J-11-121
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCES – SAISIE DE REMUNERATIONS – SIGNIFICATION A PARQUET – REGULARITE DE LA SIGNIFICATION – OPPOSITION – VALIDITE DU TITRE EXECUTOIRE (Non) – NULLITE DE LA SAISIE – MAINLEVEE.
Dès lors qu’il est démontré que la signification de la décision qui constitue un acte préalable à toute opération de saisie n’est pas régulière, par conséquent, le créancier ne disposant pas d’un titre exécutoire, il y a lieu de déclarer nulle la saisie attribution pratiquée pour défaut de titre exécutoire et d’ordonner en conséquence sa mainlevée.
En effet, il n’appartient pas au juge d’exécution de juger de la validité de l’acte d’opposition, il doit simplement vérifier si le créancier dispose d’un titre exécutoire lui permettant de pratiquer des saisies.
Cour d'Appel de Niamey, arrêt n°82 du 27 juin 2007, affaire DJIBO SALIFOU, contre RAHMOU BOLHO.
LA COUR
EN LA FORME
Suivant exploit en date du 5 février 2007 de Maître Mahamane Moussa Maïga, huissier de justice à Niamey, Monsieur Djibo Salifou, demeurant aux USA, 157 W 117 St APT 5 A, New York, assisté de Maître Illo Issoufou, avocat à la Cour, a relevé appel de l’ordonnance de Référé n°037 rendue par défaut à son encontre le 30 janvier 2007 par le Président du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey, Juge d’exécution.
Cet appel étant intervenu dans les forme et délai légaux, il échet de le déclarer recevable en la forme.
AU FOND
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier et des débats à l’audience, que par exploit en date du 1er décembre 2006, Djibo Salifou, assisté de Maître Illo Issoufou, avocat à la cour, a assigné devant le Président du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey, Juge de l’exécution, dame Rahmou Bolho aux fins de voir :
– déclarer nulle la saisie- attribution du 3 novembre 2006;
– ordonner en conséquence sa mainlevée;
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Il exposait qu’en vertu d’un jugement coutumier n°29 du 28/01/2005, rendu par défaut à son encontre par le Juge de la commune Niamey I, dont il a fait opposition, dame Rahmou Bolho a pratiqué des saisies-attributions sur ses deniers entre les mains du syndic de la liquidation Air Afrique; qu’il soutenait que cette saisie doit être déclarée nulle pour violation de l’article 34 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution et méconnaissant l’effet suspensif de l’opposition; qu’il sollicitait par conséquent sa mainlevée sous astreinte de 100.000 F CFA par jour de retard.
Attendu que pour sa part, Maître Mounkaïla Yayé, conseil de dame Rahmou Bolho, soutenait que la décision dont l’exécution est poursuivie, a été signifiée au requérant qui ne l’a pas contestée dans les délais légaux; que l’opposition dont se prévaut Djibo Salifou, n’est pas valable dans la mesure où elle a été formée par un avocat qui ne justifie pas de mandat; qu’il concluait au rejet de toutes les demandes de Djibo Salifou.
Attendu que par ordonnance du 30 janvier 2007, le Juge a reçu la requête de Djibo Salifou régulière en la forme; qu’au fond, il l’a rejetée comme étant mal fondée, et condamné Djibo Salifou aux dépens.
Attendu que c’est contre cette décision que Djibo Salifou a relevé appel.
DISCUSSION
Attendu que le 1er Juge a rejeté la requête de Djibo Salifou comme étant mal fondée, motifs pris de ce que le jugement dont l’exécution est poursuivie a été signifiée au requérant; que par ailleurs, une attestation de non pourvoi a été produite; que par conséquent dame Rahmou Bolho dispose bien d’un titre exécutoire conforme aux dispositions de l’article 34 AUPSRVE;
Qu’au surplus, le Juge soutient que l’opposition faite par Djibo Salifou est postérieure à l’attestation de non pourvoi délivrée le 11 novembre 2005 et qu’elle ne peut dès lors entacher la validité de la saisie pratiquée.
Attendu que Djibo Salifou a relevé appel de cette ordonnance; qu’il demande à la cour de céans, sous la plume de son conseil Maître Illo Issoufou, d’infirmer cette décision, de déclarer nulle la saisie pratiquée le 3 novembre 2006 par dame Rahmou Bolho et d’ordonner en conséquence sa mainlevée.
Il soutient qu’il porte 3 griefs à l’ordonnance querellée.
1°) Il fait valoir qu’il a formé opposition contre le jugement dont l’exécution est poursuivie par Dame Rahmou Bolho. Car selon lui, l’opposition a un effet suspensif. Par ailleurs, il explique qu’il n’appartient pas au juge des référés de juger de la validité de l’acte d’opposition;
2°) Djibo Salifou soutient qu’il s’agit d’une saisie-rémunération pratiquée entre les mains du syndic de la liquidation Air-Afrique.
Or, en l’espèce, l’intimé a employé les règles de la saisie attribution alors que s’agissant d’une saisie-attribution, ce sont les dispositions des articles 760 et suivants de l’Acte Uniforme sur les voies d’exécution portant saisies des rémunérations qui doivent être respectées; que tel n’ayant pas été le cas en l’espèce, la cour doit déclarer nulle la saisie pratiquée pour non respect des règles sur la saisie-rémunération;
3°) Il explique enfin que l’ordonnance n’a pas de base légale en ce que le commandement de payer à indiquer la somme de 83.259.670 F CFA en principal, alors que la décision mise en exécution (jugement du 28/01/05) a simplement condamné son client au paiement d’une pension alimentaire de 250.000 F CFA par mois en sus des frais, de scolarité dont le montant n’est pas fixé. Il conclut qu’il s’ensuit que le montant de la saisie dans son quantum manque de base légale.
Qu’au regard de tout ce qui précède, il sollicite l’infirmation de l’ordonnance querellée, l’annulation de la saisie et par voie de conséquence sa mainlevée.
Attendu que de son côté, Maître Mounkaïla Yayé, conseil de l’intimée dame Rahmou Bolho, a conclu à la confirmation de l’ordonnance attaquée.
Il expose à la cour de céans que le jugement a été rendu par défaut contre Djibo Salifou ensuite, il lui a été signifié le 25/08/2005 à parquet; que par rapport à l’effet suspensif de l’opposition soutenu par le conseil de Djibo Salifou, il prétend que celui-ci disposait d’un délai de 3 jours pour faire opposition et 2 mois pour faire appel avec les délais de distance qui ne sauraient dépasser 90 jours pour l’étranger (cf article 1er DT n°60-A6/MS); que c’est après l’expiration de tous ces délais qu’il a obtenu un certificat de non pourvoi, dernière voie de recours extraordinaire qui restait ouverte à Djibo Salifou et qu’il n’a pas exercé; qu’il conclut par conséquent que c’est à bon droit que le 1er Juge a estimé qu’il disposait d’un titre devenu définitif et exécutoire.
Il poursuit par ailleurs que le jugement a été grossoyé et exécuté et qu’en vertu de l’article 32 AUPSRVE l’exécution ne peut être arrêtée.
Attendu que par rapport au non respect des règles sur la saisie-rémunération, le conseil de l’intimé poursuit que s’agissant d’une liquidation, le solde de tout compte est une créance comme toute autre, le syndic n’étant pas l’employeur
Par conséquent, la créance produite dans une liquidation peut faire l’objet d’une saisie ordinaire de droit commun. Enfin, s’agissant du manque de base légale du quantum de la saisie, le conseil de l’intimé explique que le montant de la saisie a été quantifié à la somme de 83.259.670 F CFA car le jugement date de 2003 et condamnait Djibo Salifou à verser 750.000 CFA par mois en sus des frais de scolarité pour 3 enfants qui, tous étudient en France.
Qu’il produit pour chaque enfant l’état de la pension alimentaire de 2003 à 2007 soit 4 ans soit (750.000 F x 12) x 3= 36.000.000 F CFA au titre uniquement des frais de scolarité, l’hébergement, le transport des 3 enfants s’élevant largement au delà du montant indiqué; que les preuves ont été signifiées en même temps que le commandement de payer au débiteur.
Il conclut par conséquent au rejet de toutes les prétentions de Djibo Salifou et à la confirmation pure et simple de l’ordonnance querellée.
Attendu que Djibo Salifou invoque la violation de l’article 34 de l’Acte Uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances et les voies d’exécution pour soutenir le défaut de titre exécutoire et demande par conséquent de déclarer nulle la saisie attribution pratiquée le 3 novembre 2006 et d’ordonner sa mainlevée.
Attendu que pour sa part, le conseil de dame Rahmou Bolho fait valoir que la décision exécutée a été signifiée au requérant qui ne l’a pas contestée dans les délais légaux; que l’opposition dont se prévaut Djibo Salifou n’est pas valable car elle a été formée par un avocat qui ne justifie pas de mandat; que par ailleurs, il a produit une attestation de non pourvoi; qu’il conclut dès lors que le jugement dont il s’agit, constitue bien un titre exécutoire conforme aux dispositions de l’article 34 précité.
Mais attendu qu’en application de l’article 34 de l’AUPSRVE, un jugement peut être considéré comme un titre exécutoire, s’il a été signifié à la partie condamnée et si un certificat de non appel et de non opposition est produit.
Attendu qu’en matière d’exécution, la signification préalable de la décision est obligatoire;
Que si un jugement rendu par défaut contre une personne résidant à l’étranger peut être signifié à parquet, encore faut-il prouver que cette signification a été faite suivant la procédure prévue à cet effet, et que cette personne ait eu connaissance de cette signification.
Attendu qu’en l’espèce, il n’est pas contesté que le jugement dont l’exécution est poursuivie a été rendue par défaut contre Djibo Salifou, et qu’il a été signifié à parquet.
Mais attendu que dame Rahmou Bolho qui prétend avoir signifié à parquet ce jugement depuis le 28/01/05, ne rapporte pas la preuve que Djibo Salifou a bel et bien pris connaissance de cette signification puisqu’en procédure normale, la signification à parquet se fait de parquet à parquet et devait être renvoyée au parquet signifiant lequel doit informer les parties. Qu’en l’espèce, la preuve du respect de cette procédure n’est pas rapportée.
Attendu que Djibo Salifou prétend avoir formé opposition le 28/09/06 contre le jugement du 28/01/05 dont il a reçu signification avec commandement de payer le 25/09/06.
Que pour sa part, dame Rahmou Bolho excipe une attestation de non pourvoi et soutient que l’opposition n’a pas été formée dans les délais légaux.
Mais attendu qu’il n’appartient pas au juge d’exécution de juger de la validité de l’acte d’opposition; qu’il doit simplement vérifier si Dame Rahmou Bolho dispose d’un titre exécutoire lui permettant de pratiquer des saisies;
Qu’il a été démontré ci-dessus que la signification de la décision qui constitue un acte préalable à toute opération de saisie n’est pas régulière; par conséquent, dame Rahmou ne dispose pas d’un titre exécutoire, qu’il y a lieu dès lors d’infirmer l’ordonnance querellée, de déclarer nulle la saisie attribution pratiquée le 03/11/06 pour défaut de titre exécutoire et d’ordonner en conséquence sa mainlevée.
Attendu qu’il n’est point besoin de discuter des autres moyens soulevés par les parties;
Que dame Rahmou Bolho ayant succombé, les dépens seront mis àsa charge.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement par décision en dernier ressort, en matière d’exécution
– Reçoit Djibo Salifou en son appel régulier en la forme;
– Au fond, infirme l’ordonnance attaquée
– Déclare nulle la saisie-attribution pratiquée le 3 novembre 2006 pour défaut de titre exécutoire
– Ordonnance en conséquence sa main-levée
– Condamne dame Rahmou Bolho aux dépens.
– Avis de pourvoi donné.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la cour d’appel de Niamey, les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.