J-09-352
RECOUVREMENT DE CREANCE – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – SIGNIFICATION A LA PERSONNE DU DEBITEUR (NON) – PREMIERE MESURE D’EXECUTION SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCE – OPPOSITION – COMPUTATION DU DELAI – SAISIE AYANT ETE DENONCEE CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 160 AUPSRVE (NON) – COMPUTATION POUVANT ETRE ADMISE A COMPTER DE LA DATE DE LA SAISIE ATTRIBUTION (NON) – RECEVABILITE DE L’OPPOSITION.
SOCIETES COMMERCIALES ET GIE – ORGANES DE GESTION, DE DIRECTION ET D’ADMINISTRATION – EFFETS DE COMMERCE – EFFETS ENDOSSES AU PROFIT D’UN TIERS AUTRE QUE LEUR SOCIETE – EXISTENCE DE RELATION PERSONNELLE ENTRE EUX ET LA SOCIETE DEBITRICE (OUI).
Article 2 AUPSRVE
Article 10 AUPSRVE ALINEA 2
Article 160 AUPSRVE
Article 121 AUSCGIE
Article 277 AUSCGIE
La computation du délai d’opposition ne peut être admise à compter de la date de la saisie-attribution, première mesure d’exécution, l’ordonnance d’injonction de payer n’ayant pas été signifiée à la personne du débiteur, dès lors que ladite saisie n’a pas été dénoncée conformément aux dispositions de l’article 160 AUPSRVE.
En conséquence, il échet de déclarer l’opposition intervenue entre-temps recevable.
L’attitude des organes de gestion, de direction et d’administration qui bénéficient d’effets de commerce en vertu des relations commerciales entretenues par leur société avec une autre débitrice, et les endossements au profit d’un tiers autre que leur société, sans rapporter la preuve du lien de causalité existant entre le nouveau bénéficiaire et cette dernière entité sociale, ne laisse croire qu’il s’agisse d’une relation personnelle prévalant entre eux et la société débitrice.
Par conséquent, l’appelante doit être déboutée de sa demande en recouvrement.
COUR D’APPEL D’ABIDJAN, 1ère CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE, ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE N 527 DU 20 MAI 2005, AFFAIRE STE IDF, SARL c/ STE SNC FATIMA, SARL.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Oui les parties en leurs conclusions.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Suivant exploit daté du 03 février 2003, de Maître AYIE KIPRE THERESE, huissier de justice à Abidjan, la Société IDF SARL agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal a interjeté appel contre le jugement N 19/2003 du 08 janvier 2003 rendu par Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui en la cause a statué ainsi :
– « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en premier ressort.
Déclare recevable et bien fondée l’opposition introduite par la Société SNC FATIMA.
Déboute la Société IDF de sa demande en recouvrement.
Condamne la Société IDF aux dépens ».
Dans son acte d’appel valant premières conclusions, la Société IDF SARL expose qu’elle a vendu à la Société SNC FATIMA et ce, à la suite de bons de commande diverses pièces de véhicules d’un montant de 65.507.300 francs CFA pour lequel elle a sollicité et obtenu du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, l’ordonnance d’injonction de payer N 3768/2002 condamnant l’intimée à lui payer la somme sus-indiquée.
Cependant, elle souligne qu’à la date du 19 juillet 2002, la SNC FATIMA a formé opposition contre l’ordonnance dont s’agit suite à la signification à elle faite, le 28 mai 2002.
Et, elle poursuit pour dire que le 08 janvier 2003, le Tribunal de Première Instance statuant sur cette action déclarait, contre toute attente, la Société SNC FATIMA recevable en son opposition et elle mal fondée en sa demande en recouvrement.
Pour elle, soutient-elle, une telle décision mérite la censure de la Cour de céans pour violation de l’article 10 alinéa 2 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
La Société IDF SARL souligne in limine litis l’irrecevabilité de l’opposition formée par la Société SNC FATIMA tirée de la violation de l’article 10 alinéa 2 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Selon elle, et aux termes de l’article 10 sus-cité l’opposition doit être formée dans les 15 jours suivant la première mesure d’exécution lorsqu’il est établi que l’acte de signification de l’ordonnance d’injonction de payer n’a pas été signifié à la personne même du débiteur.
Or, l’appelante souligne qu’une saisie-attribution a été pratiquée le 02 juillet 2002 en vertu de l’ordonnance querellée sur les sommes détenues par la SOTRA pour le compte de la Société SNC FATIMA suivant exploit de Maître THIERI LAURENT Huissier de Justice à Abidjan.
Ainsi, elle affirme que la SNC FATIMA disposait d’un délai de quinze jours pour former opposition, à compter de cette date, et en application des dispositions de l’article 10 alinéa 2.
Tel n’est pas le cas en l’espèce, poursuit-elle, la SNC FATIMA a exercé cette voie de recours à la date du 19 juillet 2002 soit plus de quinze(15) jours après la saisie-attribution.
Dès lors il échet de déclarer l’opposition irrecevable.
Subsidiairement l’appelante sollicite l’infirmation du jugement querellé et la condamnation de l’intimée au payement de la somme de 65.507.300 francs car cette dernière ne justifie pas l’avoir désintéressée depuis la livraison des pièces commandées.
En répliques aux écritures de l’appelante la SNC FATIMA se réjouit du fait que la Société IDF SARL reconnaisse que l’ordonnance d’injonction de payer querellée n’ait pas été signifiée à sa personne.
Cependant, la Société IDF SARL qui selon elle, veut faire courir le délai d’opposition imparti à partir du 02 juillet 2002, date de la saisie-attribution qu’elle aurait fait pratiquer entre les mains de la SOTRA à son préjudice oublie que ladite saisie-attribution était pratiquée entre les mains d’un tiers en l’occurrence la SOTRA, celle-ci doit être obligatoirement dénoncée au débiteur saisi, en l’occurrence elle.
Et, c’est cet acte de dénonciation qui constitue pour le débiteur saisi le premier acte, la première mesure d’exécution à partir de laquelle commence à courir le délai d’opposition argumente la SNC FATIMA.
Or, elle souligne qu’en l’espèce, la saisie-attribution du 02 juillet 2002 n’a nullement été dénoncée à sa personne.
Ainsi, aucun délai n’ayant couru à son égard, l’opposition formée par elle à la date du 19 juillet 2002 doit donc être déclarée recevable en la forme.
Poursuivant son argumentation, la SNC FATIMA souligne que dans son acte d’appel daté du 31 janvier 2003, la Société IDF justifie le fondement de sa créance par des bons de livraison de pièces de véhicule qu’elle aurait effectué à son profit, or dans sa requête aux fins d’injonction de payer en date du 15 mai 2002 IDF justifiait sa créance par des effets de commerce revenus impayés et c’est donc sur le fondement de l’article 2 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement que l’appelante a sollicité et obtenu l’ordonnance de condamnation querellée.
Cependant, elle soutient comme l’a reconnu le premier juge ‘ ‘ aucun des effets de commerce ou chèques émis par la SNC FATIMA et produits au dossier n’ont été libellés au nom de la Société IDF en outre, il n’est pas non plus rapporté la preuve que lesdits effets ont été endossés à son profit par leur bénéficiaire, le nommé ALAIN WEBER, dès lors dans ces conditions, seul le bénéficiaire, desdits effets a qualité pour réclamer leur payement.
En conséquence, elle sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
Reprenant ses écritures, la Société IDF soutient que le premier juge a méconnu les dispositions pertinentes du traité OHADA sur le droit des sociétés / en décidant tel qu’il l’a fait.
Pour elle, la conjugaison des dispositions des articles 121 et 277 de l’Acte Uniforme sur le droit des sociétés commerciales et groupements d’intérêt économique permet de relever qu’ » à l’égard des tiers, les organes de gestion, de direction et d’administration ont, dans les limites fixées par le présent acte uniforme pour chaque type de société, tout pouvoir pour engager la société, sans avoir à justifier d’un mandat spécial; Toute limitation de leurs pouvoirs légaux par les statuts est inopposable aux tiers ».
En d’autres termes, les gérants, les directeurs généraux et autres organes de direction des; personnes morales n’ont pas à justifier, dans leurs relations avec les tiers, d’un mandat dit l’appelante.
Ainsi, en application de ces principes sus-énoncés, le jugement qui décide que les effets de commerce n’ont pas été libellés au profit de la personne morale mais de son représentant légal et que la preuve n’est pas faite de l’endossement de ces effets au profit de la personne morale n’est pas conforme au droit.
Dès lors elle sollicite l’infirmation du jugement querellé.
Le Ministère Public a conclu à la recevabilité de l’appel de IDF et au bien fondé de sa demande de recouvrement en redonnant à l’ordonnance d’injonction de payer N 3768/2002 son plein et entier effet.
SUR CE
Les parties ayant conclu et déposé, il convient de statuer contradictoirement à leur égard.
EN LA FORME
Sur la recevabilité de l’opposition
D’une part l’article 10 alinéa 2 de l’Acte Uniforme portant recouvrement des créances simplifiées et voies d’exécution dispose que « .. Toutefois, si le débiteur n’a pas reçu personnellement la signification de la décision portant injonction de payer, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai de quinze jours suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur… » et d’autre part l’article 160 du même acte uniforme dispose que « dans un délai de huit jours, à peine de caducité, la saisie est dénoncée au débiteur par acte d’Huissier ou d’agent d’exécution… ».
En l’espèce, la Société IDF ne conteste pas que l’ordonnance querellée n’a jamais été signifiée à la personne de l’intimée et mieux par exploit d’huissier daté du deux (02) juillet 2002 a fait pratiquer saisie-attribution des sommes dues à la SNC FATIMA par la SOTRA entre les mains de celle-ci.
Or cette saisie-attribution qui serait la première d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens de sa débitrice, telle qu’admise par l’alinéa 2 de l’article 10 suscité n’a pas été dénoncé conformément aux dispositions de l’article 160 précité.
Dès lors la computation du délai d’opposition ne peut être admise à compter de la date de la saisie-attribution.
Il échet en conséquence déclarer l’opposition intervenue entre-temps recevable.
AU FOND
Sur la demande en recouvrement de créance de la société IDF
S’il est vrai qu’il résulte des dispositions de l’article 121 de l’Acte Uniforme relatif aux sociétés commerciales et groupements d’intérêts économiques qu’à l’égard des tiers, les organes de gestions, de direction et d’administration ont, dans les limites fixées pas le présent acte uniforme pour chaque type de société, tout pouvoir pour engager la société sans avoir à justifier d’un mandat spécial, il n’est pas moins vraisemblable que l’attitude des organes de gestion, de direction et d’administration qui, bénéficiaires d’effets de commerce en vertu des relations commerciales entretenues par leur société avec une autre débitrice, et les endosse au profit d’un tiers autre que leur société, sans rapporter la preuve de lien de causalité existant entre le nouveau bénéficiaire et cette dernière entité sociale, ne laisse croire qu’il s’agisse d’une relation personnelle prévalant entre eux et la société débitrice.
Or en l’espèce, tel est le cas.
Dès lors, il échet de débouter la société IDF de sa demande en recouvrement.
SUR LES DEPENS
IDF succombe, il convient la condamner aux dépens.