J-101-250
BAIL COMMERCIAL – NON PAIEMENT DES LOYERS – BAILLEUR OBTENANT UNE ORDONNANCE D’OUVERTURE DES PORTES POUR RECUPERER LE LOCAL LOUE – COMPETENCE DU JUGE DES REFERES POUR CONNAÏTRE DE CETTE DEMANDE.
Le premier juge, qui est le Président du Tribunal de Première Instance et juge des ordonnances sur requêtes qu2i a rendu celle critiquée en appel, est seul compétent, s’il y a diff3iculté ou en cas de rétractation, pour en connaître la suite; il y a donc lieu de confirmer ici sa compétence.
Le bailleur qui enjoint, en vain, à plusieurs reprises son locataire de payer les loyers échus et constate que le local donné à bail est fermé depuis plusieurs mois4, est en droit de co5nsidérer le bail résilié 6de plein droit et de solliciter du juge des référés l’ouverture des portes dudit local. Il y a donc lieu de rejeter l’appel du preneur contre l’ordonnance d’ouverture des portes alors qu’au surplus, il a procédé lui-même, de forc7e, à la réouverture des portes et emporté les meubles d’exploitation de son f8onds en u endroit resté inconnu du bailleur.
Article 101 AUDCG
(COUR D’APPEL DU CENTRE, arrêt n°363/civ/bis du 17/10/2008, af9faire MVOGO MVOGO Serges Jean Guy contre TSUDJO KAMGA Hilaire).
LA COUR;
Vu l’ordonnance n°09/civ10 du 17 janvier 2008 rendue par le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou.
Vu la requête d’appel en date du 8 avril 2008 introduite par Maîtres M11BEN- SONG- NTEP NYEK, Avocats associés à Yaoundé pour le compte de leur client MVOGO MVOGO Serges Jean Guy.
Vu l’appel incident introduit formulé par TSUDJO KAMGA Hilaire ayant pour conseil Maître KAMGA TAGNE, dans ses conclusions en date du 18 juillet 2008.
EN LA FORME
Considérant que les appels principal et incident sont recevables comme faits dans les forme et délai de la loi.
Considérant que toutes les parties représentées à l’audience par leurs conseils ont conclu.
Qu12’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard.
AU FOND
Considérant que par ordonnance sus attaquée le premier juge a ordonné la rétractation de l’ordonnance n°504/06/2007 du 25 octobre 2007 de Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou et a ordonné la réintégration du sieur TSUDJO KAMGA des lieux loués.
Considérant qu’au soutien de sa requête d’appel sieur MVOGO MVOGO Serges Jean Guy fait valoir sous la plume de ses conseils Maîtres MBEN- SONG & NTEP NYEK qu’il a donné à bail commercial un local sis à ESSOS CHAPELLE, que depuis on intégration dans ledit local sieur TSHUDJO KAMGA s’est illustré par un paiement irrégulier de ses loyers échus.
Que courant septembre 2007 à l’époque de la sommation de payer et libérer icelui était redevable de 13huit mois de loyer impayés et avait outrepassé la grande majorité des clauses les liant notamment l’enregistrement dudit contra14t de bail et les droits d’impôts; qu’en sus de son insolvabilité, sieur TSHUDJO KAMGA ava15it fermé les portes du local depuis plusieurs mois et retenu les clés par devers lui, il a également cédé ledit local à une personne inconnu du bailleur et sans autorisation préalable.
Qu’il a régulièrement saisi le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou d’une requête aux fins d’ouverture des portes qui ont été fermé16es; que pour rendre son ordonnance n°504/06-07; le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou a effectué une descente sur les lieux à l’effet de vérifier la maté17rialité des faits du préjudice.
Que l’ordonnance issue de ladite requête signifiée à sieur TSHUDJO KAMGA, ce dernier saisira alors le juge de référé aux fins de rétractation de ladite ordonnance et sa réintégr18ation dans les lieux loués.
Que contre toute attente le juge de référé l’a suivi.
Que cette décision qui fait l’objet du présent appel mérite réformation pour plusieurs motifs, que premièrement le juge de référé est incompétent à connaître de la réintégration d’un preneur récalcitrant expulsé par voir légale et que deuxièmement l’article 101 de l’Acte Uniforme OHADA n°2 portant droit commercial a été violé en ce qu’en son alinéa alinéa 2 elle dispose que » à défaut de paiement ou en cas d’inexécution d’une clause du bail, le bailleur pourra demander à la juridiction compétente la résiliation du bail et l’expulsion du preneur… ».
Que sieur TSHUDJO KAMGA en septembre 2007 était redevable de huit mois de loyers impayés et échus; que conformément au bail icelui ne bénéficiait plus du statut de locataire compte tenu de ce que la résiliation du contrat était intervenue de plein droit dès le premier mois impayé et échu.
Considérant que pour sa défense sieur TSHUDJO KAMGA réplique qu’il est 19lié au sieur MVOGO par un contrat de bail commercial daté du 28 mars 2005; que le 14 Août 2007 alors qu’il exploite paisiblement les locaux loués, il est surpris de voir arriver son bailleur qui fermera toutes les voies d’accès à ce fonds de commerce; que pendant plus de deux mois les lieux resteront fermés sieur MVOGO s’opposant à leur réouverture.
Qu’une plainte déposée auprès de la Brigade de Gendarmerie de NKOLMESSENG n’y fera rien; que curieusement le 27 octobre 2007, sieur MVOGO procèdera à l’ouverture forcée des lieux restés fermés jusque là et emportera vers une destination inconnue de TSHUDJO les meubles d’exploitation du fonds de commerce.
Que lors de l’audience des référés introduite à la suite de cette voie de fait; sieur MVOGO produira une ordonnance d’ouverture des portes signée p20ar Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou.
Que les débats et les pièces produites convaincront le juge des requêtes de la supercherie et le conduiront à la rétrac21tation de l’ordonnance d’ouverture des portes et à la réintégration du sieur TSHUDJO KAMGA dans les lieux, que malheureusement l’astreinte sollicitée sera refusée, d’où l’objet de son appel incident.
Qu’il sollicite donc la réformation de l’ordonnance attaquée en assortissant la réintégration ordonnée d’une astreinte de 500 000 francs CFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision du premier juge soit le 1er Novembre 2007 et de confirmer cette ordonnance pour le reste.
Mais Considérant que le premier juge, qui est le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou est le juge des ordonnances sur requêtes qui a rendu l’ordonnance sur requêtes qui a rendu l’ordonnance sur requête n°304/civ du 25 octobre 2007; qu’il est seul s’il y a difficulté ou en cas de rétractation d’en connaître la suite, qu’il y a lieu de confirmer ici sa compétence.
Considérant qu’il est constant que sieur MVOGO a donné à bail à usage commercial son local sis au quartier Chapelle d’Essos à TSHUDJO KAMGA Hilaire moyennant un loyer mensuel de 95 000 francs.
Que jusqu’à la date du 04 septembre22 2007, sieur TSHUDJO KAMGA était redevable de huit mois de loyers échus et impayés; la preuve en est le silence éloquent qu’il garde depuis la sommation de payer et de libérer à lui adressée le 4 septembre 2007 ainsi que dans toutes ses conclusions dans les différentes audiences, qu’il ne ressort nulle part preuve qu’icelui a exécuté le contrat en bon père de famille et de bonne foi, que le premier juge dans le 4e rôle de son ordonnance reconnaît expressément la mauvaise foi de sieur TSHUDJO KAMGA.
Considérant également que les faits qui sont décrits par sieur MVOGO sur la requête aux fins d’ouverture des portes qui a donné lieu à l’ordonnance dont la rétractation a été sollicitée sont les mêmes faits que soutien MVOGO à la Cour, que dans sa requête aux fins d’ouverture des portes sieur MVOGO soutient que c’est depuis le 14 Août 2007 que sieur TSHUDJO a abandonné les lieux en fermant certaines portes de la maison, qu’il a toujours soutenu cette version jusqu’à la Cour, que sieur TSHUDJO KAMGA soutient que ce même jour alors qu’il exploitait paisiblement les locaux loués, il a été surpris de voir arriver son bailleur qui fermera toutes les voies d’accès à ce fonds de commerce.
Que le premier juge pour faire droit à la version des faits de TSHUDJO a déclaré qu’il y a en fraude parce que sieur MVOGO connaissait le domicile de sieur TSHUDJO puisqu’il lui a servi certaines notifications d’exploits chez lui.
Mais contrairement que le fait de connaître le domicile du locataire pour lui faire porter les différents exploits d’Huissier ne prouve aucune fraude, que le contrat devait s’exécuter à la Chapelle d’Essos où les locaux loués étaient et non dans les bureaux à (MEMI HOTEL) du locataire.
Qu’il est surprenant qu’un locataire qui est expulsé manu militari le 14 Août là où il exerce son fonds de commerce ne saisit pas les juridictions pour faire constater ces voies de fait et en demander réparation, que ce locataire de bonne foi attende religieusement que le bailleur saisisse les juridictions, lui notifie la décision pour qu’il vienne solliciter la rétractation de l’ordonnance plusieurs mois après la prétendue expulsion.
Considérant que la fraude n’a été démontrée ni par sieur TSHUDJO KAMGA, ni dans la décision du premier juge; qu’il y a lieu d’infirmer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau de rejeter l’action de TSHUDJO KAMGA comme non fondée, l’article 8 du contrat de location prévoyant la résiliation de plein droit en cas de non paiement de loyer, et le locataire ayant lui- même abandonné le local loué en fermant les portes, il appartient au bailleur de solliciter l’ouverture des portes devant le juge des requêtes.
Que le juge est descendu sur les lieux afin de constater la matérialité des faits et dans son procès- verbal de descente il n’a pas constaté quelque chose susceptible de démontrer la fraude.
Considérant que la partie qui succombe supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement; contradictoirement à l’égard des parties en matière de référé, en appel, en collégialité et à l’unanimité des membres.
EN LA FORME
Reçoit l’appel principal et incident.
AU FOND
Infirme l’ordonnance entreprise.
Statuant à nouveau.
Déboute TSHUDJO KAMGA Hilaire de son action comme non fondée et le condamne aux dépens.
(…)

1 V. J. Issa-Sayegh, obs. sous CA-Abidjan, arrêt n° 92 du 31 janvier 2003, Dame Ghussein Fadiga c/ Société Alliance Auto, ibid.

2 Cf. CA-Abidjan, arrêt n° 1164 du 24 octobre 2003, aff. Kinda Augustin Joseph c/ Mlle Koné Fatoumata, Ohadata J-03-337.

3 V. Y. Guyon, Droit des affaires, t. 2, Entreprises en difficulté, redressement judiciaire, Economica, 7' éd., Paris, 1999, p. 383.

4 En l'absence de dispositions spécifiques au règlement préventif.

5 Elle fait allusion au cas où la chose est détenue à l'occasion des travaux effectués sur la chose (voiture réparée) ou à partir de la chose (travaux de comptabilité sur des pièces comptables).

6 Elle fait allusion au cas où le lien entre la chose et la créance résulte d'un même contrat.

7 Cette solution prévue en réalité pour le gage est également applicable au droit de rétention qui, pour être devenu une sûreté complète, lui est désormais assi- milable, v. à ce sujet, F. M. Sawadogo, Droit des entreprises en difficulté, coll. Droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant, Bruxelles, 2002, spéc, n° 309, p. 297.

8 Interprétant ce texte, la jurisprudence a conclu qu' « une banque, créancière d'une société cautionnée par une personne titulaire d'un compte personnel chez elle, peut refuser de payer un chèque émis par la caution et tiré sur ce compte à son propre bénéfice et retenir le solde créditeur de ce compte, un lien de connexité existant entre le compte personnel de la caution et la créance de la banque» selon le juge de l'espèce, « le lien de connexité exigé par l'article 42 du même acte est établi compte tenu des relations d'affaires existant entre les parties ». En effet, la caution était cliente de la banque depuis 1993. Cf. CA-Abidjan, arrêt n° 321 du 7 mars 2000, Djiriga Diahi el SGBCI, Revue Ecodroit, AIDD n° 1, juillet-août 2001, p. 35. (Ohada jurisprudences nationales n" 1, déco 2004, p. 109). Ohadata J-02-21. Dans une espèce différente, cette manière de voir est confirmée par la CCJA, v. arrêt n° 006 du 28 février 2008, aff. Envol-Transit Cote d'Ivoire Sarl CI l-SDV Cote d'Ivoire dite SDV-CI 2.- Société IBD, 3.-Administration des douanes, Recueil de jurisprudence de la CClA. n° Il, janvier-juin 2008, p. 35.

9 Cf. art. 42 al. 3 de l'AUS.

10 En droit, le paiement en vue du retrait de la chose par exemple doit être autorisé par le juge-commissaire, v. C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, Montchrestien, 6' éd., Paris, 2009, spéc. n° 536, p. 316.

11 Lire à ce sujet, R. Fako, L'égalité des créanciers en droit des procédures collectives de l'OHADA, mémoire de DEA, Université de Dschang, juin 2006, p. 68.

12 C'est en réalité la considération qui lui était faite à un moment en droit français, lire sur ce point, F. Derrida, « La "dématérialisation" du droit de rétention », Mél. Voirin, LGDJ, Paris, 1967, pp. 177 et s.

13 Pour l'ensemble, v. R. Assontsa, Le juge et les voies d'exécution depuis la réforme de l'OHADA, thèse de doctorat, Université de Strasbourg, 2009.

14 (12) J. Issa-Sayegh, « Commentaire de l'Acte uniforme du 17 avril 1997 portant organisation des sûretés », ln OHADA. Traité et Actes uniformes commentés et annotés, 3e éd., Juriscope, Paris, 2008, p. 688.

15 Art. 41 de l'AUS in fine.

16 En effet, le gage doit normalement être constitué par le propriétaire du bien donné en garantie. Le gage s'analyse finalement comme un acte de disposition. Mais, même constitué par un non propriétaire, le gage peut produire des effets prévus pour le possesseur de bonne foi en cas de revendication du propriétaire. L'article 47 AUS recommande juste de considérer la bonne foi du créancier. V. en ce sens, F. Anoukaha et al., OHADA, Sûretés, op. cit., p. 69.

17 L'auteur de la remise du bien entre les mains du rétenteur pouvant avoir agi comme gérant d'affaire.

18 Selon ce texte en effet, « si le créancier ne reçoit ni paiement ni sûreté, il peut, après signification faite au débiteur et au propriétaire de la chose, exercer ses droits de suite et de préférence comme en matière de gage ».

19 Et même dans ce cas et par analogie au régime du gage, l'article 47 de l'Acte uniforme dispose que « le constituant du gage doit être propriétaire de la chose gagée. S'il ne l'est pas, le créancier gagiste de bonne foi peut s'opposer à la revendication du propriétaire dans les conditions prévues pour le possesseur de bonne foi ».

20 V. J. Issa-Sayegh, obs, sous CA-Abidjan, arrêt n° 92 du 31 janvier 2003, Dame Ghussein Fadiga ci Société Alliance Auto, Ohadata J-03-226.

21 F. Anoukaha, Le droit des sûretés dans l'Acte uniforme OHADA, coll. Droit uniforme, PUF, 1998, p. 27.

22 (20) Cf. Civ. I. 22 mai 1962, Van Elverdinghe C. Boucher.