J-10-117
DROIT DES SOCIETES COMMERCIALES – SOCIETE ANONYME – ACTION EN DISSOLUTION ET EN LIQUIDATION DES BIENS – ACTION BIEN FONDEE – DECISION DE DISSOLUTION ANTICIPEE ET DE LIQUIDATION DE LA SOCIETE.
SAISIE VENTE – APPEL – EXCEPTIONS D’IRRECEVABILITE ET DE NULLITE – ACTE D’APPEL – NON MENTION DES MOYENS D’APPEL – DEFAUT DE PREUVE D’UN PREJUDICE – APPEL RECEVABLE (OUI) – ACTE D’ASSIGNATION – DEFAUT D’INDICATION DE CERTAINES PIECES – PREJUDICE SUBI – DEFAUT DE PREUVE – ARTICLE 137 ALINEA 2 CPP – MOYENS DE DEFENSE POSTERIEURS A L’ACTE CRITIQUE – NULLITE COUVERTE (OUI) – DEFAUT DE QUALITE ET D’INTERET POUR AGIR – CONTRAT DE SOCIETE – ASSOCIE – DECISION DE METTRE FIN AU CONTRAT – ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE – NON ASSOCIATION DE L’ACTIONNAIRE – DECISION DE RESTITUTION DE LA VALEUR NOMINALE DES ACTIONS – DECISION POSTERIEURE A L’ACTE D’ASSIGNATION – PERTE DE LA QUALITE D’ASSOCIE (NON) – CESSION DES DROITS SOCIAUX – VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 59 AUSCGIE.
FIN DE NON RECEVOIR (NON).
DISSOLUTION DE LA SOCIETE ANONYME – CAUSES – ARTICLE 200 ET 736 AUSCGIE – DEMANDE DE DISSOLUTION ANTICIPEE POUR JUSTES MOTIF – MESENTENTES ET MESINTELLIGENCE ENTRE ASSOCIES – CRISE GRAVE – DYSFONCTIONNEMENT – CONFIRMATION DU JUGEMENT – DEMANDE DE DOMMAGES INTERETS – ACTION MALICIEUSE, VEXATOIRE ET DILATOIRE (NON) – DEMANDE MAL FONDEE – FRAIS EXPOSES ET NON COMPRIS DANS LES DEPENS (OUI).
Suite aux nombreuses difficultés rencontrées avec son associé principal, un associé
informe ses coactionnaires de son intention ferme et définitive de mettre fin à la société anonyme qu’ils ont créée. Il intente alors une action en dissolution et en liquidation des biens de ladite société.
Aux termes de l’article 200 AUSCGIE, l’action en dissolution d’une société commerciale ne peut être exercée que par une personne ayant qualité. En l’espèce, l’intimé a saisi le Tribunal par exploit d’huissier du 23 février 2007 et la décision a été rendue le 06 juin 2007) L’assemblée générale extraordinaire, fut elle régulièrement convoquée le 19 mars 2007, ne peut déchoir l’intimé de sa qualité d’associé, surtout que ce dernier n’avait pas été associé à ladite assemblée générale et que la correspondance du 16 février 2007 n’est que la manifestation non équivoque de l’intention de l’intimé de mettre fin au contrat par la voie judiciaire.
Par ailleurs, l’article 59 AUSCGIE dispose que « dans tous les cas où est prévue la cession des droits sociaux d’un associé, ou le contrat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, à défaut d’accord amiable entre les parties, par expert désigné, soit par les parties soit, à défaut d’accord entre elles, par décision de la juridiction compétente statuant à bref délai ». En l’espèce, l’intimé n’a pas cédé volontairement ses actions. C’est l’assemblée générale extraordinaire qui a décidé de lui restituer la valeur nominale de ses actions sans son consentement. Pourtant, seules les cessions volontaires ou judiciaires emportent la perte de la qualité d’actionnaire. Dès lors, l’exception d’irrecevabilité tenant au défaut de qualité et d’intérêt doit être rejetée.
L’article 736 AUSCGIE dispose que la société anonyme est dissoute pour les causes communes à toutes les sociétés dans les conditions et sous les effets prévus aux articles 200 à 202 AUSCGIE. La société anonyme est également dissoute, en cas de perte partielle d’actifs, dans les conditions fixées aux articles 664 à 668 AUSCGIE. Et selon l’article 200 AUSCGIE, la société prend fin pour la dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution des ses obligations par un associé ou de mésentente entre associés empêchant le fonctionnement normal de la société.
En l’espèce, l’existence de mésententes et la mésintelligence entre les associés ne peuvent être contestées, et en en imputant cette mésintelligence à l’intimé, les appelants reconnaissent l’existence de celle-ci. En plus, une nouvelle société a été créée entre les mêmes actionnaires et délocalisée à Abidjan ayant le même objet, les mêmes employés, le même président du conseil d’administration, le même directeur général. Dès lors, il y a lieu de prononcer la dissolution de la société, celle-ci ne pouvant plus fonctionner.
Article 15 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 137 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 138 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 140 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 141 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 438 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 530 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 551 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
(COUR D’APPEL DE BOBO-DIOULASSO, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n 10/09 du 10 juin 2009, Union des Transporteurs Ivoiro-burkinabè, SAWADOGO Komyaba Issaka, SAWADOGO Hada, SOKOTO Haoudou, SAWADOGO Djibril c/ BOKOUM Samba Amadou).
LA COUR,
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
SAWADOGO Issaka gérant de la société de commerce, de voyage Ivoiro Burkinabé (SO.CO.CIB.) et BOKOUM Samba Amadou, gérant de la société COBOF décidaient de créer le 31 août 2004, le groupement d’intérêt économique dénommé l’union de transport SOCOCIB – COBOF en abrégé UTSC en vue d’exploiter ensemble le train marchandises et voyageurs. Leur convention d’affrètement devait être signée avec UTSC et SITARAIL, mais par la suite, SAWADOGO Issaka devait apprendre que le contrat d’affrètement a été signé avec COBOF et non UTSC et pour remédier aux insuffisances de UTSC & Cie, SAWADOGO Issaka et BOKOUM Amadou, SAWADOGO Hada, SOKOTO Haoudou, SAWADOGO Djibril ont par acte notarié du 09 octobre 2006 créer la société anonyme dénommée « Union des Transporteurs Ivoiro-Burkinabé » (UTIB).
Le capital social est divisé en 1 000 actions de mêmes catégories et SAWADOGO Issaka, BOKOUM Samba Amadou apparaissent comme les actionnaires majoritaires en ce que chacun d’eux détient 375 actions. La société a pour objet « toute activité de transport ferroviaire de personnes et de marchandises ». Suivant correspondance datée du 16 février 2007 délaissée au siège de l’UTIB le 23 février 2007, BOKOUM Amadou informait ses actionnaires de son intention ferme et définitive de mettre fin à la société suscitée suite aux nombreuses difficultés qu’il rencontre avec son associé principal.
Par acte d’huissier du 23 février 2007, BOKOUM Amadou faisait assigner UTIB, SAWADOGO K. Issaka, SAWADOGO Hada, SOKOTO Haoudou et SAWADODO Djibril par devant le Tribunal de Grande de Bobo-Dioulasso à l’effet de :
Dire l’action recevable, prononcer la dissolution de la société UTIB, prononcer la liquidation des biens de ladite société, mettre les dépens à la charge des dépens.
Par jugement n 23 du 06 juin 2007, ledit Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale; vu les articles 200 et suivants de l’AUSCGIE.
Rejetait les exceptions de nullité de l’acte d’assignation et la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité de BOKOUM Amadou soulevées par les défendeurs.
Déclarait recevable l’action de BOKOUM Amadou et la disait bien fondée, en conséquence, prononçait la dissolution de la société UTIB-SA.
Nommait maître SISSOKO Boubakar en qualité de liquidateur à l’effet de procéder aux opérations de la liquidation.
Condamne les défendeurs au paiement de la somme de cinq cent mille francs (500 000 FCFA) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Mettait les dépens à la charge de la société UTIB-SA.
Contre ce jugement, l’UTIB-SA, SAWADOGO K. Issaka, SAWADOGO Hada, SOKOTO Haoudou et SAWADODO Djibril interjetaient appel par exploit d’huissier du 20 juin 2007.
La cause enrôlée sous le RG n 83/2007 bis du 28 juin 2007 était appelée à l’audience du 16 juillet 2007 et renvoyée à la mise en état. Le 02 mars 2009, le conseiller chargé de la mise en état clôturait l’instruction et renvoyait le dossier au 08 avril 2009) A cette date, le dossier fut retenu et mis en délibéré pour décision être rendue le 13 mai 2009 date à laquelle, la Cour au regard des prétentions et moyens des parties a statué ainsi qu’il suit :
Les appelants par l’intermédiaire de leur conseil, SCPA TOU et SOME, maître NOMBRE Benjamin, maître Adolphe René OUEDRAOGO soulèvent la nullité de l’acte d’assignation pour violation de la loi et le défaut de qualité et d’intérêt pour agir de BOKOUM Amadou.
S’agissant de l’acte d’assignation, ils estiment qu’il n’indique pas les pièces sur lesquelles BOKOUM Amadou fonde sa demande, pourtant une telle formalité essentielle est prescrite à peine de nullité par l’article 438 du code de procédure civile de ce fait, ils ont subi un préjudice qui justifie la nullité de l’acte en cause.
Pour le défaut de qualité, ils prétendent que le juge a fait une mauvaise application des articles 141 du code de procédure civile de l’article 200 de l’AUSC et du GIE par suite d’une mauvaise appréciation des faits en motivant qu’à la date du 23 février 2007, BOKOUM Amadou était toujours associé et l’assemblée générale extraordinaire fut elle régulièrement convoquée le 19 mars 2007, ne peut pas rétroactivement le déchoir de sa qualité d’associé car aucune des quatre (04) résolutions de ladite assemblée générale ne porte sur une quelconque déchéance de BOKOUM Amadou de sa qualité d’associé; en effet l’assemblée générale extraordinaire en première résolution stipule in fine « elle prend cependant acte de la volonté ferme de BOKOUM Samba Amadou de ne plus être actionnaire de la société UTIB.
L’assemblée des actionnaires entérine la décision de BOKOUM Amadou, prend donc acte de ce qu’il ne fait plus partie des actionnaires de la société UTIB et décide de continuer la société sans lui ».
C’est exclusivement BOKOUM Amadou qui a pris la décision ferme et définitive de mettre fin au contrat de société qui les lie; de ce fait, la perte de la qualité d’associé par BOKOUM Amadou ne résulte pas de l’assemblée générale mais de sa propre volonté et sa non participation à l’assemblée générale du 19 mars 2007 est une preuve supplémentaire; la qualité pour agir devant être apprécié au moment de la saisine du Tribunal, il est constant que BOKOUM Amadou n’avait plus qualité d’associé au moment où il saisissait le tribunal.
Ils allèguent aussi que le Tribunal fait une confusion entre le régime juridique de la perte de la qualité d’associé et le régime juridique des parts sociales ou actions de l’associé concerné en soutenant dans sa motivation que la perte de la qualité d’associé dans une société anonyme résulte suivant l’article 764 de l’AUSC et du GIE d’une décision libre de l’associé; en effet, le sort des actions de l’associé démissionnaire n’a aucune incidence juridique sur la validité de sa démission et il est constant que BOKOUM Amadou dispose de voies légales pour contester le principe et les modalités de cessions des actions; le tribunal, en citant les dispositions de l’article 59 de l’AU suscité, ne fait que confirmer la validité de la démission; dès lors, BOKOUM Amadou n’a plus de qualité pour agir; enfin, au regard de l’article 25 des statuts de l’UTIB-SA, la société peut être dissoute par l’arrivée du terme ou par la volonté des actionnaires réunis en assemblée générale extraordinaire et le fait pour un seul actionnaire de dénoncer le contrat de société n’entrave pas la validité de celui-ci entre les quatre autres associés restants de l’UTIB; il y a donc irrecevabilité.
Au fond, les conseils des appelants prétendent que c’est à tort que le jugement attaqué a prononcé la dissolution de la société, prétextant de la paralysie, car l’article 200 de l’AUSC et du GIE en parlant de la paralysie fait référence aux organes de la sociétés et ces organes sont : l’assemblée générale, le conseil d’administration, la direction générale; outre BOKOUM Amadou et Issaka, la société compte 03 autres associés; le jugement ne dit pas en quoi, l’un des organes de la société est paralysé, il se trouve simplement à invoquer la démission du directeur général; sur ce point, la Cour remarquera que non seulement cette démission est intervenue le 28 février 2007, bien après la saisine du Tribunal, mais aussi YAMEOGO Z. Souleymane a été immédiatement remplacé par un nouveau directeur général et ce, bien avant la première audience; il serait donc naïf de croire que dans une société anonyme, la démission du directeur général constitue en soi une preuve de paralysie de la société, les autres organes, de l’UTIB fonctionnent normalement.
Dans la présente cause, BOKOUM Amadou qui est seul contre quatre ne possède que 375 actions sur les 1 000 actions du capital social; que le second groupe en détient 625 donc plus que la majorité et c’est justement pour la paralysie escompter que BOKOUM Amadou a tenté de bloquer les comptes bancaires de l’UTIB en procédant à la saisie le 12 mars 2007 mais cette tentative a échoué.
Le juge a confondu la personnalité de 02 actionnaires à celle de la société UTIB; en effet en droit, la dissoute personnel entre 02 actionnaires parmi tant d’autres dans une société anonyme ne constitue pas une paralysie de la société; la mésintelligence doit avoir pour conséquence d’empêcher les organes de la société soit de se réunir, soit de prendre des décisions, alors qu’en l’espèce, les organes se réunissent et prennent des décisions sans problèmes et tous les indicateurs de la société sont au vent et il est de jurisprudence constante que la dissolution est refusée dans des hypothèses ou la société est prospère (voir Lamy sociétés droit des sociétés commerciales).
Le premier juge pour soutenir sa décision, a aussi motivé que la paralysie est plus caractéristique dans la mesure où BOKOUM Amadou que l’on considère comme n’étant plus associé n’est pas moins le bénéficiaire du contrat d’affrètement avec la SITARAIL, le retrait de son contrat prive absolument UTIB de son objet, cette motivation est inexacte pour deus raisons :
Tenir tel raisonnement, c’est méconnaitre l’objet social de l’UTIB qui n’est pas uniquement d’exploiter un contrat avec SITARAIL qui d’ailleurs n’entendait plus traiter avec COBOF SARL; car le 07 avril 2007 SITARAIL avait notifié à BOKOUM Amadou un préavis de résiliation du contrat pour une nouvelle signature du contrat d’affrètement provisoire avec UTIB en remplacement de celui signé avec COBOF; la rencontre était prévue pour le 14 mai 2007 à Abidjan mais le 1er juge ayant prononcé la dissolution de la société UTIB, le 06 mai 2007, SITARAIL a préféré attendre l’issu de la procédure; mais malgré tout, elle a résilié le contrat et a signé un contrat d’affrètement ferroviaire avec la société UTIB qui continue d’exister de fonctionner.
Il n’a jamais été question pour SITARAIL de contracter avec BOKOUM Amadou; celui-ci a trompé la religion de SITARAIL pour signer le contrat avec COBOF et c’est rattraper cette situation sans mettre BOKOUM Amadou à la touche que la société UTIB a été créée et BOKOUM Amadou ayant assigné ladite société en dissolution pour éviter la signature du contrat avec celle-ci, les autres coactionnaires ont créé une nouvelle société la STIB (Société de Transport Ivoiro Burkinabè).
Le jugement attaqué soutient que « …subsidiairement, UTSC dont UTIB est l’émanation, est en procédure de dissolution »; cependant d’une part, la procédure de dissolution de l’UTSC est le fruit d’un accord des parties; UTSC étant un GIE, les parties (COBOF et SOCOCIB) ont décidé de le dissoudre pour créer une nouvelle structure dotée de la personnalité juridique cette fois; cet accord a fait l’objet d’un consensus et pouvoir a été donné aux avocats à cet effet; les difficultés qui existent actuellement dans le processus de dissolution sont liées aux malversations commises par BOKOUM Amadou qui agissait au nom du GIE d’autre part, UTIB est une personne morale distincte de USTC qui est un GIE; les actionnaires de UTIB sont au nombre de cinq (05) et sont tous des personnes physiques alors que UTSC était composé de deux (02) personnes morales.
Par conséquent, UTIB ne saurait être l’émanation de l’UTSC dans la mesure où COBOF et SOCOCIB existent toujours. Le jugement a aussi conclu au fait qu’il n’est pas établi que les faits reprochés à BOKOUM Amadou soient exacts, cependant, aussi bien les faits que les pièces du dossier appellent à un avis contraire; sans paralyser le fonctionnement de l’UTIB, la situation de crise qui existent résulte des turpitudes, malversations et de BOKOUM Amadou.
Les conseils des appelants soutiennent que c’est à tort que le jugement a écarté la responsabilité de BOKOUM Amadou dans la survenance de la crise en s’appuyant sur le contenu du procès-verbal d’une rencontre du 29 octobre 2006 alors que les faits invoqués au procès verbal concernant la période du GIE – UTSC, à cette période, UTIB n’existait pas et UTIB a été créée le 10 octobre 2006 pour surmonter la crise, elle n’a été dotée de la personnalité juridique que le 12 octobre 2006 par son immatriculation au RCCM; la rencontre du 29 octobre 2006 avait été convoquée par le médiateur pour exorciser le mal qui gagnerait UTSC, et BOKOUM Amadou n’a pas assisté à cette rencontre; mais suite à l’action du médiateur, les deux associés Issaka et Amadou avaient convenu de travailler dans le seul intérêt de UTIB et des mesures concrètes avaient été retenues à cet effet. BOKOUM Amadou devait donc envoyer sa lettre de dénonciation du contrat, mais à la rencontre du 13 février 2007, les actionnaires se sont rendus compte qu’il n’avait rien fait. Les véritables conflits au sein des actionnaires de UTIB ont commencé à cette occasion; il est donc constant que c’est BOKOUM Amadou qui en est à l’origine; en effet, il a menti à tous ses associés en affirmant avoir envoyé la lettre, pire bien qu’ayant promis de le faire le plus tôt possible après le 13 février 2007, il ne fera rien malgré les rappels.
Concernant les accusations de détournement, il est constant que SITARAIL a versé des ristournes à UTSC, une copie du chèque émis par SITARAIL a été produite à cet effet; pour éviter tout soupçon, BOKOUM en tant que premier responsable de UTSC qui a reçu et encaissé ce chèque devait en justifier l’utilisation mais il n’a pas pu le faire; les appelants l’ont donc accusé de détournement et le tribunal parle de simples allégations, ce qui n’est pas juste, s’agissant des menaces de mort, BOKOUM a reconnu ce forfait et a présenté ses excuses devant témoins.
Pour les ristournes, BOKOUM Amadou n’ayant pas pu justifier l’utilisation de la somme, une plainte qui a été faite contre lui a abouti à son implantation et sa mise sous mandat de dépôt pour abus de confiance; et c’est encore BOKOUM Amadou qui a écrit à SITARAIL pour tenter d’écarter UTIB.
Pour ce qui est des dommages intérêts, les appelants prétendent que l’action de BOKOUM Amadou est le portrait robot de l’action décrite à l’article 15 du code de procédure civile à savoir l’action malicieuse, vexatoire, dilatoire ou qui n’est fondée sur aucun moyen sérieux qui leur a causé grand dommages, en effet, il a distrait les appelants dans leurs occupations habituelles et fait perdre à UTIB le contrat d’affrètement qu’elle devait signer avec SITARAIL; de ce fait, il sied de condamner BOKOUM Amadou à leur payer 10 millions. Sur les frais irrépétibles, ils soutiennent que du fait de BOKOUM, ils ont dû s’attacher les services de conseils et en application de l’article 6 nouveau de la loi portant organisation judiciaire au Burkina Faso, le condamner à leur payer la somme de 10 millions.
En réplique, BOKOUM Amadou par l’intermédiaire de son conseil maître Issif SAWADOGO prétend à l’irrecevabilité de l’appel en ce que l’acte d’appel ne comporte aucun moyen d’appel, comme il est prescrit à l’article 550 du code de procédure civile.
Sur la prétendue nullité de l’acte d’assignation, les appelants estiment à tort que l’exploit introductif d’instance mérite annulation sur le fondement de l’article 438 du code de procédure civile, alors qu’ils ne sont pas la preuve du préjudice que leur cause d’omission de n’avoir pas mentionnée et énuméré certaines pièces sur lesquelles BOKOUM Amadou fonde son action en première instance; à défaut de faire cette preuve, on ne peut prononcer la nullité de l’acte en cause au regard de l’article 140 du code de procédure civile; ensuite en vertu de l’article 137 alinéa 2 du code de procédure civile, la nullité des actes de procédure est converti si celui qui l’invoque a postérieurement à l’acte critiqué, fait valoir des moyens de défenses au fond ou soulevé une fin de non recevoir; en l’espèce, des moyens de défenses au fond ont été soulevés; que ce moyen est donc à rejeter.
Sur le prétendu défaut de qualité de BOKOUM Amadou pour demander la dissolution de UTIB-SA, les appelants font grief au jugement d’avoir violé des articles 141 du code de procédure civile et 200 de l’AUSCGIE en faisant une mauvaise exploitation du dossier; l’article 200 énonce les causes de dissolution d’une société; c’est à tort qu’il est fait mauvaise querelle à la motivation du jugement en ce que celui-ci affirme qu’au moment de l’exploit introductif d’ instance le 23 février 2007, BOKOUM Amadou avait la qualité requise pour entreprendre son action. En plus, les appelants confirment bien que c’est après avoir reçu la correspondance du 23 février 2007 de BOKOUM par laquelle, il décidait de mettre fin à la société qui les unie, qu’une assemblée générale s’est réunie le 19 mars 2007 pour décider de se partager sinon, attribuer les parts sociales de BOKOUM à une tierce personne, là où c’est valable que la cession d’action; du reste, comment peut ont prétendre que BOKOUM Amadou a « démissionné » de UTIB pour sa lettre du 16 février 2002 comme s’il avait la qualité d’employé. L’actionnaire démissionne pas parce qu’il n’a pas la qualité de travailleur, encore moins le détenteur de parts sociales d’une société cède ses actions; seules la cession volontaire ou judiciaire emporte la perte de la qualité d’actionnaire du reste, il n’appartient pas aux autres associés d’attribuer les actions d’un associé à un tiers même en assemblée générale pour l’exclure de la société et pouvoir prétendre qu’il n’a plus qualité pour demander la dissolution de la société UTIB-SA; l’interprétation partisane que les appelants donnent à la correspondance du 16 février 2007 en même temps que l’assignation en dissolution ne souffre d’aucune ambiguïté quant à sa bonne compréhension et le vocable « se retirer » n’a jamais été usité par BOKOUM pour que les appelants puissent en tirer les conséquences d’un éventuel retrait volontaire et se partager les actions. Il convient de restituer à la correspondance toute sa réalité car prendre la décision de mettre fin au contrat n’emporte pas démission, mais plutôt l’exercice de l’action judiciaire pour la voie de l’assignation.
Sur le fond, le jugement de dissolution de la société est bien fondé, en ce sens qu’il s’est basé sur l’article 200 de l’AUSC et du GIE qui énumère les causes de dissolution.
En l’espèce, l’existence de mésententes et la mésintelligence entre BOKOUM et SAWADOGO Issaka ne peut être contesté par les appelants; il suffit de se référer aux déclarations expresses imputables à SAWADOGO Issaka établies dans le Procès verbal de l’assemblée général de UTIB-SA du 29 octobre 2006; prétendre que la société UTIB fonctionne correctement est une méconnaissance du fait qu’une assemblée générale des actionnaire d’une société participe du fonctionnement de la société; il est constant que la mésentente est bel et bien installée et existante entre les parties au regard en plus de deux mandats de dépôt décernés contre BOKOUM suite à une plainte de SAWADOGO Issaka.
UTIB-SA ne fonctionne plus du fait car aucun procès verbal de réunions récentes de ladite société encore mais représentants légaux ne peuvent être dénommés actuellement par les appelants. Il s’agit pour ceux-ci d’amener la chambre à ne point prononcer une décision qui légalise une dissolution défait. UTIB-SA délaissée et d’une nouvelle société entre les mêmes actionnaires, délocalisée à Abidjan, ayant le même objet, les mêmes employés, le même président du conseil d’administration, le même directeur général a été créée, d’où intérêt des appelants à ce qu’une décision de liquidation ne soit pas prononcée contre UTIB-SA; c’est pourquoi BOKOUM Amadou sollicite que les statuts de la nouvelle société soient versé au dossier afin que la Cour en soit d’avantage éclairé.
En application de l’article 6 de la loi portant organisation judiciaire au Burkina Faso, il sollicite que les appelants soient condamnés à leur payer la somme de un million de francs CFA pour frais exposés et non compris dans les dépens.
DISCUSSION
EN LA FORME
Sur l’appel
Attendu que maître SAWADOGO Issif, conseil de BOKOUM Amadou prétend à l’irrecevabilité de l’appel en ce que l’acte d’appel ne comporte aucun moyen d’appel comme le prescrit l’article 550 du code de procédure civile.
Attendu qu’il ressort de l’article 140 alinéa 1 du code de procédure civile que la nullité ne peut être prononcée qu’à charge par celui qui l’invoque de prouver le préjudice que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public; qu’en l’espèce, maître SAWADOGO Issif ne fait cas d’un préjudice qu’il a subi du fait de l’acte critique; qu’il convient dès lors de rejeter ce moyen.
Attendu que décision querellé a été rendue contradictoirement le 06 juin 2007; qu’appel a été interjeté de cette décision par exploit d’huissier du 20 juin 2007 et enrôlée le 28 juin 2007; qu’en application des articles 140, 530, 550 et 551 du code de procédure civile, il y a lieu de déclarer l’appel recevable.
Sur l’acte d’assignation
Attendu que les conseils des conseils des appelants font valoir que l’acte d’assignation n’indique pas les pièces sur lesquelles BOKOUM Amadou fonde sa demande; que pourtant, une telle formalité substantielle essentielle est prescrit à peine de nullité par l’article 138 du code de procédure civile; que cependant l’article 140 du code de procédure civile dispose que la nullité d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver le préjudice subi.
Attendu que les appelants prétendent avoir subi un préjudice du fait du défaut d’indication de pièces sur l’acte d’assignation mais qu’ils ne rapportent pas la preuve du préjudice.
Attendu en plus qu’il ressort de l’article 137 alinéa 2 du code de procédure civile que la nullité est couverte si celui qui l’invoque a, postérieurement à l’acte critiqué, fait valoir des défenses au fond ou soulevé une fin de non recevoir; qu’en l’espèce aussi bien des défenses au fond et une fin de non recevoir ont été soulevées; que la nullité est donc couverte.
Sur l’exception d’irrecevabilité tirée du défaut de qualité de BOKOUM Amadou
Attendu que les appelants ont soulevé une fin de non recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt de BOKOUM Amadou en ce que celui-ci a pris la décision ferme et définitive de mettre fin au contrat de société qui le lie à eux; que lors d’une assemblée générale extraordinaire, ils lui ont donné acte de ce qu’il ne fait plus parti des actionnaires et lui ont restituer la valeur nominale de ses parts sociales; que la qualité pour agir devant être appréciée au moment de la saisine du Tribunal, BOKOUM n’avait plus cette qualité en saisissant le Tribunal.
Attendu qu’il résulte de l’article 200 de l’AUSCGIE que l’action en dissolution d’une société commerciale ne peut être exercée que par une personne ayant qualité.
Attendu qu’en l’espèce, BOKOUM Amadou a saisi le Tribunal par exploit d’huissier du 23 février 2007 et la décision a été rendue le 06 juin 2007; que l’assemblée générale extraordinaire fut elle régulièrement convoquée le 19 mars 2007 ne peut déchoir BOKOUM de sa qualité d’associé, surtout que le dernier n’avait pas été associé à ladite assemblée générale que la correspondance du 16 février 2007 n’est que la manifestation non équivoque de l’intention de BOKOUM Amadou de mettre fin au contrat par la voie judiciaire.
Attendu par ailleurs que l’article 59 de l’AUSCGIE dispose que « dans tous les cas où est prévue la cession des droits sociaux d’un associé, ou le contrat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, à défaut d’accord amiable entre les parties, par expert désigné, doit par les parties soit à défaut d’accord entre elles, par décision de la juridiction compétente statuant à bref délai »; qu’en l’espèce, BOKOUM Amadou n’a pas cédé volontairement ses actions et c’est l’assemblée générale extraordinaire qui a décidé de lui restituer la valeur nominale de ses actions sans son consentement; que seules les cessions volontaires ou judiciaire emportent la perte de la qualité d’actionnaire; que dès lors, l’exception d’irrecevabilité tenant au défaut de qualité et d’intérêt doit être rejetée.
AU FOND
Sur la dissolution
Attendu que BOKOUM Amadou a assigné les appelants par devant le Tribunal de grande instance afin que la dissolution de la société UTIB-SA soit prononcée.
Attendu que l’article 736 de l’AUSCGIE dispose que la société anonyme est dissoute pour les causes communes à toutes les sociétés dans les conditions et sous les effets prévus aux articles 200 à 202 de l’Acte uniforme suscité.
La société anonyme est également dissoute, en cas de perte partielle d’actifs dans les conditions fixées aux articles 664 à 668 de l’AUSCGIE.
Attendu qu’il ressort de l’article 200 de l’AU suscite que la société prend fin pour la dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution des ses obligations par un associé ou de mésentente entre associés empêchant le fonctionnement normal de la société.
Attendu que les appelants soutiennent que la société UTIB-SA prise en ses organes a toujours fonctionné de façon régulière; que la mésintelligence, imputable d’ailleurs à BOKOUM Amadou ne peut constituer un juste motif de dissolution de ladite société qui si elle paralyse son fonctionnement.
Attendu qu’en l’espèce, l’existence de mésententes et la mésintelligence entre BOKOUM Amadou et SAWADOGO Issaka ne peuvent être contestées; qu’en effet, il suffit de se référer aux déclarations de SAWADOGO Issaka contenues dans le procès verbal de l’assemblée générale de l’UTIB-SA du 29 octobre 2006 qui affirment que BOKOUM Amadou aurait payé vingt (20) millions de francs à des tiers pour le faire assassiner et qu’il n’aura jamais confiance en lui pour travailler ensemble; qu’en plus, suite à deux plaintes formulées par SAWADOGO Issaka contre BOKOUM Amadou pour tentative d’assassinat et détournement de fonds sociaux, deux mandats de dépôts ont été décernés contre ce dernier, qu’il est constant donc que la mésentente est belle et bien installée et existe entre les parties; qu’en imputant cette mésintelligence à BOKOUM Amadou les appelants reconnaissent l’existence de celle-ci.
Attendu en plus; qu’en effet aucun procès verbal de réunion récente de celle-ci, encore moins ses représentants légaux ne peuvent être dénommés actuellement UTIB-SA a été délaissée et une nouvelle société entre les mêmes actionnaires et délocalisée à Abidjan ayant le même objet, les mêmes employés, le même président du conseil d’administration, le même directeur général; que dès lors, il y a lieu de prononcer la dissolution de la société UTIB-SA, celle-ci ne pouvant plus fonctionner.
Sur les dommages intérêts
Attendu que les appelants soutiennent que l’action de BOKOUM Amadou est le portrait robot de l’action décrite à l’article 15 du code de procédure civile à savoir l’action malicieuse, vexatoire, dilatoire, ou qui n’est pas fondée sur des moyens sérieux; que cela leur a causé un grand dommage en ce qu’il les a distrait de leurs occupations habituelles et fait perdre à UTIB le contrat d’affrètement.
Attendu que l’action de BOKOUM Amadou n’est en aucun cas dilatoire; qu’il n’a fait qu’exercer un droit qui lui est légalement reconnu; qu’il convient donc de les en débouter comme étant mal fondée.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens
Attendu que aussi biens les appelants que BOKOUM Amadou sollicitent de la Cour qu’elle condamne les uns à payer à l’autre et vice versa respectivement les sommes de un million et dix (10) millions au titre de ces frais.
Attendu qu’il résulte de l’article 6 de la loi portant organisation judiciaire, que dans toutes les instances sur demande expresse et motivée, le juge condamne la partie perdante à payer à l’autre une somme qu’il détermine à cet effet et il n’est pas lié par la convention des parties.
Attendu que les appelants ont succombé au procès et la demande est fondée dans son principe et justifiée quant au montant; qu’il y a lieu de condamner les appelants à payer à BOKOUM Amadou à cet effet la somme de un million de francs CFA.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort :
En la forme : déclare recevable l’appel de la société UTIB et quatre autres.
Au fond : confirme le jugement attaqué.
Déboute les appelants de leur demande de dommages intérêts.
Condamne l’UTIB-SA, SAWADOGO K. Issaka, SAWADOGO Hada, SOKOTO Haoudou et SAWADOGO Djibril à payer à BOKOUM Samba Amadou, la somme de un million de francs (1 000 000 FCFA) à titre de frais exposés et non compris dans les dépens.