J-12-134
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES — INJONCTION DE PAYER — TRAVAUX DE REPROFILAGE — CONTRAT DE SOUS-TRAITANCE — ENTREPRENEUR PRINCIPAL — PAIEMENT INTEGRAL DU PRIX — PAIEMENT DIRECT D’ACOMPTES A TIERS FOURNISSEUR — RELIQUAT — DECISION D’INJONCTION DE PAYER RENDUE SUR OPPOSITION — APPEL — RECEVABILITE (OUI)
ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER — ACTE DE SIGNIFICATION — MONTANT DES INTERETS — VIOLATION DE L’ARTICLE 8 AUPSRVE (NON) — TAUX D'INTERET LEGAL — VIOLATION DES ARTICLES 430 ET 431 CPC (NON) — ORIGINE DE LA CREANCE — TIERS FOURNISSEUR — DEFAUT DE LIEN CONTRACTUEL — FACTURES NON ACCEPTEES — ABSENCE DE PREUVE — VIOLATION DES CONDITIONS DE L’ARTICLE 2 AUPSRVE (OUI) — INFIRMATION DU JUGEMENT — ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER — ANNULATION.
Tout en estimant que les intérêts réclamés dans la signification d'injonction de payer ont été mal évalués, l’appelant ne précise pas le montant des intérêts qui devaient effectivement être réclamés sur la base de l'article 430 CPC. Par ailleurs l'article
8 AUPSRVE qui veut que le montant des intérêts et frais de greffe soit précisé a été respecté, et le premier juge a fait courir les intérêts de droit pour compter de la décision. Il convient donc de rejeter l’exception tiré de la violation des articles
8 AUPSRVE et 431 CPC.
Le fait de travailler sur un chantier objet d’une sous-traitance n'est pas une preuve suffisante de l’existence d’une relation contractuelle avec l’appelant. Par ailleurs, les deux factures versées au dossier ne contiennent pas la signature de l’appelant. N'étant pas des factures acceptées, elles ne peuvent également constituer une preuve au sens de l'article 1315 du code civil.
Enfin, selon l'article
2 AUPSRVE, la procédure d'injonction de payer ne peut être introduite que lorsque la créance a une cause contractuelle. En l’espèce, il ressort des faits qu’aucun contrat ne lie les parties dans la présente instance. Il convient donc d'infirmer le jugement et annuler l'ordonnance d'injonction de payer.
Article 15 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 394 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 430 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 431 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 1315 CODE CIVIL BURKINABÈ
(COUR D’APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n° 18 du 2008, KONDOMBO T. Marcel c/ SEONE Abdoulaye)
LA COUR,
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d'huissier en date du 29 juin 2006 signifié à monsieur SEONE Abdoulaye et déposé au greffe de la Cour d'appel de Ouagadougou, monsieur KONDOMBO T. Marcel a interjeté appel du jugement en date du 21 juin 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en ces termes :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort;
Déclare KONDOMBO T. Marcel recevable en son opposition;
Au fond, le condamne à payer à SEONE Abdoulaye la somme de cinq millions quatre cent quatre mille quatre cent seize (5.404.416) francs outre les intérêts de droit à compter du présent jugement; Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire; Condamne KONDOMBO T. Marcel aux dépens »;
Monsieur KONDOMBO T. Marcel fait valoir que le premier juge en rendant la décision ci-dessus n'a pas fait une bonne appréciation des faits et une saine application de la loi; que les dispositions de l'article
8 de l'Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution (AUPSRVE) et 430 et 431 du code de procédure civile ont été violées, ainsi que les articles 1 et 2 du même Acte uniforme et 1315 du code civil; qu'il résulte de l'article 431 qu'« en cas de condamnation, le taux d'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fut-ce par provision;
En cas de condamnation confirmé en appel, le taux d'intérêt légal s'applique à compter de la décision de première instance »; que SEONE Abdoulaye a réclamé dans la signification d'injonction de payer des intérêts de droit sur trois ans; qu'alors que les intérêts de droit devaient normalement s'appliquer pour compter de la date de la prise de l'ordonnance c'est-à-dire le 22 novembre 2005; que surabondamment aux termes de l'article 430 du code de procédure civile : « en toute matière, le taux d'intérêt légal est fixé pour la durée de l'année civile. Il est, pour l'année considérée égal au taux d'escompte pratiqué par la BCEAO le 15 décembre de l'année précédente. Si le taux d'escompte au 15 juin de l'année considérée est différent de trois points ou d'avantage, de celui pratiqué le 15 décembre précédent, le taux d'intérêt légal est égal pour les six derniers mois de l'année au nouveau taux d'escompte »; que dès lors le taux d'intérêt appliqué dans le présent jugement est inexact et aussi la date prise comme point de départ de calcul est erronée; qu'il y a lieu d'annuler le jugement querellé;
L'appelant soutient par ailleurs que la créance est incertaine; que l'article
1 de l'AUPSRVE a été violé; que la créance de SEONE, Abdoulaye est contesté par lui au vu des pièces 7 et 8 produites; qu'en plus il n'a jamais été conclu un contrat de location d'engin avec SEONE Abdoulaye; que seulement il a conclu un contrat de sous-traitance avec Dolsom Salif ZOUNGRANA qui semble être l'unique cocontractant de SEONE Abdoulaye; que par conséquent l'article 2 de l'Acte uniforme suscité a été violé; qu'aux termes de ce contrat de sous-traitance Dolsom Salif ZOUNGRANA devait exécuter des travaux de réprofilage sur les axes Kantchari-Namounou et Diapaga-Kodjari pour un montant de quatorze millions neuf cent cinquante mille (14.950 000); qu'il a sollicité qu'une partie des acomptes soient directement payés à certains de ses fournisseurs notamment à EGCBGC, entreprise avec laquelle il a loué les engins; que c'est ainsi que ECHA a délivré un chèque BIB n° 4745492 du 17 décembre 2002 d'un montant de un million huit cents mille (1.800 000) francs CFA; qu'il en a été de même pour la somme de quatre cent soixante mille (460 000) francs CFA; l'appelant se dit être l'une des rares entreprise de la place qui dispose d'un parc important d'engins de travaux publics et qui n'a pas besoin d'avoir recours à des locations pour l'exécution de ses travaux; il évoque également l'absence de preuve de la créance et réclame des dommages et intérêts de cinq millions (5 000 000) de francs CFA sur la base de l'article 15 du code de procédure civile et des honoraires d'avocat respectivement de deux cent vingt sept mille (227 000) francs exposés en barre d'instance et trois cent cinquante quatre mille (354 000) francs en barre d'appel;
En réplique SEONE Abdoulaye expose qu'il a été sollicité par monsieur KONDOMBO T. Marcel de décembre 2002 à février 2003 pour la location de ses engins de transport et de travaux publics; qu'il a répondu à sa demande en mettant à sa disposition des engins; qu'il lui a aussi adressé des factures mais ne percevra que des avances un million huit cent mille (1.800 000) francs CFA le 17 décembre 2002 et quatre cent soixante mille (460 000) francs CFA le 23 décembre 2002 par chèque BIB libellé à l'ordre de son entreprise (EGCBGC); que KONDOMBO T. Marcel lui devait cinq millions quatre cent quatre mille quatre cent seize (5.404.416) francs CFA représentant la plus grosse part des sommes; que devant son refus de payer il a eu recours à la procédure d'injonction de payer pour obtenir le paiement qui a abouti au jugement dont teneur a été donné plus haut et qui fait l'objet d'appel;
Sur l'exception tirée de la violation des articles 430 et 431 du code de procédure civile soulevée par l'appelant il cite l'article
8 de l'AUPSRVE qui établi que : « à peine de nullité, la signification de la décision portant injonction de payer contient sommation d'avoir, soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par la décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisée.... »; que l'obligation de mention des intérêts et frais dus dans l'acte de signification est d'ordre légal et qu'elle a été respectée; que le premier juge a fait courir les intérêts de droit pour compter de la décision et par conséquent il convient de rejeter cette exception;
Sur le fondement de la créance, l'intimé soutient que les engins sont allés sur le chantier; qu'il a reçu paiement partiel; qu'il s'agit d'un contrat onéreux; que même si KONDOMBO T. Marcel n'a pas personnellement négocié la location des engins, il a tout au moins admis le principe; que par conséquent sa créance est contractuelle, réelle liquide et exigible et KONDOMBO T. Marcel doit être déclaré mal fondée et qu'en application de l'article 6 alinéa 3 de la loi n° 10/93/ADP du 17 mai 1993 il y a lieu de condamner KONDONBO T. Marcel à lui payer la somme de deux millions cinq cent mille (2.500 000) francs au titre des frais et honoraires d'avocat exposés et non compris dans les dépens;
DISCUSSION
SUR LA FORME
Attendu que l'appel de KONDOMBO T. Marcel a été interjeté dans les délais et la forme prescrits par les articles
15 de l'AUPSRVE et 550 du code de procédure civile; qu'il y a lieu de le déclarer recevable
AU FOND
Sur la violation des articles 8 de l'acte uniforme portant sur les procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution (AUPSRVE) et 431 du code de procédure civile (CPC)
Attendu que KONDOMBO T. Marcel sollicite l'annulation de l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer au motif que SEONE Abdoulaye réclame des intérêts de droit sur 3 ans; que les dispositions de l'article 430 du code de procédure civile n'ont pas été respectées;
Attendu cependant que KONDOMBO P. Marcel tout en estimant que les intérêts réclamés ont été mal évalués ne précise pas le montant des intérêts qui devaient être effectivement réclamés sur la base de l'article 430 précité; que par ailleurs l'article
8 de l'AUPSRVE qui veut que le montant des intérêts et frais de greffe soit précisé a été respecté; que le premier juge a fait courir les intérêts de droit pour compter de la décision; qu'il convient de rejeter cette exception;
Sur le fondement de la créance
Attendu que KONDOMBO T. Marcel ne reconnaît pas avoir été en relation contractuelle même verbalement avec SEONE Abdoulaye; que par contre il a passé un contrat de sous-traitance avec Dolsom Salif ZOUNGRANA et qu'il a payé intégralement la somme de quatorze millions neuf cent cinquante mille (14.950 000) francs CFA objet dudit contrat;
Attendu cependant que SEONE Abdoulaye soutient le contraire; que ses propres engins sont allés sur le chantier et y ont travaillé et suite à cela il a reçu paiement partiel de ce qui lui est dû; que le reliquat n'a pas été payé;
Mais attendu que KONDOMBO T. Marcel conteste la créance de SEONE Abdoulaye; qu'il soutient s'être acquitté de ce qu'il devait au sous traitant;
Attendu que SEONE Abdoulaye ne nous apporte pas la preuve qu'il a été en relation contractuelle avec KONDOMBO T. Marcel; que même s'il a travaillé sur le chantier c'est dans le cadre d'un contrat conclu entre eux que ses engins ont travaillé sur le chantier; que cela n'est pas une preuve suffisante; que par ailleurs les deux factures qui sont versées au dossier ne contiennent pas la signature de KONDOMBO T. Marcel; que n'étant pas des factures acceptées, elles ne peuvent également constituer une preuve au sens de l'article 1315 du code civil;
Attendu que selon l'article
2 de l'AUPSRVE, la procédure d'injonction de payer ne peut être introduite que lorsque la créance a une cause contractuelle; que dans la présente instance aucun contrat ne lie KONDOMBO T. Marcel et SEONE Abdoulaye; qu'il convient d'infirmer le jugement et annuler l'ordonnance d'injonction de payer;
Des dommages et intérêts - Des frais non compris dans les dépens
Attendu que KONDOMBO T. Marcel demande de condamner SEONE Abdoulaye à lui payer la somme de cinq millions (5 000 000) à titre de dommages et intérêts sur la base de l'article 15 du code de procédure civile;
Attendu cependant que l'action de SEONE Abdoulaye ne saurait être qualifiée de malicieuse vexatoire encore moins dilatoire; qu'il y a lieu de rejeter cette demande;
Attendu que KONDOMBO T. Marcel réclame par ailleurs des frais d'honoraires d’instance de deux cent vingt sept mille (227 000) francs CFA et trois cent cinquante quatre mille (354 000) fracs CFA en appel en application de l'article 6 alinéa 3 nouveau de la loi n° 10/93/ADP du 17 mai 1993;
Attendu que le juge au terme de la loi ci-dessus peut sur demande expresse et motivée condamner la partie perdante au paiement des frais non compris dans les dépens; qu'en l'espèce SEONE Abdoulaye a succombé; que c'est à bon droit que KONDOMBO T. Marcel qui s'est attaché les services d'un avocat demande des frais exposés dans ce sens; que par conséquent il y a lieu de condamner SEONE Abdoulaye à payer à KONDOMBO T. Marcel la somme de trois cent cinquante quatre mille (354 000) francs CFA au titre des honoraires d'appel et rejeter la demande concernant les honoraires en barre d'instance;
Attendu que selon l'article 394 du code de procédure civile, celui qui succombe est condamné aux dépens; qu'il convient de condamner SEONE Abdoulaye aux dépens et rejeter toutes ses demandes.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort;
Déclare l'appel recevable;
Infirme le jugement attaqué;
Statuant à nouveau, annule l'ordonnance d'injonction de payer n° 405/05 du 22 novembre 2005 du président du Tribunal de grande instance de Ouagadougou;
Condamne SEONE Abdoulaye aux dépens;
Le condamne en outre à payer à KONDOMBO T. Marcel la somme de trois cent cinquante quatre mille (354 000) francs CFA au titre des honoraires d'appel en application de l'article 6 alinéa 3 nouveau de la loi n° 10/93/ADP du 17 mai 1993.