J-09-363
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – ACTION EN NULLITE – QUALITE DEMANDEUR N’ETANT PAS LE DEBITEUR SAISI – DEFAUT DE QUALITE – IRRECEVABILITE.
Article 139 AUPSRVE A 152 AUPSRVE
Il y a lieu de déclarer le demandeur irrecevable en son action en nullité de la saisie, pour défaut de qualité, dès lors qu’il n’est pas le débiteur saisi.
COUR D’APPEL DE DALOA, 1ère CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE, ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE N 110 DU 23 MAI 2007 AFFAIRE LA SOCIETE CENTRALE INDUSTRIE c/ LA SOCIETE RAYANE ET AUTRES.
LA COUR
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Vu les conclusions des parties.
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions et moyens, des parties et motifs ci-après.
Faits et procédure
Dans ses relations d’affaires avec la société RAYANE, la Société CAFCACI S.A est restée devoir la somme de 1.220 000 000 francs représentant le reliquat du prix des produits agricoles à elle livrés par cette dernière.
Pour avoir paiement de sa créance, la société RAYANE a sollicité et obtenu de la juridiction présidentielle de Sassandra l’ordonnance n 198/06 du 21 décembre 2006 l’autorisation à pratiquer une saisie conservatoire de tous les stocks de produits café-cacao appartenant à la société CAFCACI SA à San-Pédro et l’enlèvement desdits produits à remettre à OMAÏS TOUFIC en qualité de séquestre.
En vertu de cette ordonnance et suivant procès-verbal du 22 décembre 2006 dressé par Me AKADJE MEL MARTIN, Huissier de justice à Sassandra, la société RAYANE a fait saisir, puis enlever des lots de cacao entreposés dans les magasins de la société Central Industrie à San-Pédro.
Estimant qu’elles bénéficient d’un gage sur les lots de produits saisis et enlevés, la Banque Atlantique de Côte d’Ivoire dite BACI et la Compagnie Bancaire de Côte d’Ivoire dite COBACI ont, par acte du 03 janvier 2007, assigné en référé d’heure à heure la Société RAYANE, la société CAFCACI-SA, Unicontrol Commodity, la société SIMAT, la société Central Industrie et OMAÏS TOUFIC devant la juridiction présidentielle de Sassandra pour s’entendre ordonner la mainlevée de la saisie.
Pour sa part, la société Central Industrie, se fondant sur un droit de rétention sur les produits en cause, a par acte du 04 janvier 2007, assigné la société RAYANE, HASSAN KAMEL FTOUNI, Me AKADJE MEL MARTIN, la société CAFCACI SA et OMAÏS TOUFIC aux mêmes fins devant la même juridiction de référé.
La juridiction saisie, après avoir ordonné la jonction des deux procédures, a par ordonnance n 03/07 du 12 janvier 2007, déclaré la COBACI irrecevable en son action, débouté d’une part la BACI et la société Central Industrie de leurs demandes et d’autre part la société CAFCACI SA de ses demandes reconventionnelles.
Par acte du 29 janvier 2007, la société Central Industrie, ayant pour conseils la SCPA N’TAKPE-GUIRO et Associés et le Cabinet CHEICK DIOP, Avocats à la Cour, a relevé appel de cette ordonnance.
Suivant arrêt avant-dire-droit n 28/07 du 07 février 2007, la Cour d’Appel de ce siège a déclaré l’appel interjeté par la Société Centrale Industrie recevable tel qu’il est dirigé contre la Société RAYANE, HASSAN KAMEL FTOUNI, Me AKADJE MEL MARTIN, OMAÏS TOUFIC et la société CAFCACI SA, mais irrecevable en tant qu’il est dirigé contre les Greffiers en chef de la Section de Tribunal de Sassandra et de la Cour d’Appel de Daloa.
Prétentions et moyens des parties
Aux termes de son acte d’appel, la Société Central Industrie a soulevé la nullité de la saisie motifs pris d’une part de l’incompétence du tribunal qui l’a ordonnée et d’autre part de l’illégalité de la décision ayant ordonné l’enlèvement des biens saisis et la nomination de séquestre.
A cet égard, l’appelante a expliqué que la Société CAFCACI SA ayant son siège social à Abidjan Cocody, seul le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau est compétent pour autoriser la saisie conservatoire de ses biens et ce, conformément aux dispositions de l’article 54 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Par ailleurs, a ajouté l’appelante, l’entrepôt de la société CAFCACI SA à San-Pédro ne peut être considéré comme une gare principale au sens de la jurisprudence pour justifier la compétence de la juridiction de Sassandra.
En outre la société Central Industrie a affirmé que la mesure d’enlèvement des biens ordonnée par le Juge et pratiquée par la société RAYANE n’es pas prévue par l’article 59 de l’Acte Uniforme précité, ni conforme à l’esprit du législateur OHADA.
Au surplus, a indiqué l’appelante, des dispositions internes de chaque Etat partie ayant été abrogées au sens de l’article 336 du même Acte Uniforme, la Cour est priée de constater le défaut de base légale de l’ordonnance appelée puisqu’aussi bien les dispositions des articles 1961 et 1963 du code civil relatives au séquestre sont désormais abrogées.
Ensuite, la Société Central Industrie à invoqué la violation des dispositions de l’article 113 alinéa 1 de l’Acte Uniforme précité parce qu’avant de rendre l’ordonnance n 198/06 du 21 décembre 2006, le Président de la Section de Tribunal de Sassandra n’a pas entendu les parties ou ne les pas dûment appelées.
Enfin, l’appelante, tirant argument de ce qu’elle dispose d’un droit de rétention sur les lots de cacao saisis, a fait grief au premier juge d’avoir violé les dispositions de l’article 114 du IVe Acte Uniforme de l’OHADA.
Au total, la Société Central Industrie a sollicité la nullité de la saisie conservatoire pratiquée le 22 décembre 2006, sa mainlevée sous astreinte comminatoire de 1.500 000 francs par jour de retard à compter du prononcé de la décision et conséquemment, l’infirmation de l’ordonnance entreprise.
En réplique aux prétentions de l’appelante, la Société RAYANE et HASSAN FTOUNI ont, par les observations orales faites par la SCPA KANGA-OLAYE et Associés, leur conseil, sollicité la confirmation de l’ordonnance en cause.
Au principal, les intimés ont soutenu que la Société Central Industrie ne peut justifier son droit de rétention conformément aux dispositions des articles 41, 42 et 43 de l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés et 114 du IVe Acte Uniforme.
En effet, ont-ils précisé, l’appelante n’a pas exercé son droit de rétention avant la saisie critiquée et elle n’en a pas informé l’huissier instrumentaire suivant la procédure prescrite par la loi.
Ainsi, arguant de ce que la Société Central Industrie ne tire sa qualité et son intérêt pour agir dans la présente cause que ce son prétendu droit de rétention, les intimés ont soulevé l’irrecevabilité de son action pour défaut de qualité et d’intérêt pour agir.
Subsidiairement, les intimés ont soutenu que la Société Central Industrie était mal fondée à soulever l’incompétence de la juridiction de Sassandra pour le compte de la Société CAFCACI alors que dans une précédente procédure aux mêmes fins, cette dernière n’a pas trouvé opportun de le faire.
En outre, les intimés ont exposé qu’à l’occasion de l’opposition formée par la Société CAFCACI contre l’ordonnance n 198/06 du 21 décembre 2006, les parties ont été appelées et entendues par la juridiction présidentielle qui, au demeurant, dispose d’un pouvoir d’appréciation souverain pour ordonner l’enlèvement des biens saisis.
Les parties ont produit des pièces.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l’appel
AU FOND
Considérant qu’aux termes de l’arrêt avant-dire-droit n 28/07 du 07 février 2007, la Cour d’Appel de ce siège a déjà déclaré l’appel interjeté par la Société Central Industrie recevable tel qu’il est dirigé contre la Société RAYANE, HASSAN FTOUNI, Me AKADJE MEL MARTIN, OMAÏS TOUFIC et la Société CAFCACI SA, mais irrecevable en tant qu’il est dirigé contre les Greffiers en Chef de la Section de Tribunal de Sassandra et de la Cour d’Appel de Daloa.
Qu’il y a lieu de s’en rapporter.
AU FOND
Considérant que la Société RAYANE, HASSAN FTOUNI ont, au principal, soulevé l’irrecevabilité de l’action de la Société Central Industrie pour défaut de qualité.
Considérant que les contestations relatives aux biens saisis sont traitées par les articles 139 à 152 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Qu’il résulte des dispositions desdits articles que seul le débiteur saisi peut demander la nullité de la saisie.
Considérant qu’en l’espèce, seule la Société CAFCACI SA, propriétaire des lots de cacao saisis est la débitrice de la Société RAYANE.
Qu’en cette qualité elle a, sans succès, assigné sa créancière en nullité de la saisie pratiquée le 22 décembre 2006 entre les mains de la Société Central Industrie.
Considérant que cette dernière se prévaut d’un droit de rétention qui ne peut s’assimiler à un droit de propriété, seul pouvant par ailleurs justifier une action en distraction des biens saisis.
Considérant que la Société Central Industrie n’étant pas la débitrice saisie, elle n’a pas qualité pour demander la nullité de la saisie en cause.
Que dès lors, il y a lieu de la déclarer irrecevable en son action pour défaut de qualité.
Considérant que le premier juge ayant statué à rebours, il importe d’infirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l’appelante.
Qu’il convient de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
EN LA FORME
S’en rapporte à l’arrêt avant-dire-droit n 28/07 du 07 février 2007 aux termes duquel la Cour d’Appel de ce siège a déjà déclaré l’appel interjeté par la Société Central Industrie recevable tel qu’il est dirigé contre la Société RAYANE, HASSAN FTOUNI, Me AKADJE MEL MARTIN, OMAÏS TOUFIC et la Société CAFCACI SA, mais irrecevable en tant qu’il est dirigé contre les Greffiers en Chef de la Section de Tribunal de Sassandra et de la Cour d’Appel de Daloa.
AU FOND
Infirme l’ordonnance n 03/07 du 12 janvier 2007 rendue par le Juge des référés de Sassandra en ses dispositions relatives à la Société Central Industrie.
Statuant à nouveau
Déclare la Société Central Industrie irrecevable en son action pour défaut de qualité.
La condamne aux dépens.
Prononcé publiquement par le Président de la Chambre les jour, mois et an que dessus.
Lequel Président a signé la minute avec le Greffier.