J-09-366
VOIES D’EXECUTION – DELAI DE GRACE – DEBITEUR DE MAUVAISE FOI (NON) – OCTROI DU DELAI DE GRACE (OUI) – MAINLEVEE DE L’IMMOBILISATION DU VEHICULE ET RESTITUTION.
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – SAISIE SUIVIE DE FORMALITE OU D’ACTION EN VUE D’OBTENIR UN TITRE EXECUTOIRE (NON) – CADUCITE (OUI).
Il échet d’octroyer au débiteur un délai de grâce pour s’acquitter de sa dette, dès lors que le non paiement du reliquat de sa dette ne résulte pas d’une mauvaise foi de sa part. Le débiteur venant de bénéficier d’un délai de grâce ayant pour conséquence la discontinuation des poursuites, il convient de faire droit à sa demande de mainlevée de l’immobilisation du véhicule et à sa restitution sous astreinte comminatoire.
La saisie conservatoire doit être déclarée caduque, dès lors qu’elle n’a pas été suivie de formalités ou d’action en vue d’obtenir un titre exécutoire comme l’exige l’article 61 de l’AUPSRVE.
COUR D’APPEL DE DALOA, 2ème CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE, ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE N 246 DU 18 OCTOBRE 2006, AFFAIRE Mr NITIEMA WIGOU c/ Mr SONDO NONGO GILBERT.
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Vu les conclusions des parties.
Ensemble l’exposé des faits, les moyens, prétentions des parties et motifs ci-après.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Faits et procédure
Considérant que par ordonnance n 110 du 09 juin 2006 du Président du Tribunal de Daloa, SONDO NONGOM dit Gilbert a été autorisé à assigner NITIEMA WIGOU et Maître FOFANA Youssouf, l’huissier instrumentaire, en référé d’heure à heure pour s’entendre.
Octroyer un délai de grâce de 06 mois pour régler le reliquat.
de sa dette.
Ordonner la mainlevée de l’immobilisation de son véhicule et la restitution dudit véhicule sous astreinte comminatoire de 300 000 F par jour de retard.
Considérant que SONDO NONGOM dit Gilbert expose avoir acheté à crédit le 04 avril 2004 un camion de marque DAF immatriculé 4466 AT02 à la somme de 6.900 000 francs à NITIEMA WIGOU.
Qu’il a fait divers règlements, à savoir 900 000F la 04 avril 2004,1 000 000 F le 02 mai 2005, 1 000 000 F le 10 décembre 2005 et 1 000 000 F le 20 février 2006, soit des acomptes de 3.900 000F.
Que l’échéance du 30 Novembre a coïncidé avec un évènement malheureux, le véhicule a fait un sinistre ayant entraîné des réparations d’un coût global de 3.991.670 F.
Qu’il reste redevable au vendeur la somme de 3.000 000 F.
Que le 1er juin 2006, ce dernier après avoir confisqué les pièces et les clefs du camion, a fait pratiquer une saisie conservatoire sur ledit camion, suivi le 06 juin 2006 d’une ordonnance d’immobilisation portant sur le même camion.
Qu’étant acheteur de café et cacao, son camion lui sert pour le ramassage de ces produits agricoles.
Que l’immobilisation de ce véhicule lui cause des préjudices énormes dans la bonne marche de ses activités commerciales.
Qu’il convient de mettre fin à cette immobilisation.
Considérant que pour sa part, NITIEMA WIGOU s’oppose à l’octroi du délai de grâce au débiteur eu égard à l’ancienneté de sa dette et aux difficultés de paiement constatées.
Considérant que par ordonnance n 24 du 15 juin 2006, la juridiction présidentielle du Tribunal de Daloa a ordonné :
– Le paiement échelonné de la dette dans la limite de deux mois à compter du mois d’octobre 2006, à raison de 1.500 000F fin octobre et 1.500 000F fin novembre;
– La main levée de l’immobilisation du véhicule litigieux.
Considérant que pour statuer comme il l’a fait, le premier juge a estimé que le véhicule litigieux a fait l’objet d’immobilisation de la part du créancier poursuivant.
Que le demandeur ne pouvant l’exploiter n’a pu honorer en partie ses engagements financiers.
Que cette situation ne résultant pas d’un titre régulier, il y a lieu de déclarer le créancier poursuivant responsable en partie des difficultés de son débiteur.
Considérant que par acte du 1er août 2006, NITIEMA WIGOU a relevé appel de cette décision devant la Cour d’Appel de Daloa.
Considérant que par arrêt avant-dire-droit n 216 du 23 août 2006, la Cour d’Appel de ce siège a déclaré cet appel recevable.
Moyens et prétentions des parties
Considérant que l’appelant fait grief au premier juge d’avoir ainsi statué.
Qu’il sollicite l’infirmation de l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Qu’il relève d’une part qu’en s’exprimant ainsi, la juridiction présidentielle méprise que c’est muni d’une décision de justice, un titre régulier (ordonnance d’immobilisation) que le véhicule litigieux a été immobilisé.
Que d’autre part, c’est eu égard à la mauvaise foi manifeste du débiteur qui n’à pu honorer ses engagements avant échéance du 1er janvier 2005 fixée d’accord parties, qu’il s’est adressé à la juridiction présidentielle pour recouvrer sa créance, qui, au demeurant, remplit toutes les conditions légales pour être recouvrer selon les articles 54 et suivants ainsi que les articles 1er et suivants de l’actes Uniforme du traité OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Que de plus il n’a jamais été question dans l’attestation de vente que se sont les fruits de l’exploitation du véhicule par le débiteur qui devraient servir à payer la dette née de la vente dudit véhicule.
Qu’en sus, en acceptant d’échelonner la dette du débiteur sans tenir compte des « besoins du créancier » la juridiction présidentielle a fait une mauvaise application de l’article 39 alinéa 2 de l’acte uniforme précité.
Considérant que pour sa part, l’intimé sollicite la confirmation de l’ordonnance attaquée.
Qu’il réitère ses arguments de première instance en articulant notamment que c’est à cause des réparations très coûteuses qu’il a effectuées sur le camion querellé qu’il n’a pas respecté l’échéance du 30 novembre 2005.
Qu’il ajoute que la saisie conservatoire pratiquée et l’immobilisation de son camion ont été faites avec une intention manifeste de nuire à ses intérêts créant un manque à gagner pour réduire périodiquement le solde de sa dette.
Qu’il relève que la saisie conservatoire pratiquée depuis le 1er juin 2006 doit être déclarée caduque au motif que plus d’un mois après, n’ayant pas été suivie de formalités ou d’action en vue d’obtenir un titre exécutoire comme l’exige l’article 61 de l’acte uniforme.
Qu’il conclut à la restitution du bien saisi sous astreinte comminatoire de 250 000 F par jour de retard.
SUR CE,
EN LA FORME
Considérant que par arrêt avant-dire-droit n 216 du 23 AOÛT 2006 la Cour d’Appel de céans a déjà déclaré recevable cet appel.
Qu’il convient de s’en rapporter.
AU FOND
Considérant que parmi les chefs de demandes présentés au premier juge, figure la restitution du véhicule immobilisé sous astreinte comminatoire de 300 000 F par jour de retard sur lequel il a omis de statuer.
Considérant qu’en sus, le débiteur a sollicité devant le premier juge un délai de grâce et celui-ci lui a accordé un paiement échelonné, statuant ainsi ultra petita.
Considérant qu’il appert de ce qui précède qu’il convient d’annuler l’ordonnance de référé entreprise, d’évoquer et de statuer à nouveau.
Sur la demande du délai de grâce
Considérant que SONDO NONGOM dit Gilbert a payé plus de la moitié de sa dette et reste devoir la somme de 3.000 000 de francs qu’il n’a pas pu payer à l’échéance convenue pour cause du sinistre survenu sur le camion acheté ayant occasionné des frais de réparation se 3.991.670 F.
Qu’ainsi le non paiement du reliquat de sa dette ne résulte pas d’une mauvaise foi de sa part.
Que c’est donc à bon droit qu’il sollicite un délai de grâce.
Qu’il échet de lui octroyer un délai de grâce de cinq (05) mois à compter de juillet 2006 pour s’acquitter du reliquat de 3.000 000 de francs de sa dette.
Sur la mainlevée de l’immobilisation de véhicule et sur sa restitution
Considérant que le débiteur vient de bénéficier d’un délai de grâce ayant pour conséquence la discontinuation des poursuites, il convient de faire droit à sa demande de mainlevée de l’immobilisation du véhicule sous astreinte comminatoire de 50 000 F par jour de retard.
Sur la caducité de la saisie conservatoire
Considérant que cette demande bien que nouvelle doit être analysée comme une défense à l’action principale au sens de l’article 175 alinéa 1er du Code de Procédure Civile, donc admise en cause d’appel.
Considérant qu’aux termes de l’article 61 du traité OHADA portant sur les voies d’exécution, « si ce n’est dans le cas où la saisie conservatoire a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit ladite saisie, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaire à l’obtention d’un titre exécutoire ».
Considérant qu’en l’espèce, la saisie conservatoire querellée pratiquée depuis le 1er juin 2006, n’a pas été suivie à ce jour de formalités ou d’action en vue d’obtenir un titre exécutoire comme l’exige l’article 61 de l’Acte Uniforme précité.
Qu’il convient de la déclarer caduque.
Sur les dépens
Considérant que l’appelant succombe, il y a lieu de le condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
EN LA FORME
S’en rapporter à l’arrêt avant-dire-droit n 216 du 23 août 2006 de la Cour d’Appel de ce siège qui a déjà déclaré recevable cet appel relevé par NITIEMA WIGOU.
AU FOND
Annule l’ordonnance de référé entreprisse, le premier juge ayant d’une part, omis de statuer sur un chef de demande et d’autre part, statuer ultra petita.
Évoquant et statuant à nouveau
Accorde à SONDO NONGOM dit Gilbert un délai de grâce de 05 mois à compter du mois de juillet 2006 pour s’acquitter de la totalité du reliquat de sa dette de 3.000 000 F.
Ordonne la mainlevée de l’immobilisation du véhicule querellé, ainsi que la restitution dudit véhicule à l’intime, sous astreinte comminatoire de 50 000 F par jour de retard.
Déclare caduque la saisie-conservatoire pratiquée sur ledit véhicule.
Condamne l’appelant aux dépens.
Prononcé publiquement par le Président de la Chambre les jour, mois et an que dessus.
Lequel Président a signé la minute avec le Greffier.