J-12-173
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES — INJONCTION DE PAYER — ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER — OPPOSITION PARTIELLEMENT FONDEE — DECISION D’INJONCTION DE PAYER — APPEL — RECEVABILITE (OUI)
CONVENTION DE COMPTE COURANT — CAUTION HYPOTHECAIRE — DEFAILLANCE DU DEBITEUR — ACTE DE NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE — ABSENCE DE SOMMATION DE PAYER — VIOLATION DE L'ARTICLE 8 ALINEA 1 AUPSRVE (NON) — MONTANT DE LA CREANCE — CONTESTATION — MENTION DES FRAIS DE GREFFE ET INTERETS — EXIGENCE LEGALE (OUI) — CAUSE DE LA CREANCE — ILLICEITE (NON) — DEBITEURS PRINCIPAUX — ABSENCE D’OPPOSITION — APPEL — EXCEPTION D’IRRECEVABILITE (OUI) — CONFIRMATION DU JUGEMENT — CREANCIERE — DEMANDE DOMMAGES ET INTERETS — ACTION ABUSIVE (NON).
La notification d’une ordonnance d'injonction de payer porte sommation en elle-même en ce sens que l'ordonnance objet de la notification porte l'injonction de payer. Il n'y a donc pas violation de l'article 8 alinéa 1 AUPSRVE. Par ailleurs, la mention des frais de greffe et des intérêts constitue une exigence légale. S’agissant de la licéité de la cause de la créance, il est à noter qu’en l’espèce, l'acte de cautionnement hypothécaire est différent de la transaction que la caution voulait opérer avec un autre établissement financier. N'ayant jamais été incriminé par une décision pénale, cet acte est valable.
Enfin, le montant réclamé qui représente l'engagement de la caution hypothécaire ne souffre pas de contestation. Et selon l'article 1134 du code civil, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites... Elles doivent être exécutées de bonne foi ». Il y a donc lieu de confirmer le jugement.
Article 8 AUPSRVE
Article 15 AUPSRVE
Article 1134 CODE CIVIL BURKINABÈ
Article 15 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 528 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
Article 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n° 55 du 04 décembre 2009, SAWADOGO Boureima c/ BANK OF AFRICA, GANAME Issaka, PORGO Mahamadi
LA COUR,
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL
Par acte d'huissier en date du 12 mars 2008, SAWADOGO Boureima a déclaré relever appel contre le jugement n° 030 rendu le 13 février 2008 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en ces termes : « Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort;
En la forme déclare l'opposition recevable parce que intervenue dans les formes et délais prévues par la loi;
Rejette toutes les exceptions soulevées par SAWADOGO Boureima comme étant mal fondées;
Au fond déclare l'opposition partiellement fondée et condamne SAWADOGO Boureima à payer à la Bank Of Africa la somme de vingt quatre millions (24 000 000) F.CFA en principal plus intérêts, frais et accessoires;
Déboute la Bank Of Africa des frais non compris dans les dépens;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire;
Fait masse des dépens qui seront supportés chacun pour moitié »;
Attendu que l'article 15 de l'Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement de créances prévoit que la décision rendue sur opposition est susceptible d'appel dans le délai de 30 jours à compter de la date de cette décision; que l'article 550 du code de procédure civile prévoit que l'appel se forme par acte d'huissier;
Attendu que la décision a été rendue le 13 février 2008 et l'appel interjeté le 12 mars 2008; que l'appel est intervenu dans les formes et délais ci-dessus visés par les articles 15 de l'Acte uniforme portant procédure simplifiées de recouvrement des créances et des voies d'exécution et 550 du code de procédure civile et qu'il y a lieu de le déclarer recevable;
AU FOND
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
SAWADOGO Boureima expose que le jugement attaqué l'a condamné à payer à la BOA la somme de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA en principal; que pourtant la signification de la décision d'injonction de payer est nulle car non seulement il n'y figure aucune sommation de payer alors que l'article 8 alinéa 1 de l'Acte uniforme sur les procédure simplifiées de recouvrement des créances et voies d'exécution le prévoit à peine de nullité, mais aussi le montant objet de l'ordonnance n'est pas précisé; que l'ordonnance d'injonction de payer est nulle pour les raisons suivantes :
– la créance de la BOA n'est pas fondée parce qu'il s'est porté caution hypothécaire à hauteur de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA en principal, intérêt et frais alors qu'il lui a été notifié une ordonnance portant sur la somme de trente six millions trois cent quatre sept mille deux cent trente sept (36.387.237) francs CFA; l'ordonnance manque de base légale car ni la somme de cinq mille (5 000) ni celle de sept millions cinq cent soixante dix huit mille sept cent soixante treize (7.578.773) francs CFA ne sont pas fondées ni prouvées;
– la cause de la créance est illicite car il a été condamné pour escroquerie portant sur la somme de dix millions (10 000.000) de francs CFA qui fait l'objet de son engagement; qu'il avait sollicité à GANAME Issaka une somme de dix millions (10 000.000) de francs CFA pour lui permettre d'obtenir un prêt de vingt millions auprès de la caisse populaire de Korsimoro; que GANAME a conditionné le prêt de dix millions par la délivrance d'une garantie hypothécaire;
Qu'une fois les dix millions (10 000.000) versés à la caisse populaire, la directrice de ladite caisse a refusé d'accorder le prêt de vingt millions sous prétexte que ceci était un moyen pour rentrer en possession des sommes dues par SAWADOGO Boureima; que GANAME Issaka saisit le tribunal correctionnel qui malgré ses explications pour prouver sa bonne foi l'a condamné avec la directrice de la caisse populaire de Korsimoro pour escroquerie avec obligation de payer la somme de dix millions (10 000.000) de francs CFA; que la décision a été confirmée en appel; que si la cause de son engagement a été illicite, le tribunal devait tirer la conséquence et prononcer la nullité absolue de l'engagement hypothécaire;
En réplique, la BOA expose que courant 2001, elle a signé une convention de compte courant avec caution hypothécaire avec l'établissement GANAME Issaka; que dans ladite convention, PORGO Mahamadi et SAWADOGO Boureima se sont portés garants du remboursement de toutes les sommes dont l'entreprise pouvait être redevable à l'égard de la BOA et ce respectivement à hauteur de seize millions (16 000 000) de francs CFA et vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA; que suite à la défaillance de l'entreprise, la banque mit un terme au compte courant rendant ainsi le solde exigible; que les mises en demeure et règlements amiables sont restés infructueux et c'est pourquoi elle fait appel des cautions; que concernant l'annulation de la signification de la décision d'injonction de payer demandée par l'appelant pour cause d'absence de sommation d'avoir à payer la somme réclamée, il fait remarquer que la notification d'une ordonnance portant injonction de payer constitue une sommation de payer; que le montant réclamé figure tout aussi bien sur l'ordonnance notifiée; que le moyen d'annulation de la notification ne peut pas prospérer; que par rapport au moyen tendant à l'annulation de l'ordonnance, il est tout aussi inopérant car l'appelant est poursuivi solidairement avec PORGO Mahamadi, chacun en paiement de sa quotte part et conformément à leurs engagements respectifs; qu'il lui est donc réclamé vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA et rien d'autre; que sur la validité de l'ordonnance il fait noter que tant que le montant de la créance principale n'est pas réglé, il produit des intérêts qui se déterminent au taux légal fixé par le ministre des finances; que l'acte de cautionnement qui les lie prévoit aussi le paiement d'intérêt sur le solde et les accessoires après la clôture du compte; que la somme de cinq mille (5 000) francs CFA constitue les frais de greffe réglés pour l'obtention du numéro de l'ordonnance tel que prévoit l'article 8 de l'Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement de créances et les voies d'exécution; que sur l'illicéité de la cause prétendue, elle fait remarquer que nulle part, le jugement correctionnel ne dit que l'acte de cautionnement conclu entre la BOA et établissement GANAME Issaka et SAWADOGO Boureima est illicite; que l'acte n'est entaché d'aucun vice et que par conséquent, elle demande de condamner SAWADOGO Boureima au paiement de sa quotte part; qu'enfin elle demande que l'appelant soit condamné à lui payer la somme de cinq millions (5 000 000) de francs CFA pour action vexatoire et malicieuse, dilatoire comme prévu par l'article 15 du code de procédure civile parce que pour recouvrer sa créance, il est mis à rude épreuve par SAWADOGO Boureima qui fait obstacle abusivement à l'aboutissement de son action; qu'elle demande en outre la condamnation de SAWADOGO Boureima à lui payer la somme de cinq millions six cent soixante neuf mille (5.669 000) francs CFA correspondant aux frais exposés en première instance et en appel conformément à l'article 6 nouveau de la loi du 17 mai 1993 portant organisation judiciaire au Burkina Faso;
PORGO Mahamadi et GANAME Issaka exposent pour leur part et soulèvent in limine litis l'irrecevabilité de l'appel relativement à eux; que l'article 528 du code de procédure civile prévoit que « en matière contentieuse, l'appel ne peut être dirigé que contre ceux qui ont été parties au procès en première instance »; que ces parties au procès en première instance étaient SAWADOGO Boureima et la BOA; que PORGO Mahamadi et GANAME Issaka n'ont jamais été ni partie, ni représentés au procès en première instance tel qu'il ressort du jugement; que l'irrecevabilité entraîne pour eux l'irrecevabilité de toute demande contre eux; qu'ils sollicitent en outre la condamnation de la BOA à leur payer la somme de cinq millions (5 000 000) de francs CFA pour résistance abusive par application de l'article 15 du code de procédure civile outre celle de quatre cent mille (400 000) francs CFA au titre des frais exposés;
En réplique la BOA expose que dans la procédure, GANAME Issaka et PORGO Mahamadi sont respectivement débiteur principal et caution; que l'appel de SAWADOGO Boureima a été dirigé contre toutes les parties et que le défaut de qualité ne saurait être retenu par la Cour; que leur demande reconventionnelle n'est nullement fondée et qu'il y a lieu de les en débouter;
MOTIVATION
1 - Sur la demande de paiement de la somme de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA
Attendu que la BOA réclame le paiement de la somme de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA à SAWADOGO Boureima;
Attendu que dans la convention de compte courant avec caution hypothécaire, SAWADOGO Boureima s'est porté garant du remboursement de la dette dont l'entreprise pouvait être redevable envers la BOA et ce à hauteur de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA; que c'est le paiement de ce montant qui réclamé à l'appelant;
Attendu que SAWADOGO Boureima demande l'annulation de l'acte de notification de l'ordonnance pour absence de sommation de payer ainsi que celle de l'ordonnance pour créance injuste, absence de base légale et illicéité de la cause de la créance;
Mais attendu que la notification de l'ordonnance d'injonction de payer porte sommation en elle-même en ce sens que l'ordonnance objet de la notification porte l'injonction de payer; qu'il n'y a donc pas violation de l'article 8 alinéa 1 de l'Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances;
Attendu que la mention des frais de greffe et des intérêts est une exigence légale; que ces montants sont prouvés par le reçu de paiement de cinq mille (5 000) francs CFA au greffe et par l'article 2 de l'acte de cautionnement hypothécaire qui prévoit les intérêts sur le solde après la clôture du compte;
Attendu que SAWADOGO Boureima conteste la licéité de la cause de son engagement parce qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel pour escroquerie suite à une transaction qu'il a opéré avec la somme de dix millions (10 000.000) de francs CFA issus du compte de GANAME;
Mais attendu que l'acte de cautionnement hypothécaire est différent de la transaction qu'il voulait opérer à la caisse populaire; que cet acte est valable et n'a jamais été incriminé par la décision pénale; que la cause est donc licite;
Attendu que la somme de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA représentant l'engagement de SAWADOGO Boureima dans la caution hypothécaire ne souffre pas de contestation; que l'article 1134 du code civil, prévoit que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi »; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement qui l'a condamné à payer à la BOA la somme de vingt quatre millions (24 000 000) de francs CFA en principal plus intérêts, frais et accessoires;
2 - Sur la mise hors de cause de GANAME Issaka et PORGO Mahamadi
Attendu que la BOA a signifié l'ordonnance d'injonction de payer à chacun des trois débiteurs que sont GANAME Issaka, PORGO Mahamadi et SAWADOGO Boureima; que seul SAWADOGO Boureima a formé opposition; que la présente procédure n'intéresse que lui seul à l'exclusion de GANAME Issaka et PORGO Mahamadi qui ont acquiescé en ne formant pas opposition; qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point;
3 - Sur la demande de paiement de dommages et intérêts de la BOA
Attendu que la BOA demande que SAWADOGO Boureima soit condamné à lui payer la somme de cinq millions (5 000 000) de francs CFA au titre de l'article 15 du code de procédure civile pour résistance abusive;
Mais attendu que l'action de SAWADOGO Boureima n'est en rien abusive ou vexatoire ou dilatoire; qu'il a reçu une ordonnance d'injonction de payer qui lui demande paiement d'une somme plus élevée que celle pour laquelle il s'est engagée et qu'il se devait de se défendre pour que cette proportion puisse être respectée; qu'il convient ne pas faire droit à cette demande et confirmer le jugement sur ce point;
4 - Sur la demande de paiement de dommages-intérêts et de frais exposés de GANAME Issaka et PORGO Mahamadi
Attendu que GANAME Issaka et PORGO Mahamadi demandent que la BOA soit condamnée à leur payer la somme de cinq millions (5 000 000) de francs CFA de dommages-intérêts pour action abusive par application de l'article 15 du code de procédure civile;
Mais attendu que l'action est légitimement engagée contre eux parce qu'ils sont débiteurs de la banque; qu'il n'y a aucune mauvaise intention dans la procédure engagée et qu'il convient de les débouter de leurs prétentions;
Attendu qu'ils réclament en outre le paiement de la somme de quatre cent mille (400 000) francs CFA au titre des frais exposés;
Attendu que l'article 6 nouveau de la loi n° la du 17 mai 1993 prévoit que sur demande expresse et motivée d'une partie, le juge peut condamner la partie perdante à payer à l'autre les frais auxquels elle s'est exposés;
Attendu que GANAME Issaka et PORGO Mahamadi sont au fond tenu de payer la créance réclamée chacun en ce qui le concerne pour des montants bien déterminés; que s'ils se sont opposés en exposant des frais, la BOA ne peut être tenue de réparer leur préjudice; qu'il y a lieu de les débouter de cette prétention;
Sur les dépens
Attendu que selon l'article 394 du code de procédure civile, la partie qui succombe est condamnée aux dépens; que SAWADOGO Boureima a succombé et il convient de le condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel interjeté recevable en application des articles 15 AUPSRVE et 550 du code de procédure civile;
AU FOND
Confirme le jugement n° 030 du 13 février 2008 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou;
Déboute PORGO Mahamadi et GANAME Issaka de leurs demandes de dommages-intérêts et de frais non compris dans les dépens comme étant mal fondées;
Condamne SAWADOGO Boureima aux dépens.