J-09-312
EXECUTION D’UNE DECISION DE JUSTICE – PROCEDURE D’EXEQUATUR – DILIGENCE A ACCOMPLIR PAR LE JUGE DE L’EXEQUATUR.
Le juge de l’exéquatur doit vérifier que les conditions de l’exéquatur sont réunies et mentionner dans sa décision les résultats de ses vérifications.
Cour suprême de Côte d’Ivoire, Chambre judiciaire, arrêt n 027/01, Sté PAPIGRAPII CI.
(MES KONE Mamadou et KOUASSI N’GUESSAN Paul) c/ Sté COFACREDIT (Mes DOGUE~ABBE-YAO et Associé), Actualités juridiques n 62, p. 71.
LA COUR
Vu les mémoires produits par les demandeur et défendeur.
VU les conclusions écrites du Ministère Public en date du 22 Septembre 2000.
Ensemble la troisième branche du premier moyen de cassation et le second moyen de cassation
Attendu que l’article 39 de la loi n 61-248 du 05 Août 1961 relative à l’Accord en matière de Justice entre la Côte d’Ivoire et la France dispose que “ le Président se borne à vérifier si la décision dont l’exequatur est demandé remplit les conditions prévues à l’article 36 pour avoir de plein droit l’autorité de la chose jugée. Il procède d’office à cet examen et doit en constater le résultat dans sa décision.
Attendu, selon l’ordonnance de référé attaqué (n 4117 du 03 Septembre 1999, Tribunal de Première Instance d’Abidjan) que par Ordonnance de référé en date du 05. Mai 1992, la Société PAPIGRAPH – C.I. était condamnée par le Juge des référés du Tribunal de Commerce de Paris à payer à la Société COFACREDIT, subrogée dans les droits et actions de la Société DAPEX, la somme de ‘33.187.890 F CFA représentant le coût total des 55 tonnes de papier qu’elle avait commandées à son fournisseur, la Société DAPEX, et dont elle avait reçu ‘livraison, augmentée de la somme de 500 000 F CFA à titre de dommages-intérêts; que par exploit en date du 13 Novembre 1992 la Société PAPIGRAPH – C.I. relevait appel ,de l’ordonnance qui avait été signifiée à Parquet Diplomatique a Paris le 02 Juillet 1992 puis à l’intéressé le 03 Octobre 1992 par le canal de la Brigade de’ recherche de la Gendarmerie d’Abidjan; que par arrêt du 25 Mars 1994 la Cour d’Appel de Paris déclarait l’appel irrecevable au motif que le délai d’appel qui est de 15 jours et augmenté d’un délai de distance de deux mois, court à compter de la date de signification de l’ordonnance de référé à Parquet Diplomatique à Paris, sans qu’il y ait lieu de rechercher la date à laquelle copie a été remise à la Société PAPIGRAPH – C.T. à Abidjan; que par la suite, la Société COFACREDIT obtenait du Juge des référés du Tribunal d’Abidjan l’exequatur de l’arrêt d’irrecevabilité par Ordonnance n 4117 du 03 Septembre 1999 présentement attaquée par la Société PAPIGRAPH – C.I.
Attendu qu’il est fait grief au Juge de l’exequatur du Tribunal d’Abidjan de n’avoir pas vérifié si la décision dont l’exequatur était demandé remplissait les conditions prévues à l’article 36 de l’Accord en matière de Justice entre la ‘Côte d’Ivoire et la France, pour avoir de plein droit l’autorité de la chose jugée en Côte’ d’Ivoire.
Attendu, en effet, qu’il résulte des mentions de l’Ordonnance d’exequatur attaqué que la Juridiction des référés s’est bornée à constater que la décision dont l’exequatur était sollicité, avait été rendue par une Juridiction Française et qu’il existait entre la Côte d’Ivoire et la France une Convention Judiciaire, sans même procéder à aucune vérification des conditions exigées par l’article 36 de la Convention Judiciaire susvisée, en tous cas, sans mentionner dans l’Ordonnance le résultat de ses vérifications, à savoir, que les différentes conditions exigées, étaient réunies, ce, en application de l’article 39, de ladite Convention Judiciaire; qu’en statuant ainsi, le Juge de l’exequatur a violé les dispositions des articles 39 et 36 de la convention Judiciaire, dont, s,’agit; qu’il suit que la troisième branche du premier moyen de cassation et le deuxième moyen de cassation sont fondés; qu’il échet de casser et d’annuler l’Ordonnance d’exequatur n 4117 du 03 Septembre 1999 rendue par la Juridiction Présidentielle du Tribunal d’Abidjan et d’évoquer.
Sur le bien fondé de la demande d’exequatur de’ l’arrêt du 25 Mars 1994 de la Cour d’Appel de’ Paris
Attendu qu’il résulte des mentions de l’arrêt dont l’exequatur en Côte d’Ivoire est demandée que l’appel interjeté le 13 Novembre 1992 par la Société PAPIGRAPH – C.1. contre l’ordonnance d’injonction de payer réputée contradictoire, rendue le 05 Mai 1992 par le Tribunal de Commerce de Paris, remise à l’appelante le 03 Octobre 1992 par la Brigade de Recherche de la Gendarmerie d’Abidjan, a été déclaré irrecevable comme tardif, ‘au motif que “ la signification régulière de l’Ordonnance à Parquet Étranger le 02 Juillet 1992 a fait courir les délais de recours sans qu’il y ait lieu de rechercher le moment où une copie de l’exploit de signification a été remise à son destinataire”.
Attendu qu une telle décision fait obstacle aux droits, de la défense qui ont un caractère d Ordre Public en Cote d Ivoire qu en effet aux termes des articles 325, 326 et 328 du Code de Procédure Civile Commerciale et Administrative Ivoirien les délais d’opposition et d’appel commencent à courir du jour de la signification de la décision faite a personne ou de la réception de la lettre recommandée adressée par l’huissier ci la partie condamnée lorsque la signification a été faite autrement qu a personne
Dans tous les cas ou il n est pas établi que la partie condamnée ait eu connaissance de la décision elle est admise a intenter les voies de recours jusqu’au dernier acte d’exécution de la décision que par conséquent, l’arrêt du 25 Mars 1994 ne remplit pas’ toutes les conditions exigées par 1 article 36 de la Convention Judiciaire entre la Côte d Ivoire et la France en ce qu’il viole des principes d’ordre public de la Côte d Ivoire que sont les droits de la défense qu il convient de rejeter la demande d exequatur.
PAR CES MOTIFS
Casse et annule 1 ordonnance d exequatur n 4117 du 03 Septembre 1999 rendue par la Juridiction des référés du Tribunal d’Abidjan
Évoquant
Déboute la Société COFACREDIT de sa demande d’exequatur en Côte d Ivoire de 1 arrêt du 25 Mars 1994 rendu par la Cour d’Appel de Paris.
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Président M. HAMZA TAHAR Chérif.
Conseillers : Mine N’GUESSAN ZEKRE-H (Rapporteur); M. KAMA YAO François. Secrétaire : Me BASSY-KOFFI Rose.