J-09-298
TRANSPORT DE MARCHANDISES – PRESOMPTION DE LIVRAISON CONFORME – PRESOMPTION SIMPLE AVARIES – ABSENCE DE RESERVE – PREUVE CONTRAIRE PAR RAPPORT D’EXPERTISE.
Le défaut de réserve prises par une société manutentionnaire au moment de la réception par elle des marchandises n’exonère nullement le transporteur maritime de ses responsabilités en cas d’avaries constatées avant les opérations de manutention.
La présomption de livraison conforme prévue par l’article 3,6 de la convention de Bruxelles de 1924 étant une présomption simple, la preuve contraire peut être rapportée notamment par un rapport d’expertise.
Cour Suprême de Côte d’ivoire, Chambre Judiciaire, arrêt n 128/07 du 15 mars 2007, Sté GEODIS OVERSEAS (Me KONE DE MESSE ZINSOU) Capitaine du Navire SZCZECIN (SCPA KONAN et FOLQUET) c/ SAFA Assurances (SCPA QUATTA et BILE). Actualités juridiques, n 57, p. 152.
La Cour
Vu l’exploit de pourvoi en cassation du 7 septembre 2004.
Vu le mémoire produit.
Vu les conclusions du Ministère Public du 5 octobre 2006.
Sur le moyen unique de cassation tiré de la violation de la loi ou erreur dans l’application ou l’interprétation de la loi, notamment du principe de la présomption de livraison conforme au connaissement,
Attendu que selon ce principe édicté par l’article 3,6 de la convention internationale pour l’unification de certaines règles en matière de connaissement signée à Bruxelles le 25 avril 1924 « à moins qu’un avis de pertes ou dommages ne soit donné par écrit au transporteur ou à son agent au port de chargement, avant ou au moment de l’enlèvement des marchandises et de leur mise sous la garde de la personne ayant droit à la délivrance sous l’empire du contrat de transport, cet enlèvement constituera, jusqu’à preuve contraire, une présomption que les marchandises ont été délivrées par le transporteur telles qu’elles sont décrites au connaissement
Vu ledit texte
Attendu, selon les énonciations de l’arrêt attaqué, (Abidjan. 30 juillet 2004) que suivant connaissement n 04 émis le 1er juin 2001 à GOTHENBERG, il a été chargé à bord du navire. SZCZECIN, 632 rouleaux de papier, à destination du port d’Abidjan par la compagnie maritime EURO AFRICA LINES, pour le compte de la société ROTOCI; qu’à l’arrivée du navire le 21 juin 2001, les opérations de manutention et d’acconage, notamment le déchargement et la livraison, ont été assurées par la société GEODIS OVERSEAS, laquelle a fait procéder, préalablement à toute intervention, à une expertise des marchandises transportées par la compagnie CONTROL UNION Côte d’Ivoire qui a conclu à des avaries portant sur 27 rouleaux de papier déchirés avant manutention et il rouleaux au cours de cette opération; que la compagnie Solidarité Africaine d’Assurances, dite SAFA, subrogée dans les droits de la société ROTOCI, destinataire des marchandises, assignait la compagnie EURO AFRICA UNES, le transporteur, et la société GEODIS OVERSEAS, en paiement de la somme de 32.540.735 F, en réparation du préjudice résultant des avaries causées aux marchandises y compris les frais d’expertise, devant le tribunal de Première Instance d’Abidjan qui condamnait la société GEODIS OVERSEAS à payer à la société SAFA la somme de 32.540.735 F et mettait hors de cause le transporteur maritime, par jugement du 26 novembre 2003.
Attendu que pour confirmer le jugement entrepris, la Cour d’Appel a considéré que « s’il est établi que le rapport délivré par l’expert commis par la société GEODIS OVERSEAS a révélé des avaries de vingt et un rouleaux de papier intervenues avant manutention et vingt sept autres~ causées pendant les opérations de manutention”, ladite société n’a pas pris de réserve au moment de la réception par elle des marchandises, de sorte qu’elle est mal venue à tenir le transporteur maritime pour responsable des avaries constatées, ce dernier bénéficiant de la présomption de livraison conforme prévue par l’article 3,6 de la convention de Bruxelles du 25 Août 1924.
Attendu cependant qu’en statuant ainsi, alors que la présomption de livraison conforme prévue par l’article 3,6 de la convention de Bruxelles de 1924, est une présomption simple tombant devant le preuve contraire qui peut être établie par tous moyens, notamment par un rapport d’expertise, comme dans le cas d’espèce, la Cour
d’Appel a violé le texte visé au moyen; d’où il suit que le moyen est fondé; qu’il y a lieu de casser et d?annuler l’arrêt attaqué, et d’évoquer conformément à la loi.
Sur l’évocation
Attendu qu’il résulte du rapport d’expertise contradictoire de Contrôle Union que les avaries portent sur 38 rouleaux de papier dont 27 constatées avant manutention, donc imputables au bord, et 11 à la charge de l’aconier manutentionnaire; que le préjudice étant évalué à la somme de 32.540.735 F y compris les frais d’expertise, il y a lieu de condamner le transporteur maritime et l’aconier manutentionnaire à payer à la Compagnie SAFA chacun leur quote-part du préjudice soit :
pour la compagnie EURO AFRICA UNES :
– 32.540.735x27 / 28 = 23.121 048,6;
– 32,540.735x11 / 28 = 9.419.686,4.
PAR CES MOTIFS
Casse et annule l’arrêt attaqué
Évoquant condamne la compagnie Maritime EURO AFRICA LINES et la société OVERSEAS à payer à la Compagnie d’Assurance SSAFA respectivement les sommes de 23.121 048,6 F et de 9.419.686,4
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Président : M. ADAM SEKA.
Conseillers : M. VE BOUA (rapporteur), M. SIOBLO DOUAI.
Greffier : Me N’GUESSAN Germain.