt attaqué retient que les relations entre les actionnaires de la Société YARA WEST AFRICA se sont détériorées, au point d’installer un véritable climat de mésintelligence entre eux; qu’en outre, il n’est pas justifié que cette mésintelligence ait paralysé les organes sociaux et que par ailleurs celle-ci se trouve en face d’un péril imminent.
Attendu qu’en statuant ainsi sans rechercher comme elle l’y était invitée, si la mésintelligence alléguée paralysait le fonctionnement de la société YARA WEST AFRICA, la Cour d’Appel a, par Insuffisance de motifs manqué de donner une base légale à sa décision; qu’il y a lieu de casser et annuler partiellement l’arrêt attaqué et d’évoquer en application de l’article 28 de la loi n 97-243 du 25 avril 1997.
Sur l’évocation
Attendu que la nomination d’un administrateur provisoire, n’est admise qu’autant que la mésintelligence invoquée paralyse le fonctionnement des organes sociaux; qu’il ressort des productions que les organes de la société YARA WEST AFRICA fonctionnent, se réunissent et délibèrent conformément aux statuts; que dès lors, il n’y a pas lieu à désignation d’un administrateur provisoire de ladite Société.
PAR CES MOTIFS
Casse partiellement l’arrêt attaqué.
Évoquant
Dit n’y avoir lieu à désignation d’un administrateur provisoire de la Société YARAWEST AFRICA.
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Président : M. BOGA TAGRO (rapporteur).
Conseillers : Mme. TMITE SOPHIE, M. AGNIMEL MELEDJE.
Greffier : Me AHISSI N’DA Jean-François.