J-09-379
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – CONVENTION DE COMPTE COURANT – CAUTIONNEMENT HYPOTHECAIRE – AVENANT – CAUTION SOLIDAIRE ET INDIVISIBLE – COMPTE DEBITEUR – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – JONCTION D’INSTANCE – DEBITEUR PRINCIPAL – ACTE D’OPPOSITION – VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 11 AUPSRVE (OUI) – DELAIS DE PROCEDURE – ARTICLE 80 CPC – RELEVE DE DECHEANCE (NON) – CAUTION – OPPOSITION RECEVABLE (OUI).
EXCEPTION D’IRRECEVABILITE – PROCEDURE CONTRE LA CAUTION – OBLIGATION D’INFORMER LA CAUTION – VIOLATION DE L’ARTICLE 13 AUS (OUI) – ANNULATION DE L’ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER.
Aux termes de l’article 13 AUS « la caution n’est tenue de payer la dette qu’en cas de non paiement du débiteur principal. Le créancier doit aviser la caution de toute défaillance du débiteur principal et ne peut entreprendre de poursuites contre elle qu’après une mise en demeure adressée au débiteur et restée sans effet ».
En l’espèce, la notification de l’injonction de payer n’équivaut pas à informer la caution de la défaillance du débiteur principal dans la mesure où l’ordonnance d’injonction de payer condamne déjà la caution au paiement de la dette. Par conséquent, il y a lieu d’annuler l’ordonnance d’injonction de payer pour violation de l’article 13 AUS.
Article 10 AUPSRVE ET SUIVANT
Article 13 AUS
Article 80 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 441 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ET SUIVANT
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n 061/08 du 26 mars 2008, SAVADOGO Wéfo Adama & GOUO Seydou c/ Banque Internationale pour le Commerce, l’Industrie et l’Agriculture du Burkina (BICIA-B)).
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties à l’audience du 07 novembre 2007, date à laquelle le tribunal a par jugement avant dire droit ordonné la jonction des RG n 998 du 02 novembre 2007 n 131 du 14 août 2007 et renvoyé l’affaire au 05 décembre 2007 à la demande de la BICIA-B; Advenue cette date, l’affaire a été renvoyée ferme au 30 janvier 2008 à la demande des opposants; A cette date l’affaire a été mise en délibéré pour jugement être rendu le 26 mars 2008; A cette date, le tribunal a statué en ces termes :
Par requête en date du 16 juillet 2007, la BICIA-B a sollicité du président du tribunal de grande instance de Ouagadougou, l’autorisation de faire signifier à monsieur GOUO Seydou et monsieur SAVADOGO Wéfo Adama, une injonction de lui payer la somme de vingt deux millions trois cent quatre vingt mille cinquante deux (22.380 052) F. CFA; elle expose qu’elle a signé avec monsieur GOUO Seydou une convention de compte courant avec cautionnement hypothécaire à hauteur de dix millions (10 000 000) F. CFA; que de cette convention, monsieur SAVADOGO Wéfo Adama s’est porté caution à hauteur de cinq millions (5 000 000) F. CFA; que le 22 novembre 2006, les parties ont procédé à la signature d’un avenant portant ainsi le montant de l’inscription hypothécaire de dix millions (10 000 000) F. CFA à trente cinq millions (35 000 000) F. CFA; que monsieur SAVADOGO Wéfo Adama s’est encore porté caution solidaire et indivisible à hauteur de vingt cinq millions (25 000 000) F.CFA; que cependant, depuis la signature de cet avenant, les mouvements se sont faits rares au niveau du compte qui finalement présente un compte débiteur de vingt deux millions trois cent quatre vingt mille cinquante deux (22.380 052) F. CFA; que ni monsieur GOUO Seydou, ni monsieur SAVADOGO Wéfo Adama ne conteste le montant dudit compte; que les nombreuses tentatives de recouvrement à l’amiable qu’elle a entreprises sont restées vaines; qu’il y a crainte que les débiteurs n’organisent leur insolvabilité; que c’est la raison pour laquelle, elle entend recourir contre eux à la procédure d’injonction de payer.
La BICIA-B a par actes de maître H. Jean Emmanuel MINOUNGOU, huissier de justice à Ouagadougou, fait signifier aux sieurs GOUO Seydou et SAVADOGO Wéfo Adama, respectivement le 1er août 2007 et le 18 octobre 2007, l’ordonnance d’injonction de payer n 280/2007 à elle délivrée par le vice-président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou le 20 juillet 2007 au pied de sa requête.
Contre cette ordonnance, monsieur GOUO Seydou et monsieur SAVADOGO Wéfo Adama ont par actes de maître Rosine BOGORE ZONGO, huissier de justice à Ouagadougou, formé opposition.
Par les même actes, ils ont donné assignation la BICIA-B et au greffe du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, d’avoir à comparaître devant ledit tribunal pour s’entendre en la forme et principalement déclarer leur opposition recevable; déclarer nul et de nuls effets l’exploit de notification en cause pour violation de l’article 8 alinéa 1 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; subsidiairement, déclarer irrecevable la requête de la BICIA-B pour violation des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme susvisé et dire en conséquence que l’ordonnance qui en est résulté n’a pu exister donc nul et de nuls effets; déclarer la présente procédure contre la caution irrecevable pour violation de l’article 13 de l’Acte uniforme portant organisation de sûretés; par extraordinaire et au fond, débouter la BICIA-B de sa procédure de recouvrement pour défaut de preuves de la créance dans son principe et son quantum et la condamner aux dépens de l’instance; par ailleurs monsieur GOUO Seydou sollicite la condamnation de la BICIA-B à lui payer la somme de 500 000 F. CFA au titre des frais non compris dans les dépens.
A l’appui de ses prétentions, monsieur SAVADOGO Wéfo Adama soutient d’une part que l’ordonnance d’injonction de payer et l’exploit de notification encourent nullité pour violation de l’article 8 l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; qu’en effet, au sens de l’article précité, « à peine de nullité, la signification de l’ordonnance portant injonction de payer contient sommation d’avoir : – soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par la décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé (..) »; qu’alors que l’exploit de notification du 18 octobre 2007 ne fait aucunement mention des intérêts; que d’autre part, la requête aux fins d’injonction de payer de la BICIA-B doit être déclarée irrecevable pour violation des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme précité en ce sens que la BICIA-B a présenté des réclamations, en l’occurrence des frais de recouvrement et d’honoraires d’avocats, qui ne sont pas contractuelles, ni la résultante de l’émission ou de l’acceptation de tout effet de commerce, ou d’un chèque dont la provision s’est révélée inexistante ou insuffisante; qu’en outre ces réclamations ne sont ni certaines, ni liquides, ni exigibles; que par ailleurs, la requête de la BICIA-B doit être déclarée également irrecevable pour violation de l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant sûretés; que cet article dispose que « la caution n’est tenue de payer la dette qu’en cas de non paiement du débiteur principal. Le créancier doit aviser la caution de toute défaillance du débiteur principal et ne peut entreprendre de poursuites contre elle qu’après une mise en demeure adressée au débiteur et restée sans effet. (..) »; qu’il n’a pas été informé de l’évolution des engagements du débiteur principal de sorte qu’il n’a pu surveiller ses droits vis-à-vis de ce dernier; qu’aucune des pièces versées au greffe par la BICIA-B pour justifier sa requête, ne comporte une mise en demeure de payer faite au débiteur principal et restée sans suite, encore moins l’information au profit de la caution de la défaillance dudit débiteur; que le non respect des dispositions susvisées lui portent préjudice car il aurait pu mieux défendre ses intérêts; qu’enfin, la créance de la BICIA-B n’est pas fondée dans la mesure où elle se contente de produire une attestation de solde en date du 1er juin 2007; que cette attestation établie de façon unilatérale et arbitraire par la BICIA-B ne saurait constituer ni justifier en lui-même l’existence d’une créance; qu’en conséquence, il y a lieu en en la forme et principalement, déclarer son opposition recevable, déclarer nul et de nuls effets l’exploit de notification en cause pour violation de l’article 8 alinéa 1 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; subsidiairement, déclarer irrecevable la requête de la BICIA-B pour violation des articles 1 et 2 de l’Acte uniforme susvisé et dire en conséquence que l’ordonnance qui en est résulté n’a pu exister donc nul et de nuls effets; déclarer la présente procédure contre la caution irrecevable pour violation de l’article 13 de l’Acte uniforme portant sûretés; par extraordinaire et au fond, débouter la BICIA-B de sa procédure de recouvrement pour défaut de preuves de la créance dans son principe et son quantum, et la condamner aux dépens.
Quant à monsieur GOUO Seydou il reprend les mêmes arguments et les mêmes prétentions que monsieur SAVADOGO Wéfo Adama tout en réclamant en sus la condamnation de la BICIA-B à lui payer la somme de 500 000 F. CFA au titre des frais non compris dans les dépens.
En réplique, la BICIA-B conclut principalement à la déchéance du droit d’opposition des sieurs SAVADOGO Wéfo Adama et GOUO Seydou pour violation de l’article 11 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; qu’en effet, entre la date de l’audience et la date de l’audience fixe, il s’est écoulé plus de 30 jours; que par ailleurs, le moyen tiré de la violation de l’article 8 de l’acte susvisé soulevé par les opposants ne saurait prospérer; qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour commune de justice et d’arbitrage de l’OHADA que la nullité prescrite à l’article 8 précité a un caractère relatif; que les opposants doivent prouver leur préjudice à l’appui de leur demande d’annulation; que l’absence de mention des intérêts s’explique par le fait qu’elle n’entend plus leur réclamer des intérêts; que sa créance à l’égard des opposants est certaine, liquide telle qu’il ressort des documents bancaires (relevé au 31/03/07 et relevé au 30/06/07) et exigible, son paiement n’étant affecté d’aucune condition, ni d’aucun terme; que le moyen fondé sur la mention des frais d’avocat ne saurait prospérer en ce sens que cette mention a été faite à titre d’information; que l’ordonnance d’injonction de payer n’ayant pas fixé leur montant, aucune somme ne leur a été réclamée à ce titre; que le moyen tiré de la violation de l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés n’est pas fondé dans la mesure où par correspondance en date du 27 mars 2007, monsieur GOUO Seydou a été mis en demeure à lui payer sous quinzaine le solde débiteur de son compte; que s’agissant de l’obligation d’informer la caution, la signification de l’ordonnance d’injonction de payer à monsieur SAVADOGO Wéfo Adama la caution lui a porté l’information de la défaillance de monsieur GOUO Seydou, débiteur principal; que reconventionnellement, elle sollicite que les opposants soient condamnés à lui payer la somme forfaitaire de un million (1 000 000) F. CFA au titre des frais non compris dans les dépens.
En réponse à cela, monsieur GOUO Seydou déclare qu’il a reçu notification de l’ordonnance d’injonction de payer 1er août 2007; qu’il a formalisé son opposition le 10 et le 13 août; qu’ainsi, il ne pouvait respecter le délai de comparution de 15 jours prévu par l’article 441 du code de procédure civile sans audiencier la cause au-delà du 22 août 2007, date de la seule audience commerciale de vacation; qu’il y a donc lieu de le relever de la déchéance encourue conformément à l’article 80 du code précité.
SUR CE
EN LA FORME
1) De la recevabilité des oppositions
a) De l’opposition formée par monsieur SAVADOGO Wéfo Adama
Attendu que l’ordonnance aux fins d’injonction de payer a été rendue le 20 juillet 2007 et signifiée à monsieur SAVADOGO Wéfo Adama le 18 octobre 2007.
Que contre cette ordonnance monsieur SAVADOGO Wéfo Adama a formé opposition par acte d’huissier le 02 novembre 2007.
Attendu qu’il résulte de l’article 10 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution que « l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer ».
Attendu qu’en l’espèce entre la date de signification de l’ordonnance d’injonction de payer (18 octobre 2007) et la date de l’opposition (02 novembre 2007), il s’est écoulé moins de 15 jours.
Qu’il convient donc déclarer l’opposition formée par monsieur SAVADOGO Wéfo Adama contre l’ordonnance d’injonction de payer n 280/2007 du 20 juillet 2007 recevable en la forme.
b) De l’opposition formée par monsieur GOUO Seydou
Attendu que l’article 11 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution dispose que : « l’opposant est tenu, à peine de déchéance, et dans le même acte que celui de l’opposition :
de signifier son recours à toutes les parties et au greffe de la juridiction ayant rendu la décision d’injonction de payer.
de servir assignation à comparaître devant la juridiction compétente à une date fixe qui ne saurait excéder le délai de trente jours à compter de l’opposition »
Attendu qu’en l’espèce monsieur GOUO Seydou a formé opposition le 10 août 2007.
Qu’elle a donné assignation à comparaître le 19 septembre 2007.
Qu’entre la date du 10 août 2007 et celle du 19 septembre 2007, il s’est écoulé plus de 30 jours.
Attendu que l’argument tiré du fait que le délai de comparution de 15 jours fixé par l’article 441 du code de procédure civile n’aurait pas été respecté si la date de l’audience était fixée au 22 août 2007 ne saurait prospérer.
Qu’en effet, certes, l’article 441 énonce que le délai pour comparaître est de 15 jours au moins, mais l’article 442 du même code dispose que : « si, en raison de circonstances particulières, l’assignation ne peut être délivrée dans le délai de l’article 441, l’huissier doit en référer au greffier du tribunal qui fait fixer par le président de la juridiction une nouvelle date de comparution ».
Qu’ainsi cette formalité n’ayant pas été accomplie, monsieur GOUO Seydou ne peut se prévaloir du relevé de déchéance prévu à l’article 80 du code susvisé.
Qu’il convient donc le déclarer déchu de son droit d’opposition.
2) Du moyen tiré de la violation de l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés
Attendu que l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés dispose que : « la caution n’est tenue de payer la dette qu’en cas de non paiement du débiteur principal. Le créancier doit aviser la caution de toute défaillance du débiteur principal et ne peut entreprendre de poursuites contre elle qu’après une mise en demeure adressée au débiteur et restée sans effet. (..) ».
Attendu qu’en l’espèce, la BICIA-B prétend que la notification de l’injonction de payer équivaut à informer la caution de la défaillance du débiteur principal; Qu’un tel argument ne saurait prospérer dans la mesure où l’ordonnance d’injonction de payer condamne déjà la caution au paiement de la dette.
Que ladite ordonnance n’a pas été notifiée à titre d’information.
Qu’au regard de tout ce qui précède, il y a lieu d’annuler l’ordonnance d’injonction de payer n 280/2007 du 20 juillet 2007 pour violation de l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort.
En la forme.
Déclare GOUO Seydou déchu de son droit d’opposition pour violation de l’article 11 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiée de recouvrement et des voies d’exécution.
Déclare SAVADOGO Wéfo Adama recevable en son opposition parce qu’intervenue dans les formes et délais prescrits par la loi.
Annule l’ordonnance d’injonction de payer n 280/2007 rendue le 20 juillet 2007 pour violation de l’article 13 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés.
Met les dépens à la charge de GOUO Seydou et de la BICIA-B.