J-12-186
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES — INJONCTION DE PAYER — ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER — OPPOSITION BIEN FONDEE — PRESCRIPTION — ANNULATION DE L’ORDONNANCE — APPEL — RECEVABILITE (OUI)
PROTOCOLE D'ACCORD — NON-RESPECT DES TERMES — DENONCIATION — CLOTURE JURIDIQUE DU COMPTE — MISE EN DEMEURE DE PAYER — DELAI IMPARTI — POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION — ARTICLE 18 AUDCG — CREANCE PRESCRITE (OUI) — CONFIRMATION DU JUGEMENT
DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS — ACTION VEXATOIRE, ABUSIVE (NON) — REJET
DEMANDE DE FRAIS NON COMPRIS DANS LES DEPENS — BENEFICE DE LA PRESCRIPTION — EQUITE — REJET DE LA DEMANDE.
L’article
18 AUDCG prévoit que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et/ou commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq (05) ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes. En l’espèce, faute pour le débiteur de respecter ces termes, la banque avait dénoncé leur protocole d'accord et lui donnait alors un délai de quinze (15) jours pour payer sa créance sous peine de poursuites judiciaires. Le point de départ de la prescription se situe à ce délai imparti dans le protocole d'accord qui est devenu la loi des parties. Il convient de constater que plus de cinq (05) ans se sont écoulés et qu'il y a lieu de confirmer le jugement qui a déclaré la créance prescrite.
Article 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (BURKINA FASO), Arrêt n° 028 du 19 mars 2010, BICIA-B c/ SIDIBE Frédéric.
LA COUR,
Par acte en date du 6 janvier 2009, la BICIA-B a déclaré relever appel contre le jugement n° 209 du 31 décembre 2008 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en ces termes :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort;
– Déclare recevable en la forme l'opposition formée par SIDISE Frédéric parce qu'intervenue dans les formes et délais prévues par la loi;
– Au fond la déclare bien fondée;
Annule en conséquence l'ordonnance d'injonction de payer n° 193 du 08 août 2008 pour cause de prescription;
Déboute SIDIBE Frédéric de ses autres demandes;
Condamne la BICIA-B aux dépens. »
Il expose au soutien de son appel que SIDIBE Frédéric est débiteur de la somme de 20.097.149 F représentant le reliquat d'une créance plus élevée matérialisée par un protocole d'accord du 23 décembre 1992; que le protocole d'accord avait pour but de préserver leurs relations et partant le compte courant qui les liait; qu'elle entendait continuer à accompagner le sieur SIDIBE dans ses activités commerciales qui rencontraient des difficultés; que SIDIBE Frédéric n'a pas pu honorer les termes du protocole d'accord, ce qui a amené la banque à dénoncer ledit protocole d'accord; qu'avec la dénonciation du protocole, le compte courant a subsisté et a continué de produire ses effets; que ce n'est qu'avec la clôture juridique intervenue le 10 mai 2007 que le solde du compte courant est devenu exigible; que le solde du compte a été porté à la connaissance du débiteur qui n'a ni contesté ni formulé des réserves; que le premier juge qui a déclaré la créance de la banque prescrite sur le fondement de la date du protocole d'accord a méconnu les principes de droit qui régissent le compte courant; qu'il sollicite que le jugement soit infirmé et qu'il soit fait droit à sa demande et condamner SIDIBE Frédéric à lui payer la somme de 20.096.149 F avec les intérêts de droit à compter de la décision;
En réplique SIDIBE Frédéric soutient qu'il a entretenu des relations commerciales avec la BICIA-B en bénéficiant de plusieurs concours financiers de la banque dans le cadre de l'exercice de ses activités; que suite à des difficultés rencontrées par lui dans ses activités il bénéficiait le 23 décembre 1992 de la conclusion d'un protocole d'accord dans lequel toutes les conventions de compte courant concluent entre les parties ont été fondues; que le 28 octobre 1993, la BICIA-B a dénoncé les termes du protocole d'accord tout en le mettant en demeure de payer sa créance dans un délai de quinze (15) jours sous peine de poursuite judiciaire; que c'est en octobre 2007 qu'il reçut une sommation interpellative d'avoir à payer la créance suivie de la procédure d'injonction de payer;
Que l'article 18 de l'Acte uniforme portant droit commercial général prévoit que « les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et/ou commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq (05) ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes »;
Que cet article s'applique à leur relation; qu'il est aussi indiqué que la créance devait être remboursée au plus tard le 31 décembre 1994 et que c'est quinze (15) ans après que la BICIA-B entreprend de poursuivre le recouvrement de sa créance; que la créance est donc prescrite en application de l'article 18 précité;
Que sur les demandes de dommages et intérêts et de frais non compris des les dépens, il forme appel incident et demande l'infirmation du jugement sur ces points; qu'en effet il s'est attaché les services d'un avocat pour défendre ses intérêts à Ouagadougou pendant que lui-même réside à Bobo-Dioulasso : qu'il a exposé des frais de déplacement du conseil pour assurer sa défense devant le Tribunal de grande instance de Ouagadougou et la Cour d’appel; qu'il sollicite la condamnation de la BICIA-B à lui payer la somme de deux millions de francs à titre de dommages-intérêts pour procédure vexatoire, abusive et celle de 2.622 000 F au titre des frais exposés non compris dans les dépens;
MOTIVATION
EN LA FORME
Attendu que selon l'article 550 du code de procédure civile, l'appel se forme par acte d'huissier; que selon l'article 15 de l'Acte uniforme OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d'exécution, l'appel contre les décisions rendues sur opposition se forme dans le délai de trente (30) jours à compter de la décision;
Que la décision sur opposition a été rendue le 31 décembre 2008, et l'appel interjeté le 6 janvier 2009; que l'appel a été formé conformément à la loi et qu'il convient de le déclarer recevable;
AU FOND
Sur la prescription
Attendu que l'article 18 de l'Acte uniforme OHADA portant droit commercial général prévoit que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants et/ou commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq (05) ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes; que le protocole d'accord conclu entre la BICIA-B et SIDIBE Frédéric avait donné l'occasion à ce dernier de payer sa créance dans de meilleures conditions et dans un délai donné; que ce protocole a été dénoncé le 28 octobre 1993 faute pour monsieur SIDIBE Frédéric de respecter ses termes; que la BICIA-B lui donnait alors un délai de quinze (15) jours à compter de cette date pour payer sa créance sous peine de poursuites judiciaires; que ces termes non équivoques ne donnaient aucune autre opportunité de maintenir son compte en activité à la BICIA-B; que celle-ci entendait par là recouvrer sa créance par voie judiciaire à l'arrivée du terme de 15 jours à compter du 31 décembre 1994; que le point de départ de la prescription se situe à ce délai imparti dans le protocole d'accord qui est devenu la loi des parties; qu'il convient de constater que plus de cinq (05) ans se sont écoulés et qu'il y a lieu de confirmer le jugement qui a déclaré la créance prescrite;
Sur les dommages intérêts
Attendu que SIDIBE Frédéric demande le paiement de la somme de 2 000 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure vexatoire et abusive en vertu de l'article 15 du code de procédure civile;
Mais attendu que la procédure de la BICIA-B n'est en rien vexatoire et abusive, mais vise le recouvrement d'une créance réelle sur Mr SIDIBE, qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande;
Sur les frais
Attendu que l'article 6 nouveau de la loi portant organisation judiciaire au Burkina Faso prévoit que dans toutes les instances le juge sur demande motivée peut condamner la partie qui succombe à payer à l'autre les frais exposés et non compris dans les dépens; que l'alinéa suivant prévoit que le juge peut refuser d'accorder les frais par décision motivée;
Que SIDIBE Frédéric par l'effet de la prescription a pu bénéficier de plus de 20 millions de francs de créance; que par équité, il ne convient pas d'alourdir davantage le passif de la Banque, qu'il y a lieu de débouter Mr SIDIBE de sa demande;
Attendu que selon l'article 394 du code de procédure civile la partie qui succombe est condamnée aux dépens; qu'il y a lieu de condamner la BICIA-B aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort :
EN LA FORME
Déclare l'appel interjeté par la BICIA-B recevable;
AU FOND
Confirme le jugement n° 209 rendu le 09 juillet 2008 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou;
Déboute SIDIBE Frédéric de sa demande de dommages-intérêts et de celle des frais exposés et non compris dans les dépens;
Condamne la BICIA-B aux entiers dépens.