J-09-359
DROIT DES SURETES – CONVENTION DE GAGE – CONSENTEMENT DU CONSTITUANT – VIOLENCE DE NATURE A FAIRE IMPRESSION SUR LUI ET A LUI INSPIRER LA CRAINTE D’EXPOSER SA VIE OU SA FORTUNE A UN MAL CONSIDERABLE ET PRESENT – PREUVE (NON) – VALIDITE (OUI).
Article 47 AUS
Article 48 AUS
Article 49 AUS
Le gage constitué conformément aux dispositions des articles 47, 48 et 49 AUS est bon et valable dès lors qu’il n’est pas établi que le constituant a subi des violences de nature à faire impression sur lui et à lui inspirer la crainte d’exposer sa vie ou sa fortune à un mal considérable et présent, la convention ayant été rédigée et signée hors des locaux de la gendarmerie, en l’étude de l’huissier.
COUR D’APPEL D’ABIDJAN, 1ère CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE, ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE N 128 DU 13 JUIN 2007AFFAIRE LA SOCIETE CARGILL WEST AFRICA c/ LA COOPERATIVE CAZAC.
LA COUR
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Vu les conclusions des parties.
Vu l’arrêt avant-dire-droit n 193 du 26 juillet 2006 de la Cour d’Appel de ce siège.
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions et moyens des parties et motifs ci-après.
Faits, procédure, prétentions et moyens des parties
Considérant que les faits, procédure, prétentions et moyens des parties résultant de l’arrêt avant-dire-droit n 193 en date du 26 juillet 2006 aux termes duquel la Cour d’Appel de ce siège, après avoir déclaré l’appel de la société Cargill West Africa irrecevable tel qu’il est dirigé contre les Greffiers en Chef du Tribunal de Première Instance et de la Cour d’Appel de Daloa mais recevable en tant qu’il est dirigé contre la Coopérative Agricole Zaïbo-Amara Carrefour dite CAZAC, a ordonné la mise en état du dossier de la procédure à l’effet d’entendre le Commandant de la Brigade de Recherches de la Gendarmerie Nationale en Vue de lui faire préciser les circonstances de l’arrestation de SILUE FOUGNEGUE-Jean, le Président du Conseil d’Administration de CAZAC, et Maître DAH BAGUI Lambert, Huissier de Justice à Daloa sur les circonstances de la conclusion du contrat de gage critiqué et procéder à tous actes nécessaires à la manifestation de la vérité.
Au cours de l’exécution de cette mesure d’instruction clôturée par ordonnance du 29 mai 2007, Maître DAH BAGUI Lambert a expliqué que le 03 janvier 2006, il a été requis par DIBY KAGAH Appolin, Directeur de la Société Cargill West Africa à l’effet de procéder à une saisie conservatoire sur les biens de l’un de ses débiteurs en l’occurrence SILUE FOUGNEGUE Jean. Le requérant lui a précisé surtout que croyant que ledit débiteur avait commis un abus de confiance à son préjudice, il l’avait fait arrêter par la Brigade des Recherches de la Gendarmerie de Daloa, mais le commandant de cette unité lui a fait savoir qu’il s’agissait d’une affaire civile et venait donc de le libérer. Il a précisé qu’au moment où DIBY KANGAH Appolin l’appelait peu avant midi SILUE FOUGNEGUE Jean, venait d’être élargi mais se trouvait encore dans les locaux de la Brigade avec son créancier. Il a invité les deux parties à son étude où étant, et après leurs explications qui ont révélé que le véhicule automobile conduit ce jour même par le débiteur avait déjà fait l’objet d’un premier gage, il a suggéré qu’un autre contrat de gage soit conclu puis qu’à ses yeux une saisie conservatoire ne pouvait plus prospérer, alors surtout qu’aux dires du créancier, la valeur du véhicule gagé ne pouvait pas couvrir le principal de la dette et les intérêts. C’est ainsi que les parties se sont entendues pour ajouter d’autres objets mobiliers.
Il s’est alors transporté en compagnie de SILUE FOUGNEGUE Jean au magasin de ce dernier pour relever le nombre et les caractéristiques du matériel qu’il donnait en gage.
Afin de lui permettre de rédiger le contrat, il a demandé aux parties de revenir à quinze heures, heure à laquelle est arrivé le premier SILUE FOUGNEGUE Jean qui a signé la convention suivi de KANGAH DIBY Appolin et après les signatures SILUE FOUGNEGUE Jean lui a remis les frais et il s’est rendu seul à la Direction des Impôts pour enregistrer le document.
Maître DAH BAGUI Lambert a précisé que d’une part SILUE FOUGNEGUE Jean lui a demandé de parfaire le contrat le même jour pour lui permettre d’aller faire ses encaissements et c’est après l’enregistrement du contrat que le même jour, vers dix huit heures il a apposé le cachet de la Coopérative et d’autre part, les objets mobiliers autres que le véhicule ont été apportés à son étude trois jours après la signature du contrat par un agent de la Coopérative et il a inclus le véhicule automobile dans le second gage parce que le support sur lequel il a été gagé pour la première fois n’était pas correct. Pour finir il a fait remarquer que pendant toute cette procédure, SILUE FOUGNEGUE Jean ne lui jamais parlé d’une quelconque violence dont il serait ou aurait été l’objet et lui a même dit qu’avant le 20 janvier 2006, il s’acquitterait de sa dette.
SILUE FOUGNEGUE Jean a pour sa part indiqué qu’il était encore retenu dans la chambre de la sûreté de la gendarmerie lorsqu’on lui a demandé de faire venir son véhicule automobile de marque BMW et c’est à l’arrivée de l’huissier de justice que les gendarmes l’ont fait sortir. Son créancier, son pasteur et l’huissier se sont retrouvés dans un bureau de la brigade où son créancier estimait que la valeur du véhicule était insuffisante pour couvrir la dette, a exigé que d’autres biens soient inclus dans le gage. Après quoi, se sont rendus chez l’huissier de justice où il a signé le contrat de gage avant de regagner son domicile. Il n’a donc pas été autorisé à se retirer chez lui contrairement aux propos de l’huissier instrumentaire. Il a précisé qu’i a signé le contrat avant de sortir pour chercher les frais d’enregistrement.
Réagissant à ces déclarations, Maître DAH BAGUI Lambert a affirmé que SILUE FOUGNEGUE Jean n’était pas constamment à son bureau puisqu’il a dû partir de là pou revenir avec les frais d’enregistrement.
YAO KOUAME, Adjoint au Commandant de la Brigade des Recherches de la Gendarmerie de Daloa entendu a expliqué qu’aux termes de la plainte qu’il a portée, le Directeur de Cargill Daloa a déclaré qu’il a remis des numéraires à SILUE FOUGNEGUE Jean qui devait lui procurer des produits agricoles. Mais depuis qu’il a reçu cet argent celui-ci n’a pas apporté lesdits produits mais en plus il est resté introuvable. Le 02 janvier 2006, le plaignant a informé les éléments de la brigade de gendarmerie de la présence de ce dernier à son domicile. Il a alors été appréhendé et gardé à vue le temps de procéder à l’enquête.
Le lendemain a-t-il poursuivi, les deux parties s’étant entendues pour procéder à un règlement amiable, SILUE FOUGNEGUE Jean a été mis en liberté, et après leur départ de la brigade, il n’a plus suivi l’affaire.
Il a affirmé que SILUE FOUGNEGUE Jean n’a fait l’objet d’aucune violence dans les locaux de la gendarmerie pour l’amener à signer quoi que ce soit, puisque c’est dans le cadre d’une enquête pour abus de confiance qu’il a été arrêté.
SILUE FOUGNEGUE déclarait qu’après sa libération, il s’était retrouvé dans un bureau en compagnie des personnes qu’il a déjà citées hors la présence des gendarmes.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l’appel
Considérant que par arrêt avant-dire-droit n 148 date du 14 Juin 2006, la Cour d’Appel de ce siège a déjà statué sur la recevabilité de l’appel; qu’il y a lieu de s’en rapporter.
AU FOND
Considérant que la mise en état du dossier de la procédure n’a pas permis d’établir que SILUE FOUGNEGUE Jean a subi des violences de nature à faire impression sur lui et à lui inspirer la crainte d’exposer sa vie ou sa fortune à un mal considérable et présent puisqu’aussi bien, il est constant que la convention a été rédigée et signée hors des locaux de la gendarmerie, en l’étude de Maître DAH BAGUI Lambert; que constitué conformément aux dispositions des articles 47, 48 et 49 de l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés de l’OHADA, le gage en date du 03 janvier 2006 est bon et valable; que dès lors, c’est à tort que le premier juge l’a annulé; qu’il y a lieu d’infirmer le jugement attaqué.
Considérant que la Coopérative Agricole Zaïbo-Amara Carrefour succombe; qu’il convient de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
EN LA FORME
S’en rapporte à l’arrêt avant-dire-droit n 148/07 en date 14 Juin 2006 aux termes duquel la Cour d’Appel de ce siège a déjà déclaré l’appel de la Société Cargill West Africa irrecevable tel qu’il est dirigé contre les Greffiers en Chef du Tribunal de Première Instance et de la Cour d’Appel de Daloa mais recevable en tant qu’il est dirigé contre la Coopérative Agricole Zaïbo-Amara Carrefour dite CAZAC.
AU FOND
Déclare ledit appel bien fondé.
Infirme le jugement civil contradictoire n 37 rendu le 14 avril 2006 par le Tribunal de Première Instance de Daloa.
Statuant à nouveau
Déclare l’action de la Coopérative Agricole Zaïbo-Amara Carrefour dite CAZAC mal fondée.
L’en déboute.
La condamne aux dépens de l’instance.
Prononcé publiquement par le président de la chambre les jour, mois et an que dessus.
Lequel Président a signé la minute avec le Greffier.