J-09-314
BAIL COMMERCIAL – RENOUVELLEMENT – OBLIGATION DU PRENEUR DE FAIRE SA DEMANDE DE RENOUVELLEMENT TROIS MOIS AVANT L’EXPIRATION DU BAIL – NON RESPECT DE L’ARTICLE 91 AUDCG – DECHEANCE DU DROIT AU RENOUVELLEMENT.
DECHEANCE DU DROIT AU RENOUVELLEMENT DU BAIL – OBLIGATION DU BAILEUR DE VERSER UNE INDEMNITE D’EVICTION (NON).
NON RENOUVELLEEMNT DU BAIL – OBLIGATION DU BAILLEUR DE RESPECTER L’ARTICLE 101 AUDCG (NON).
En vertu de l’article 91 AUDCG, il appartient au preneur de demander le renouvellement du bail, par acte extrajudiciaire, trois mois avant la date d’expiration dudit bail. Pour ne l’avoir pas fait, il se trouve déchu de son droit au renouvellement du bail. En considération de ce qui précède, la Cour d’Appel, qui a ordonné l’expulsion du preneur n’a, en rien, violé l’article 91 suscité; d’où il suit que cette branche du moyen doit être rejetée, parce que non fondée;
Il ne peut être reproché à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 94 du même Acte Uniforme en ordonnant l’expulsion du preneur en violation dudit texte qui dispose que “le bailleur peut s’opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée en réglant au locataire une indemnité d’éviction en n’ayant pas obligé le propriétaire des locaux loués à verser au locataire une indemnité d’éviction. D’une part, la requérante qui n’a pas engagé en temps opportun la procédure du droit au renouvellement du bail se trouve déchue du droit de réclamer une indemnité d’éviction; d’autre part, c’est après avoir souverainement apprécié les éléments du dossier que les juges d’appel ont ordonné l’expulsion de la société preneuse.
L’article 101 AUDCG ne peut s’appliquer que si l’une des parties contractantes ne respecte pas les clauses et conditions du bail, ce qui n’est pas le cas en l’espèce; d’où il suit que le, moyen tiré de la violation de l’article 101 de l’Acte Uniforme susvisé est inopérant et la Cour d’Appel, en ordonnant l’expulsion de la Société preneuse des locaux loués, n’a pas violé la loi; en conséquence, cette branche du moyen doit également être rejetée, parce que non fondée.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, arrêt n 032/2008 du 03 juin 2008, Ste METALUX SARL (Me Mamadou Tounkara) / Cheik Basse (Étude Youba). Actualités juridiques n 60-61, p. 426, note anonyme.
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique demande d’expulsion faite par Monsieur Cheick Basse, l’arrêt incriminé a violé la loi et mérite de ce fait d’être cassé
Mais attendu qu’aux termes de l’article 91 de l’Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général, “le droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée est acquis au preneur qui justifie avoir exploité conformément aux stipulations, du bail, l’activité prévue à celui-ci, pendant une durée minimale de deux ans”; que l’article 92 du même Acte Uniforme prescrit que “Dans le cas du bail à durée déterminée, le preneur qui a droit au renouvellement de son bail, en vertu de l’article 91 ci-dessus, peut demander le renouvellement de celui-ci par acte extrajudiciaire, au plus tard, trois mois avant la date d’expiration du bail. Le preneur qui n’a pas formé sa demande de renouvellement’ dans ce délai est déchu du droit au renouvellement du bail”; qu’en l’espèce, il ressort des écritures que la Société METALUX SARL représentée par Monsieur Mamadou SOW, son gérant, a exploité les locaux à lui loués pendant plus de deux ans et avait, de ce fait, droit au renouvellement’ du bail, conformément à l’article 91 suscité; que cependant, en application de l’article 92 sus-énoncé, il appartenait au preneur de demander le renouvellement du bail, par acte extrajudiciaire, trois mois avant la date d’expiration dudit bail; que pour ne l’avoir pas fait, il se trouve déchu de son droit au renouvellement du bail; qu’en considération de ce qui précède, la Cour d’Appel, qui a ordonné l’expulsion de la Société METALUX SARL dont le gérant est Monsieur Mamadou SOW des locaux loués n’a, en rien, violé l’article 91 suscité; d’où il suit que cette branche du moyen doit être rejetée, parce que non fondée.
Sur la deuxième branche du moyen
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 94 du même Acte Uniforme susvisé en ce que les juges de la Cour d’Appel ont ordonné l’expulsion de la Société METALUX SARL dont le gérant est Monsieur Mamadou SOW, en violation dudit texte qui dispose que “le bailleur peut s’opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée en réglant au locataire une indemnité d’éviction; que pour n’avoir pas obligé le propriétaire des locaux loués à verser au locataire une indemnité d’éviction, l’arrêt incriminé a fait preuve d’une “très grave légèreté” et mérite d’être cassé pour cela.
Mais attendu, d’une part, que la requérante qui n’a pas engagé en temps opportun la procédure du droit au renouvellement du bail se trouve déchu du droit de réclamer une indemnité d’éviction; que, d’autre part, c’est après avoir souverainement apprécié les éléments du dossier que les juges d’appel ont ordonné l’expulsion de la METALUX SARL dont le gérant est Monsieur Mamadou SOW des locaux loués; qu’il suit que cette branche du moyen doit également être rejetée parce que non fondée.
Sur la troisième branche du moyen
Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt déféré d’avoir violé l’article 101, alinéas 2 et 3 de l’Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général en ce qu’il est ainsi motivé : “Considérant que par un acte extrajudiciaire en date du 15 janvier, Cheick Basse a notifié à l’intimé sa décision de résilier le bail les liant pour compter de juin 2002; qu’il y a lieu dès lors d’infirmer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau ordonner l’expulsion de Monsieur Mamadou SOW tant de sa personne que de tous les occupants de son chef’; que cette façon de faire, selon le requérant, viole l’article 101 sus mentionné, “car il ressort de l’acte de mise en demeure servi à Monsieur Mamadou SOW, que le bailleur manifestait simplement son intention de ne pas renouveler le contrat de bail; que cette mise en demeure est contraire à l’article 101 sus mentionné et fait que l’arrêt querellé, manquant de base légale, doit être ‘cassé”
Mais attendu qu’aux termes de l’article 101 sus mentionné, “le preneur est tenu de payer le loyer et de respecter les clauses et conditions du bail; qu’à défaut de paiement du loyer ou en cas d’inexécution, d’une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l’expulsion du preneur, et de tous occupants de son chef, après avoir fait délivrer, par acte extrajudiciaire, une mise en demeure d’avoir à respecter les clauses et conditions du bail”; que ledit texte ne peut s’appliquer que si l’une des parties contractantes ne respecte pas les clauses et conditions du bail, ce qui n’est pas le cas en l’espèce; d’où il suit que le, moyen tiré de la violation de l’article 101 de l’Acte Uniforme susvisé est inopérant et que la Cour d’Appel, en ordonnant l’expulsion de la Société METALUX SARL ayant pour gérant Monsieur Mamadou SOW des locaux loués, n’a pas violé la loi; qu’en conséquence, cette branche du moyen doit également être rejetée, parce que non fondée
Attendu que la Société METALUX SARL représentée par Monsieur Mamadou SOW, son gérant, ayant succombé, doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Rejette le pourvoi formé par Monsieur Mamadou SOW, gérant de la Société METALUX SARL contre l’Arrêt n 132 rendu le 23 mai 2003 par la Cour d’appel de Bamako.
Condamne la requérante aux dépens.
Président : M. Antoine Joachim OLIVIERA.
Juges : M. Doumsinrinmbaye BADJE (Rapporteur);M. Boulacar DICKO.
Greffier : Me Paul LENDONGO.
Note anonyme
L’article 71 de l’Acte uniforme sur le Droit Commercial Général (AUDCG) définit le contrat de bail commercial et laisse aux parties le soin de fixer librement la durée du bail. Mais lors que celle-ci arrive à son terme, soit le bail expire soit il est renouvelé, si le locataire le demande expressément par un acte extrajudiciaire au plus tard 3 mois avant la date d’expiration du bail. A défaut de demander ce renouvellement, le locataire se trouve déchu du droit au renouvellement du bail. La société METALLUX l’a appris à ses dépens). Bien qu’ayant exploité les locaux conformément au bail, elle n’avait pas demandé le renouvellement du bail conformément à l’article 98 de I’AUDCG. Elle a été donc considérée comme déchue de ce droit, qui lui était pourtant légalement acquis.
Pouvait-elle obtenir une indemnité d’éviction de la part du bailleur ? L’article 94 de I’AUDCG ne prévoit le paiement d’une indemnité d’éviction que si le bailleur s’oppose au droit au renouvellement, exception faite des cas de non renouvellement pour cause légitime prévus par l’article 95 de I’AUDCG. La CCJA a estimé que la requérante, qui n’avait pas engagé en temps opportun la procédure du droit au renouvellement, se trouve déchue du droit de réclamer une indemnité d’éviction “. Cette solution s’admet facilement. En effet, il apparaît inconcevable que le locataire, qui n’a pas signifié au bailleur son intention de voir renouveler son bail (renouvellement qui n’est pas automatique), sollicite de la part de celui-ci une indemnité d’éviction pour non renouvellement du bail. Mais fallait-il le considérer comme déchu du droit de réclamer une indemnité d’éviction ou tout simplement le débouter de sa demande? On pourrait incliner pour le débouté pur et simple. Mais à y regarder de près, la décision de la CCJA doit être approuvée.
En effet la déchéance est définie comme la perte d’un droit soit à titre de sanction, soit en raison du non respect de sa condition d’exercice et tel était bien le cas en l’espèce.
Même si l’acte uniforme ne mentionnait pas expressément cette sanction pour le droit à l’indemnité d’éviction, il ne peut être contesté que pour pouvoir l’exercer avec succès, il faut que le locataire respecte une condition essentielle, qui est la demande par acte extrajudiciaire du renouvellement de son bail (nous négligeons volontairement la bataille sur l’application de l’article 101 de I’AUDCG qui ne présente pas d’intérêt en l’espèce).