J-11-22
VOIES D’EXECUTION – SAISIE VENTE – BIENS OBJETS DE LA SAISIE – BIENS N’APPARTENANT PAS AU DEBITEUR – SAISIE FAUTIVE (oui).
Il résulte des dispositions de l’Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution que la saisie pratiquée par le créancier doit porter sur les biens de son débiteur. Doit donc être confirmé le jugement qui déclare fautives la saisie et la vente faites sur des biens n’appartenant pas au débiteur.
Cour d’Appel d’Abidjan, 2ème Chambre Civile et Commerciale, Arrêt civil contradictoire n°130 du 16/04/2010, ZHENG LINGTAO (Me YAO KOFFI) C/ DOUKOURE MODIBO
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit daté du 2 juin 2009 comportant ajournement au vendredi 31 juillet 2009 M. ZHENG LINGTAO, commerçant domicilié à Abidjan a relevé appel du jugement n°1643 rendu le 04/06/2008 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui, en la cause a statué ainsi qu’il suit :
– « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile en premier ressort;
– Déclare Doukouré Modibo irrecevable en son action en revendication et en distraction du prix des biens saisis et vendus;
– Le déclare recevable en son action en dommages intérêts;
– L’y dit bien fondé;
– Condamne ZHENG LINGTAO, Maître KOUA BOA Vincent, Maître ABOUGNAN
– Martine et DOUKOURE Cheick SADIBOU à lui payer la somme de 6.000.000 f à titre de dommages intérêts;
– Condamne les défendeurs aux dépens »;
Il ressort des énonciations du jugement ainsi querellé que suivant exploit en date
du 10 août 2007 le sieur DOUKOURE Modibo a fait servir assignation à ZHENG Lingtao, à Maître KOUAO BOA Vincent, à Maître ABOUGNAN Martien et à DOUKOURE Cheick SADIBOU à l’effet de comparaître par devant le Tribunal de Première Instance d’Abidjan pour s’entendre condamner solidairement à lui payer certaines sommes, ce en expliquant qu’en exécution du jugement n°2284 CIV/3 du 08/10/2006 rendu par le Tribunal d’Abidjan condamnant M. DOUKOURE Cheick SADIBOU au profit de M. ZHENG LINGTAO, celui-ci a fait pratiquer saisie sur des biens qui lui appartenant et a fait procéder à la vente desdits biens;
Estimant que cette saisie sur ses biens alors qu’il n’était pas le débiteur de M. ZHENG LINGTAO, lui cause, un préjudice certain, M. DOUKOURE Modibo, sollicitait la condamnation des défendeurs au paiement de la somme de 6.000.000 f à titre de dommages intérêts;
Pour faire droit à l’action en paiement de dommages intérêts le premier juge a relevé qu’il est constant, au regard des pièces produites au dossier, que les mèches saisies et vendues appartiennent à DOUKOURE Modibo alors même qu’il est tiers à la décision de condamnation dont l’exécution était entreprise;
Au soutien de son appel, M. ZHENG LINGTAO affirme que bien que les factures produites portent en entête « DOUKOURE Modibo », les marchandises saisies ne lui appartiennent pas, mais appartiennent plutôt à dame Ami à Abobo, car, précise t-il, les factures indiquent que le magasin de M. DOUKOURE Modibo est situé à Adjamé, au marché Gouro, alors que les marchandises ont été saisies dans divers magasins situés dans différents quartiers d’Abidjan, à savoir, Port-Bouet, Abobo Gare, et dans un domicile à Koumassi;
Il conclut en conséquence à l’infirmation du jugement entrepris et, la Cour statuant à nouveau, dira que M. DOUKOURE Modibo qui n’est pas propriétaire des marchandises n’a aucune qualité pour agir;
Pour sa part, l’intimé M. DOUKOURE Modibo, en sollicitant le rejet de l’appel et la confirmation du jugement entrepris, affirme qu’il est le véritable propriétaire des marchandises saisies et que, c’est manifestement par erreur que cette saisie a été pratiquée;
Ainsi, les objets saisis ayant fait l’objet d’une vente, il ne lui reste plus qu’à solliciter des dommages intérêts; Ce à quoi le premier juge a fait droit;
DES MOTIFS
L’intimé ayant comparu, il convient de statuer contradictoirement;
EN LA FORME
L’appel de M. ZHENG LINGTAO ayant été relevé conformément aux dispositions
légales, il convient de le déclarer recevable;
AU FOND
Aux termes des dispositions de l’article 141 de l’Acte Uniforme relatif aux voies
d’exécution, le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi peut demander la Juridiction compétente d’en ordonner la distraction;
L’article 142 dispose que l’action en distraction cesse d’être recevable après la vente des biens saisis; Seule, peut, alors être exercée l’action en revendication;
En l’espèce, M. DOUKOURE Modibo se disant propriétaire des biens saisi par M. ZHENG LINGTAO en exécution du jugement condamnant le sieur DOUKOURE Cheick SADIBOU à lui payer certaines sommes d’argent, a sollicité et obtenu la condamnation solidaire de M. ZHENG LINGTAO, Maître KOUA BOA Vincent, huissier de Justice, Maître Abougnan Martine, Commissaire priseur et DOUKOURE Cheick Sadibou au paiement de la somme de 6.000.000 F à tire de dommages-intérêts pour le préjudice à lui causé par la saisie et la vente desdits biens;
C’est à tort que M. ZHENG LINGTAO conteste cette décision;
En effet, les pièces produites au dossier attestent :
– D’une part que le débiteur de ZHENG LINGTAO est bien DOUKOURE Cheick
Sadibou et non DOUKOURE Modibo;
– Qu’ainsi, DOUKOURE Modibo n’est nullement concerné par le jugement de
condamnation dont l’exécution était entreprise;
– D’autre part, que les biens saisis portent bien, sur les différentes factures
d’achat, le nom de DOUKOURE Modibo, comme propriétaire;
Ainsi, les biens n’étant pas la propriété de son débiteur, la saisie et la vente faites sont fautives; d’autant que le créancier saisissant qui savait bien que les biens qu’il saisissait n’appartenaient pas à son débiteur se contente d’affirmer, en cause que ceux-ci appartenant plutôt à dame Ami (?) et non à DOUKOURE Modibo, sans toutefois expliquer en quoi, aurait-il le droit de procéder à la saisie des biens appartenant à cette dame Ami;
Il convient en conséquence de rejeter son appel non fondé et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
L’appelant qui succombe ainsi doit être condamné aux dépens en application de l’article 149 du code de Procédure Civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
Déclare recevable mais mal fondé et rejette comme tel l’appel relevé par M. ZHENG LINGTAO du jugement civil contradictoire n°1643 rendu le 4/06/2008 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan;
Confirme ledit jugement en toutes ses dispositions;
Condamne l’appelant aux dépens.
Président : M. KANGA-PENOND YAO MATHURIN
Membres : Mme. COULIBALY OLGA
M. GOLLO TABLEY
Greffier : Me FOFANA BRAHIMA