J-09-328
PROCEDURES COLLECTIVES D’APUREMENT DU PASIF – DEFAUT DE PAIEMENT – CESSATION DES PAIEMENTS.
ABSENCE DE PROPOSITIONS CONCORDATAIRES – LIQUIDATION DES BIENS.
FAILLITE PERSONNELLE DES DIRIGEANTS DE SOCIETE.
Une société qui a disparu physiquement (sic) et qui n’est pas en mesure de faire face à son passif exigible est en état de cessation des paiements avéré conformément aux dispositions de l’article 25 AUPCAP.
Lorsque la société, bien qu’ayant comparu par l’entremise de son conseil, ne s’est jamais expliquée sur sa situation, encore moins fait des propositions concordataires, elle doit être déclarée en liquidation des biens.
Lorsque les dirigeants de la société, de par leurs fonctions ne pouvaient manifestement ignorer la situation de la société d’autant plus que les différents actes d’exécution leur ont été servis, ils doivent en conséquence être déclarés en faillite personnelle conformément aux dispositions des articles 194 à 198- 2 de l’AUPCAP.
Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, Jugement Commercial N 055 du 12 Décembre 2003. Affaire : Société Africaine de Sondages, Injection Forages (SASIF) c/ Entreprise d’Export Import de Commerce et de Représentation (EEXIMCOR). Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur.
Attendu que par exploit daté du 1er mars 2002, de Maître Assane DIENE, Huissier de Justice à Dakar, la Société Africaine de Sondages, Injections et Forages dite SASIF, a fait servir assignation à la Société Entreprise d’Export, d’Import, de Commerce et de Représentation dite EEXIMCOR, au sieur Mamadou Aminata DIOP, Ousmane Hanne et Mouhamed Ahne, en déclaration, la première, de cessation des paiements et de liquidation des biens, les autres en faillite personnelle.
Attendu que les défendeurs n’ont pas conclu bien qu’ayant constitué avocat, qu’en application de l’article 52 du Code de Procédure Civile, il échet de statuer contradictoirement à leur égard.
EN LA FORME
Attendu que la présente procédure introduite dans les forme et délai légaux est recevable; qu’il échet de la déclarer recevable.
AU FOND
Sur l’état de cessation des paiements
Attendu que la SASIF qui dit s’en tenir à son exploit introductif d’instance expose qu’elle est créancière de EEXIMCOR de la somme de 16.004.750 F CFA consacrée par une décision du tribunal de céans, laquelle a été confirmée par un arrêt de la Cour d’Appel du 14 août 1998.
Que lors de l’exécution de ces décisions, l’huissier commis à cet effet n’a trouvé aucun représentant de la société débitrice au siège social.
Qu’il est ainsi manifeste que la société a disparu physiquement et ce, en violation des règles organisant la vie des sociétés; que son état de cessation des paiements est ainsi avéré.
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article 25 de l’Acte Uniforme sur les procédures d’apurement du passif (AUPCAP), qu’est en cessation des paiement, le débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
Qu’il résulte par ailleurs du jugement N 95 du 20 janvier 1998 confirmé par l’arrêt N 563 du 14 août 1998 que la société EEXIMCOR est débitrice de SASIF de la somme de 16.0047.750 F CFA; que les différents actes d’exécution entrepris par cette dernière sont restés vains ainsi qu’en atteste les différents procès verbaux versés au dossier, notamment celui de saisie arrêt pratiqué sur les comptes bancaires de la défenderesse; qu’il est ainsi manifeste que EEXIMCOR n’est pas en mesure de faire face à son passif exigible; qu’il échet de constater l’état de cessation des paiements et de fixer la date de celle-ci au 1er juillet 2002.
Sur la liquidation des biens
Attendu que la défenderesse bien qu’ayant comparu par l’entremise de son conseil, ne s’est jamais expliquée sur sa situation encore moins fait des propositions concordataires; qu’il échet par conséquent de la déclarer en liquidation des biens.
Sur la faillite personnelle
Attendu que pour solliciter que les dirigeants de EEXIMCOR soient déclarés en faillite personnelle, la SASIF fait valoir que l’état de cessation des paiements de celle-ci ne pouvait manifestement pas être ignoré par les sieurs DIOP, Hanne et Ahne en leur qualité de représentant légal.
Attendu qu’il est évident que les susnommés de par leur fonction ne pouvaient ignorer la situation de la société d’autant plus que les différents actes d’exécution leur ont été servis; qu’ils doivent en conséquence être déclarés en faillite personnelle conformément aux dispositions des articles 194 à 198. 2 de l’AUPCAP et pour cela pour une durée de trois ans.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par décision contradictoire en premier ressort
Reçoit la SASIF en son action.
AU FOND
Constate la cessation des paiements de EEXIMCOR.
La fixe au 1er juillet 2002.
Ordonne la liquidation des biens de EEXIMCOR.
Prononce la faillite personnelle de Messieurs Mamadou Aminata DIOP, Ousmane Hanne, Mouhamed Ahne et cela pour une durée de trois (03) ans.
Désigne Madame Aminata Diène Paye en qualité de Juge Commissaire et Monsieur Dial Gueye en qualité de Syndic.
Dit que les dépens passeront en frais privilégiés de la procédure.
Ainsi dit, fait et jugé publiquement les, jour, mois et an que sus indiqués.
Et ont signé le Président et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur
Si on ne peut qu’acquiescer aux trois premiers points de cette décision (déclaration de la cessation de paiement et prononcé de la liquidation des biens pour défaut de propositions concordataires), on ne peut qu’être réticent à approuver le prononcé de la faillite personnelle des dirigeants au seul et vague motif « qu’il est évident que les (dirigeants) susnommés, de par leur fonction ne pouvaient ignorer la situation de la société d’autant plus que les différents actes d’exécution leur ont été servis; qu’ils doivent en conséquence être déclarés en faillite personnelle conformément aux dispositions des articles 194 à 198. 2 de l’AUPCAP et pour cela pour une durée de trois ans ». Encore eût-il fallu que les juges relèvent et motivent l’existence de l’un des cas édictés par les articles 196 et 197 AUPCAP (faillite personnelle obligatoire), d’une part ou par l’article 198 AUPCAP (faillite personnelle facultative), d’autre part.